TOUT EST DIT

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samedi 15 décembre 2012

Le réquisitoire de Charles Consigny : Nicolas Sarkozy doit-il changer d'avocats ?

Amis juristes, je ne parle pas ici, bien sûr, de notre vénérable et vénéré confrère Thierry Herzog, dont le talent et la loyauté font l'unanimité respectueuse. Il est certain que, dans ses relatifs démêlés judiciaires, Nicolas Sarkozy sera bien défendu.
On les a entendus claironner sur tous les plateaux la victoire de leur motion : Guillaume Peltier et Geoffroy Didier, toujours présentés dans cet ordre (je ne doute pas que, s'ils étaient trois, le nom de M. Didier serait énoncé en troisième), ont porté la Droite forte en tête des suffrages militants lors des dernières élections internes à l'UMP. Ces deux trentenaires, dont les ficelles qu'on verrait presque tant elles sont épaisses sont agitées par l'obscur Patrick Buisson, ont fait une OPA sur le nom et le slogan de l'ancien président de la République, proposant toutes sortes de mesures caricaturales que les votants n'ont probablement même pas lues. Il y a eu un effet de marque, on a voté Droite forte comme on aurait acheté Damome ou Herpès. Il y a eu tromperie sur la marchandise.

Bling-bling 
Il aura vraiment fallu une immense fatigue de fin de mandat, puis de fin de campagne, et de grandes vertus de mystificateur à M. Buisson pour laisser croire à Nicolas Sarkozy qu'il avait gagné en 2007 grâce à son idée de donner un ministère à l'identité française (concept que je n'estime pas intouchable), et qu'il aurait gagné en 2012 s'il avait proposé qu'on autorise le port d'armes.
Il y avait, en 2007, autre chose. Il y avait l'envie d'un sursaut, une idée que la France n'était pas vouée à s'enliser dans les sables mouvants de son ennui et de sa paresse ; il y avait l'espoir d'une vie meilleure, b.a.-ba peut-être de toute campagne électorale. Sarkozy, c'était à la fois Bonaparte et Tony Montana, c'était l'exaltation de la grandeur de la nation et du volontarisme en même temps qu'un désir fou de bling-bling, signe extérieur de réussite personnelle. C'était une philosophie américaine, les victoires individuelles font la richesse collective, et un colbertisme, l'État tordra le bras de Mittal.
Grandeur 
Las, Lehman Brothers a fait faillite, l'effet domino a prouvé sa pertinence et les Français, qui avaient enfin accepté de se battre dans la guerre économique mondialisée, ont été stoppés net dans leur élan. Ils ont choisi, cinq ans plus tard, un type qui incarne physiquement le droit administratif ; un type qui ressemble à la fois au contrôleur de la SNCF, au postier, à l'agent de mairie, bref au fonctionnaire, le rassurant fonctionnariat qui exclut tout ce qui fait peur au XXIe siècle, licenciement, déclassement, privatisation. L'actuel président de la République a été élu sur la frustration par un peuple résigné. Ensuite, l'abîme appelle l'abîme.
Il y a, en France, beaucoup plus de génie, d'énergie, de force et de rêves que les maîtres sondeurs de l'UMP veulent bien le croire. Il y a trop d'intelligence, trop de culture, trop de patrimoine et trop de grands morts pour laisser penser qu'on gagnera le coeur des gens avec des arguments répondant aux fantasmes les plus tristes. Au ciel de la France planent la poésie d'Apollinaire et la foi de Claudel, les vers de Racine et les tourments d'Hugo. Les vignes de Château-Chalon résonnent encore des mots du prince de Metternich à Napoléon III ("Sire, le plus grand vin du monde se récolte dans un petit canton de votre empire, à Château-Chalon") et les sous-sols de la Vendée tremblent toujours du sang des chouans. La droite française n'est pas étrangère à ces grandeurs, la grandeur est une idée qui ne lui est pas étrangère. Qu'elle la retrouve.

