TOUT EST DIT

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lundi 7 janvier 2013

Peillon et l'école catholique: une question plus politique qu'éducative

En appelant l'enseignement catholique à respecter la neutralité dans le cadre du débat sur le mariage gay, Vincent Peillon est accusé par une partie de la droite de "rallumer la guerre scolaire". Comment en est-on arrivé là?

Le gouvernement n'avait sans doute pas besoin d'une nouvelle polémique. En rappelant à l'enseignement catholique son obligation de neutralitéVincent Peillon a déclenché une petite tempête, à quelques jours de la manifestation du 13 janvier contre le mariage homosexuel
Les relations entre Vincent Peillon et l'enseignement catholique étaient jusque-là apaisées. La campagne présidentielle lui avait donné l'occasion de s'exprimer sur ce point. Peillon, responsable du pôle éducation de Hollande, pourfendait alors les "intégristes" de la laïcité, et défendait une gestion mesurée des relations avec l'école privée. Pas question par exemple de revenir sur la loi Carle de 2009 (qui garantit la parité de financement entre les écoles publiques et privées accueillant des élèves scolarisés hors de leur commune) comme le réclamaient depuis des années les associations laïques. 

Un climat envenimé

Six mois plus tard, l'heure est à la radicalisation, dans les deux camps. Du côté du ministère d'abord, pressé par ses partenaires syndicaux, Unsa, en tête, qui a fait de la défense d'une laïcité radicale sa marque de fabrique. "La pression des laïcs purs et durs est très forte", assure Bernard Toulemonde, ancien directeur au ministère de l'Education nationale. En demandant aux rectorats la plus grande vigilance quant à l'organisation de débats sur le mariage homosexuel dans les établissements catholiques, Vincent Peillon se glisse dans un rôle qu'il affectionne, celui du hussard noir Troisième République. Mais les temps ont changé. "La lettre de Peillon a envenimé le climat. C'est une échauffourée grave, une maladresse du gouvernement qui témoigne d'un manque de maturité vis-à-vis des relations avec l'enseignement privé", témoigne-t-on au secrétariat général de l'enseignement catholique. 
Dans cette affaire, l'enseignement catholique n'a pas non plus fait preuve de mesure. "L'enseignement catholique est en désaccord avec une évolution législative ouvrant le mariage et la parentalité aux couples homosexuels", explique l'institution dans une lettre aux établissements datée du 12 décembre. Ce courrier que l'enseignement catholique a pris soin de diffuser par communiquéillustre bien sa reprise en main par les évêques, qui s'en étaient désintéressé dans les années 1980/1990. "Cette lettre est signée par Claude Berruer, l'homme lige du Vatican au secrétariat général. Il s'agit là de rappeler la doctrine de l'Eglise et de faire pression sur les élèves", juge Bernard Toulemonde, fin connaisseur de l'enseignement catholique. Dans un contexte de large déchristianisation, les écoles privées sont un terrain de prosélytisme pour l'Eglise qui vient de lancer un mouvement de "nouvelles évangélisations". 

Le "blocage" de 84

Avec son rappel à l'ordre à l'enseignement catholique, Peillon pousse-t-il dans la rue les défenseurs de l'école libre, dont la dernière mobilisation, en 1984, avait conduit à la démission du ministre de l'Education de François Mitterrand? "Le contexte et le climat n'ont rien à voir", objecte Bernard Toulemonde. "Il ne s'agit pas pour nous de ranimer la guerre scolaire: après la lettre de Vincent Peillon aux recteurs, Eric de Labarre, le secrétaire général de l'enseignement catholique a revu sa position", assure-t-on dans l'entourage du ministre.Qu'importe le mal est fait. L'opposition s'est emparée du sujet: samedi dans Le FigaroLaurent Wauquiez a dénoncé les propos "scandaleux" de Peillon, qui chercherait "à faire culpabiliser les chrétiens". 
La question des relations entre l'Education nationale et l'enseignement privé est de fait plus politique qu'éducative. Nicolas Sarkozy en avait même fait un élément de son argumentaire de campagne, lançant à Laurent Fabius lors d'un débat télévisé: "Souvenez-vous de François Mitterrand et de l'école libre. Souvenez-vous de ce blocage." 


