TOUT EST DIT

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dimanche 6 janvier 2013

Les classiques contre-attaquent


Grâce à l'acharnement de quelques passionnés, les films classiques font l'objet de restaurations coûteuses et de reprogrammations à la télévision, en salles et dans les festivals. Pour la plus grande joie des cinéphiles.

Un nouveau temps, le passé présent. C'est celui que conjugue le cinéma, saisi en cette fin d'année par une forte fièvre patrimoniale. A peine le festival Lumière achevé, dirigé à Lyon par Thierry Frémaux, délégué général du Festival de Cannes, et Bertrand Tavernier, que Serge Bromberg, l'aventurier des archives perdues - dont un des coups d'éclat est d'avoir permis de redécouvrir la version colorée du Voyage dans la lune, de Georges Méliès -, fêtait au cinéma Balzac, à Paris, les 20 ans de son «Retour de flamme», en programmant«200 films miraculés retrouvés dans les caves ou les greniers», des longs-métrages «replacés dans leur contexte historique avec fantaisie et jubilation». Et que la Cinémathèque française lançait Toute la mémoire du monde, le premier festival du film restauré. 

SARAH BERNHARDT NUMÉRISÉE

Entre autres merveilles et (re)trouvailles, on a pu y découvrir les incroyables saynètes du Phono-Cinéma-Théâtre, perles archéologiques filmées à l'occasion de l'Exposition universelle de 1900 : voir danser Cléo de Mérode, époustouflante de modernité, voir Sarah Bernhardt en pourpoint, jouant Hamlet, oui, le rôle d'Hamlet... Ces plaisirs et bien d'autres, grâce à la numérisation. Le grand mot est lâché. A la Cinémathèque, au cours de débats, autour de tables rondes, il a été répété, commenté, évalué, encensé, redouté.


On s'est félicité que la numérisation du parc des salles soit sur le point d'être achevée, on s'est réjoui notamment que les deux sociétés doyennes du cinéma mondial, Gaumont et Pathé, engagent des sommes considérables pour restaurer et numériser leurs immenses catalogues. On a salué l'engagement du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) dans les programmes de restauration. On a parlé DCP (digital cinema package), le disque dur qui a remplacé les lourdes boîtes de pellicule, on a parlé 2K et 4K, les normes de définition des fichiers informatiques.


Et puis, soudain, on a soulevé un énorme, un métaphorique, un inéluctable problème. Rien ne prouve la pérennité des outils actuels de la numérisation, ils changent si vite. Alors que la pellicule, le support argentique, même centenaire, même attaquée par le temps, a résisté. On prend conscience qu'il faudrait, qu'il faudra revenir, pour une préservation sûre, à une copie 35 mm de chaque film numérisé... Paradoxe autant technique que philosophique, tel un ruban de Möbius, le progrès à la fois avance et se retourne contre lui-même.


Paradoxes plus légers : aux Etats-Unis, on est, paraît-il, reconnaissant au multi-oscarisé The Artist. Par son charme rétro, le film de Michel Hazanavicius servirait d'appât à un public jeune, réputé rétif à l'idée d'aller voir un film muet et en noir et blanc. En revanche, à Paris, on a surpris un patron de vidéoclub occultant le nom de Jean-Luc Godard sur le DVD de Pierrot le Fou. Argument : le nom fait peur, le titre fait vendre... Comment désormais diffuser, exploiter, rentabiliser au mieux l'afflux exponentiel de films restaurés ?
La ressortie en salles est prestigieuse, mais le box-office est aléatoire, à quelques exceptions près. Mieux vaut privilégier, multiplier, l'offre DVD et Blu-ray. Compter sur la VOD ? Elle est plutôt sollicitée pour rattraper à moindres frais un film récent. Attendre les passages à la télévision ? Si Arte se montre un partenaire fidèle, fiable, et en récolte les fruits (près de 1 million de spectateurs pour les Enfants du paradis), on peut avancer qu'il manque... une case à la télévision de service public. N'ouvrant aux films classiques qu'un créneau pour insomniaques, elle montre par ailleurs une audace très relative. Ainsi le 2 décembre dernier proposait-elle sur France 2 la quatorzième diffusion en prime time des Tontons flingueurs, de Georges Lautner. Résultat : 5,34 millions de téléspectateurs... Beaucoup plus modestes, mais nouveaux, les sites de «cinéma à la demande», réinventant à leur façon le ciné-club. En cliquant sur ilikecinema.com, on choisit sur catalogue un film qu'on aimerait revoir, dans quelle ville, à quelle heure. D'autres amateurs se joignent à vous, 30 personnes suffisent. L'affaire est faite.


