TOUT EST DIT

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dimanche 2 décembre 2012

Messieurs les Anglais, ne vous tirez pas les premiers !

Messieurs les Anglais, ne vous tirez pas les premiers ! 

 
Oui, les Britanniques sont pénibles. Ils roulent à gauche. Ils ont coulé une partie de la flotte française pendant la guerre. Leur penchant libre-échangiste malmène le Colbert qui sommeille en chaque Français. Et leur propension à donner des leçons à la terre entière irrite. Surtout en France, où la leçon universelle est une spécialité cultivée avec soin, qui ne souffre pas la concurrence.
Et voici qu'ils deviennent europhobes. Selon un sondage, 56 % des Britanniques voudraient quitter l'Union européenne si un référendum était organisé sur le sujet. Avec un tel climat qui pèse sur sa majorité politique, le Premier ministre britannique, David Cameron, se montre intraitable et a fait capoter un sommet européen, la semaine dernière, sur le budget de l'Union : il voulait des coupes dans les dépenses. Coupes que ses partenaires n'ont pas acceptées.
Eh bien, qu'ils s'en aillent, entend-on désormais à Bruxelles et à Paris. L'Europe sans les Britanniques n'en fonctionnerait que mieux. Ne se sont-ils pas exemptés de la discipline commune en exigeant un opting out pour l'euro, pour les accords de Schengen, pour le traité de stabilité signé au début de l'année ? Dès qu'un nouvel accord européen est signé, c'est la guerre de Cent Ans pour négocier avec l'Angleterre. Quel que soit le sujet, elle veut rester une île et ralentit le rythme de l'intégration.
 
À l'époque de Margaret Thatcher, la construction européenne était un "accord d'arrière-pensée", selon les mots mêmes de la Dame de fer, une sorte d'auberge espagnole politique où chacun apportait ce qu'il voulait manger. Libre-échange pour les uns, intégration pour les autres. Cette ambiguïté a volé en éclats avec la crise, qui exige un saut que les Britanniques ne peuvent et ne veulent pas faire, nous disent les zélateurs du fédéralisme européen. Tirons-en les conséquences. Dehors, Albion !
Étrange procès. L'Europe n'est-elle pas justement l'expérience de la différence, le patient travail de polissage des cultures qui a permis de dépasser le nationalisme et ses travers ? Qu'y aurait-il de plus ennuyeux qu'une Europe d'entre soi, de plus barbant qu'un congrès de sociaux-démocrates continentaux ? Et de plus coûteux, avec des hommes politiques français toujours prompts à lever l'impôt et à créer des postes de fonctionnaires ? Si les Britanniques n'étaient pas entrés en Europe en 1973, la bureaucratie aurait prospéré sans contre-pouvoir. Nous paierions déjà d'innombrables impôts européens au titre d'une prétendue solidarité qui n'est pas autre chose que le manteau de la paresse politique.
La querelle budgétaire illustre bien la plus-value britannique. Est-il normal que le budget européen continue à progresser, alors que les États cherchent partout des économies en ces temps de disette ? Est-il tolérable que l'argent public file sans contrôle à Bruxelles, alors que la Cour des comptes européenne a refusé de certifier le budget pour la dix-huitième année consécutive à cause de manquements dans l'exécution ? Alors que les exemples d'aberrations relevés par le comité d'experts Open Europe se multiplient : une maison close baptisée 7e Ciel qui touche une subvention de 54 000 euros, un Danois qui reçoit 100 000 euros pour construire une piste de ski sur une île plate où il ne neige qu'une fois par an, 411 000 euros attribués à un centre de remise en forme pour les chiens en Hongrie... Réjouissons-nous qu'il y ait encore des hommes politiques pour poser ces questions ingrates, qui n'intéressent pas la classe dirigeante française, tout à sa religion de la redistribution.
De façon plus fondamentale encore, une Europe sans la City de Londres ne serait plus qu'une puissance financière de second rang. Une Europe amputée de l'armée britannique serait moins crédible et écoutée qu'elle ne l'est aujourd'hui. Pour Paris, Londres est un partenaire militaire autrement plus puissant que Berlin. C'est, en Europe, le seul pays qui possède une industrie d'armement de premier plan, avec lequel la France peut mutualiser certains programmes. Ex-puissance mondiale et ex-empire, le Royaume-Uni est aussi l'un des rares pays qui restent, comme la France, attachés à une forme de souveraineté nationale. Sans cette grande île exotique qui a le nez planté dans l'Atlantique, la France serait plus seule en Europe.

Sarkozy, sabre de bois !

Tandis que d'aucuns rêvent de la mort du bipartisme, Nicolas Sarkozy s'agite. Mais que peut vraiment l'ancien président ? s'interroge Jacques-Alain Miller.

