TOUT EST DIT

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vendredi 21 février 2014

AH QU’ELLES SONT JOLIES…

AH QU’ELLES SONT JOLIES…


On ne dira jamais assez les vertus de l’alternance. Car qui d’autre qu’un président socialiste pourrait, à la manière de François Hollande, mener une telle offensive de charme en direction de chefs d’entreprise si souvent vilipendés ? Quasiment une réhabilitation. Après le hug californien (l’accolade au leader des « pigeons »), c’était « petits fours et photo officielle » hier à l’Élysée pour une trentaine d’investisseurs internationaux. Avec, en musique de fond, une ritournelle hésitant entre un slogan de l’Internationale (« Patrons du monde, unissez-vous ») et un tube d’Enrico Macias (« Ah qu’elles sont jolies les entreprises de mon pays »). Étonnant quand on se souvient qu’il y a moins de deux ans, le même homme, alors en campagne, grimpait sur la camionnette des syndicalistes de Florange et déclarait la guerre à la finance mondiale : « Mon véritable adversaire ». Mais bon, l’emphase électorale, ce moment où la politique rêve de sentir le souffle de l’Histoire passer sur elle, résiste mal à l’épreuve du pouvoir. Dans une France en perte d’attractivité mais qui ne peut être coupée du monde, près d’un emploi sur sept dépend de capitaux étrangers. Le salut économique ne connaît donc pas de frontières.

Nuit blanche à l'Elysée


Ils sont deux, six, puis quatre, ou trois, autour du président. Des hommes, uniquement. Une drôle de réunion de travail, foutraque et improvisée, où des ombres passent et repassent, où les portes s'ouvrent et se ferment, comme dans un décor d'opérette. La nuit est tombée depuis longtemps sur le palais de l'Elysée. Au premier étage du « château », ce jeudi 9 janvier, les lumières restent allumées. Et tous affichent des mines fermées, de ces masques qu'on revêt dans les cérémonies funèbres ou lors des catastrophes nationales. Comme si ce soir, au-delà de la « crise » qui les réunit, les conseillers du chef de l'Etat avaient compris que le principal problème de François Hollande, c'était François Hollande lui-même. Et d'une certaine manière, eux aussi.

« L'amour secret du président », dira quelques heures plus tard la « une » de Closer en présentant Julie Gayet à la France entière. Le lendemain, dans les kiosques, des clichés ridiculiseront un chef de l'Etat coiffé d'un casque intégral censé déjouer la vigilance des paparazzis. Même si la rumeur de la publication des photos volées était déjà arrivée à leurs oreilles la semaine précédente, les conseillers du président n'ont pas pu anticiper l'affaire. Le magazine du groupe italien Mondadori avait préparé, pour détourner l'attention, une fausse couverture sur Vanessa Paradis. Aucun des communicants ne doute de la liaison avec l'actrice. Mais, à force d'entendre crier au loup, leur attention s'est un peu relâchée. Le leurre a fonctionné. Il est 21 heures, et personne, à l'Elysée, parmi cet aréopage d'énarques cravatés et de conseillers appliqués, n'a encore été capable de récupérer le numéro funeste. Derrière le bureau du chef de l'Etat trône encore, sur la cheminée, la photo de la victoire à Tulle, le 6 mai 2012, « François et Valérie » chantant main dans la main La Vie en rose. Le secrétaire général de l'Elysée, Pierre-René Lemas, d'ordinaire si souriant, affiche ce soir une mine contrariée et surtout sidérée. Jamais cet ancien préfet de Corse, qui sur l'île avait essuyé des menaces du FLNC et vu sa préfecture mitraillée, n'aurait imaginé que le scoop d'un journal qu'il n'a jamais feuilleté, même chez le coiffeur, le retienne toute une nuit rue du Faubourg- Saint-Honoré.