Grandissant, on le sent, le goût du passé cinématographique a ses hérauts. Ainsi Bertrand Tavernier, cinéphile passionné, cinéphage érudit, qui professe : «Ça n'existe pas, les vieux films. La plupart d'entre eux, les grands du moins, demeurent connectés à nos vies. Antoine et Antoinette, de Jacques Becker (1947), nous parle de nous, de la crise que nous vivons aujourd'hui.» En plein tournage de son nouveau film, Quai d'Orsay, adapté de la BD satirico-politique à succès de Christophe Blain et Abel Lanzac, Tavernier n'en continue pas moins d'alimenter son blog (www.tavernier.blog.sacd.fr  ) consacré aux sorties DVD les plus pointues. Un tout petit extrait de l'une de ses longues chroniques, si merveilleusement prescriptrices : «Sparrows, DVD zone 2 chez Les Films du paradoxe. Ceux qui ne connaissent que la dernière partie de la carrière de William Beaudine (surnommé "One Shot Beaudine"), qui comprend des titres aussi pittoresques que Bela Lugosi Meets A Brooklyn Gorilla, Billy The Kid VS Dracula ou Jesse James Meets Frankenstein's Daughter, éprouveront un choc devant la beauté visuelle et l'audace lyrique de Sparrows, l'un des meilleurs Pickford...»


Autre héraut (héros) de la cause, Vincent Paul-Boncour, jeune patron de Carlotta Films, distributeur, éditeur, programmateur, passeur. Dans les deux petites salles de son cinéma du Marais, le Nouveau Latina, la Bunuel et la Rossellini, il impose en douceur une nouvelle cinéphilie, panachant avec audace sur ses affiches avant-hier et aujourd'hui. Ainsi pendant la semaine du 12 au 18 décembre pouvait-on voir au Nouveau Latina, glissées entre Ernest et Célestine et Piazza Fontana, la réédition en 3D de l'Etrange Créature du lac noir, mythique film d'horreur de Jack Arnold (1954), et les Aventures extraordinaires de Mr West au pays des Bolcheviks, de Lev Koulechov (1924) ! Boncour vient de sortir (en DVD et en salles) la superbe restauration du Fleuve, le premier film en couleurs de Jean Renoir (1951).


Un week-end de décembre au Nouveau Latina : Agnès Varda est là, assise au salon de thé du premier étage, arborant son étrange coiffure bicolore de vieux moine facétieux. L'intégralité de ses films va être projetée, en continuité. Sans manières, avec gaieté, elle descend tous les présenter. A 13 h 45, c'est la Pointe courte, son premier film (1954). Il y a du monde dans la salle. Elle rappelle qu'elle avait engagé son jeune monteur parce qu'on lui avait dit qu'il était sympathique, et de gauche. C'était Alain Resnais. Et puis elle rit : «A l'époque, on m'appelait "l'hirondelle qui annonce le printemps de la nouvelle vague". Maintenant, je suis devenue "la grand-mère de la nouvelle vague"...» 


De New York, où il tourne The Wolf Of Wall Street, avec Leonardo DiCaprio et «notre» Jean Dujardin, dans le rôle d'un banquier suisse véreux, Martin Scorsese a envoyé un message vidéo à la Cinémathèque française. Contredisant avec chaleur ce qu'écrivait Paul Valéry dans Propos sur le progrès, en 1931 : «Bientôt l'ère toute nouvelle enfantera des hommes qui ne tiendront plus au passé par aucune habitude de l'esprit», il a dit : «Toute la mémoire du monde, c'est un nom merveilleux pour ce festival. Plus nous plongeons dans cette mémoire et nous enfonçons dans le passé, plus il devient présent.» 