Porte-parole… d’évangile

Porte-parole… d’évangile 

Était-il besoin de ces jets d'huile (sainte ou non) sur le feu ? La polémique née du rappel à l'ordre laïc, adressé par Vincent Peillon, ministre de l'Éducation nationale, au secrétaire général de l'enseignement catholique, ressuscite de vieilles querelles. Elle va contribuer à une radicalisation des positions à huit jours de la « grande manif » contre le « mariage pour tous ». Comme toujours, il devient nécessaire de faire la part des choses. Disons-le tout net, la lettre de la direction de l'enseignement catholique aux 8.500 chefs des établissements catholiques sous contrat était inopportune.
Outre qu'elle semblait s'adresser indistinctement aux élèves de tous âges, elle est intervenue trop tardivement (le 12 décembre), au moment où la discussion prenait un tour très politique. Dès lors, elle apparaissait plus comme un appel à la mobilisation qu'à une invitation au débat « éclairant ». On aurait donc volontiers souscrit à la réaction de Vincent Peillon si sa référence au strict principe de laïcité et de neutralité avait été inattaquable.
Mais, en présentant le « mariage pour tous » comme une « avancée », en réponse à une question posée dans un collège public du Loiret, la ministre et porte-parole du gouvernement, Najat Vallaud-Belkacem, a bel et bien fait du prosélytisme. Bien qu'elle s'en défende, elle a formulé un jugement de valeur. D'où ces questions. N'y aurait-il de bonne parole qu'émanant du gouvernement ? L'exercice d'un « magistère moral » serait-il une exclusivité de gauche ?
Sur plusieurs dossiers récents, « l'esprit d'équité et de dialogue » semble avoir manqué à la majorité. Est-il normal qu'un député PS adresse son « mépris républicain » au Medef ? Est-il normal que Najat Vallaud-Belkacem absolve de manière éhontée les sportifs français, exilés fiscaux, parce qu'ils ont fait moins de tapage dans leur fugue dorée que Depardieu ? Curieuse conception de l'égalité. 
Ou faut-il s'incliner en considérant Najat Vallaud-Belkacem comme une porte-parole… d'évangile ?

Déprime à la française

Déprime à la française


Sale temps pour le médicament. Après la pilule contraceptive qui a fait naître les pires craintes, c’est au tour du comprimé antidépresseur d’angoisser des experts. Comme en écho au drame du Mediator, et à d’autres, ces doutes bousculent l’approche thérapeutique en France. La passion de la prescription y est donnée pour dévorante. À croire que la santé passe, forcément, par l’ordonnance.
Flagrant dans les pathologies touchant au physique, le « réflexe gélule » s’est étendu aux maux de l’âme. Le terrain était favorable. Les consommations d’alcool et de cannabis témoignent d’un tropisme national pour les psychotropes, même ceux non pris en charge par la Sécurité sociale.
Le succès des « pilules du bonheur » profite aussi de mécanismes complexes, anciens. L’intrication des liens entre patient et médecin, la pression des laboratoires, un système de remboursement très protecteur ne sont pas pour rien dans l’addiction du pays à la chimie en général. Et aux substances psycho-actives en particulier.
Pour corser le tout, s’est développée une pensée qui ne légitime plus seulement mais impose un traitement pharmaceutique de toute plainte, qu’elle vise le corps ou l’esprit. Une médecine de la cause et de son remède moléculaire s’est installée. Du coup, la chaîne de soins s’est conformée à cette idée, sans que personne ne parvienne à siffler la fin de l’escalade.
L’antidote aux habitudes de consumérisme médical reste à trouver. Le problème n’est pas tant le médicament que ses usages banalisés et dans certains cas inappropriés. Avalons d’abord, on discutera ensuite. Voilà bien une curieuse conception des priorités. Parfois toxique, souvent coûteuse. L’étrange déprime à la française, dont parlent les spécialistes, désigne peut-être le spleen incurable des payeurs de l’assurance-maladie.