PEU AVANT MINUIT, L'EXEMPLAIRE DE CLOSER EST LIVRÉ
Près de lui, Aquilino Morelle, qui se flatte de tutoyer le président et fait mine de ne jamais lire les mauvais « papiers », bien qu'il supervise la « com », s'agite pour trouver le magazine. Comme Christian Gravel, l'ancien homme de confiance de Manuel Valls, chargé lui aussi des relations avec les journalistes. Claude Sérillon, autre « expert » chargé de l'image du président (auquel on a toutefois interdit de s'exprimerdepuis son arrivée, un an plus tôt, à l'Elysée, au prétexte que le légendaire et brillant communicant de François Mitterrand, Jacques Pilhan, « ne parlait jamais »), se tient debout, en retrait. Stéphane Ruet est aussi de la partie. Le photographe a signé avec Valérie Trierweiler l'album photo amoureux de la campagne de 2012 – le cliché qui leur fait face sur la cheminée, c'est le sien.
Même lui, l'ancien chasseur d'images de Sygma recruté par la présidence, l'ex-baroudeur qui « planquait » autrefois au pied du fort de Brégançon pour surprendre Jacques Chirac au réveil et connaît les manières de ses anciens confrères, a été rassuré par les SMS de la directrice de Closer, Laurence Pieau. Alors que l'hebdomadaire est déjà sous enveloppe dans les centres postaux partout en France, que des rédactions et des élus savent ce que les paparazzis ont réussi àsaisir, que, dans l'après-midi, le président s'est fait raconter par quelques députés amis les grandes lignes – les grandes images, plutôt – du scoop sacrilège, l'Elysée attend. Ce n'est qu'un peu avant minuit qu'un motard déboule dans la cour de l'Elysée. Il porte à Aquilino Morelle, qui s'impatiente sur le gravier, le numéro blasphématoire. Le conseiller s'est résolu à appeler son ami Manuel Valls, qui a lui-même téléphoné au préfet de police de Paris. Le président obligé de quémander le magazine people qui l'humilie auprès de ce ministre de l'intérieur plus populaire que lui !
AUCUN REPROCHE AU PRÉSIDENT
Vingt fois, depuis un an et demi, son cercle de communicants est venu lui faire part de la « rumeur ». François Hollande a souri et changé de sujet devant les uns, nié devant d'autres. Le président, apparemment, veut croire que l'époque où François Mitterrand pouvait garder secrète pendant vingt ans l'existence d'un enfant n'est pas tout à fait terminée. Pas davantage cette nuit qu'auparavant, ses conseillers n'oseraientfaire reproche de son imprudence au chef de l'Etat. Y songent-ils seulement ?
Depuis dix-huit mois, de toute façon, chaque fois qu'un cafouillage, qu'une polémique inutile, qu'un revirement politique vient écorner un peu plus la popularité du pouvoir socialiste, la petite cour des communicants pointe le doigt vers Matignon en levant les yeux au ciel. C'est là, disent-ils, qu'est le désordre, l'absence de sens politique, la faute. Jean-Marc Ayrault n'ignore pas que le travail interministériel est décousu, que les cabinets de ses ministres sont parfois bien novices.
C'est d'ailleurs pour cela qu'il a commandé en septembre à Alain Christnacht, un conseiller d'Etat passé par le cabinet de Lionel Jospin, un rapport qui recense tous les dysfonctionnements du gouvernement. Le document confidentiel a été transmis « pour information » à Sylvie Hubac, la directrice de cabinet du chef de l'Etat. « Un brûlot contre Matignon ! », ont aussitôt assuré aux journalistes les communicants de l'Elysée, après en avoir parcouru une copie. Dedans, pourtant, les critiques ne sont pas neuves : trop de ministres, trop de réunions interministérielles, des cabinets trop peuplés.
« COMPORTEMENT EXEMPLAIRE »
voici les 6 conseillers qui ont entouré le président lors de la nuit qui a précédé la parution du scoop de Closer. De gauche à droite, Christian Gravel, chargé des relations presse; Claude Sérillon, expert de l'image du président; Aquilino Morelle qui supervise la communication; Pierre-René Lemas, secrétaire général de l'Elysée; l'avocat du président Jean-Pierre Mignard qui est aussi le parrain de ses enfants, et enfin Stéphane Ruet, auteur du cliché du couple présidentiel dansant sur «La vie en rose» le soir de la victoire à Thulle.