Des fuites dans la tuyauterie

Des fuites dans la tuyauterie 

 
Quand il y a le feu dans la maison, le temps n'est plus aux incantations ni aux bricolages. C'est ce qui rend si pathétiques, à gauche comme à droite, les vieux discours de tant de professionnels de la politique.
Alors qu'arrive l'heure de la purge, ils bottent en touche, s'étripent sur l'actualité et laissent quelques rares volontaires monter au front, tel l'excellent M. Cahuzac, ministre du Budget, qui se retrouve maintenant avec un bouquet de fléchettes dans le dos et une affaire de compte en Suisse collée aux doigts comme le sparadrap du capitaine Haddock.
Mais on n'y coupera pas, il va falloir expier pour nos bêtises et nos lâchetés, après nous être ventrouillés si longtemps dans les orgies dépensières. La France ne s'en sortira qu'en tournant le dos à la politique du moindre mal qui, à force d'endettement, la conduisait peu à peu vers la déchéance. C'est ainsi seulement qu'elle pourra, enfin, se remettre au travail.
Après que M. Hollande a commencé à montrer la direction lors de sa dernière conférence de presse, la plupart de ses ministres se sont bien gardés de relayer son discours. "Tous aux abris !" Tel est le mot d'ordre qu'ils semblent s'être donné. Ils en étaient restés aux naïvetés du programme socialiste. Ils n'avaient pas été préparés, il leur faudra des cours de rattrapage.
C'est "l'ayraultvolution" : tandis que M. Moscovici parle à juste titre de "révolution copernicienne", M. Ayrault propose un "nouveau modèle français", fermement social-démocrate et franchement réaliste (1). En soi, l'expression du Premier ministre ne veut rien dire, mais elle signifie au moins que l'ancien est obsolète. Merci à lui de l'avoir reconnu.
Il a fallu arriver au bord du précipice pour que, dans les deux camps, la majorité de la classe politique rejoigne le cercle du bon sens et accepte l'idée qu'il est dangereux pour un pays de vivre au-dessus de ses moyens. Jusqu'à sa prochaine résurrection, c'en est donc fini du keynésianisme et des relances stupides qui, au nom de l'idéologie de la croissance presse-bouton, dopent les importations chinoises en finissant de massacrer notre industrie.
Le "nouveau modèle français", voilà bien l'occasion d'un grand débat national : depuis quelques décennies, notre pays a glissé sur une pente qu'il est urgent de remonter si l'on veut mettre fin à la déstructuration sociale et à la perte de repères qui font tout voler en éclats dans notre tissu urbain, sur fond d'exclusion et de ghettoïsation. Dopée, contrairement aux pronostics, par les résultats des dernières législatives partielles, la droite requinquée ferait bien d'y réfléchir au lieu de se contenter de slogans simplets : la France est son problème aussi.
Jusqu'à présent, le modèle social français que le monde entier nous enviait, paraît-il, n'était qu'une usine à gaz redistribuant de l'argent qu'on n'avait pas mais qu'on empruntait, le pompon étant la calamiteuse loi Aubry des 35 heures financée par la dette à raison d'une quinzaine de milliards au moins par an. Il fallait y penser : en France, nous nous endettons pour travailler moins !
Pendant ces années de laxisme généralisé, nos gouvernants de droite ou de gauche ont tout laissé filer. Pour preuve, la gabegie dans la formation professionnelle, la santé publique ou l'action logement (l'ancien 1 %), pendant que la part du secteur productif ne cessait de se rétracter et que le nombre d'entreprises industrielles baissait de 20 % en dix ans, ce qui s'est traduit par la destruction de 500 000 emplois. Mais qu'importe puisque, sur un point au moins, nous faisions mieux que l'Allemagne, avec deux fois plus de fonctionnaires qu'elle pour 1 000 habitants.
C'est ainsi que s'est écroulée la construction sociale sur laquelle la France avait vécu pendant plus d'un siècle, jusqu'à l'apogée des Trente Glorieuses. Aujourd'hui, nos structures urbaines sont comme une maison dont on aurait retiré les fondations. Non seulement l'usine est fermée, faute de compétitivité, mais les commerces disparaissent, victimes de la grande distribution ou des ventes en ligne. Sans parler de deux professions structurantes tout au long de la IIIe puis de la IVe République, les enseignants et les médecins : ils sont mis à la diète par un État-providence débordé qui n'a plus assez de cuillères pour nourrir tout le monde.
Les enseignants et les médecins français sont parmi les plus mal lotis d'Europe. Au lieu d'embaucher les premiers à tour de bras, M. Peillon serait bien inspiré de les augmenter. En début de carrière, le salaire d'un professeur de collège ou de lycée est deux fois moins élevé qu'en Allemagne, c'est tout dire. Quant à nos médecins généralistes, ils sont pareillement moins bien traités qu'outre-Rhin, où l'on affiche néanmoins des comptes de santé insolemment florissants. C'est décidément toute notre échelle des valeurs et des revenus qui est à revoir.
La France est encore riche, pourtant. Où est passé l'argent des taxes et des impôts ? Quand l'eau ne coule plus au robinet, c'est qu'il est temps de refaire la tuyauterie.