MITCHUM, PRÊCHEUR PRÉDATEUR 

DVD : «la Nuit du chasseur»

Le film unique de Charles Laughton revient de loin, de vingt ans de recherche et de restauration de ses éléments dispersés, de l'indifférence générale aussi, qui accueillit sa sortie en 1955. Voilà les petits enfants dans la nuit de la grande peur, et voici qu'apparaît «le prêcheur» prédateur, Robert Mitchum, et ses inoubliables mains tatouées, «Amour» et «Haine»... La Nuit du chasseur ressuscite dans une édition limitée et numérotée, accompagnée d'un livre de Philippe Garnier brillamment illustré et d'un CD. Un document extraordinaire prolonge (de 2 h 40 !) la vision du film : on y suit Laughton lisant un extrait du Sermon sur la montagne - «Méfie-toi des faux prophètes...» -, jouant tous les rôles, torturant Shelley Winters en lui faisant répéter des dizaines de fois la même réplique, ou réclamant à Mitchum «un rictus malsain»... Fascinant.

La Nuit du chasseur, édition limitée numérotée, 2 DVD Blu-ray + livre de 200 p., Wild Side Video, 159 €.

ARLETTY, GOUAILLEUSE IMPÉRIALE

DVD : «les Enfants du paradis»

Restauration exemplaire, plaisir total de retrouver, tels qu'ils étaient restés mystérieusement intacts dans la mémoire collective, ces Enfants du paradis. Carné, Prévert, la vraie foule sur le boulevard du Crime, la gracieuse mélancolie de Baptiste-Barrault, la géniale faconde de Pierre Brasseur, Arletty et sa gouaille impériale : «On m'appelle Garance, c'est le nom d'une fleur...» Suppléments très riches, on retrouve les «clandestins» Trauner et Kosma, Prévert à la fin de sa vie parlant d'Arletty : «C'est la voix qui compte, c'est un chant intérieur.» Et un remarquable livret permet de se replonger dans «ce que fut la réalisation» du film à travers un extrait de l'autobiographie de Marcel Carné, de découvrir que son accueil fut contrasté, François Chalais, notamment, y voyant «une succession ratée de brillantes velléités»... Et de suivre pas à pas toutes les étapes de sa restauration.

Les Enfants du paradis, Pathé, 19,98 €.

NASTASSJA KINSKI, BEAUTÉ TRANSLUCIDE

DVD : «Tess»

Plus de trente ans après son long, son coûteux tournage, la splendeur retrouvée de Tess, superproduction intimiste, histoire d'innocence et de fatalité, dédiée par Roman Polanski «à Sharon», sa femme assassinée. Le Dorset de Thomas Hardy a été réinventé en Normandie, et la beauté adolescente, transparente, de Nastassja Kinski irradie ce grand film lumineux et cruel. A la fin, après son crime, dans sa robe rouge «couleur de sang séché», Tess s'endort sur une pierre de Stonehenge, le monumental alignement néolithique, près de Salisbury. Un Stonehenge entièrement fabriqué à Paris, à la SFP, apprend-on dans les suppléments. Après quatre mois de prises de vues, huit mois de montage et un gros dépassement de budget, on s'interroge, le producteur, Claude Berri, n'a-t-il pas perdu le sommeil ? La réponse qui court alors : «Non, il dort comme un bébé. Il se réveille toutes les heures pour pleurer.»

Tess, Pathé, 19,98 €.

VARDA, GLANEUSE D'INSTANTS

DVD : «les Glaneurs et la glaneuse»

Agnès Varda prend la route, en France, elle a une caméra DV et un regard libre, proche, le respect de ce qu'elle filme. Agnès Varda part de ce tableau devenu chromo, cette petite madeleine patrimoniale, les Glaneuses, de Jean-François Millet. Et la voilà partie à la rencontre de ceux et celles qui vivent de nos restes, de nos rebuts - les glaneurs, les glaneuses, les grappilleurs, les ramasseuses. Parfois, ces biffins magnifiques sont des artistes, le plus souvent ils glanent par nécessité, des pommes de terre en forme de cœur, des réchauds à gaz, des téléviseurs morts, des fruits tombés. Au milieu d'un champ de cardons, un avocat en robe confirme le droit à glaner, une famille grappille, en chantant, une vigne abandonnée. Chemin faisant, Agnès la glaneuse cueille aussi des fragments de sa propre vie, filme avec une sérénité à peine navrée sa main que le temps burine, cette main si sûre et maternelle qui sait mettre au monde des images bonnes, comme il est de bonnes personnes.

