TOUT EST DIT

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lundi 5 août 2013

UNE JEUNESSE EN PROIE À SON MAL DU SIÈCLE

Depuis 2008, la jeunesse grecque est une des figures les plus sévèrement touchées par la crise. Un désenchantement accompagné d'un faible espoir en l'avenir. Analyse d'une génération plurielle et incertaine en quête d'issues, κρισις [crisis] en grec ancien … 

Nous sommes coincés. Je ne sais plus quoi faire : rester ici, aller quelque part, me battre, ou juste accepter les choses. […] Nous sommes comme glacés, pétrifiés ».Tels sont les mots de Christialena, éducatrice spécialisée de 28 ans, pour décrire la situation complexe des jeunes Grecs. Leur attitude diffère, en effet, selon les individus. Certains décident d'émigrer vers des cieux jugés plus prometteurs, d'autres choisissent de rester pour survivre en silence ou, au contraire, pour lutter. 

LES JEUNES GRECS, PREMIÈRE VICTIME DE LA CRISE

Au début de l'année 2013, 60,2% (sondage Eurostat) des jeunes actifs grecs de moins de 25 ans étaient au chômage. Les quelques emplois occupés par ces jeunes sont bien souvent des emplois précaires en inadéquation avec leur diplômes obtenus. Alors, beaucoup de jeunes Grecs prennent des cours de suédois ou d'allemand dans l'espoir de quitter le pays et de trouver, ailleurs en Europe, un travail et une qualité de vie meilleure. D'autres ont fui les bancs de l'université pour retourner vivre chez leurs parents et ainsi éviter des dépenses supplémentaires à leur famille.

C'est aussi ça la crise pour ces jeunes grecs : une perte d'autonomie, mais un retour aux sources familliales. L'austérité budgétaire s'est également manifestée par des coupes drastiques dans les dépenses publiques et notamment dans le domaine de l'éducation. Ainsi, entre 2009 et 2013, le budget alloué à l'éducation supérieure a diminué de 25%, pas de quoi préparer un meilleur avenir pour la jeunesse hellène. Mais surtout, ce sont les droits des étudiants, hérités de 1974 suite à la chute des colonels, qui sont remis en cause. Pourtant inscrit dans la Constitution, le droit à l'éducation universelle et gratuite, a été très largement bafoué.

En août 2011, la réforme de la ministre Diamantopoulou a mis fin au droit d'asile au sein des universités et a transféré les pouvoirs décisionnels universitaires des étudiants vers des conseils privés indépendants. Le programme Athéna, daté d'avril dernier, donne le coup de grâce au système d'avant crise. Ce programme prévoit la fermeture de 400 facultés et départements, réduit l'accès aux universités pour les jeunes Grecs, et enclenche la privatisation de celles-ci.

UNE JEUNESSE MOBILISÉE

Les réformes précédemment évoquées sont loin d'être passées dans le silence. Elles ont poussé de nombreux étudiants grecs dans la rue. Par ailleurs, les étudiants possèdent toujours un pouvoir conséquent au sein des universités. Ils élisent les recteurs universitaires qui détiennent un pouvoir décisionnel majeur. Les recteurs ont alors maintes fois refusé que les forces de l'ordre s'introduisent dans les universités, préservant ainsi le droit d'asile hérité de 1974. Les partis politiques restent également très influents au sein du système universitaire grec.

L'activisme de gauche fait partie intégrante de la vie universitaire à la grecque. Le parti de la gauche radicale SYRYZA, le parti communiste grec KKE, ainsi que le mouvement anti-capitaliste ANTARSYA remportent un franc succès auprès des étudiants présents sur les campus. Pourtant, beaucoup de jeunes Grecs ont perdu confiance envers le personnel et les structures politiques. Les voix des étudiants politisés tendent à masquer celles de ceux qui ont perdu foi dans leurs représentants politiques. La crise grecque est aussi une crise politique, une crise de la représentation. Les grecs renouent alors avec la démocratie directe en investissant les rues. Selon l'hebdomadaire Kathimerini, six grecs de moins de 25 ans sur dix ont pris part aux manifestations de l'été 2011. 

L'HÉRITAGE DE 1973

En avril 1967, les colonels ont pris le pouvoir en Grèce et ont instauré une dictature conservatrice. Les Grecs sont privés de liberté et sont touchés de plein fouet par la récession économique des années 1970. La junte des colonels est aujourd'hui associée à la troïka qui dicte les mesures d'austérité que le gouvernement doit prendre. Spyros Marketos, professeur de science politique à l'Université de Thessalonique, explique dans le récent film, Catastroika (2012), que le gouvernement est formé de « politiciens dirigés par un banquier qui, en fait, est dans une large mesure responsable de la banqueroute grecque. C'est une junte de banquiers qui n'a pas plus de légitimité populaire que la junte de 1967 ». Ce lourd passé historique, toujours présent dans la tête de nombreux Grecs, est une des raisons pour lesquelles beaucoup de Grecs ne se sentent actuellement plus en démocratie. La crise grecque est également une crise de la souveraineté. Depuis son indépendance en 1830, la Grèce n'a cessé d'être sous la tutelle des puissances européennes, puis sous celle des États-Unis pendant la période d'après-guerre, et enfin sous celle de la troïka aujourd'hui.

C'est pourtant l'insurrection étudiante, partie de l'école Polytechnique d'Athènes en novembre 1973, qui a fragilisé le régime en place et conduit à sa chute en 1974. Les slogans de la contestation étudiante de 1973 sont aujourd'hui repris en chœur lors des manifestations. C'est pourquoi il est toujours émouvant pour un grec d'entendre aujourd'hui retentir dans les rue d'Athènes le célèbre slogan estudiantin : «  Pain, Éducation, Liberté ».