Lettre ouverte à Nicolas Doze sur le défaut de la Grèce

Lettre ouverte à Nicolas Doze : les souffrances actuelles de la Grèce ne sont pas dues à son défaut souverain, mais, au contraire, au refus catégorique de faire défaut.
«Monsieur,
Bien qu’habitant la Belgique, je suis un auditeur régulier de BFM Business, station sur laquelle j’ai le plaisir d’entendre régulièrement vos interventions pleines de bon sens.
Ce matin, lors du journal de Stéphane Soumier, vous avez déclaré (de mémoire) : « Si l’on pouvait éviter le défaut, ce serait bien. Personne n’a envie de se retrouver dans la situation grecque. »
À ce propos, j’aimerais attirer votre attention sur deux points.
D’abord, les souffrances actuelles de la Grèce ne sont pas dues à son défaut souverain, mais, au contraire, au refus catégorique de faire défaut. Très tôt, les économistes libéraux ont indiqué qu’il serait impossible à la Grèce de faire face à ses obligations de remboursement. Voilà presque 3 ans que le magazine The Economist a commencé à défendre le défaut grec comme une première mesure d’assainissement des finances publiques. D’ailleurs, ce journal spécifiait à l’époque que plus la Grèce tarderait à prendre cette mesure, plus celle-ci se révélerait douloureuse.
Hélas, les dirigeants allemands et français n’ont pas voulu l’entendre de cette oreille. Depuis le début, ils s’acharnent à forcer la Grèce à rembourser ses créditeurs. Toutes les mesures mises en œuvre ces dernières années visaient à empêcher un défaut, qui, paraît-il, aurait déshonoré la zone Euro. L’an passé, un timide premier pas a été fait avec le PSI, mais, trop tardif et trop restreint, il n’a pas permis à la Grèce de retrouver la bouffée d’oxygène nécessaire à la relance de son économie. Il semblerait désormais que Mme Merkel ne s’oppose plus à un défaut de la Grèce, mais pas avant un an ou deux.
Il me semble donc important de rappeler à chaque occasion qu’il n’y a pas véritablement eu de défaut grec et que le désastre économique actuel est lié à l’orgueil des instances politiques (France, Allemagne, UE, BCE, FMI) qui ont voulu conjurer l’inéluctable et n’y sont pas parvenues.
Ensuite, comme vous le précisiez, ce serait bien si l’on pouvait éviter le défaut souverain dans l’Europe du Nord. Mais le pouvons-nous encore ? Aujourd’hui, les dettes publiques ont atteint des sommes monstrueuses et nous asphyxient par leur remboursement. Quoique la période actuelle soit extrêmement favorable aux États, avec des taux d’intérêt proches de zéro, les gouvernements sont confrontés à des difficultés budgétaires colossales. Pour ne rien arranger, il n’y a aucune chance que les taux restent longtemps aux niveaux actuels. Que ce soit par le retour de la croissance ou par celui de l’inflation, les taux sont appelés à remonter un jour ou l’autre. À ce moment, les finances publiques imploseront sous le poids de la dette et nous serons confrontés à un choix cornélien : rembourser la dette ou l’annuler.
En ce qui concerne la Belgique, mon pays, le Parti Libertarien défend explicitement l’annulation pure et simple. Pour nous, il est hors de question de courir le risque d’une situation à la grecque. Nous refusons que le remboursement de la dette publique soit utilisé comme argument pour imposer l’austérité socialiste, augmenter toujours plus les impôts et détruire le peu d’économie privée qu’il nous reste.
La dette publique est le fruit de 60 ans de politiques interventionnistes et de pseudo-relance keynésienne. Nous ne nous sentons pas tenus par les conséquences d’une politique que nous avons toujours condamnée. Les créanciers étaient parfaitement au courant de la situation et ils ont fait le pari du toujours plus d’État. Ils ont perdu. Tant pis pour eux.
Loin de constituer une catastrophe économique comme on le dit trop souvent, l’annulation ordonnée de la dette doit être un nouveau départ. Accompagnée d’un grand mouvement de privatisation et d’une diminution drastique des impôts, cette annulation permettra l’émergence d’une nouvelle génération d’entrepreneurs qui donnera un formidable coup d’accélérateur à notre économie. Ce sera le commencement d’un nouveau siècle de paix, de liberté et de richesse.
Nous ne doutons pas que le mouvement initié par les libertariens belges trouvera très prochainement un écho auprès de nos compagnons français.
En vous félicitant encore pour la qualité de vos émissions, je vous prie d’agréer, Monsieur, mes salutations respectueuses.

Grèce: la zone euro va bientôt débloquer une aide de 34 milliards d'euros


La zone euro s'est mise d'accord jeudi pour débloquer l'aide financière à la Grèce gelée depuis des mois et versera 34,3 milliards d'euros dès la semaine prochaine, a indiqué le chef de file de l'Eurogroupe, Jean-Claude Juncker.
"L'Eurogroupe a formellement approuvé le déblocage" de l'aide financière pour la Grèce après (...) avoir évalué les résultats de l'opération de rachat de dette menée par Athènes", indique l'Eurogroupe dans un communiqué.
"La zone euro salue le résultat de cette opération, qui permettra de nettement réduire la dette publique grecque. En prenant en compte les mesures annoncées le 27 novembre et l'application du programme d'ajustement budgétaire, la dette grecque devrait être ramenée à 124% du PIB en 2020", poursuit-il.

Au terme de leur réunion, les ministres des Finances de la zone euro n'ont pas exclu de "prendre des mesures supplémentaires, si nécessaire, pour atteindre avec certitude cet objectif" qui avait été décidé fin novembre, en concertation avec le Fonds monétaire international (FMI), un des créanciers publics de la Grèce.
Dans la foulée de la réunion de l'Eurogroupe, la directrice générale du FMI, Christine Lagarde, a recommandé le versement de l'aide promise par son institution.
Mme Lagarde a précisé dans un communiqué qu'une décision formelle sur ce point pourrait être prise dès janvier à l'occasion d'une réunion du conseil d'administration du FMI.
Elle confirme que les mesures et engagements pris vont permettre à la dette publique de la Grèce de revenir à "124% du produit intérieur brut en 2020 et substantiellement en dessous de 110% en 2022". Cet objectif était un préalable pour que le FMI juge la dette grecque soutenable et continue donc à prêter de l'argent à Athènes.
Au final, la zone euro va débloquer 49,1 milliards d'euros en faveur de la Grèce d'ici fin mars, dont 34,3 milliards qui seront versés "dès la semaine prochaine", a indiqué M. Juncker lors d'une conférence de presse à Bruxelles.
Les sommes restantes (14,8 milliards d'euros au total) seront versées au premier trimestre en plusieurs fois et serviront à couvrir les besoins de recapitalisation des banques grecques et les dépenses d'Etat, "en fonction de la mise en place de certaines mesures et leur approbation par la troïka", qui rassemble les principaux bailleurs de fonds de la Grèce.
Dans l'immédiat, sur les 34 milliards qui seront versés la semaine prochaine, 16 milliards d'euros sont destinés à recapitaliser les banques grecques, 7 milliards pour les dépenses d'Etat et 11,3 milliards pour couvrir l'opération de rachat de dette qui a été menée par Athènes.
Cet appel d'offres a été lancé il y a un peu plus d'une semaine auprès des banques et fonds détenteurs d'obligations grecques, dans l'objectif de réduire d'au moins 20 milliards la dette abyssale du pays.
"C'est une étape très importante, qui montre que le programme pour la Grèce est un programme crédible, que son financement est crédible", a estimé le ministre français des Finances, Pierre Moscovici.
"Les Européens ont montré leur capacité et leur volonté à tourner la page de la crise. Et aujourd'hui, à la fin de cette année 2012, l'existence de l'euro n'est plus en doute. La volonté des Européens de trouver une solution à la crise est manifeste. Nous nous en donnons les moyens", a-t-il ajouté.
Les dirigeants européens se pencheront dans l'après-midi lors d'un sommet qui débute à 17H00 (16H00 GMT) sur les propositions pour approfondir l'Union économique et monétaire et renforcer l'intégration européenne, en se fondant sur un rapport rédigé sous la houlette de Herman Van Rompuy, le président de l'UE.