Tout(e) Varda, coffret 22 DVD, Arte Vidéo, 110 €.

L'acte manqué de François Hollande


Il faut, bien sûr, être indulgent. Des erreurs, qui n’en commet pas ? De gauche comme de droite, tous les gouvernements se sont illustrés par des bévues plus ou moins grossières ou plus ou moins ridicules.

l faut, bien sûr, être indulgent. Des erreurs, qui n’en commet pas ? De gauche comme de droite, tous les gouvernements se sont illustrés par des bévues plus ou moins grossières ou plus ou moins ridicules. Alors, cette pantalonnade de la taxe à 75 %, dont l’Elysée faisait si grand cas mais qui a finalement été censurée fin décembre par le Conseil constitutionnel, on pourrait être enclin de ne pas en faire durablement des gorges chaudes. L’affaire est certes particulièrement consternante, puisque c’est la promesse phare du candidat. 
  
François Hollande qui passe du même coup (provisoirement ?) à la trappe, celle à laquelle il tenait le plus et qui a grandement contribué à sa victoire, en donnant des accents de gauche à sa campagne. D’autant plus consternante que ce n’est pas sur le fond que la réforme a été rejetée, mais parce qu’elle était techniquement stupide, construite en violation des règles les plus élémentaires de l’équité fiscale. Mais, encore une fois, à quoi bon accabler le gouvernement de Jean-Marc Ayrault ? Il a ouvert d’autres chantiers, et c’est sur l’ensemble de son action qu’il devra être jugé, n’est-ce pas ? Bien sûr ! Sauf que… cette vision des choses bute sur une réalité pour le moins embarrassante pour les socialistes. Cette taxe à 75 % était, en vérité, la caution de gauche d’une politique économique et sociale d’inspiration libérale, pour ne pas dire franchement de droite. Que l’on fasse en effet le bilan de toutes les autres réformes engagées depuis l’alternance, et on aura tôt fait de mesurer que la politique économique n’a guère changé depuis l’éviction de Nicolas Sarkozy. Ou alors seulement à la marge. 
  
D’abord, il y a eu le cap maintenu de l’austérité budgétaire et salariale. Pour le Smic, le gouvernement a juste consenti une aumône au 1er juillet 2012, en accordant un « coup de pouce » ridiculement faible, équivalant à 20 centimes d’euro par jour. Mais, dès le 1erjanvier de cette année 2013, plus de « coup de pouce » ni de largesses, même dérisoires : la rigueur est redevenue la règle, même si le pouvoir d’achat s’effondre. 

Et, pour la politique budgétaire, le couperet a été aussi violent. Afin d’abaisser à marche forcée dès cette année les déficits publics sous la barre des 3 % de la richesse nationale, Bercy a multiplié les mesures d’économie, au risque d’étouffer un pays déjà au bord de la récession. 

Il y a eu ensuite le « choc de compétitivité ». Là encore, le gouvernement a pratiqué la politique économique du coucou, en mettant en oeuvre une réforme dont Nicolas Sarkozy s’était fait le champion et que le candidat François Hollande avait vivement critiquée. Et, sans le moindre scrupule, les socialistes ont même annoncé qu’ils useraient de la TVA pour financer la réforme – TVA qu’ils ont toujours vouée dans le passé aux gémonies. 

Cap à droite toujours, avec la modernisation du marché du travail. Même si la négociation entre les partenaires sociaux n’a pas encore abouti, l’inspiration de cette autre réforme est transparente : elle trouve sa source dans les pamphlets ultralibéraux concoctés par l’OCDE et le FMI qui depuis des lustres font campagne pour une flexibilité accrue en faveur des entreprises. Et puis, au bilan économique de cette année 2012, il faut encore inscrire une cascade de reniements. Il y a eu ainsi le manquement à la parole donnée aux ouvriers sidérurgistes de Florange, qui ont été aussi maltraités par la gauche que ceux de Gandrange l’avaient été sous le quinquennat précédent. 