Et maintenant, un peu d'oppression fiscale


Certes, ce sont les vacances. Certes, l'actualité se fait plus calme, les journalistes étant eux-mêmes partis profiter des joies qu'offrent le capitalisme et la mondialisation pour revenir ensuite au bercail, batteries rechargées, cracher sur le capitalisme et la mondialisation. Pendant ce temps, le gouvernement est en pause. Tout le gouvernement ? Non. Un petit ministère résiste encore et toujours à l'endormissement : Bercy.
Bien sûr, on ne doit pas vraiment à un hasard du calendrier l'actuelle apparition des nouvelles douloureuses sur la pluie d'impôts qu'on nous concocte pour les mois à venir. De la même façon qu'on ne fait les barbecues, les émeutes et les baignades qu'en été, les annonces douloureuses sur les impôts privilégient toujours cette période où plus personne n'écoute. Cependant, entre deux moiteurs estivales, difficile d'écarter les certitudes qu'un petit bouillon se trame à l'horizon.
Et on en parle donc, un peu, ici ou là.
Ici, on apprend qu'il va falloir trouver entre quatre et six milliards d'euros. Comme Mario, de la BCE, refuse obstinément de les imprimer sur son lot d'imprimantes alors qu'il a reçu plein de cartouches neuves, le gouvernement français -- qui fait, pour rappel, l'équivalent d'un petit emprunt de plus de 700 millions d'euros par jour ouvré -- a décidé qu'il allait trouver cette somme dans la poche forcément pleine de surprises de ses concitoyens.
, on comprend à demi-mots gênés que la petite Najat a bien du mal à concilier son appartenance au Camp du Bien d'un côté, et le fait qu'il va falloir cogner comme un sourd sur tout le monde et surtout les pauvres (les plus nombreux), comme le faisait juste avant qu'elle arrive le Camp du Mal. C'est embêtant que voulez-vous : on vise, nous dit-elle la bouche en cœur, à ne pas laisser une ardoise aux générations futures.
najat et les impôts
Ce qui n'empêche pas l'actuel gouvernement de creuser la dette nationale de plusieurs dizaines de milliards d'euro cette année encore (et prend-toi ça dans les gencives, encombrante génération future !) et d'emprunter dans les 170 milliards en 2013. Une paille.
Les éléments s'accumulent, les papiers s'enchaînent et tous pointent dans le même sens : la rentrée sera piquante, l'année 2014 sera chaude, et les impôts vont, malgré les dénégations fermes de Hollande en début d'année 2013 (suivies de rétropédalages choucrouteux six mois plus tard) continuer à augmenter.
Une bonne nouvelle dans tout ça : seuls les riches seront mis à contribution (mais si : tous les médias le disent :"Bercy veut taxer les plus aisés"). Une mauvaise nouvelle : maintenant, en France, on est riche dans les pluzaisés dès 20.000 euros de revenus par an. C'est aussi ça, le changement maintenant : youpi, la France accueille un nombre de riches croissants ! En effet, selon les calculs du syndicat Solidaires-Finances publiques, ce dispositif entraînera 23 euros d’impôts supplémentaires pour un célibataire avec 20.000 euros de revenus, 162 euros s'il gagne 35.000 euros, 626 euros pour 100.000 euros de revenus et 1.772 euros pour 200.000 euros ; pour un couple marié avec deux enfants, la facture progresserait de 19 euros à 3.059 euros selon les cas des figure. Et il s'agit bien de l'impôt supplémentaire, pas de l'impôt total. On est en France, hein.
Si l'on se rappelle que le salaire médian est (justement) de 20100€ par an, on comprend que la mesure va toucher au moins 50% des salariés français (soit 1/4 des foyers, une moitié ne payant pas d'impôts sur le revenu). Vous me direz : zut, c'est encore et toujours le même quart qui trinque. Eh bien oui, c'est aussi ça, le changement. Et si ça ne vous plaît pas, c'est pareil.