Vivement 2014 !

Vivement 2014 ! 


Que d’amicales dissonances franco-allemandes en clôture du Conseil européen ! Dans sa conférence de presse à l’adresse des Français, le président Hollande s’est montré résolument optimiste. L’Europe aurait enfin bougé en 2012 avec quelques avancées majeures comme cette union bancaire encore à parfaire, plus une feuille de route pour de véritables réformes au sein de la zone euro, à définir en première étape dès juin prochain. Peut-être aussi une renégociation sur les fameux « eurobonds » après les élections européennes de 2014 suivies de la mise en place d’une nouvelle Commission… Bref, sans être jugulée, la crise européenne serait moins aiguë. Grâce à quelques portes ouvertes – ou entrouvertes – sur l’espoir.
Changement de ton chez Angela Merkel face à son opinion publique à elle. Pas d’optimisme, pas de pessimisme non plus. Seulement du réalisme enrobant de multiples conditions les avancées bruxelloises. Du pragmatisme très « fair play » également, en saluant le compromis sur l’union bancaire en devenir, dont Berlin ne voulait pas, et sans doute à mettre au compte de l’opiniâtreté du ministre Pierre Moscovici en excellente entente avec son homologue allemand Wolfgang Schäuble. C’est d’ailleurs la première fois depuis longtemps que Paris a su imposer – au moins, partiellement – son point de vue à l’Allemagne. Notamment en donnant de nouveaux pouvoirs à la BCE de Francfort qui, sous Mario Draghi, a déjà su s’affranchir de contraintes réglementaires liées à l’euro. Au grand dam des tenants de l’orthodoxie à l’allemande.
Toute avalanche d’amabilités à part, le rapprochement franco-allemand se limite pour l’instant à cette supervision bancaire. Même si Paris et Berlin restent le moteur de l’Europe – et le Conseil de Bruxelles l’a démontré une fois de plus – encore faut-il dégripper la machine d’une façon ou d’une autre pour vraiment sortir la zone euro de la crise.
Certainement pas en 2013. L’Allemagne entre en campagne électorale pour les législatives de septembre. Devant le Bundestag archi-souverain en matière européenne comme au congrès de la CDU, la candidate-chancelière était parfaitement claire : Berlin ne changera en rien ses principes sur la politique de l’euro, et c’est un engagement. Mais en 2014, année où curieusement les échéances discutées à Bruxelles ont été reportées ?

Le gouvernement Ayrault n'aime pas la liberté

Jean-Marc Ayrault nous rappelle qu'il n'aime pas la liberté, au cas où le message n'était pas encore passé.
Ayrault l'affirme : "Nous ne menons pas une politique sociale-libérale". Pour ce qui est de la politique sociale, je le laisse en juger, mais une chose est certaine : le gouvernement ne mène pas de politique libérale. Le libéralisme se fonde sur le libre consentement des individus comme principe des interactions humaines ; on ne peut pas mener de politique libérale-machin ou truc-libérale : le consentement est libre ou ne l'est pas, et, malgré leurs divergences, les courants libéraux ont ce principe en commun.
S'il se trouve quelqu'un pour être fier de pouvoir affirmer ce genre de choses, c'est sans doute notre cher premier ministre :