Autre promesse bafouée – et de quelle manière : alors que François Hollande avait promis de faire la guerre à la finance et en conséquence de séparer les activités de banque de dépôt et de banque d’investissement, la loi bancaire, qui vient d’être dévoilée, tourne quasiment le dos à ce projet. Et on pourrait poursuivre longtemps cette triste litanie des réformes de droite conduite par un gouvernement de gauche. En mentionnant le maintien des scandaleux avantages consentis aux plus grandes fortunes, au travers de systèmes de défiscalisation dans les DOM-TOM ou pour le cinéma (Sofica)… Du coup, à suivre toutes ces palinodies de la politique économique socialiste, on se rend compte que l’indulgence, en fait, n’est pas de mise. La stupide impréparation qui a conduit à la censure de la taxe à 75 % ne serait qu’une péripétie, n’entachant qu’à peine une politique économique cohérente et réformatrice, on serait enclin à ne pas y attacher d’importance.  

Mais, dans le cas présent, il en va différemment. Cette taxe à 75 %, sortie à la va-vite par François Hollande en pleine campagne présidentielle pour draguer les voix de la gauche de la gauche, n’était pas en cohérence avec la politique économique qui est aujourd’hui la sienne. C’était la seule mesure un tantinet de gauche, même si elle était très mal construite et n’avait en vérité rien à voir avec la « révolution fiscale » promise ces dernières années par les socialistes.  


Alors, que cette réforme soit maintenant censurée semble logique : de la part des socialistes, cela ressemble presque à un acte manqué. Ils rêvaient de se délester d’une promesse inconsidérée ; le Conseil constitutionnel les y a aidés ! Si François Hollande était honnête, il ne devrait donc pas cacher sa satisfaction, car, même si ce n’est pas de son fait, la politique économique qu’il impulse a enfin trouvé sa cohérence. 

HOLLANDE HONNÊTE  ? C'EST DU DOMAINE DU RÊVE.




Pécresse : "La France devient la risée du monde

L'ancienne ministre du Budget estime que "le seuil de tolérance fiscale est dépassé" et provoque "la délocalisation des emplois".

La députée UMP Valérie Pécresse, qui a précédé Jérôme Cahuzac comme ministre du Budget à Bercy, déclare qu'elle "souffre de voir la France devenir la risée du monde".
"Il faut bien comprendre que le seuil de tolérance fiscale est dépassé", déclare-t-elle dans un entretien au Journal du dimanche, évoquant notamment la contribution exceptionnelle de 75 % sur les revenus supérieurs à 1 million d'euros par an décidée par François Hollande et censurée par le Conseil constitutionnel. Une nouvelle disposition, aménagée mais "dans le même esprit", est en préparation. Dimanche matin, Jérôme Cahuzac a laissé entendre qu'elle pourrait devenir pérenne, alors que, dans sa première mouture, cette taxe devait disparaître au bout de deux ans.
"La censure des 75 % est un premier avertissement : en France, les impôts ne peuvent pas être confiscatoires. Cela entraîne le départ des plus riches et, beaucoup plus grave, la délocalisation des emplois et des centres de décision par les entreprises, un phénomène qui ne se voit pas pour le moment, mais qui se traduira dans les chiffres du chômage", estime Valérie Pécresse. "Au final, ce seront les classes moyennes qui devront payer les impôts. On va vers une révolte fiscale des classes moyennes", affirme l'ancienne ministre du Budget.

Selon Cahuzac, la taxe sur les hauts revenus pourrait ne plus être provisoire

Le ministre du Budget a pourtant promis que les impôts cesseraient d'augmenter pendant le reste du quinquennat.

Le ministre délégué au Budget, Jérôme Cahuzac, a répété dimanche qu'il n'y avait "pas d'augmentation d'impôts prévue ou prévisible, envisagée ou envisageable" d'ici à la fin du quinquennat du président François Hollande, au Grand Rendez-vous Europe 1-i>Télé-Le Parisien. "On demande un effort considérable en 2013. La réforme fiscale a été présentée et votée par le Parlement, on ne peut pas demander davantage aux contribuables désormais", a prévenu le ministre.
"Désormais, c'est la stabilité fiscale qui est la politique du gouvernement", a-t-il expliqué, en précisant que ce principe prévaudrait sur la durée de la mandature. "Demander davantage serait probablement demander trop, et les agents économiques, qu'il s'agisse des individus ou des entreprises, ont besoin de lisibilité. Il faut pouvoir savoir ce qu'il en sera dans un an, dans deux ans, dans trois ans." M. Cahuzac a en outre rappelé que la loi de programmation des finances publiques prévoit que "les prélèvements obligatoires commenceront à baisser à partir de 2016".
Le budget 2013 prévoit 30 milliards de recettes supplémentaires, financées pour un tiers par une augmentation des impôts pour les contribuables, un tiers pour les entreprises et le reste par le biais d'économies sur les dépenses publiques.