Ce jeudi soir, c'est pourtant bien à l'Elysée même que ça « dysfonctionne ». Et que François Hollande improvise cette étonnante réunion de crise nocturne dans son bureau. Tout ce qui arrive contrevient à la ligne que le candidat socialiste s'était fixée durant la campagne. Comment faire, quand il n'a jamais cessé, ces cinq dernières années, de reprocher à son adversaire, Nicolas Sarkozy« cette confusion du privé et du public que les Français ne supportent plus » ? Dans sa célèbre anaphore, le 2 mai 2012, n'avait-il pas promis pour lui-même : « Moi, président, je ferai en sorte que mon comportement soit en chaque instant exemplaire » ? Il se voulait l'exact opposé de son prédécesseur, « ce président “m'as-tu vu” » qui transformait, cinglait-il, les Français en « voyeurs ».
Ils y pensent tous, évidemment. Mais tout haut, on ne s'indigne que contre Closer. Comment cette patronne people ose-t-elle ? On invoque toujours un improbable complot dans les situations trop gênantes. Rien de tout cela, pestent-ils, ne serait arrivé sous Nicolas Sarkozy. Ce soir, la petite cour réunie autour de François Hollande fait aussi semblant de croire qu'il s'agit d'une « affaire privée qui se règle en privé », comme le dira plus tard le président. C'est pourtant tout l'Elysée qui veille, à minuit passé, pour gérer le « cas Valérie ». Le seul homme venu de l'extérieur rejoindre l'équipe est un ami de la famille, Jean-Pierre Mignard, le parrain des enfants Hollande. L'avocat du président explique qu'il n'est pas question de porter plainte contre le magazine : si quelqu'un doit le faire, c'est Julie Gayet.
Pour le reste, Me Mignard se contente d'observer, à la dérobée, ces hommes empressés censés conseiller son ami chef de l'Etat. « Il ne faut pas qu'ils m'enferment », a souvent glissé le président à ses amis en évoquant ses collaborateurs. Moyennant quoi, il les consulte sans toujours les suivre, les contourne sans jamais les renvoyer, les déplace dans un organigramme dont les micromouvements restent indéchiffrables, même parmi ceux qui, à l'extérieur, parlent le plus couramment le « hollandais ». N'empêche : ils restent son meilleur public. Et c'est de ça qu'il a besoin ce soir.
DEPUIS L'ÉTÉ, « VALÉRIE » NE TIENT PLUS TOUT
Il y a toujours des moments délicats dans la vie d'une cour, ces instants fugitifs où le pouvoir vacille et où il faut choisir le bon camp. Si l'air est lourd, cette nuit, c'est que, à quelques pas du bureau où se prépare un communiqué pour l'AFP, dans l'aile dite « de Madame », se trouve Valérie Trierweiler. Ils la connaissent bien. Certains, comme Stéphane Ruet, lui doivent même leur promotion. Ils l'ont accompagnée de leurs prévenances durant toute la campagne présidentielle. Et Dieu sait les efforts qu'ils ont faits pour lui plaire ! Ils craignent ses colères. A leurs postes d'observation, ils ont noté les premiers, avec cette fois un sens aigu de l'anticipation, les prémices de la disgrâce.
Depuis l'été, « Valérie » ne tient plus tout. Aquilino Morelle a croisé, un soir, bien tard, dans un couloir, l'ami de trente ans du président, Julien Dray : tiens, tiens, malgré les oukases de la journaliste, voilà cet ostracisé qui revient discuter avec François Hollande en passant par la grille du Coq de l'Elysée. Tant mieux, se sont-ils dit, il déteste Jean-Marc Ayrault… Le président a aussi convoqué par la grande porte l'ancien journaliste Claude Sérillon. Celui-là même qui recommandait dans une note que « Valérie » ne possède pas de bureau à l'Elysée. Avec un brin de perversité, François Hollande l'avait montrée à sa compagne outrée. Ils ont surtout noté, depuis septembre, cette manière que leur patron a de retirer sa main lorsqu'elle cherche à la saisir en public. Et quand elle a choisi de convier Ségolène Royal à la projection privée du film Yves Saint Laurent, en décembre, ils ont compris qu'elle cherchait à renouer avec la présidente de la région Poitou-Charentes, comme si elle avait enfin compris que sa jalousie était sans objet.