"Nous menons une politique sociale républicaine, sans doute la plus à gauche dans le cadre de l'Europe, avec l'euro" a ajouté le premier ministre pour répondre aux critiques sur la politique économique menée par son gouvernement. Des critiques se sont notamment faites entendre à gauche sur les mesures visant à améliorer la compétitivité du pays, annoncées par M. Ayrault, le 6 novembre.
Parce que la compétitivité, ce n'est pas un combat de gauche, il est toujours bon de rassurer son électorat sur le fait qu'on ne fera pas grand chose pour l'améliorer. Le rassurer également sur la croissance continue de notre dette :
Le chef du gouvernement s'est également défendu de mener une politique d'austérité, engendrant de lourdes conséquences sociales. "Pratiquement tous les autres pays ont diminué les salaires, les pensions, les prestations sociales, ce n'est pas ce que nous faisons. (...) La politique menée [en Allemagne] a augmenté la compétitivité mais aussi la pauvreté", a-t-il estimé. Et de lancer : "Je l'ai dit, je ne veux pas être le premier ministre du tournant de l'austérité."
Sa formulation révèle une lucidité qui n'a d'égale que sa lâcheté : il faudra qu'un premier ministre prenne le tournant de l'austérité, mais ça ne sera pas lui. Il a autre chose à faire, comme insulter ceux qui fuient sa politique.
Le chef du gouvernement est également revenu sur  la proposition de son ministre du redressement productif, Arnaud Montebourg, qui avait évoqué une nationalisation temporaire. "Il ne faut pas exclure, dans des circonstances exceptionnelles, l'intervention de l’État dans les entreprises, a estimé M. Ayrault."
Dans des circonstances exceptionnelles, comme une crise sans précédent par exemple, bientôt derrière nous, pardon, déjà terminée, l’État interviendra dans les entreprises. Ce qu'il fait également en temps normal depuis des décennies en France, mais c'est un détail, l'essentiel est de rassurer. De se rassurer également, en se rappelant que même les Américains que tout le monde croit libéraux font preuve d'un collectivisme féroce :
Citant l'exemple de General Motors aux États-Unis, groupe que le gouvernement américain a décidé de sauver avec un apport financier, M. Ayrault a lancé : "En France, si c'est une industrie stratégique [en difficulté], je préconiserai une intervention de l’État. Ça ne me fait absolument pas peur. Mais si cela devait se faire, pour un groupe industriel stratégique, ça ne voudrait pas dire que nous garderions tous les sites et tous les emplois."
Mais attention. La nationalisation, ce n'est pas, ça ne doit pas être et ça ne sera pas... une expropriation. Donnons-lui quelques idées de formulations alternatives : c'est un "investissement dans des actifs stratégiques", une "sécurisation de l'accès aux ressources et aux savoir-faire prioritaires" ou encore la "préservation de compétences d'avenir dans des secteurs porteurs". Pas d'expropriations en vue donc, seulement des nationalisations :
Cela étant dit, le premier ministre a expliqué pourquoi il n'avait pas retenu ce scénario pour le site de Florange. "Dans le cas de Mittal, ce n'était pas la même chose, c'était une expropriation. C'était une solution technique très lourde qui ne garantissait pas l'emploi."
De la même façon, il ne faut surtout pas aider les Français à s'enrichir – d'autant plus que cela requiert souvent leur départ – mais les inciter à sortir de la pauvreté. On ne va pas mettre en péril un système monétaire que le Zimbabwe ne renierait pas, mais faire un grand bon en avant de l'union bancaire. On sent bien, dans ce dernier exemple, que le choix des formulations est restreint par un nombre important de précédents : un mur antifasciste à Berlin, une république populaire démocratique en Corée du Nord...
Oui, mais voilà. La France est endettée, l’État-providence ne fonctionne pas, l'intervention de l’État dans l'économie a des effets délétères qu'il faut être irresponsable pour ne pas reconnaître. Que vous ne soyez pas libéral, nous l'avons tous compris. Vous n'accordez aucune importance à la liberté individuelle, ne donnez aucun crédit au consentement libre, et priver les individus des fruits de leur travail ne vous fait pas peur. Ce qui vous fait peur, c'est que le marché gagne toujours. La liberté gagne toujours. Quand les individus ne sont pas d'accord avec vous et que vous ne leur laissez pas le choix, ils s'en vont. Quand les actionnaires et potentiels investisseurs ne voient pas d'avenir en France ou craignent que vous les expropriez, ils s'en vont.
Vous considérez que l’État a un rôle prépondérant à jouer dans l'économie, plus que l'individu. Vous considérez que la coercition a un impact bénéfique, plus que la liberté. Vous considérez qu'il est important de protéger l'emploi, plus que d'en créer. Je ne partage pas vos idées, mais soit. Il y a toutefois une chose que vous ne nierez pas, que vous semblez même revendiquer par le rôle que vous voulez jouer dans l'économie et la société françaises : votre responsabilité. Alors allez-y, monsieur Ayrault : créez de la richesse en France, des emplois, rendez les Français heureux. Comme des millions de Français, je vous regarde. Mais de loin, parce que je ne crois pas que vous y parviendrez.

Battage sur l'accessoire, flou sur l'essentiel : quand donc François Hollande finira-t-il par s'attaquer aux réformes dont la France a besoin ?