L'"esprit" des 75 %

Mais le ministre délégué au Budget a également évoqué le retour de la taxe sur les hauts revenus, laissant entendre que le dispositif qui viendra remplacer l'imposition à 75 % - censurée par le Conseil constitutionnel -, initialement présenté comme temporaire, pourrait être appliqué pendant tout le quinquennat. "Je pense que ça peut faire partie des paramètres", a indiqué M. Cahuzac, interrogé sur l'hypothèse que la future taxe s'applique pendant toute la durée du mandat du président François Hollande et non pendant seulement deux ans.
La semaine dernière, le Conseil constitutionnel avait censuré la disposition du budget 2013 instaurant cette taxe, au motif que celle-ci s'appliquait aux revenus des seuls individus et non pas des ménages. Cette ponction aurait dû normalement s'appliquer sur les revenus perçus en 2012 et 2013. M. Cahuzac n'a pas donné d'autres indications sur les modalités envisagées pour remplacer la disposition censurée, précisant simplement qu'il avait reçu "mandat", avec son collègue de l'Économie et des Finances, Pierre Moscovici, pour "proposer une disposition qui reprenne l'esprit de cette mesure".

Piste de travail

"Cette mesure-là avait pour but d'inciter à un peu plus de prudence et de décence un certain nombre, très rare, de dirigeants", a-t-il dit, pour défendre la pertinence de cet engagement de campagne du président de la République. Le ministre a souligné que si cette loi devait figurer en loi de Finances - et donc être présentée au plus tard l'automne prochain -, il ne comptait "évidemment" pas attendre aussi longtemps pour "proposer quelque chose". Il faut que "les acteurs économiques soient informés", a-t-il expliqué.
Il n'a pas démenti que l'imposition puisse être prélevée directement auprès des groupes accordant de telles rémunérations. "C'était déjà une piste de travail à l'époque" (lors de la genèse de la disposition censurée), a-t-il dit.
M. Cahuzac ne s'est pas prononcé sur le taux de la future taxe, mais il a relevé que le Conseil constitutionnel avait laissé entendre que "au-delà de 75 % tous revenus confondus, il pourrait juger le taux confiscatoire".

63% des Français contre le retour de Royal au gouvernement : la marque "Ségolène" est-elle vraiment has-been ?


Alors que Ségolène Royal ne cache pas son désir d'intégrer le gouvernement, la majorité des Français ne souhaitent pas voir l'ancienne candidate à la présidentielle faire son retour en politique d'après une enquête Harris Interactive pour le magazine Grazia.

Alors que Ségolène Royal fait la couverture du magazine VSD et ne cache plus son désir de revenir au gouvernement, la majorité des Français ne souhaitent pas voir l'ancienne candidate à l'élection présidentielle faire son retour en politique d’après une enquête Harris Interactive menée pour le magazine Grazia. Comment expliquez-vous le mélange d'amour et de haine qu'inspire la personnalité de Ségolène Royal ?

François Belley : Il faut d'abord noter que Ségolène Royal est un produit totalement à part sur le marché politique. Malgré le nombre d'échecs retentissants qu'elle a vécu, elle est toujours là. On connaissait son sourire, les Français ont découvert ses larmes après sa défaite aux primaires, puis aux législatives. Il n'en demeure pas moins que Ségolène Royal existe toujours politiquement. Si 64% des Français sont hostiles à son retour, presque 40% estiment qu'elle pourrait avoir sa place au gouvernement. Un peu comme Bernard Tapie, Ségolène Royal est une sorte de sphinx qui renaît de ses cendres. 
Il y a effectivement de la fascination et de la répulsion pour Ségolène Royal car c'est un personnage hors normes qui fait de la politique comme on fait du marketing. Elle a le sens de l' image et sait jouer avec l'émotion : sourire lorsqu'il le faut, pleurer lorsqu'il le faut. Par ailleurs, elle reste médiatique grâce à son parcours privé puisqu'elle est l'ancienne compagne du président de la République actuel.

