TOUT EST DIT

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vendredi 13 juin 2014

Intermittents : une culture syndicale


« Nous ne voulons pas revivre 2003 », a écrit le Syndicat professionnel des producteurs, festivals, ensembles et diffuseurs indépendants de musique. 2003 et ses festivals d’été en capilotade du fait des mouvements de protestations des intermittents du spectacle. Le message ne s’adresse pas aux intermittents mais au gouvernement : à lui d’arranger les choses, de préserver leur statut en revenant sur la nouvelle convention d’assurance chômage qui mécontente les acteurs et les techniciens de la scène.
Mais 2003 n’a-t-il pas déjà recommencé ? Le Printemps des Comédiens (Montpellier) a ouvert le 3 juin, ira-t-il jusqu’au 29 ? Les annulations s’enchaînent. Un spectacle de Jane Birkin, Gainsbourg, poète majeur, était programmé pour le 22 juin, mais la chanteuse et comédienne l’a annulé pour afficher son soutien aux intermittents. Réelle compassion ou façon de prendre les devants tout en cumulant quelques points de démagogie ?
La direction du Printemps des Comédiens n’arrive pas à prendre la décision d’annuler carrément le festival. Elle ne veut ni blesser les intermittents ni être responsable financièrement. Les annulations de festivals, c’est entendu, sont dommageables sur le plan économique. Sur le plan culturel aussi, mais pas systématiquement. Ainsi les trois représentations (11, 12 et 13 juin) de Golgota Picnic sont passées à la trappe : merci qui ? Merci la CGT.
Montpellier contamine Toulouse où le festival Rio Loco devait se dérouler ces jours-ci (11-15 juin). Rio Loco, festival des musiques du monde, est certainement « composite et cosmopolite », mais plus tellement « rendez-vous incontournable » puisque les grèves d’intermittents provoquent l’annulation des spectacles les uns après les autres. En fait de musiques du monde, on n’entend guère que la grosse musique syndicale. La coordination syndicale a emboîté le pas au festival de Montpellier, « parce que Toulouse est un pilier de la lutte et que la solidarité est nécessaire ».
Aparté, ou didascalie : les intermittents salariés de Rio Loco s’étaient prononcés pour le maintien des concerts… mais le blocage leur a été imposé par des intermittents de la coordination qui ne travaillent pas pour ce festival. Ah, les ficelles de la comédie syndicale !
Sur le pont d’Avignon
Forts de ces précédents montpellierains et toulousains, les artistes, régisseurs et techniciens du festival d’Avignon (4-27 juillet) ont écrit à François Rebsamen et à Manuel Valls pour les avertir qu’ils se mettront en grève si le gouvernement agrée l’accord du 22 mars signé par le patronat et trois syndicats (CFDT, FO et CFTC).
Le directeur du festival, Olivier Py, a commenté cette prise de position : « Moi, je n’ai pas le droit d’interdire la moindre grève. Je me battrai pour qu’il n’y ait pas de grève, bien évidemment, parce que je crois que les conséquences pour le festival seraient absolument dramatiques voire fatales. » Pauvre Olivier Py ! On l’avait entendu pleurer entre les deux tours des municipales : en cas d’élection d’un maire Front national, le festival n’aurait d’autre solution que de quitter la ville. Grâce à ses amis intermittents, le festival d’Avignon risque tout bonnement de quitter la scène. Effet pervers d’une culture syndicale pour laquelle Olivier Py, n’en doutons pas, montrera beaucoup de compréhension.

L’opium des peuples


Attention ! La consommation excessive de football peut nuire gravement à la santé. L'avertissement n'est pas superflu au moment où s'ouvre le Mondial 2014 au Brésil, avec la bénédiction du Christ Rédempteur de Rio de Janeiro nous tendant les bras. Le foot est bel et bien devenu le nouvel opium des peuples. Et l'on ne croit pas si bien dire. Comme s'il ne suffisait pas des nuits blanches de ceux qui vont se « shooter » aux dribbles du Brésilien Neymar, les autorités annoncent une consommation record de cocaïne pendant l'épreuve, pour le plus grand bonheur des narco-trafiquants. Le Brésil pourrait ainsi devenir (aussi) le pays champion du monde de la consommation de drogue.
Tout cela ajoute à la démesure d'un événement qui s'inscrit dans l'escalade des compétitions sportives modernes. Nous sortons des JO d'hiver de Sotchi, qui furent les plus chers de toute l'histoire de l'olympisme avec 26 milliards d'euros, pour entrer dans le Mondial le plus dispendieux de tous les temps avec 8,5 milliards d'euros (trois fois plus que l'édition sud-africaine de 2010).
Ces dépenses faramineuses, inconsidérément encouragées par les instances sportives, ne rendent que plus insupportables les déficits démocratiques ou sociaux des pays organisateurs. Plus que jamais, le sport est utilisé par les potentats au pouvoir comme élément « agrégateur » de leurs populations en difficulté ou comme instrument de propagande et de réhabilitation d'image. Ainsi les grands rendez-vous sportifs planétaires sont-ils désormais dévolus aux appétits des plus offrants (Poutine pour Sotchi) ou aux largesses des plus corrupteurs (le Qatar pour le Mondial de 2022).
Sauf que la coupe pourrait être bientôt pleine. L'hypermédiatisation des compétitions offre une tribune universelle aux contestataires. Au Brésil, la peinture des arènes est encore trop fraîche pour maquiller les souffrances du peuple qui réclame des transports, des hôpitaux, des écoles ou des logements, plutôt que des stades. Après tout, faut-il se désoler que le foot cesse d'être une drogue dure ? Même au Brésil !
OVERDOSE DE BÊTISE, OVERDOSE MÉDIATIQUE, LES DEUX MAMELLES DE CE SPORT DE MILLIONNAIRES.