Bon, je vous charrie : en fait, ces augmentations d'impôts aussi inopinées que douloureuses ne sont rien que de vilaines rumeurs colportées, on s'en doute, par toute une clique de vilains ultralibéraux et autres médiocres opposants à la ferme et vigoureuse réforme de tout le pays, à laquelle s'est attelé tant François Hollande, son inénarrable président, que Pierre Moscovici, son extraordinaire minustre de l'Economie et des Finances. D'ailleurs, il l'explique lui-même avec ses mots à lui, touchants et maladroits comme seuls les enfants et les benêts savent le faire :
"Notre politique en matière de fiscalité est de refuser les hausses d'impôts qui sont généralisées et indifférenciées. Notre souci à nous, c'est le sérieux budgétaire mais aussi le pouvoir d'achat des plus démunis et des classes moyennes."
Dans la foulée, pour ajouter un bon gros bout de crédibilité en conserve à sa tirade, il a précisé qu'en plus,
"le 2e trimestre a été un trimestre de croissance positive, et je pense qu'elle devrait être du même ordre au 3e trimestre. Puis, 2014 sera la première année de croissance depuis trois ans."
C'est mignon.
deni de réalité - moscovici
En attendant, si l'on écarte les vilaines rumeurs, le tangible, le sûr, le dur, le concret, c'est des dépenses de l’État qui persistent à grossir, ce sont des fonctionnaires qui seront, pour la moitié d'entre eux, augmentés, alors qu'ils devraient être diminués (en nombre et en traitement), et ce sont des dispositifs fiscaux débiles, mis en place par des manchots et des incapables, qui s'avèrent bien plus coûteux que ce que les fins comptables de Bercy avaient calculé.
parcours institutionnel suiteAinsi, a contrario, donc, de ce qu'on avait prévu (sur ce blog et ailleurs), le dispositif Duflot de Garantie Universelle des Loyers (GUL) va se transformer en gouffre comme toute belle idée collectiviste aux effets de bords inévitables, avec explosion du budget initial et mort du petit cheval dans la foulée. M'est avis qu'on entendra longtemps parler du Gouffre du Gul duquel montait les mugissement de Duflot (ce qui, au passage, pourrait faire l'objet d'une aventure épique avec des trolls, des nains et des elfes dans un pays magique où l'Etat finit toujours par retomber sur les pattes des autres).
On pourrait croire l'histoire duflotesque anecdotique, mais il n'en est rien : si les impôts augmentent tant d'un côté, c'est aussi parce que, il faut bien le dire, nos "élites" font absolument n'importe quoi. Et comme pour corriger leurs erreurs, les maladroits aigrefins ajoutent une bonne dose de bévues, la France passe son temps à modifier ses lois fiscales dans un tourbillon de changements, maintenant, ici, avant, après, là et partout.
Comment s'étonner, devant une telle insécurité juridique, que des entreprises mondiales installent leurs sièges sociaux ailleurs que dans le cloaque bouillonnant français ? Comment s'étonner lorsqu'on découvre que le nouveau géant de la publicité va s'installer aux Pays-Bas, notamment parce que le régime fiscal néerlandais n'a pas bougé en vingt ans ?
mosco arrête de chyprerComment ne pas comprendre que cette insécurité fiscale, ces erreurs de chiffrage à répétition, ces effets de bords négatifs mal compris, ces augmentations permanentes des taxes et des impôts conduisent tous les jours un peu plus le pays à sa perte ? Comment ne pas voir que les étapes suivantes seront toujours de plus en plus douloureuses, jusqu'au moment où, comme dans l'île méditerranéenne, les épargnants vont se faire salement chyprer leurs comptes ?
Oui, il n'y a plus de doute : l'administration qui est chargée de collecter les impôts a passé la démultipliée. Finalement, Le Changement De Braquet De l'Administration Fiscale, c'est peut-être un slogan à la con, mais c'est maintenant et ça va faire un peu mal, surtout les premiers temps. Mais l'habitude permet des souplesses qu'on croyait impossibles, qu'on n'imaginait pas et pour tout dire, qui en font saliver plus d'un.
Vous l'avez voulu, vous l'avez eu. Profitez-en bien.