Alors que François Hollande est au plus bas dans les sondages, Jean-Pierre Chevènement explique que le président ne s'occupe que de problèmes périphériques. Et les Européens, les entreprises et les agences de notation de s'impatienter.
Les semaines se suivent et la situation française n’en finit pas de se dégrader. Personne ne comprend ce qui se passe au niveau de l’Etat et de la haute administration.
François Hollande pourrait passer une partie de son week-end à éplucher les derniers sondages et regretter qu’il ne soit plus soutenu que par moins d’un tiers des Français que ça n’effacerait pas les erreurs politiques et l’absence de vraies décisions. C’est Jean-Pierre Chevènement qui a assez bien résumé la situation vendredi soir en regrettant que le chef de l’État ne s’occupe que de problèmes périphériques et marginaux. Bref il amuse la galerie et gagne du temps en permanence. La politique doit servir à autre chose qu'à dissimuler la poussière sous les tapis.
Et c’est vrai. Pourquoi se mêler des préoccupations judiciaires de sa compagne au point d’envoyer une lettre au juge chargé de traiter cette affaire de diffamation.  Plus grave encore, pourquoi demander à son ministre de l’Intérieur de témoigner par écrit de sa bonne foi. Tout cela est surréaliste. Pourquoi intervenir aussi maladroitement dans le dossier des aciéries de Florange au point de discréditer une décision qui n’était pourtant pas si mauvaise et de se mettre tout le monde à dos. Pourquoi s’entêter à présenter un projet de loi mal ficelé sur le mariage pour tous. Pourquoi s’abaisser à critiquer la décision de Gérard Depardieu de s’expatrier en Belgique sans s’interroger sur les vraies raisons qui poussent tant de Français à l’exil fiscal. Pourquoi menacer les riches. Faudra-t-il aussi un jour interdire aux jeunes diplômés français de partir à l’étranger prendre des jobs qu'ils ne trouvent pas en France ? (80% des effectifs sortis des grandes écoles en Juin 2012 sont partis s’installer hors de nos frontières). Faudrait-il empêcher les retraités de la classe moyenne de résider au Maroc comme ils le font de plus en plus…
Pourquoi accepter que l’équipe gouvernementale se contredise pratiquement tous les jours sur des sujets qui ne sont d’ailleurs pas primordiaux ce qui laisse l’impression d’un énorme désordre. Pourquoi le président accepte-t-il d’être aussi mal conseillé, d'avoir un entourage aussi absent au point de le laisser déraper à ce point.  
Moi, Président Je...............
La grande majorité des Français sont déçus par un gouvernement qui n’a pas pu réaliser les promesses de campagne mais il fallait s’y attendre. Ils sont surtout déçus par la politique économique qui ne répond pas aux nécessités de la situation. Ils sont déçus par la politique sociale qui se délite dans le nombre de chômeurs qui s’accroît.
L’annonce faite par Fitch que la France va pouvoir garder sa notation AAA n’a impressionné personne. D'abord parce que les autres agences ont dégradé la France depuis plus d’un an, ensuite parce ce que le propriétaire de l’agence, le Français Marc de la Charrière a été automatiquement soupçonné de complaisance, ce qui est peut-être injuste. Enfin, quand on lit les attendus de l’agence, le diagnostic est sévère (on attend les réformes) et la menace est claire (sans preuve que la dépense publique va baisser, il faudra dégrader la France). D'où les remarques cacophoniques gouvernementales. D'un côté Pierre Moscovici qui fait semblant de ne pas avoir lu les attendus se félicite de ce triple A. François Hollande, lui, a dû les lire et du coup le prend de haut en disant que "la France ne se fera pas dicter sa politique par une agence de notation".
Les Français seraient prêts à accepter tous les efforts budgétaires et les réformes de structures si douloureuses soient-elles s’ils avaient le sentiment que la politique puisse à terme améliorer la situation. Mais depuis quelques semaines, les Français ne comprennent pas que le gouvernement ne fasse rien d’autre que de traiter des problèmes sociétaux ou des questions de morale et d'éthique (certes importants mais pas forcément de la première urgence).
L’urgence des urgences serait de sécuriser l’évolution économique. Ça passe par la solidarité européenne. François Hollande n’a convaincu personne en claironnant que le dernier sommet européen avait été un "bon sommet". Contrairement à ce qu'il a affirmé, ce n’est pas le président français qui a arraché la mise en place de la régulation bancaire. Cette réforme très importante avait été initiée par Michel Barnier, le commissaire à la concurrence, soutenue par Nicolas Sarkozy, puis plus récemment par Mario Monti. Angela Merkel a accepté de défendre le projet contre la promesse de ses partenaires qu'ils tiendront leurs engagements de réformes. Et au final, la réforme a été adoptée grâce à l’habileté de Mario Draghi, le président de la Banque centrale européenne qui est ainsi devenu le banquier en dernier ressort. François Hollande aurait pu se féliciter publiquement de l’action de la Banque centrale qui devrait nous permettre d’amortir un peu la brutalité de la rigueur allemande et de mettre en place des systèmes de financements qui sont très proches des euro bonds.
Mais s’il l’avait fait, c'eût été reconnaitre publiquement un nouvel abandon de souveraineté inacceptable pour une grande partie de sa majorité.
Pourtant les faits sont têtus.
Apres avoir consenti la réforme budgétaire qui contraint les États membres à soumettre leurs lois de finances au contrôle de Bruxelles, la France a accepté de déléguer la surveillance de ses banques à la Banque centrale européenne.
Les choses ne se sont pas très bien passées à Bruxelles quand le president français a déclaré qu'on était sorti de la crise… Angela Merkel aurait déclaré pendant le dernier diner qu'on sortira de la crise quand un pays  comme la France nous aura démontré qu'il est capable d’assainir ses finances publiques à l'image de ce qui se passe aujourd'hui en Italie… Angela Merkel n'a d’ailleurs pas ménagé ses efforts pour assurer Mario Monti de son soutien contre les manœuvres ridicules mais dangereuses de Sylvio Berlusconi. Lequel agace plus qu'il n'inquiète. Les chefs d'États et de gouvernement souhaitent et pensent que Mario Monti finira pas se présenter et qu'il sera élu.
François Hollande aussi et c’est pour cette raison que du bout des lèvres il a reconnu les efforts faits par l’Italie pourtant gouvernée par un chef de gouvernement qui n’appartient pas à la gauche.
Bref les Français trouvent le temps de plus en plus long à Bruxelles où on leur a reproché une fois de plus d’être flous sur la strategie de politique économique, vagues sur les réformes à venir et incertains quant à la capacité de reduire la dépense publique. Cette attitude a été d'autant plus mal vécue par nos partenaires quand la délégation française a essayé d’ouvrir des dossiers de l’harmonisation fiscale.
Pour Francois Hollande et Pierre Moscovici, il s'agissait bien sûr de profiter du bruit mediatique fait par Gerard Depardieu et signifier aux militants socialistes français qu'ils n’allaient pas "se laisser impressionner par quelques riches qui fuient leur responsabilités nationales", la morale toujours. Mais ils ont précisé que la solution était plus européenne que francaise. Les Anglais, les Belges, les Allemands et les Italiens ne se sont pas privés de renvoyer poliment les Français dans les méandres de leur propre fiscalité. Mario Monti, ancien professeur d’économie, rappelait le théorème de Laffer : "les hauts taux tuent les totaux".
On espère à l'Élysée que le dossier va se refermer. On n’a d’ailleurs modérément apprécié l’émotion de Michel Sardou qui a complètement oublié les années passées en Floride. On sait surtout qu'il voulait s'offrir une publicité à bon compte pour remplir Bercy, ce qui était loin d’être le cas.
Les "forces vives du pays" comme on dit au moment des vœux ne décolèrent pas. Les syndicats considèrent que la mauvaise gestion du dossier Arcelor les met dans une position difficile. Ils sont obligés de durcir leur position alors qu’ils étaient prêts à finaliser les accords proposés par Michel Sapin qui va être obligé de mouiller sa chemise une fois de plus.
Les chefs d'entreprises ne tolèrent plus d’être ainsi en permanence cloués au pilori. La loi de finances qui a été votée cette semaine est selon les termes d’un grand patron français parti à Genève "une loi d’étranglement fiscal, y compris pour les créateurs de start-up". Et pour cause, contrairement aux promesses, les pigeons n’ont pas obtenu une modification de la taxation des plus-values. Finalement les pigeons vont donc se faire plumer. La majorité des chefs d’entreprises ne peuvent pas déménager mais tous y pensent. Les états-majors des grandes entreprises du CAC 40 ont informé François Hollande qu'ils étudiaient des déménagements soit en Grande-Bretagne soit aux Pays-Bas où beaucoup ont déjà acheté des locaux.
Fidèle à sa méthode, le président de la République va essayer la semaine prochaine de calmer le jeu et de gagner du temps.
Au niveau du parti socialiste, il reçoit dès lundi matin Bruno Leroux qui a de plus en mal à tenir le groupe socialiste à l’Assemblée nationale. L’offensive des députés fidèles a Ségolène Royal pour préparer une arrivée au gouvernement empoissonne les conseillers de l’Elysée qui n’avaient vraiment pas  besoin de cela pour brouiller encore plus les cartes. D’autant que Jean-Marc Ayrault est de plus en plus handicapé. Sur Arcelor, comme sur l’affaire de l’aéroport de Nantes, il n’a pas réussi à reprendre la main.
Au niveau des entreprises, François Hollande a cédé à l’invitation pressante  de l'Afep de venir s’expliquer. L’Afep, l’association française des entreprises privées, est le cœur du réacteur patronal. Créée en 1982 par Amboise Roux au lendemain de l’élection de François Mitterrand, l’Afep est une association discrète des patrons des plus grandes entreprises françaises. Elle est devenue l’association la plus influente à Paris comme à Bruxelles pour peser sur les décisions politiques.
Les diners ne sont pas publics. François Hollande va donc rencontrer à huis clos  les membres de l’Afep mardi soir et de l’avis de tous ça risque d’être sportif. Pierre Pringuet, le PDG de Pernod Ricard qui a succédé à Maurice Levy pour animer cette société secrète, a été mandaté pour prévenir François Hollande de l’urgence de la situation. Tout va donc y passer, la fiscalité, le droit du travail, les déficits budgétaires, et surtout le climat d’hostilité permanente à l’encontre des chefs d’entreprise.
Les hasards de l’agenda ne permettront pas au président de terminer la semaine en toute quiétude. Jeudi, la visite officielle en Algérie, provoque et énerve. C’est une promesse faite pendant la campagne électorale mais le voyage indispose les autres pays du Maghreb qui ont beaucoup de mal à contenir la montée du radicalisme religieux. La Tunisie, la Libye, et le Maroc où François Hollande a envoyé Jean-Marc Ayrault pour rassurer les libéraux marocains. En vain.