L'aveuglement volontaire

L'aveuglement volontaire


« Mon père était communiste, il écoutait Radio Moscou », c'est avec cet argument que Gérard Depardieu a justifié sa démarche auprès de Vladimir Poutine pour obtenir un passeport russe. Après quoi, joignant le geste à la parole, il s'est rendu à Sotchi, la station balnéaire des bords de la mer Noire, pour y rencontrer le président russe. Ce dernier ne peut que se frotter les mains des déclarations du comédien affirmant que « la Russie est une grande démocratie ». Dans un pays qui manifeste de longue date une grande vénération pour les acteurs populaires français, les dernières sorties de Gérard Depardieu sont du pain bénit pour un régime dont le caractère autoritaire ne cesse de s'affirmer.
Quelle est donc la grande démocratie que célèbre l'acteur tout en maniant l'argument de la nostalgie communiste dont Poutine sait user et abuser ? C'est un pays où la corruption de la justice permet de condamner sans coup férir celui que le pouvoir désigne. Un pays qui fait des innocents des coupables, comme le dit le titre du livre récent de la journaliste Zoïa Svetova (1). Un pays où Zara Mourtazalieva, une jeune étudiante tchétchène vivant à Moscou, a pu être condamnée à neuf ans de camp dans un procès monté de toutes pièces, accusée d'avoir préparé un attentat qui n'a jamais existé que dans l'imagination de ceux qui avaient besoin d'une condamnation pour leurs états de service. Un pays où l'avocat Serge Magnistki est mort en prison pour avoir dévoilé les malversations commises par des fonctionnaires russes contre son client.
Dans la Russie qu'aime tant Depardieu, le FSB, héritier de l'ancien KGB, règne en maître, tenant sous surveillance tous les « ennemis » potentiels du régime, et les libertés fondamentales sont, chaque jour, davantage limitées. On vient d'y interdire aux titulaires d'un double passeport de diriger des ONG, et le Kremlin soutient encore le régime de Bachar al-Assad, empêchant ainsi que prenne fin une guerre civile effroyable qui a déjà fait plus de 60 000 morts.
La « culture » dont Gérard Depardieu se réclame, en évoquant son père qui écoutait Radio Moscou, était celle d'un aveuglement qui ne voulait pas voir les crimes du régime communiste. Cet aveuglement volontaire lui permet, aujourd'hui, d'ignorer le sort réservé à Mikhaïl Khordorkovski - emprisonné depuis 2003 et condamné à la détention jusqu'en 2016 au terme de deux procès qui furent une parodie de justice - et le fait que les commanditaires de l'assassinat de la journaliste Anna Politkovskaïa, en 2006, n'ont jamais été inquiétés.
Cette même culture, qui n'a honte de rien, lui a permis de flatter Islam Karimov, dictateur sans états d'âme d'Ouzbékistan, de se rendre à Grozny pour célébrer l'anniversaire de Ramzan Kadyrov, qui règne sans partage sur la Tchétchénie.
Il ne manque à Gérard Depardieu pour parfaire son sinistre « tableau d'honneur » que d'aller serrer la main d'Alexandre Loukachenko qui a fait de la Biélorussie une sorte de Jurassik Park du socialisme réel. Il pourrait aussi féliciter les chefs du parti communiste chinois pour le bonheur qu'ils imposent au Tibet et la douceur de leurs geôles dans lesquelles moisissent entre autres les écrivains Liu Xiaobo - prix Nobel de la Paix 2010 - et Li Bifeng - récemment condamné à douze ans de prison - et où l'on prélève le sang ou les organes des condamnés à mort avant leur exécution.

(1) Zoïa Svetova, Les innocents seront coupables, coll. « Les moutons noirs », Paris 2012, François Bourin Éditeur.