Le Coup du Père François (épisode 1) : Deux hommes dans un cimetière (tiré du Figaro)


FICTION POLITIQUE- Une nuit de février 2015, quelque part en France - où rien ne va plus - une voiture se gare le long d'un cimetière. Deux hommes en descendent…
Un quidam qui, en cette nuit glaciale de février, se serait trouvé devant le cimetière de cette petite ville de province aurait été le témoin d'un spectacle bien singulier. S'engageant silencieusement dans la rue du Chail, une voiture s'arrêta devant l'entrée principale du jardin des morts. Avec des airs de conspirateur, son conducteur en descendit et scruta longuement l'obscurité. Pas âme qui vive à l'horizon, pas un bruit. Il n'y avait que la nuit. Visiblement rassuré, notre homme se dirigea vers la porte arrière droite du véhicule et l'ouvrit. Un personnage de petite taille en sortit. Il fit le tour de la voiture, ouvrit la porte arrière gauche et aida lentement à s'en extirper un homme de grande taille au regard fixe et au visage parcheminé. Portant sur lui le poids des années, ce dernier prit appui sur le toit de la voiture, tandis que l'autre s'adressait au chauffeur à voix basse. «Nous en aurons pour une heure, pas plus. Surtout, que personne ne vous voie! Vous avez la clef?» Le chauffeur tendit une longue clef à demi rouillée.
Dans un geste où il y avait à la fois de l'affection, de la timidité, de l'égard et de la précaution, l'homme qui désormais tenait la clef dans une main prit par le bras son compagnon de voyage. Ils se dirigèrent à pas lents vers la grille d'entrée. Tout en cheminant, le premier disait au second: «Nous allons marcher doucement. Tout ira bien. La tombe est à trente mètres, sur la droite.» Après quelques secondes de cette marche nocturne, ils se trouvèrent devant la grille d'entrée. La clef tourna dans la serrure et la grille s'ouvrit dans un grincement qui aurait glacé le sang de notre quidam s'il avait été là. Mais il n'y avait personne. Les pavés du cimetière, les morts en dessous, l'obscurité partout, et deux silhouettes à pas lents. Le petit homme, qui tenait toujours le grand par le bras, prit la parole tout en cheminant: «On ne peut évidemment pas parler avec les morts, mais la fréquentation de leurs ossements peut nous inspirer quand la situation est désespérée. En tout cas, on me l'a dit. Il suffit de fermer les yeux et de penser très fort à eux. Dieu sait que je suis athée, mais il y a des jours, si je puis dire, j'ai des doutes!»
- «Moi aussi!», répondit en riant la grande ombre voûtée, tout en prenant garde à la courbe des pavés qui défilaient lentement sous ses pas. «Ton expérience me tente! Entrer en contact avec les morts, voilà une histoire roborative et qui me change de mes journées interminables! Tu sais, je m'ennuie à cent sous de l'heure chez moi!»
- «Un peu plus que cent sous…», répondit, jovial, son acolyte.
- «Allez, disons deux cents!», concéda la grande ombre en partant d'un rire sonore.
Soudain, ils s'arrêtèrent. C'était là. Ils y étaient. Une tombe presque semblable aux autres. Des fleurs fanées, une croix, et l'envahissant sentiment du temps immobile mais qui passe encore. «Je ne sais pas comment entrer en communication avec lui. Il paraît qu'il suffit de se taire et la chose se fait», glissa le petit homme au grand. Ce dernier, goguenard, répondit: «Toi qui es bavard comme une pie, tu n'es pas sorti de l'auberge!»
- «Tais-toi! Ça y est, il est là!»
- «Tu es sûr? Je n'entends rien!», répondit l'homme de grande taille. «Esprit es-tu là, poursuivit-il en souriant. Si tu es là frappe trois coups, si tu n'es pas là, frappe quatre coups!»
- «Mais enfin tais-toi! Écoute!», l'interrompit son voisin.
Notre quidam aurait alors vu les deux silhouettes, penchées sur une tombe, immobiles, fermant les yeux et comme possédées. La scène dura à peu près trente minutes, mais comme il n'y eut aucun témoin on peut dire qu'elle dura plus, ou moins. Cela n'a pas d'importance. L'important, c'est ce qui se trama à cet instant et que personne ne vit ni ne sut jamais, à l'exception des deux visiteurs.
Ils n'avaient pas bougé pendant tout ce temps. Soudain, le plus petit prit le plus grand par la taille, l'invitant d'un geste à rebrousser chemin. Tous deux se dirigèrent lentement vers la sortie du cimetière. Ils n'échangèrent pas une parole en marchant, comme si la fréquentation nocturne de l'homme qui gisait en dessous les avait rendus muets. Ils avaient encore dix mètres à faire avant d'atteindre la grille lorsqu'un rayon de lune perça les nuages, éclairant les tombes, les allées, les arbres. Et les deux promeneurs. S'il avait été là, notre quidam aurait alors vu deux visages familiers et entendu cette brève conversation.
Le plus petit des deux prit la parole, mettant ses mains sur celles de son compagnon de cimetière:
- «Il n'était pas là, mais il était là. L'as-tu senti? J'ai cru comprendre qu'il m'encourageait. Devant sa tombe, en fermant les yeux, tout m'est revenu: ses complots, ses machinations, ses mensonges, sa rouerie. Il avait décidément raison sur tout. Jacques, ma décision est prise. Je vais dissoudre l'Assemblée nationale.» Il observa quelques secondes de silence. «Ma décision est irrévocable! Tu es le seul à le savoir. Gardons la chose secrète toi et moi. Tu me le jures? Avoue qu'après cette étourdissante expérience de spiritisme, c'est bien le moins…»
- «François, tu es génial! Le petit va se prendre les pieds dans le tapis. On va rire! Tout naturellement, je ne le dirai à personne. C'est motus! Croix de bois, croix de fer!»
- «Et si ta femme te dit: “Ne me cachez-vous pas quelque chose…?”»
- «Je ferai celui qui n'entend pas… Tu sais bien que je suis dur d'oreille!»
- «Ça oui, je confirme! Tu n'as même pas entendu lorsque l'esprit a frappé trois coups, tout à l'heure. Pourtant, il a fait un de ces baroufs!», répondit l'homme de petite taille.
- «Il a vraiment frappé trois coups? Ben j'ai rien entendu!»
- «Oui, trois coups bien nets, bien sourds. Comme s'il était content de nous voir! Avoue que ce n'est pas tous les jours qu'il a d'aussi prestigieux visiteurs!» Les deux hommes s'esclaffèrent dans l'obscurité.
Ronde comme une orange dans ce ciel de février, la lune avait gagné son combat contre les nuages de la nuit. La voiture attendait devant les grilles, qui soudain s'ouvrirent.
François Hollande et Jacques Chirac, à pas comptés, et comme des cambrioleurs, quittèrent le cimetière des Grand' Maisons, à Jarnac, où François Mitterrand est enterré depuis 1996. Les deux hommes montèrent dans le véhicule qui, reparti aussi discrètement qu'il était venu, quitta la petite ville charentaise pour regagner Paris, à 480 kilomètres de là. Une femme d'un certain âge les regarda s'éloigner. Elle était assise au volant de sa voiture, garée tous feux éteints dans la rue du Chail. C'était une très vieille 205 rouge. Immatriculée en Corrèze.