Petit rappel des chiffres de l'immigration à l'usage des naïfs, des ignorants et des idéologues

Philippe Manière, ancien directeur général de l’Institut Montaigne, a déclaré lors d'un débat télévisé que notre "petit flux d’immigration est non significatif", parlant de "flux migratoire extrêmement ténu, le plus ténu des pays de l’OCDE".
Lors d’un débat télévisé consacré à l’immigration, sur France 3 le 5 décembre 2012 , certains propos étaient tout simplement hallucinants. M.Philippe Manière, ancien directeur général de l’Institut Montaigne, l’une des personnalités influentes de l’intelligentzia française déclarait ainsi : "le petit flux d’immigration qu’on a est non significatif ", parlant de "flux migratoire extrêmement ténu, le plus ténu des pays de l’OCDE", enfin décrivant la France comme "un pays incroyablement fermé".
Les faits parlent pourtant d’eux-mêmes : notre pays délivre environ 200 000 "premiers titres de séjour" à des nouveaux migrants chaque année. Il est, de plus, le second au monde, après les Etats-Unis par le nombre de demandeurs d’asile qu’il accueille : 40 à 50 000 annuellement. Ces arrivées se produisent dans un contexte où il n’y a pas de travail disponible, avec plus de trois millions de chômeurs, dont un quart des jeunes. Le flux migratoire, en provenance de pays non-européens, de culture, de mode de vie, et de traditions profondément différentes des nôtres, nourrit ainsi la pauvreté, l’exclusion, le repli identitaire, la révolte.
Il représente dans ces conditions, en particulier dans les quartiers populaires, un facteur de déstabilisation profonde et de désintégration de la société aux conséquences dramatiques pour tout le monde, y compris les migrants eux-mêmes. La situation de certains collèges sinistrés de banlieue dont 80% des élèves sont issus de l’immigration est  un révélateur flagrant de l’impact des flux migatoires. Moi, je pense qu’il est infâme d’exploiter le thème de l’immigration à des fins électoralistes par des propos haineux et mensongers. Mais il est tout aussi odieux de nier l’évidence, les faits, la réalité, en se drapant dans une réputation d’intellectuel et de notable. On aimerait comprendre ce qu’a voulu dire M. Manière. Si vraiment, il n’est pas au courant de ce qui se passe dans le pays, c’est franchement préoccupant, compte tenu de ses références et de son niveau, cette ignorance exprimant le fossé entre les élites protégées et la réalité quotidienne des Français. S’il nie les faits en toute connaissance de cause, c’est encore plus grave: on est alors dans l’idéologie sinon la propagande.