BEAUCOUP CONNAISSENT JULIE GAYET
Parmi les socialistes, beaucoup connaissent Julie Gayet. Le vice-président chargé de la culture à la région Ile-de-France, Julien Dray, a partagé plusieurs Festivals de Cannes avec elle : l'actrice lui a même assuré qu'elle avait milité aux Jeunesses communistes révolutionnaires et porté la petite main jaune de SOS-Racisme, l'association qu'il a fondée. Le maire de Dijon, François Rebsamen, a dîné en sa compagnie lors des Rencontres cinématographiques de la cité bourguignonne. La comédienne a même accepté de tournergracieusement pour Touria Benzari, une des collaboratrices dijonnaises de l'édile, dans un court-métrage, Rock'n Bled, suite d'un premier film nommé… Mariage blues.
Julie Gayet est aussi la fille de celui qu'au PS on appelle « Brice ». Depuis des années, les socialistes consultent ce professeur de chirurgie digestive pour leurs proches. Brice Gayet a d'ailleurs connu Aquilino Morelle au cabinet de Bernard Kouchner, et Jérôme Cahuzacest un ami de jeunesse : il a suivi ses études de médecine avec lui.
En attendant de savoir avec certitude où le vent tournera, le petit groupe des conseillers est parti dîner au restaurant. François Hollande, lui, cherche comment éviter le scandale qui couve. Il sait que l'humiliation planétaire qu'il inflige à sa compagne va lui valoir le pire. Il craint les éclats publics alors même qu'il a programmé, cinq jours plus tard, la conférence de presse qui doit lui permettre de reprendre la main. « Valérie » vient de faire un malaise. A 2 heures du matin, il appelle à la rescousse de vieux amis discrets.
Le premier coup de fil est pour Brigitte Taittinger, la directrice de la stratégie et du développement de Sciences Po et l'épouse de son ami Jean-Pierre Jouyet. Le couple présidentiel a partagé avec eux la soirée de Noël. L'ancienne présidente des parfums Annick Goutal est une femme, elle saura parler à « Valérie ». Puis, il téléphone à sonconseiller santé, le professeur de neurologie Olivier Lyon-Caen. Lui aussi était au petit réveillon du 24 décembre organisé quinze jours plus tôt chez les Jouyet. Ancien conseiller de Lionel Jospin, le médecin est à la fois un politique et un tenant scrupuleux du secret médical.
À 5 HEURES : HOSPITALISATION DE VALÉRIE TRIERWEILER
Ce sont eux qui vont se rendre à l'Elysée, où le président poursuit sa nuit blanche, pour organiser, à 5 heures du matin, l'hospitalisation de Valérie Trierweiler à la Pitié-Salpêtrière. La compagne, défaite, doitquitter le Palais, comme une discrète exfiltration qui ne dirait pas son nom. Seuls le directeur de l'hôpital, Serge Morel, le chef du service de psychiatrie, le professeur Roland Jouvent, et deux infirmières ont été mis dans la confidence. Le directeur de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, Martin Hirsch, est tenu à l'écart. Paris dort encore lorsque Brigitte Taittinger conduit la compagne du président à l'hôpital, dans sa voiture. Valérie Trierweiler qui, dans le désordre du départ, avait oublié son sac et ses téléphones, a insisté pour qu'on remonte les luichercher.
Dans cette nuit qui s'étire, les conseillers repassent dans leur tête ces photos du président, « shooté » à l'arrière d'un scooter en compagnie de ces deux gardes du corps qu'ils ont vus tant de fois au PS et dans le sillage du candidat. Ils savent confusément combien ces clichés lui ressemblent. Depuis toujours, François a aimé se faufiler entre lesvoitures, insaisissable. Premier secrétaire, c'est ainsi qu'il venait à Matignon rencontrer Lionel Jospin, en 1997. Cet homme qui cloisonne a gardé la conviction qu'au fond, avec un deux-roues, un portable et deux hommes de sécurité, il pouvait régler seul l'essentiel. En 2012, c'est sur un scooter qu'il dirigeait sa campagne, bien loin de la Rue de Solférino, où il ne passait jamais, mais aussi de son QG.