L’équation impossible

L’équation impossible


Mollement accusé de vouloir rallumer la guerre scolaire par une droite convalescente, le gouvernement s’apprête à passer un nouvel examen ce mardi avec l’annonce de ses mesures sur l’école.
La réforme des rythmes scolaires est en effet depuis toujours ou presque un sujet à hauts risques dans notre pays, comme chez nos voisins d’ailleurs. Il y a là, plus que dans tout autre domaine, une part d’irrationnel et d’affectif qui rend la discussion passionnelle pour ne pas dire impossible.
Enseignants, parents, chronobiologistes sont convaincus que le système actuel n’est pas bon ou en tout cas pas optimal et le disent. Ce n’est d’ailleurs pas qu’une impression : de récents rapports mettent en évidence la stagnation du niveau moyen des acquis ou la progression des inégalités scolaires.
Chacun s’accorde donc unanimement à réclamer sa refonte, au nom du sacro-saint bien-être de l’enfant. Mais au moindre aménagement, à la plus petite évolution, au simple fait d’envisager de….. se lèvent étendards corporatistes et boucliers humains.
Du coup, depuis 40 ans, on va de mesurette en mesurette, de demi-réformes en quarts d’amendements. Sans que rien ne change vraiment. Cette fois pas plus que les précédentes.
Bien sûr, on va revenir à la situation d‘avant 2008 et donc à quatre jours et demi d’école par semaine avec des journées plus courtes. C’est déjà un progrès. Mais les négociations, avec les syndicats et les communes notamment, ont vidé le projet initial de sa substance et différé son application dans le temps.
Sauf improbable surprise, il n’y aura rien de neuf sur la réduction des vacances scolaires l’été ou l’augmentation annuelle du nombre de jours de classe visant à se rapprocher des standards européens (144 jours d’école en France contre 187 en moyenne dans l’OCDE). Pas plus que sur l’allégement des programmes en primaire, la baisse des effectifs et autres idées phare de ce qui devait être une « refondation » et qui ne sera, comme d’habitude, qu’un aménagement.

Mort aux vieux !


Dans une société basée sur le profit, où l'on considère l'humain comme une unité de production tout juste bonne à être remplacée une fois devenue inutilisable, quelle place gardera-t-on pour les « usagés », source de dépenses sans contrepartie ?

J’ai été frappé par la récente coïncidence de deux événements survenus la semaine dernière, et a priori sans rapport entre eux: 

Soleil Vert
- Et la programmation sur Arte, du film « Soleil Vert », racontant comment, dans des villes surpeuplées du futur, les personnes âgées seront encouragées à se faire euthanasier, pour être ensuite transformées en biscuits alimentaires pour les plus jeunes. Ce film de science-fiction deRichard Fleischer, sorti en 1973, est  inspiré d’un roman de Harry Harrison publié en 1966. Or, aujourd’hui, tous deux paraissent  beaucoup moins « fictionnels» qu’il y a près d’un demi-siècle. 

Pendant longtemps, dans la plupart des cultures, les vieux étaient à la fois moqués (le « barbon »),  mais aussi respectés, car supposés gagner en sagesse, en savoir et en expérience. Et le système des retraites par répartition a été inventé, créant une solidarité entre générations qui n’est, au fond, sachant que nous serons tous vieux un jour, que de l’égoïsme collectif et intelligent à long terme. 

Mais nous sommes en train de changer de société et de culture. 

Nous sommes entrés dans le monde du court terme, dans lequel tout objet ne vaut que tant qu’il peut être source de bénéfices, mais qui, dès qu’il se révèlera défectueux, se trouvera totalement dévalorisé et envoyé à la casse. Et, très logiquement, l’homme devient un « objet » et est progressivement traité comme tel. 

C’est déjà, depuis longtemps, le cas des salariés-kleenex, mis à la poubelle non seulement lorsque leur savoir-faire ne répond plus à aucune demande du marché, mais lorsque leur âge les rend nécessairement moins performants : « dégraissages » et quasi-impossibilité de retrouver un autre emploi dès la cinquantaine. 