Dans votre livre, Ségolène la femme marque, vous comparez l'ex-candidate à la présidentielle à une "marque" politique. Est-ce que "la marque Ségolène" est toujours tendance ?

Ségolène Royal reste "une marque" pour trois raisons. La première est son importante notoriété. Elle existe médiatiquement, donc elle existe politiquement.
Deuxième point, son identité politique est claire pour le "consommateur/ électeur" qui la positionne très facilement. L'esprit participatif est par exemple associé au personnage.François Hollande et Martine Aubry sont des "produits" politiques issus du parti socialiste. A l'inverse, Ségolène Royal n'a pas besoin du parti socialiste pour exister.Elle existe en tant que "Ségolène" et non en tant que marque PS.
Troisième élément, elle s'inscrit dans la durée. Daniel Cohn-Bendit est lui aussi une vraie marque politique parce qu'il a su incarner son "personnage" dans la durée à travers sa provocation et ses formules. Il a su garder le même cap comme Nicolas Sarkozy ou Arlette Laguiller dans des registres différents. Ségolène a su également s’inscrire dans le temps à coup de formules, de provocations et d'images chocs pour faire mouche.
Aujourd'hui, Ségolène Royal reste donc bien une marque, même si celle-ci est effectivement moins tendance qu'auparavant. Elle a perdu en crédibilité et en visibilité. Ségolène Royal est forcément moins dans l'air du temps d'autant plus que le "consommateur électeur"est versatile.

Malgré les mauvais sondages, Ségolène Royal peut-elle reconstruire son image de marque ?

Si demain, elle retourne au gouvernement, il n'est pas impossible qu'elle redevienne populaire. Comme Manuel Valls, elle pourrait jouer avec beaucoup de dextérité de la communication et des images. Il serait intéressant de voir comment les Français apprécieraient son retour de manière concrète. Ils constateraient probablement qu'elle a de l'expérience et de l'influence. Elle a été plusieurs fois ministre et a été candidate au second tour de l'élection présidentielle contre Nicolas Sarkozy.
Ségolène Royal conserve tous les atouts et les valeurs de "la marque", notamment sa combativité et sa pugnacité. C'est un gros capital à l'heure où le Premier ministre et même le président de la République se cherchent un style. A l'heure où Jean-Marc Ayrault se cherche une âme de chef de guerre, tout le monde connaît la détermination de Ségolène Royal. Elles est certes moins attractive qu'avant. Mais il ne serait pas inintéressant de comparer sa cote de popularité à celle de Michel Sapin ou Laurent Fabius. Le sondage qui vient d'être réalisé sur son éventuel retour n'est pas forcément inquiétant lorsqu'on le compare à la cote de popularité du gouvernement et du Président de la République.
Pour gagner en popularité, elle doit maintenant gagner en proximité. L'ancienne candidate à la présidentielle doit donc sans doute renouer avec le terrain et l'action pour reconquérir du crédit. Si elle revient au gouvernement, elle saura créer l'évènement autour d'elle comme Nicolas Sarkozy lorsqu'il était au pouvoir.

Xavier Niel peut se battre contre Google mais pas tuer toute la presse en ligne au passage


Selon une source proche du dossier, le dispositif de blocage des publicités sur Internet, installé par défaut depuis jeudi par l'opérateur Free, devrait être désamorcé "dans les jours qui viennent". Il s'agissait pour Free d'un moyen de pression pour amener Google à partager une partie de ses revenus.

Depuis le 2 janvier, les abonnés à l'offre Free ADSL bénéficient d'une option qui bloque les publicités directement depuis leur box. Ce dispositif devrait être désamorcé dans les prochains jours selon une source proche du dossier a-t-on appris ce samedi. Ce système, pensé par Free pour faire pression sur le géant Google alors que les deux sociétés sont en plein conflit sur le financement de la bande passante, ne risque-t-il pas de faire de gros dégâts collatéraux sur les structures financées par la publicité ?

