Une semaine après la série d’attentats tragiques et la réaction magnifique du peuple français, certains se demandent toujours si les choses vont reprendre comme avant. Il y a les optimistes, tendance rêveurs, qui pensaient que la concorde nationale ouvrirait pour longtemps une nouvelle ère. Ceux-là sont déjà déçus : de premières fissures sont apparues dans le bloc de granit de l’union politique ; une partie de la population française a osé avouer qu’elle n’était pas Charlie ; le climat social se tend à nouveau avec une grève des routiers et l’échec des négociations patronat-syndicats sur la réforme du droit du travail.
 
Tous ces faits nourrissent les pessimistes, tendance revenus de tout : ils constatent que dans une grande partie du monde musulman, la pression monte brutalement à l’égard de la France ; ils voient l’engrenage de la provocation se mettre en place ; ils savent que les questions de l’exclusion, de l’école, des banlieues, de l’assimilation, de la fracture sociale, et en arrière-fond de tout cela du chômage, n’ont pas avancé d’un iota à la faveur de cette mobilisation nationale. Sont-ils désabusés lorsqu’ils expliquent que cela prouve bien que, une fois le choc passé, la vie reprendra exactement comme avant ? Sont-ils cyniques lorsqu’ils prédisent que la bulle de popularité dont bénéficient le chef de l’Etat et son Premier ministre s’envolera, et qu’à la fin de l’histoire c’est comme toujours le Front national qui capitalisera le plus sur la peur ? Ou sont-ils simplement réalistes lorsqu’ils constatent que déjà François Hollande, multipliant les discours, les interventions, les visites, inaugurations et commémorations, a repris son costume à grosses coutures politiciennes ? Qu’il est ainsi en train de dilapider ses gains auprès des Français ? Car, optimistes ou pessimistes, ils savent tous que gouverner sur l’émotion ne fait pas une politique.