ON NE SAIT JAMAIS VRAIMENT QUI COMPTE POUR HOLLANDE
Depuis qu'il est élu, le président continue à mener presque tout en direct et seul. « Je préfère le faire que le faire faire », dit-il souvent. Il garde pour lui le secret de nombreux rendez-vous. Malgré les promesses de ne pas se mêler de la vie de son parti, il a rencontré des candidats aux municipales et aux européennes. Seul Pierre-René Lemas sait qui il reçoit dans son bureau, au grand dam du reste des conseillers. Un ancien de la promotion Voltaire, Jean-Marc Janaillac, a montré au président la lettre d'un collaborateur assurant que le chef de l'Etat ne pourrait pas lui remettre en personne sa Légion d'honneur. « Appelle-moi directement, plutôt que de passer par eux », a glissé François Hollande avant de charger son secrétariat d'organiser la cérémonie pour son ancien condisciple.
On ne sait jamais vraiment qui compte pour Hollande, qui sont ses amis ou pas. Ce soir, au restaurant, une vague inquiétude les étreint de l'avoir vu si neutre, auscultant les aspects techniques du scandale comme s'il s'agissait d'un dossier. « J'ai les nerfs tout à fait froids », avait lâché le chef de l'Etat à la télévision, il y a un peu moins d'un an. Aucun n'a oublié comment, après la victoire, il a abandonné le précieux François Rebsamen et presque oublié Stéphane Le Foll, l'homme qui l'avait accompagné durant sa traversée du désert. « C'est ta différence avec Mitterrand », lui avait lâché Rebsamen après avoir constaté qu'il n'était pas du gouvernement. Que veut dire « fidèle », « ami », « proche » pour le président ?
Quatre jours plus tard, le 14 janvier, a été programmée la conférence de presse de rentrée si attendue où François Hollande doit annoncerson vaste plan d'aide aux entreprises. Ce doit être le début de son opération reconquête. Sur le fond, le plan a été bouclé sur les chapeaux de roue, dans un mélange de détermination générale et d'improvisation sur les détails, notamment sur les fameuses contreparties qui devront accompagner les cadeaux aux entreprises et dont personne, ni à l'Elysée ni à Bercy, n'est encore capable de dire ce qu'elles pourraient recouvrir. Sur la forme – mais qui s'en aperçoit ? –, le décor est brinquebalant. Le président s'agacera plus tard d'avoir dû «tenir pendant deux heures » la paroi gauche de son écritoire, arrangée à la hâte par une équipe de communicants amateurs. Sur le pupitre figure l'adresse @elysee-fr, qui renvoie en fait à un compte parodique de l'Elysée sur Twitter.



Les leçons de Schopenhauer à M. Hollande


Le philosophe allemand Arthur Schopenhauer (1788-1860) avait tout pour être français, notamment une liberté d'esprit et un pessimisme noir grâce auxquels il écrivit plusieurs livres plus ou moins réjouissants, dont le célèbre Art d'être heureux (1), toujours d'actualité.

On en a plus que besoin : la politique française est devenue une maison de fous. Quand elle ne tourne pas autour de Dieudonné, elle s'enflamme autour du premier fait divers venu ou d'un livre pour enfants, "Tous à poils !", dont on ne comprend pas en quoi il mériterait la mise à l'index préconisée avec indignation par M. Copé. Mystère.
À croire que tout est bon pour ne pas parler des choses importantes, celles qui concernent l'avenir du pays et qui se jouent en ce moment : si M. Hollande a vraiment changé de cap, ce qui semble être le cas, il est temps qu'il agisse pour mettre ses actes en conformité avec son discours, que toutes les forces vives débattent de la nouvelle politique à mener et que l'opposition ajoute, comme il se doit, son grain de sel.
Au lieu de quoi le psychodrame français continue, au rythme d'un scandale, faux ou pas, par jour. Du calme ! Plutôt que de péter les plombs, les Français et leurs élus seraient bien inspirés de suivre au plus vite quelques-unes des "cinquante règles de vie" de "L'art d'être heureux", d'après Schopenhauer.
1. La vie est une longue désillusion que la mort abrège. Nous arrivons au monde, pleins de rêves de bonheur et de jouissance qui s'avèrent rapidement chimériques. C'est pourquoi la première règle est de chasser du présent nos douleurs et nos souffrances en cessant de nous préoccuper d'un destin qui peut à tout moment nous tomber dessus, sur les bras et "même sur le nez". S'il a au moins l'avantage d'ouvrir les yeux des myopes, le catastrophisme ne mène nulle part, à condition d'en sortir.