Bruno Le Maire, la France et l’Allemagne

 ”Le mépris typiquement français pour les petits pays et leurs drames. Mais si ! Mais si, je le vois bien ! Vous ne devriez pas. Votre grande histoire ne vous donne aucun droit sur nous. Elle a été autant abîmée que la nôtre, votre grande histoire, seulement vous ne voulez pas le reconnaître, non ? Je me trompe ? Vous avez cru que votre histoire vous donnait des droits sur les autres, sur les petits, sur les vaincus. Vous faites une erreur. Vous faites une erreur grossière depuis des années. Les petits pays vous voient rapetisser à votre tour, certains, pour tout dire, avec une certaine jubilation. Et le grand pays vaincu ne vous reconnaît plus aucun droit sur lui. Vingt ans et quelques mois à Stuttgart. Je connais suffisamment les Allemands pour vous dire que leur conscience politique, si vous me permettez ce mot, ne vous accorde plus le moindre droit sur eux. Ils ne veulent plus que vous vous mêliez de leurs affaires, point final. Vous dites l’Europe ? Quelle Europe ? Votre Europe est une excuse pour conserver votre part du gâteau. Plus personne ne se laissera prendre à votre truc. Y compris les Allemands. Comprenez une fois pour toutes que les Allemands sont à la fois puissants et provinciaux, provinciaux et puissants. Quand cela les arrange, ils se replient sur eux et impossible de leur faire prendre la mesure de leurs responsabilités. Le lendemain, ils prennent deux ou trois décisions économiques qui écrasent leurs voisins. En toute bonne conscience. Et vous qui réclamez de leur part un sens universel ! Une vision du monde ! Vous êtes prisonniers de votre histoire et vous ne la connaissez pas. Autant que vous êtes aveugles à l’histoire des autres.”
 Bruno Le Maire, Musique absolue, Une répétition avec Carlos Kleiber, Gallimard, NRF, L’infini 2012

Sortie de crise progressive

 Sortie de crise progressive
 
Le pas peut sembler modeste.L’enjeu, la supervision bancaire,trop technique. Et pourtant. L’accord intervenu, à vingt-sept, dans la nuit de mercredi à jeudi, représente une étape importante pour la sortie de crise.

Politiquement, les dirigeants européens affichent, par-delà les nécessaires compromis, leur volonté de renforcer l’intégration européenne. Certes, le superviseur européen n’aura pas le droit de regard direct et immédiat sur l’ensemble des quelque 6 000 banques de l’Union, comme beaucoup le souhaitaient. Seuls les grands instituts seront dans le collimateur des contrôleurs. Angela Merkel a ainsi obtenu une sorte de bouclier pour ses petites et moyennes caisses d’épargne. Mais le principe est acquis. La Banque centrale européenne pourra exercer un droit de regard dont elle ne disposait pas jusqu’ici.

Quand on observe, en reparcourant les douze derniers mois, combien la BCE, sous la férule de Mario Draghi, a su se dissocier de l’orthodoxie que prêchait la Bundesbank en matière de dette souveraine, le pas en avant n’est pas si modeste. Ce sont bien les (premières) fondations d’une Union bancaire qui viennent d’être décidées.

En outre, si l’Allemagne a obtenu ce qu’elle voulait, cet accord sur les banques devrait aussi permettre plus de souplesse de la part de Berlin. Car la centralisation de la supervision, même si elle est tempérée par le maintien de superviseurs nationaux dont les prérogatives resteront amples, devrait permettre au Mécanisme européen de solidarité de venir en aide à des banques en difficultés sans nécessairement déclencher une spirale spéculative sur la dette souveraine de l’État concerné. Et donc, sur ses contribuables.

Le feu vert donné hier au refinancement de la Grèce, après des mois de tergiversations, va dans le même sens. L’année 2012 semble s’achever sur un double message qui n’avait rien d’évident en janvier. L’Europe résiste. Son processus de construction repart.

Un autre message est arrivé, hier, des négociations sur l’Union bancaire : la volonté de ne pas creuser le fossé entre les dix-sept membres de la zone euro et les dix autres membres de l’UE. Surtout, de ne pas laisser la dérive centrifuge de la politique britannique prendre un tour irrémédiable.

Ainsi, le pire semblerait derrière nous en ce qui concerne la crise de la zone euro. Difficile, pourtant, de brandir aux opinions publiques un sourire béat. Si des progrès sont accomplis sur les leviers permettant de sortir du tunnel, la crise, la vraie, celle qui rime avec chômage, licenciements, blocage des salaires, austérité, cette crise, elle, mord toujours. Plus que jamais, sans doute, en ce début d’hiver.

Les élites doivent donc prendre garde à ce déphasage entre leur action et la réalité vécue. Sans vision, sans projet, l’austérité est redoutable et potentiellement explosive. Certains citoyens se considèrent plus légitimes que d’autres. Certains Européens plus vertueux que d’autres. Chacun lorgne dans le portefeuille du voisin. Tous revendiquent leur indignation, voire leur colère.

Hier, Angela Merkel a, à juste titre, affirmé que l’Europe ne pouvait reposer sur les seuls services. Qu’il fallait une production industrielle.

Se réjouir ou envier la santé des entreprises allemandes ne suffit plus. Il faut prendre la chancelière au mot et lui proposer de grands projets industriels. Européens. Pour donner un sens politique et économique à cette union bancaire si éloignée des citoyens.