Le principe de responsabilité

Le principe de responsabilité
La déclaration des droits de  l’homme et du citoyen  de 1789 se présente comme le socle des principes qui sont censés régir la vie sociale dans notre pays. Or, ces valeurs fondatrices sont prises en compte, avec beaucoup d’hypocrisie, de manière extrêmement inégale, en fonction des intérêts et des modes idéologiques. L’égalité, qui coïncide avec le penchant au nivellement de l’époque – d’ailleurs en un sens contraire aux intentions des rédacteurs de 1789 –  nous est servie à tout propos. En revanche, un autre principe essentiel, qui dérange, est lui passé sous silence : le principe de responsabilité. « Art. 15. La Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration. » De nombreux intervenants sur ce blog expriment la contradiction suivante : le chef d’entreprise, dans le secteur privé, qui commet une erreur, ou une faute, est aussitôt sanctionné par la perte voire la faillite de son entreprise. En revanche, l’homme politique, le fonctionnaire, le magistrat, bénéficie en général d’une impunité de facto qui s’applique aux conséquences, même désastreuses, de ses décisions ou non-décisions. Ainsi, il est souvent question de l’irresponsabilité des magistrats. Un procureur vient de relâcher trois dangereux voyous au prétexte – contesté –  de l’absence de places en prison. Si demain un homme, une femme, un enfant est tué par l’un des malfaiteurs, le magistrat à l’origine de cette initiative n’encourt aucun risque de sanction. Mais le sujet ne concerne pas seulement les juges. Qui a pris la responsabilité d’interrompre le programme, essentiel, de construction de 20 000 places de prison supplémentaires lancé par Nicolas Sarkozy ? Le gouvernement, les politiques ! Bien sûr, il y aura la sanction du suffrage universel, mais bien trop tard, et trop dilué dans la sanction d’une politique générale. Le principe de responsabilité publique doit s’appliquer aux conséquences directes d’une décision, d’un choix précis, en cas de faute lourde, grave, délibérée, ou de négligence évidente, et frapper le responsable public, qu’il soit politique, magistrat, fonctionnaire, dans ses intérêts personnels, à l’image de ce que subirait un chef d’entreprise. 
Je proposerais donc la création d’une instance supérieure, totalement indépendante, qui serait élue au suffrage universel tous les trois ans, dotée de pouvoir de sanctions, chargée de faire respecter l’article 15 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

Ni les moyens, ni l’envie

Ni les moyens, ni l’envie
Daniel Ruiz

Que la prison refasse la Une de l'actualité et aussitôt les trompes sécuritaires se remettent à nous sonner le grand air du laxisme, de l'inefficacité et de la tranquillité des citoyens honnêtes. Pour être connu, le refrain n'empêche pas les fausses notes : la surprise feinte de Manuel Valls, l'opportune demande d'information de Mme Taubira, les réactions démagogiques… Reste que la libération des trois malfaiteurs, condamnés et relâchés faute de place en prison, repose un problème vieux comme l'organisation de la France, celui de la punition. Oublieux de leurs réalités récentes MM. Estrosi et Ciotti roulent les mécaniques de leurs idées populistes, comme s'ils n'avaient jamais été confrontés à la surpopulation carcérale.
Toute faute mérite sanction, c'est un des fondements de notre société. Mais la collectivité nationale devrait battre la coulpe de son incapacité chronique à inventer une réponse sociale qu'elle opposerait à la violence, à l'horreur et à la récidive. Après quarante ans d'échecs gouvernementaux, on peut s'en tenir aux statistiques du manque de places de prison, on peut quantifier les peines en attente d'exécution et rappeler les trente mille places promises en 2011 qui ne compenseraient même pas les fermetures prévues au plan vétusté. On peut…
On pourrait aussi repenser notre système carcéral tellement inadapté qu'il n'a pas imaginé de répondre à la violence autrement que par la violence. La prison ne dissuade jamais les auteurs de délits, pas plus que notre barème des peines n'empêche le passage à l'acte. Les geôles n'ont aucune valeur d'exemple, en tout cas positif, et il est connu et reconnu qu'elles transforment fréquemment le petit loubard en voyou endurci.
Les querelles qui opposent rituellement nos élus ne sont que l'écume du débat politique puisque la France n'a ni les moyens de créer les cellules suffisantes, ni l'envie de s'intéresser à ceux qui enfreignent ses règles. Notre société doit se protéger, nul ne le conteste, et elle dispose pour cela du monopole de la punition. Elle n'imagine pas, pour le moment, de pouvoir se passer, un jour, de la mise à l'écart par l'emprisonnement. Elle n'imaginait pas, non plus, de pouvoir se passer de la peine de mort.

Vieilles lunes

Vieilles lunes


Mais quelle était l'intention de Stéphane Le Foll en annonçant la création des « Controverses européennes des Vieilles charrues » le jour même – et il ne l'ignorait pas – où le Conseil d'État s'apprêtait à annuler l'interdiction de semer du maïs transgénique ? S'il s'agit de débattre des relations entre science et agriculture en confirmant la capacité de l'agriculture française à innover et à produire raissonné, il y aura du monde autour de la table du forum. Mais alors, pourquoi installer cette réflexion aux Vieilles charrues, un festival rock à l'origine rassemblement celte ? Et pourquoi, encore, avoir eu une réaction aussi virulente et peu nuancée après l'annonce sur le MON810 ? On ne peut pas prétendre ouvrir le débat et rejeter comme irrecevables, a priori, les arguments contraires.
Le monde agricole a toujours intégré les révolutions scientifiques grâce à la ténacité des gens entreprenants et audacieux qu'il compte dans ses rangs. Il faut leur faire confiance pour assimiler le fruit de la recherche et des nouvelles technologies. Leur mission reste de produire de la nourriture, de l'énergie et de quoi se vêtir, pas d'entretenir le paysage.
Même si les charrues ont été à une époque l'exemple de la modernité absolue, elles sont rouillées aujourd'hui et la symbolique voulue par Stéphane Le Foll est désastreuse, bien qu'habillée du langage de la démocratie directe. La France, qui a si longtemps combattu les archaïsmes, est en train de devenir un pays de conservatismes poussiéreux. Elle se vitrifie en s'opposant à la recherche sur les nanotechnologies, sur les OGM, sur les gaz de schiste. Comment un ministre peut-il dire « non » à la transgénèse, quand il s'agit de la technologie à partir de laquelle est fabriquée une part essentielle de nos médicaments ?
Déjà polluée par le principe de précaution, l'impérieuse évolution vers le progrès souffre désormais de postures idéologiques et du discours régressif de la décroissance. Les équilibres politiques doivent s'effacer face aux enjeux majeurs. Ce sont les raisons politiques qui font qu'un milliard de personnes meurent de faim sur notre planète. Pour elles, l'agriculture n'est pas un problème, elle est une solution.