2. Évitons comme la peste la jalousie, qui nous détourne des vraies questions. Elle est de toutes les époques et de tous les continents, mais elle est notre plaie, à nous autres Français, toujours trop sensibles à ses sirènes. Elle est la mère de l'antiaméricanisme, de la germanophobie ou, ces dernières années, de la sinophobie. Au lieu de tirer des leçons de nos échecs, la bien-pensance socialisante ne cesse d'en donner aux pays qui réussissent sous prétexte qu'ils céderaient à l'affreux libéralisme. Contemplons, dit Schopenhauer, ceux qui vont plus mal que nous plus souvent que ceux qui vont moins mal que nous.
3. "On n'apprend pas à vouloir", disait Sénèque. Après avoir hésité, dévié ou procrastiné, l'homme doit savoir ce qu'il veut et ce qu'il peut : c'est seulement ainsi, armé de "la pleine certitude de la nécessité immuable", qu'il "montrera du caractère" et "accomplira quelque chose de juste". Premier message personnel à l'intention de François Hollande.
4. "Méditer sûrement la chose avant de la mettre en oeuvre" : mais une fois que le processus est engagé et qu'on en attend l'issue, " il est absurde de s'inquiéter en pesant tous les risques possibles". Selon Arthur Schopenhauer, il faut alors arrêter de se prendre la tête et se rassurer avec "la conviction que tout a été bien réfléchi en temps voulu". Encore un message personnel à l'intention de François Hollande.
5. Par mauvais temps, il vaut mieux "limiter le cercle de ses relations" afin de laisser "moins de prise au malheur". Sur le plan des sondages, c'est une réussite totale : les Français sont de plus en plus nombreux à se détourner du chef de l'État. Si, de surcroît, les braillards de la gauche énervée quittaient le PS, ce qu'ils n'auront au demeurant pas le courage de faire, M. Hollande serait sans doute soulagé. Plus seul mais plus heureux.
6. "Un homme qui reste serein en dehors de tous les accidents de la vie" montre qu'il considère le malheur actuel comme "une très petite part de ce qui pourra arriver". C'est l'attitude olympienne, adoptée jusqu'à présent par M. Hollande devant les avanies en tout genre.
7. Il importe de "tenir en laisse nos envies" et de savoir "dompter notre colère". Toujours selon Schopenhauer, ce qui nous rend malheureux pendant la première moitié de notre vie, c'est de croire que celle-ci a été faite pour la jouissance et le bonheur. Partir à leur poursuite est le plus court chemin qui mène au malheur. C'est pourquoi les Français sont un peuple jeune, apparemment pas prédisposé aux remèdes churchilliens du sang, de la sueur et des larmes.
Qu'elle prenne des voies schopenhauériennes ou non, il est temps que la France se réconcilie avec le bonheur, un mot, comme "bravo", dont sa langue est en train de perdre peu à peu l'usage.

Pourquoi il y aura encore des citoyens de gauche pour voter encore PS


L'Humanité.fr publie « L'appel de la gauche du PS : "Non à la politique de l'offre" ». Il est précédé de cette présentation : 
27 membres du bureau national du PS sur 72 ont signé un appel pour une autre politique. Non à la politique de l’offre ! Non à la baisse du « coût du travail » disent-ils. "Si 35 % de la direction du parti signe cela, on peut penser que, à la base, c’est bien plus que la majorité des adhérents tellement le mécontentement est grand" écrit Gérard Filoche, également signataire.
Le lecteur curieux de lire cet appel dans son intégralité le trouvera ici.
Ce texte est suivi de nombreux commentaires, parmi lesquels ceux qui traitent de la question de l’existence du PS comme parti qui se dit de gauche méritent d’être relevés, malgré les redondances mais avec la vigueur de leur style.
Que font-ils dans les rangs du Parti socialiste ?
La salutaire rupture avec l’ère Sarkozy, moi, je ne l’ai pas vue. L’aile déplumée devrait penser à la rupture avec l’ère solférinienne. Certains ont eu le courage de quitter le PexS. Le parti de gauche fut fondé. Ce courage manquerait-il à la frange sinistre ?