Retour à la IVe République

Nous évoquions la fin du cycle chiraco-sarkozyen qui domine à droite depuis 38 ans. Mme Françoise Fressoz, éditorialiste au Monde, va plus loin. Elle annonce carrément "la fin du bipartisme". En clair, le décès de la Ve République, telle que nous la connaissons. On imagine. L'éclatement de l'UMP. Le rejet des extrêmes (Front de gauche, FN, UMP-Copé) à la périphérie du système. L'apparition d'un vaste marais médian, allant de Fillon à Hollande, en passant par Bayrou et Borloo. Ce serait en somme une "troisième force", comme on l'a connue sous la IVe République. Il est amusant de relever que son grand homme fut Henri Queuille, dit "le père Queuille". Si le centre de la France est en Gironde, comme Sollers le soutenait ici même, que dire de cette Corrèze d'où nous vient, après Queuille et Chirac, François Hollande ?
 

Passions françaises

Cependant, le cercle qui mène le jeu sur le plan économique n'est pas libre, sur le plan parlementaire, de s'accomplir comme une "troisième force" qui serait l'alliance formelle des partis de gouvernement. Ce qui y fait obstacle, ce sont ces passions françaises dont Theodore Zeldin se fit l'historien. Sur les questions dites régaliennes et sociétales, vives sont nos querelles. Aux États-Unis, on les appelle culture wars, et elles ont joué leur rôle dans les résultats de la dernière élection présidentielle. Les guerres idéologiques ont toujours eu en France une belle vigueur. Elles en ont encore trop pour penser que le temps d'un "bas-les-masques !" général est arrivé. Le spectacle continue. Boum ! Boum !

"Moins de lumière !"

Mais il est vraisemblable que, rue du Faubourg-Saint-Honoré, on rêve, on spécule sur l'émergence, au centre de l'échiquier, d'une troisième force qui serait une mare aux crocodiles sacrés, bien boueuse, telle qu'une chatte, si l'on peut dire, n'y retrouverait pas ses petits. L'éloge de la transparence est aujourd'hui une figure imposée. Pourtant, il y a des opportunités qui n'émergent que de situations peu claires. Et, merveille ! Il y a justement à l'Élysée un spécialiste de la conduite par temps de brouillard. Quand le soleil brille, il reste au garage ; c'est un as quand plus personne n'y voit goutte. La tradition veut que les derniers mots de Goethe aient été "Mehr Licht !", "Plus de lumière !" Tout indique que les souhaits de François Hollande vont à l'opposé. "Baisse un peu l'abat-jour, veux-tu ? Nous serons mieux", comme dit Paul Géraldy. Il a maîtrisé l'art d'avancer ses affaires à couvert de la confusion et de l'indécision. De plus, a-t-il confessé, il croit à sa bonne étoile. Comment lui donner tort quand la paralysie de l'UMP, la perspective de sa division et, dans tous les cas, son état présent de "foutoir" font faire un pas de géant à l'action qu'il médite ?

Le prisonnier du Palais-Royal

L'évidence qu'à l'UMP on travaille, on se tue au travail pour François Hollande, a tiré Nicolas Sarkozy du royaume des limbes. Guillotiné le mercredi, il est ressuscité le vendredi. Mais il peut peu. On rapporte de lui des interventions, des colères. Il serait "atterré". On le soupçonne de soutenir Copé en sous-main. Il voudrait surtout que Fillon laisse tomber sa proie. A-t-il confiance en ce que Copé lui rendra les clefs de la maison ? Pour frayer les voies de sa médiation, il a commencé par traiter l'un de forcené, l'autre de minable. Et lui-même ? Il est illisible. Voilà le seul sage dont dispose l'UMP. Il l'a laissée incertaine sur son intention de revenir. Aucune évidence chez lui d'un désir décidé. Il a cru pouvoir mettre le parti en mode pause, le temps d'aviser, le temps de se faire un peu d'argent. Mais la politique, comme la nature, a horreur du vide. Comme si cet imbroglio n'était pas suffisant, il est allé se fourrer dans la cage dorée du Conseil constitutionnel. Ce faisant, il s'est mis à la fois un fil à la patte et sur la bouche un bâillon. C'est le gag. Du coup, il ne parle plus que par messagers interposés. Ceux-ci sont souvent anonymes : "une source", "un proche", "l'entourage". Les propos rapportés sont controuvés, ou équivoques, ou contradictoires, en tous les cas sujets à caution. L'idée est peut-être de traiter le mal par le mal, le foutoir par le foutoir ? Risqué. Vous pouvez parfaitement continuer de bénéficier in absentia de la fidélité de vos suivants - voir Nelson Mandela ou encore le général Perón -, encore faut-il qu'ils soient assurés de votre désir d'être auprès d'eux. Dans ces conditions, quel crédit accorder à la menace de disqualifier publiquement et simultanément Pincemi et Pincemoi ? Comme disait le maréchal Staline, qui ne croyait pas aux forces de l'esprit : "Sarkozy, combien de divisions ?"