Mais il n’y a aucune raison pour que cette logique économique s’arrête là. Comme le faisait remarquer dès 2002 le psychanalyste Charles Melman (1), « cette économie libidinale (...) est aujourd’hui au principe des relations sociales, à travers la façon de se servir du partenaire comme un objet que l’on jette dès qu’on l’estime insuffisant » : c’est vrai pour les mariages, comme ce sera bientôt vrai pour les vieux. 

Et de poursuivre sa démonstration : « Le problème de la prolongation de l’existence, par exemple, va poser des questions qu’il faudra résoudre. La masse des vieux coûtera cher à toute une génération. Et celle-ci devra trouver le moyen, avec des apparences honnêtes, de régler ce problème, c’est-à-dire de jeter ce qui, après avoir servi, est devenu usagé, source de dépenses sans contrepartie. (...)  Je vois très bien se profiler cette perspective : les compagnies d’assurances versant des primes aux personnes âgées qui auront souscrit des polices afin qu’elles servent à assurer un héritage à leur descendance, moyennant euthanasie pour raccourcir un parcours socialement onéreux. Le dire comme cela paraît abominable et monstrueux. Mais on voit régulièrement des choses semblables se passer. Alors pourquoi pas celle-là ? On développera toutes les argumentations et les théories nécessaires pour justifier l’affaire. Il y aura même des volontaires, il y en a d’ailleurs déjà. Alors on commencera par accepter, légaliser  l’euthanasie, et puis à partir de là... » 

Complétons le raisonnement : de l’euthanasie pour mettre fin à des souffrances sans espoir de rémission et que la médecine est incapable de soulager, on glissera progressivement vers l’euthanasie pour convenance personnelle sans justification médicale (« ma vie ne m’intéresse plus ») , puis à la pression sociale culpabilisatrice envers ceux  qui, refusant l’euthanasie, s’obstinent à constituer une charge improductive pour la société, alors qu’ils pourraient, en anticipant le moment de l'héritage, contribuer à la prospérité des jeunes générations encore actives : processus dont les biscuits alimentaires de « Soleil Vert » ne constituaient que le symbole prémonitoire... 

On vit une époque formidable : bonne année à tous ! 

1- Dans son livre  « L’homme sans gravité », Folio Essais, Denoël, 2002 

Charles VII reconstruit le royaume de France


1415-1453 ÉPILOGUE DE LA GUERRE DE CENT ANS. Maniant avec talent la diplomatie comme l'artillerie, Charles VII chasse les Anglais qui avaient conquis la majeure partie du territoire français, mettant ainsi fin à cent seize ans de conflits.

Le 5 août 1392, le roi de France Charles VI traversait une vaste plaine écrasée sous le soleil de midi aux abords de la forêt du Mans. Epuisé, le souverain s'était assoupi tout en chevauchant, malgré la troublante rencontre qu'il venait de faire avec un inconnu qui lui avait dit de se méfier, car il était trahi. 

Brusquement, il fut réveillé par le bruit de la lance d'un page tombant sur un de ses voisins. Charles dégaina alors son épée et se lança contre sa suite en hurlant à l'assaillant. Son frère Louis d'Orléans dut fuir pour éviter son agression. Médusés, ses serviteurs tentèrent de le maîtriser et quatre hommes moururent avant qu'il ne soit pris, ligoté et allongé sur un chariot où il perdit connaissance. 

Il fallait se rendre à l'évidence : le roi de France était devenu fou. Et son mal irait grandissant, ouvrant une vacance au sommet de l'Etat, d'où allaient naître la division, la discorde, puis l'invasion et l'occupation. A la faveur de cette impuissance nationale, les Anglais entreraient en France comme dans du beurre. 

Car le gouvernement se divise alors entre des partis et des clans dont les noms sont entrés dans l'histoire : les Armagnacs et les Bourguignons. Chacun d'eux veut exercer le pouvoir au profit de sa clientèle et de ses proches. Assassinats, trahisons et disgrâces se poursuivent si bien que les souverains anglais comprennent l'opportunité de reprendre les armes et, sous prétexte de querelle de succession à la couronne de France, de se lancer dans une nouvelle session de pillages et d'extorsions de fonds. 