Arroser le sable

Arroser le sable


Le plan Banlieue qu'a éxaminé le gouvernement viendra se superposer aux strates déjà fournies des autres annonces et contrats dédiés à cette question tellement sensible. Pudiquement nommés « politique de la Ville », ces paquets d'intentions pieuses accumulent les échecs et dissimulent mal les craintes du pouvoir face à la poudrière des quartiers à risques. Il faut dire que l'on ne consacre que bouts de chandelles à ces actions pourtant prioritaires dont les ministres n'ont jamais été plus que des pions dans les castings et équilibres ministériels. Tapie, Borloo, Fadela Amara, Christine Boutin et les autres n'ont fait qu'arroser le sable en créant des postes d'éducateurs, en augmentant l'assistanat social et en écrivant quelques discours bien sentis.
C'est d'argent et de courage politique dont ont besoin les banlieues. De l'argent pour aider les jeunes créateurs d'entreprises à réussir, même s'ils n'ont pas le format habituel des héritiers de papa sortis des grandes écoles. Si on attend que les énarques ou les X-Mines créent des emplois pour les jeunes des banlieues, on ne s'en sortira jamais. Les quartiers aspirent à une vie économique solvable et socialisée.
Le traitement éducatif voulu trop souvent par les gouvernants, en particulier les socialistes, n'est qu'un machin théorique et inutile s'il n'est pas en prise avec l'économie. Et encore plus si on éduque ces jeunes comme des bourgeois en oubliant qu'il s'agit d'abord de les sortir de l'organisation sociale des clans, de la religion et des gangs qui leur sert de refuge. Ils s'éduqueront bien quand ils seront des acteurs sociaux. Beaucoup de ces jeunes ont de vrais talents qu'ils expriment dans l'économie souterraine qui, jusque-là, a limité les grandes explosions de violence. Ceux, et ils sont nombreux, qui ont fait montre de créativité gagnent de l'argent.
Il faut aussi regarder en face l'épineuse réalité des communautarismes et de l'ordre républicain. Souvent gêné par ces sujets, le PS devrait se remémorer le propos du jeune Premier ministre Fabius en 1984 : « Le Pen pose les bonnes questions, mais apporte de mauvaises réponses ». Il n'empêche, le Front national continue de moudre son grain sur des réponses fallacieuses et démagogiques. 

'Les investisseurs étrangers commencent à déserter la Chine'


Les manufactures étrangères commencent à quitter la Chine, pour d’autres pays d’Asie du Sud-Est, le Mexique, et même les Etats-Unis, affirme le site The Epoch Times. Cependant, le ministère du Commerce chinois réfute cette information, estimant que seulement quelques usines étrangères auraient quitté le pays, tout en admettant que depuis 2011, il constate une chute des créations d’entreprises étrangères de l’ordre de 9,18%, et qu’il a simplifié le processus d’agrément pour les investisseurs étrangers pour enrayer cette tendance.
« L’avantage en terme de coût manufacturier de la Chine s’est énormément érodé sur les dernières années », a indiqué Steve Maurer, qui dirige la firme de consultance AlixPartners, à CNBC. Il cite l’augmentation des coûts salariaux, l’appréciation du yuan, et les coûts d’expédition comme des facteurs qui ont amoindri l’intérêt que présentait la Chine pour les investisseurs.
Parmi ces facteurs, le surenchérissement du coût de la main d'oeuvre est prépondérant. Dale Weathington, le porte-parole de la société américaine Kolcraft, a expliqué à The Economist que ce poste avait augmenté de 20% par an au cours des 4 dernières années. Un rapport du bureau National des Statistiques chinoises a montré que le salaire minimum avait augmenté en moyenne de 20,2% dans 25 provinces chinoises.
En outre, les impôts société ne sont plus aussi avantageux qu’ils avaient pu l’être. Depuis que le pays est devenu la seconde puissance mondiale, il supprime progressivement les incitations fiscales qu’il offrait autrefois aux investisseurs étrangers. Le taux d’imposition sur les sociétés, qui atteint 25%, est le même que celui du Vietnam, mais ce dernier ne taxe pas les dividendes et n’a pas de taxe sur la valeur ajoutée, alors que la Chine impose ces taxes aux taux respectifs de 10% et 17%. Par-dessus le marché, les coûts salariaux sont inférieurs au Vietnam. La Malaysie, dont la fiscalité des entreprises ressemble à celle du Vietnam, est aussi très attractive pour les investisseurs étrangers.
Enfin, les usines ne sont pas les seules à fuir le pays. Le ralentissement de la croissance, et le fait que Pékin se refuse à prendre des mesures de relance expliquent pourquoi les gérants de fonds internationaux ont désinvesti dans les actions chinoises au cours de 16 des 18 dernières semaines.
Résultat, plus de 10.000 usines de la seule province de Guangdong financées par des investisseurs hongkongais ont fermé depuis 2011, selon le South China Morning Post. De son côté, cependant, l’Administration pour l’Industrie et le Commerce n’aurait enregistré que 217 fermetures d’entreprises étrangères en 2012.