C’est bien mes "camarades", mais le long passé (et passif) du PS indique que tout cela n’est que de la pose, que du baratin. On en reparlera quand vous joindrez les paroles aux actes et romprez clairement avec les membres de votre parti qui s’efforcent de doubler l’UMP sur sa droite.
Bel appel, beau discours. Avec la première fois que je vois apparaître le coût du capital ailleurs qu’au Front de Gauche.
Mais que vont-ils faire maintenant ? Voter contre le pacte d’irresponsabilité pour ceux qui sont parlementaires ? ou carrément quitter le parti social-libéral ?
À moins que ce ne soit qu’une posture pré-électorale pour amadouer les gens qui sont à leur gauche et qui se posent quelques questions après le discours du 14 janvier et le renoncement face à l’extrême-droite début février...
À mettre tous dans le même sac
Rappelons nous le discours du Bourget de François Hollande, c’était vraiment un discours de gauche (*), il s’attaquerait à la finance, il ne toucherait pas aux acquis sociaux et aux retraites, bref il a fait l’inverse une fois élu avec tout son gouvernement, avec tous ses élus à l’assemblée nationale qui votent tous les lois antisociales comme un seul homme.
Nous sommes entrés de plain-pied dans la période pré-électorale, municipales et européennes, il est donc normal que le PS se souvienne d’un seul coup qu’il faut parler à la gauche, après avoir graissé la droite et le MEDEF de plusieurs dizaines de milliards d’Euros qui vont saigner à blanc l’activité économique et donc alimenter la misère et le chômage.
C’est donc à la gauche du PS que revient ce travail de séduction des électeurs de gauche, tandis que François Hollande sur sa lancée continue de flatter le grand patronat avec son pacte de responsabilité, initié par le MEDEF, et son voyage auprès de Obama est là pour conforter sa place dans le concert impérialiste avec visées guerrières vers la Syrie, vers le Mali, vers le Centre Afrique, aux cotés des Américains, de plus ils travaillent d’arrache pied sur le projet de grand marché transatlantique, véritable rouleau compresseur des lois qui régissent les conditions de travail et de salaires français et européens, en unifiant le tout vers le bas, c’est du jamais vu, il s’agit d’une véritable guerre faite au monde du travail.
Voilà donc à quoi ressemble la politique du PS, de sa droite jusqu’à sa gauche, nous ne pouvons compter que sur les électeurs trompés qui les ont élus, et espérer qu’ils ouvriront les yeux sur tant de trahisons des promesses, en votant massivement Front de Gauche aux prochaines élections municipales et européennes.
VIVE LE VRAI PCF ET LES FORCES ANTICAPITALISTES REGROUPÉES DANS LE FRONT DE GAUCHE
Enfin, pour conclure, cette analyse qui va au fond des choses :
Le Parti Socialiste est une catastrophe pour la démocratie. Il va d’une droite libérale pure avec Moscovici, Sapin, Valls et consorts proche de l’UMP, jusqu’à une gauche socialiste presque assimilable par le Front de gauche actuel. Comment le citoyen peut-il s’y reconnaitre dans un tel capharnaüm qui représente tous les courants politiques de la société ? Pour que la souveraineté populaire s’exerce librement, elle a besoin de formations politiques globalement cohérentes par rapport à un projet honnête et affiché. Et d’un débat ouvert entre des courants identifiables par tout un chacun. Ce gros machin mou, gluant, confusionniste et trompeur est un obstacle à la libre expression du suffrage puisque le citoyen ne sait pas pour quoi il vote quand il vote pour lui. Pour cette raison, son existence procède foncièrement d’une vision totalitaire [sectaire au sens propre] de la vie politique. C’est d’ailleurs étonnant qu’il n’y ait jamais eu d’unanimité des formations républicaines pour dénoncer cet attelage purement démagogique et électoraliste qui pollue notre vie publique depuis quarante ans. Il faut s’en débarrasser par notre vote une fois pour toutes et le plus tôt sera le mieux. Chacun de ses leaders se reclassera alors sans aucune difficulté dans les bonnes cases et la démocratie s’en portera mieux.
Merci à mes camarades du PCF
(*) Rire du transcripteur : comment des propos tenus dans un meeting pré- électoral une fois et une seule, ont-ils pu être pris aux sérieux par l’auditeur lambda et mieux, avoir servi un temps de câble de sauvetage à des responsables politiques à la remorque ?