C'est ainsi que, en octobre 1415, sous le commandement d'Henri V, une petite armée de 6 000 soldats anglais a débarqué en Normandie, près de Harfleur. Sous le commandement du connétable de France Charles d'Albret, une troupe de 30 000 hommes, la fine fleur de la chevalerie, doit lui barrer le passage et la détruire. Ainsi le jour de la Saint-Crépin, si bien décrit par Shakespeare, les deux forces se font face. 

A la fougueuse charge de la cavalerie lourde française répondent les flèches des archers anglais. Avant même la mêlée, la première ligne française est liquidée à distance par les tirs ennemis. Le soir de la bataille d'Azincourt, le roi d'Angleterre Henri V a gagné son hégémonie sur les deux royaumes. Par le traité de Troyes, en 1420, il est officiellement reconnu successeur de son nouveau beau-père, Charles VI, le fou. Mais il meurt avant ce dernier. 

Bientôt, son fils Henri VI, tout juste âgé de 9 mois, devient roi de France et d'Angleterre. La majeure partie du territoire est soumise aux Anglais. Le pays connaît une forme d'occupation, la guerre civile fait rage, quand ce n'est pas l'anarchie, les petits seigneurs en profitant pour régler de vieux comptes ou détourner des terres et des revenus à leur profit. Paris, dominé par le parti bourguignon, est un soutien constant à la couronne anglaise. 

Quelques princes refusent cette situation et, en particulier, l'héritier direct de Charles VI, le dauphin Charles, qui rejette le traité de Troyes, et trouve refuge dans la région Centre, avec Bourges pour capitale. Disons-le haut et fort : Charles, septième du nom, a été un très grand roi et la clé principale de la renaissance du royaume de France. 

Habile stratège, il s'est lancé dans une politique de reconnaissance diplomatique sans précédent. Il a aussi compris mieux que d'autres la puissance nouvelle de l'artillerie pour reconquérir les villes. Il a su enfin s'entourer de serviteurs dont la fidélité lui a permis de compenser l'avidité des grands clans qui composaient son entourage. 

Si nous avons de lui une image si piètre, c'est bien parce qu'il a mis au pas les Bourbons, ce que les rois issus de cette branche ne lui pardonneront pas. Et, pour les historiens républicains, il sera détourné en symbole du ridicule monarchique. Pourtant, Charles VII a su trouver de nouvelles troupes, réorganiser l'Etat et retourner lentement cette situation ahurissante à son avantage. 

Trois personnalités vont incarner les voies du redressement. La première est une toute jeune femme, Jeanne d'Arc ; le deuxième, un financier, Jacques Cœur ; et le troisième, un ennemi, Richard, duc d'York. 

Jeanne, déjà appelée «la Pucelle» de son vivant, porte dès son apparition le formidable travail de recomposition de la légitimité royale de Charles. Elle s'inscrit dans une série de prophètes et d'inspirés qui affirment l'existence d'un lien privilégié entre le roi et Dieu. Le sacre de Reims auquel Jeanne conduit le dauphin est la manifestation directe de cette idée, tout comme l'usage de sa bannière au combat. La capture de la jeune fille, son procès calamiteux et son exécution sur le bûcher n'arrêtent pas la machine de propagande du roi, qui transforme la jeune victime des Bourguignons et de leurs alliés anglais en martyre d'une foi réaffirmée dans la lignée royale française. 

RÉORGANISATION ÉCONOMIQUE

Jacques Cœur, ensuite, favorise la réorganisation de l'économie publique. Il trouve, grâce à ses manœuvres monétaires, les moyens de financer les conquêtes et place la France au sein d'un réseau d'échanges et d'investissements très actif. Sa disgrâce et sa chute montrent toutefois les limites de la modernisation des pratiques de cour. Monté trop haut, il est brisé pour que chacun puisse se partager une partie des dépouilles de son empire. Et son effondrement vient précisément quand Charles VII considère que l'homme a déjà livré l'essentiel de ses bienfaits. 