Jean-Baptiste Fontana : De nombreux sites internet, et notamment ceux de la presse en ligne, ont mis en place un contrat moral avec leurs lecteurs : Vous disposez d'une information qui a une valeur, on ne vous la fait pas payer car ce sont les annonceurs qui la payent pour vous.
 
A partir de là, si le lecteur ou le FAI en tant qu'intermédiaire casse ce contrat, forcément tout le système s'écroule. On en revient à la question de base des modèles économiques de la presse : qui paye l'information ?
 
Deezer en est un bon exemple : c'est gratuit avec de la publicité ou en payant en service premium sans publicité, et dans tous les cas, les artistes sont rémunérés.
 
Je considère qu'utiliser un système de blocage des publicités sans rétribuer les éditeurs s'apparente tout simplement à du piratage. C'est exactement la même chose que de télécharger un film ou une musique sans payer.
Ce fou qui se prend pour Steve Jobs
 
Ce peut être aussi le point de départ d'une réflexion avec le public et les FAI. Si on va au bout de la logique de Free, l'idée serait de proposer un abonnement internet premium avec l'option "sans publicité" payante qui permettrait de rétribuer les éditeurs. Mais ça soulève de nombreuses questions, comme la dépendance des éditeurs vis à vis des FAI et surtout de la neutralité du net.
 
Dans tous les cas, bloquer la publicité sauvagement, c'est la mort assurée d'une bonne partie des sites d'information. Le législateur doit donc se saisir de ce dossier.
 

Certains affirment qu'une telle mesure porte atteinte à la "neutralité du web" ? Partagez-vous ce constat ?

Bien sûr. Au nom de quoi un FAI a t'il le droit de modifier le contenu des pages consultées par les internautes sans leur consentement ?
Apparemment ce filtrage ne concerne pas toutes les régies. C'est déjà une source de suspicion. Peut être que demain, un FAI contactera des régies pour désactiver le filtrage en échange d'une commission.
 
Là c'est la publicité, mais une brèche est ouverte. C'est au citoyen, et lui seul, de décider ce qu'il souhaite ou pas consulter. La société civile doit s'approprier ce débat de fond sur la liberté et la neutralité du web. Chacun doit être responsable bien sûr, mais ce n'est certainement pas aux fournisseurs d'accès de décider ce qui est bon ou pas pour le citoyen. La prochaine étape ce sera quoi ? Des censures éditoriales, politiques, idéologiques, communautaire

Une réglementation de la publicité intrusive ne serait-elle pas préférable à un blocage automatique des contenus publicitaires ?

Un grand travail de pédagogie doit être fait avec le public, mais aussi du coté des annonceurs. Avec le public d'abord, pour qu'il accepte que l'information a un coût et qu'il faut bien la payer de manière directe ou indirecte.
 
Du coté des publicitaires également, il est important de fixer des règles de bonne conduite.Il y a trop d'abus sur les réseaux sociaux autour des données personnelles. C'est opaque, et trop souvent, sous prétexte de jeux ou d'applications faussement gratuites, les utilisateurs cèdent à leur insu leurs données personnelles. La publicité comportementale pose elle aussi de sérieuses questions sur le tracking permanent et excessif des internautes.
 
Maintenant, c'est aussi aux annonceurs de faire le choix de campagnes de qualité. On a aujourd'hui des formats très intéressants, tantôt créatifs, ludiques ou esthétiques qui permettent de mettre en avant l'annonceur autrement que par des popups et interstitiels intrusifs.
 
De la même manière que pour la question des adblockers, si les professionnels n'arrivent pas à fixer eux-mêmes les règles, alors que le législateur intervienne.

La ministre de l'Economie numérique, Fleur Pellerin, devra arbitrer lundi le conflit entre les différents acteurs. Que peut-on attendre de cette réunion ? Un compromis est-il envisageable ?

Un compromis à court terme certainement. Il est probable que Free revienne sur le blocage par défaut, tout en maintenant le service de manière optionnelle, c'est à priori le souhait de la ministre. Après tout, Xavier Niel a parfaitement réussi son coup marketing vis à vis du public et marqué des points face à Google dans leur bras de fer.

La presse en ligne est une victime collatérale n'avait vraiment pas besoin de ça pour débuter 2013.