CE N'EST PAS POUR AUTANT QU'ILS VIENDRONT INVESTIR EN FRANCE.

    "Les gens du voyage, boucs émissaires des bien-pensants" par Éric de Montgolfier, c'est dire !!!!

    De la différence naissent les peurs, puis les violences. L'exemple du sort réservé aux gens du voyage a inspiré le procureur Éric de Montgolfier.

    L'âge venu, le temps passé vous rapporte sans cesse des bribes de votre enfance. Alors, comme une éponge, vous absorbiez les leçons de vos maîtres. L'éducation civique y tenait une large place, formant des citoyens pour la République. Des têtes bien faites, plutôt que seulement pleines. À entendre monter les cris de l'intolérance, il semble que nombre d'entre nous aient évité ce qui paraît aujourd'hui des écueils. Des têtes vides qui ont tout oublié des périodes les plus sombres de notre histoire. Les images d'Épinal nous montraient une France accueillante et généreuse. Sans doute avait-on forcé sur les couleurs chatoyantes. La réalité, cette triste réalité qui réduit à peu les élans de l'âme, en a vite corrigé les excès. Voici que, dans notre pays, certains appellent sans cesse à l'intolérance.
    On aimerait croire que cette politique n'est que le produit d'une stratégie tendant à réduire l'influence du Front national. L'égaler pour ne point laisser le champ libre à ses outrances. Un peu la politique de Gribouille qui, les jours de pluie, se réfugiait dans une mare pour ne pas être mouillé. Mouillé, comme le doigt qui paraît servir à prendre le pouls de l'opinion afin de ne jamais la contrarier. Les sondages ont remplacé l'intelligence politique, elle-même supplantée par le besoin, souvent celui d'être élu. Faut-il vraiment s'accommoder de ce que la démocratie, à défaut d'être le meilleur des systèmes, en reste le moins pire ? Au moins atteint-on ici les limites de la démocratie représentative quand les élus se laissent guider plus qu'ils ne guident. Car ce ne sont pas les partis de l'extrême qui font naître les phénomènes de rejet qui se multiplient, mais ceux qui les portent d'autant mieux que d'autres, qui devraient en être éloignés, tendent à s'en rapprocher.

    Il suffit de peu en certaines contrées pour paraître étranger

    Pour se flatter de vivre au pays des droits de l'homme, notre peuple s'abîme trop souvent dans ses peurs. Les rejets viennent surtout de là et les périodes de crise économique les alimentent plus que de coutume. Mais cette explication ne vaut que partiellement. Toutes ces années, il m'a été donné de constater combien la différence provoquait cette inquiétude qui conduit à l'exclusion, pas seulement quand des intérêts vitaux sont en cause. Il me revient en mémoire un conseil de prévention de la délinquance dans un gros bourg du Nord. La réunion m'avait étonné tant les chiffres de la délinquance étaient minces. Un seul cambriolage l'année écoulée. Un de trop, certes, mais quand même... Je le fis valoir aux habitants quand ils évoquèrent l'insécurité dont ils souffraient. La semaine dernière, me répondirent-ils, il y avait, la nuit tombée, trois personnes sous un réverbère de la place. Oui... et bien ? "Ils n'étaient pas d'ici." Il suffit de peu en certaines contrées pour paraître étranger et justifier une crainte irraisonnée.
    Au moins ne s'agissait-il pas de "gens du voyage", citoyens de cetteEurope qui se veut fraternelle ou simplement de France, que l'on affuble souvent, même au coeur des institutions, de vocables qui respirent davantage la discrimination que la sympathie. Partout, je les ai vus pourchassés, caricaturés, désignés comme fauteurs de troubles, asociaux, vivant de rapines, et j'en passe. Certes, leur mode de vie est-il sensiblement différent du nôtre, mais il n'est pas en soi contraire à nos lois. Au contraire, elles imposent, en admettant ainsi implicitement sa légitimité, la création d'aires pour les accueillir dignement. Mais les élus regimbent et préfèrent payer des pénalités, à la charge des communes, plutôt que de respecter la loi, comme c'est le cas pour les logements sociaux. Alors, l'occupation sauvage prend des allures de légitime défense.

    Plus de problèmes pour les propriétaires privés que sur les terrains publics

    Mais, même quand les communes respectent la loi, les aires d'accueil ne peuvent être adaptées aux déplacements saisonniers de grande ampleur. Alors, venus en nombre, les nomades s'installent au mépris des règles de la propriété. Cela pose de réels problèmes, sans doute plus encore pour les propriétaires privés que sur les terrains publics. Mais la collectivité, qui sait parfois reconnaître le droit des minorités, a le devoir de favoriser l'exercice normal de leurs libertés ; elle sait d'ailleurs fort bien, quand elle en tire avantage, se doter provisoirement des infrastructures nécessaires à l'accueil et au séjour des participants. Pourvu du moins qu'ils ne soient pas tenus pour indésirables... Les arguments utilisés pour s'y opposer en témoignent parfois, avec une pauvreté intellectuelle qui claironne les préjugés.
    Ainsi, le maire de Nice s'est récemment ému de l'occupation forcée d'un terrain de sport de la ville. Mais pourquoi a-t-il fallu, outre ses habituelles rodomontades, qu'il évoque leurs grosses voitures ? Elles lui paraissent suspectes entre leurs mains. C'est vrai, non, ceux qui se déplacent ainsi devraient au moins avoir l'air pauvres ! À n'en pas douter, ce serait, aux yeux de l'édile, le signe de leur probité. Les grosses voitures vont bientôt fuir une ville dans laquelle elles suscitent si peu de considération, ce qui, à vrai dire, ne m'était pas apparu pendant les treize années que j'y ai passées. Mais avec un tel argument, la question est posée : après la chasse aux prostitués qui déparaient la promenade des Anglais, puis la stigmatisation des musulmans qui, faute de la mosquée promise, priaient dans la rue, serait-ce le tour des "gens du voyage" ? Comme les autres, cette cible a le mérite de rassembler les bien-pensants, peut-être les bien-votants, dans une ville dont le maire affirme précisément que les gens pensent comme lui. Espérons quand même que la contagion en épargnera quelques-uns.