Richard d'York, enfin, qui combattit en France contre Charles VII, devait lui fournir indirectement le meilleur moyen de stabiliser la reconstruction française, en déclenchant tout simplement la guerre civile outre-Manche. En effet, c'est à la faveur de la guerre des Deux Roses, celle de la maison d'York et celle de la maison de Lancastre, autrement dit d'Henri VI et son clan, que le roi de France peut achever la reconquête et l'unification du territoire, ne laissant plus que Calais à l'Angleterre. Finalement, les trente années d'hostilités intestines anglaises achèvent un conflit de cent ans, dont la phase la plus critique entre 1420 et 1453 était elle-même le résultat de la guerre civile française. 

* Olivier Bouzy est directeur du Centre Jeanne-d'Arc. Son prochain ouvrage, «Jeanne d'Arc en son siècle», paraîtra en janvier 2013 chez Fayard. 

Marronniers : le cru 2013 est déjà là


On ne parle plus que de Depardieu. C’est bien pratique pour les rédactions. Avec cette seule info, on remplit des pages et des pages, enchaînant réactions et contre-réactions. Cela évite d’envoyer des journalistes sur le terrain. Ça coûte moins cher. C’est bien pratique, les journaux n’ont plus d’argent, occupés qu’ils sont à payer très cher les magnifiques locaux qu’ils occupent – c’est bien connu, pour faire du grand journalisme, il faut travailler dans un grand immeuble …
Et de fustiger la déclaration du plus grand acteur russe francophone sur la « Grande Démocratie » qu’est la Russie de Vladimir Poutine. Comme si les opinions de Gérard sur la géopolitique, sur l’état et la misère dans le monde avait plus de valeur que celles du Gérard que je croise tous les soirs au bistrot ? Sauf que ce Gérard là, à part quelques courts passages dans les micros trottoirs du Parisien, on ne l’étale pas des les journaux.
Gérard Depardieu est un  grand acteur et un personnage public. Mais aucune de ses réalisations ne lui donne de légitimité particulière pour parler de politique, d’économie ou de droit de l’homme. Ou du moins pas plus que n’importe quel citoyen. Alors pourquoi le relayer lui ?
Est-il universitaire spécialiste de cette région du monde ? Y-a-t-il voyagé autrement qu’en s’y faisant inviter dans les plus belles datchas ? Est-il même simplement un associatif véritablement impliqué dans les problèmes de ce pays ?
A tout cela non, alors laissons parler Gérard, comme on laisserait parler tout un chacun, son avis sur la question n’a pas grand intérêt.
Mais cet exemple peut s’appliquer à d’autres.
Jamel appelant à voter PS, Bardot pour le FN, la styliste Agnès B. soutenant Mélenchon, rien qu’à la dernière présidentielle …
Pourquoi donne-t-on à ces personnes, aux réalisations indéniables dans les domaines de l’habillement ou du spectacle, la possibilité d’influencer le vote de leurs concitoyens ?
Pourquoi surtout les écoute-t-on ? Elles ont le droit de prendre parti, mais pourquoi leur donner autant d’importance ?
Lorsqu’on fustige la « politique people » doit-on inviter des peoples à donner leur avis sur la politique ou sur la pérennité de l’école publique et la vie dans les quartiers ? A part leur langue bien pendue, ils n’ont pas plus à dire que n’importe quel Gérard croisé dans la rue et souvent bien moins puisque la plupart d’entre eux vivent dans des quartiers huppés, ne fréquentent que les mêmes grands restaurants et placent leurs enfants dans les meilleurs écoles privées.
Ce que je ferai sans honte si je possédais leurs revenus, mais j’épargnerais sans doute à la populace l’expression de mon avis sur des sujets que je ne maîtrise presque pas.
Je vous laisse, le Gérard du bistrot me fait signe de le rejoindre…

Demandez-nous la une

Manuel Silveira da Cunha

Reponsable de la publication de MEDIAVOX 

TRÈS BIEN VU, CELA RÉSUME BIEN 
LA SITUATION DE LA PRESSE 
AUJOURD'HUI !