    J'ESPÈRE LE CONTRAIRE, LES GENS DU VOYAGE DOIVENT VOYAGER, 
    HORS DE FRANCE, C'EST MIEUX.

    Juillet ou août ? Les facteurs conscients et inconscients qui décident du moment où vous prenez vos vacances


    Ce week-end, juillettistes et aoûtiens se croisent sur les routes. Si historiquement, prendre ses vacances le septième ou le huitième mois de l'année était révélateur d'un certain style de vie, ce clivage n'a plus le même sens aujourd'hui.

    33 millions de Français prennent leurs vacances l'été. Mais les juillettistes et les aoûtiens ont souvent été présentés comme deux tribus irréconciliables. Qu'en est-il réellement ? Qui sont les juillettistes et qui sont les aoûtiens ? Existe-t-il de réels différences sociologiques entre ces deux catégories de vacanciers ?

    Pierre Perrier : Historiquement, dans les grandes entreprises publiques, comme les travaux publics, et le secteur industriel (industrie automobile notamment), par le jeu des conventions salariales, les congés étaient établis plutôt sur la période d'août. Le huitième mois de l'année est traditionnellement celui des classes populaires et de la classe ouvrière. Cela reste en partie vrai aujourd'hui pour la main-d’œuvre industrielle ou des travaux publics, même si la classe ouvrière est moins importante aujourd'hui. La manière de prendre des vacances diffère en fonction de
    l'appartenance socio-professionnelle. Un cadre a une plus grande liberté pour décider des moments de vacances tandis que l'ouvrier ou le salarié des travaux publics va avoir des périodes de congés imposées.

    Les juillettistes et les aoûtiens partent-ils aux mêmes endroits ?

    Le bord de mer reste la destination la plus attractive au mois d'août qui est aussi le mois des vacances en famille. En août, les vacances sont davantage pensées pour les enfants, ce qui explique que la plage est souvent la destination privilégiée. Au mois de juillet, il y a traditionnellement plus de diversité des lieux de vacances. 

    La séparation nette juillettistes/aoûtiens est-elle toujours aussi pertinente aujourd'hui ?

    Non, aujourd'hui, la distinction entre juillettistes et aoûtiens est plus difficile à établir et pas forcément pertinente. D'abord, il faut souligner que nous sommes dans une tendance "baissière" du nombre de départs, y compris pour les cadres et les urbains qui partent moins en vacances. Seulement 53% des Français partent en vacances en 2013 contre 57% au début de la crise en 2008. La seule catégorie épargnée est celle des seniors. Cette population, qui est la niche du tourisme aujourd'hui, part à d'autre moment que l'été, de façon plus étalée dans l'année. La bonne santé des seniors, leur pouvoir d'achat et les nouvelles valeurs du voyage et de la découverte qui se sont diffusées dans le corps social jusque dans cette génération plus âgées, expliquent cette évolution. Les étudiants partent également en dehors des mois d'été. Cela s'explique par le changement de calendrier universitaire qui leur permet d'être libre dès juin.
    De manière générale, la période historique des congés payés, durant laquelle les gens prenaient un mois de  vacances, est terminée. Les séjours sont désormais plus courts : en moyenne, une dizaine de jours aujourd'hui et cela tend à se réduire encore. Les vacances sont plus courtes, mais aussi plus fractionnées, y compris sur la période d'été. Les gens partent moins longtemps, mais plus souvent dans l'année.
    Par ailleurs, les gens anticipent moins les départs pour pouvoir bénéficier d'opportunités de dernière minute. Il y a aussi moins de fidélité des vacanciers par rapport aux lieux de vacances. Les gens partent moins sur le même lieu de vacances d'une année sur l'autre. Les pratiques et les destinations de vacances sont moins ritualisées que par le passé.

    Quelles sont les nouvelles tendances ?

    Il y a notamment un tourisme émergent qui est le tourisme urbain. Ce tourisme se développe auprès des classes moyennes dans les grandes villes particulièrement attractives : 12-14% des destinations sont désormais urbaines.

    Le juillettiste fait ses valises lorsque ses collègues sont au travail et revient au bureau au moment où l'activité économique tourne au ralenti. Mérite-t-il sa réputation de "fainéant" ? L'aoûtien est-il vraiment plus studieux ?

    Encore une fois, cette distinction n'est plus vraiment pertinente car les cartes sont brouillées. Là encore, on observe de nouvelles tendances. De plus en plus gens ne partent pas en vacances pour travailler davantage les mois d'été. Les salariés à revenus modestes ont ainsi un double-emploi sur la période de juillet/août. Il y a aussi les gens qui continuent à travailler tout en étant en vacances. Les technologies, notamment les outils informatiques,  permettent aujourd'hui de travailler à distance. Un entre-deux où on est jamais pleinement en vacances est aujourd'hui en train de se dessiner.