Aujourd'hui

L'enjeu n'est nullement de savoir, comme le répètent les médias, si Copé et Fillon, l'un ou l'autre ou les deux, céderont avant mardi aux objurgations de Sarkozy. La seule question qui vaille est celle-ci : "Copé le gourdin" trouvera-t-il ou non, grâce à Sarkozy et au choeur des lamentations à l'UMP, la feinte pour faire sauter son arme des mains de Fillon ? On saura alors si ce n'était qu'un fleuret moucheté, une épée en carton-pâte. Le père Queuille avait cette phrase, qui fut reprise et popularisée par Jacques Chirac et Charles Pasqua : "Les promesses n'engagent que ceux qui les écoutent." [Autre version : "qui les croient".] Le sage corrézien s'y connaissait en matière d'intersubjectivité logico-linguistique.
C'est la Saint-Nicolas, c'est la fête à Nancy ! Copé sera là. À 18 h 15, il parlera. Restons connectés...

Les mariés de l'an douze

Les mariés de l'an douze 

 
L'empereur romain Caligula, premier adepte du mariage pour tous : il avait épousé son cheval. Pourquoi s'en tenir, en effet, aux épousailles entre gens du même genre ? J'ai quelques idées pour de futures unions à célébrer dans les mairies :
- Entre un homme et un livre. J'épouserais volontiers les deux plus beaux romans français du XXe siècle : Les communistes d'Aragon et Belle du Seigneur d'Albert Cohen. En grande pompe, c'est-à-dire sur beau papier.
- Entre une femme et un animal. Beaucoup de femmes préfèrent leur chien ou leur chat à leur mari : je ne saurais trop leur conseiller de divorcer de leur conjoint et de se présenter devant le maire afin d'officialiser leur union avec un animal de compagnie.
- Entre un vivant et une actrice morte. Je suis certain que beaucoup de mes amis cinéphiles n'auraient rien contre un mariage avec Françoise Dorléac, trop tôt disparue. Je m'engagerais volontiers avec Pascale Ogier, Catherine Jourdan, voire Dominique Laffin. Ou même Pauline Lafont.
 
- Entre deux frères. Y a-t-il une meilleure entente que celle de deux frères, quand ils s'entendent ? Il n 'y a qu'à voir les merveilles que cela donne au cinéma : les frères Coen, Dardenne, Wachowski.
- Entre deux soeurs. Ma femme préfère partir en vacances avec sa soeur plutôt qu'avec moi, et je la comprends : c'est plus simple de ne pas se fâcher avec quelqu'un de son propre sexe et de son propre sang qu'avec un énergumène dans mon genre.
- Entre un homme et une ville. La passion pour une ville nous anime parfois pendant toute notre vie. Woody Allen épouserait volontiers Paris. Éric Neuhoff passerait avec joie la bague au doigt à New York. Entre Belgrade, Brazzaville et Bangkok, qui choisirais-je pour épouse ? Belgrade, que je m'empresserais de tromper avec les deux autres.
- Entre une femme et un gâteau. Elle épouserait une religieuse si elle était gay et un Bavarois si elle était straight.
- Entre un homme et un alcool. On fêterait à la slivovitsa mes noces avec la slivovitsa. Je me demande si Michel Déon épouserait une vodka russe, polonaise ou suédoise. Frédéric Berthet, aujourd'hui décédé, se marierait illico avec Johnnie Walker. Qu'est-ce qui pourrait bien empêcher un mort d'épouser un homme qui serait une marque de whisky ? La tolérance ne doit pas rester qu'un mot.
- Entre une mère et son fils. On sait, depuis Freud et Proust, que c'est le couple parfait, n'était le petit problème de la différence d'âge. Il est temps que le législateur autorise cette union qui n'a que trop souffert, depuis des siècles, de la clandestinité dans laquelle on l'a obligée à se terrer.
- Entre un père et sa fille. Le couple de rêve. Dans ce sens-là, la différence d'âge est moins gênante. Le père est l'idéal masculin de la fille et vice versa : il est temps que la loi française prenne en compte cette évidence.

Retour au débat d’idées

Retour au débat d’idées


Personnellement, il m’indiffère que le président de l’UMP s’appelle Fillon ou Copé. Je pense du fond du coeur, après ce que nous venons de voir, qu’aucun des deux n’est l’homme providentiel que la France attend en 2017. L’opposition, si elle souhaite l’emporter dans 4 ans et demi, ce qui est loin d’être gagné, doit surmonter ses querelles d’ego et en revenir à l’essentiel: le débat d’idées. C’est ce que disait en permanence le président Sarkozy. Car les grands débats de société des dernières années, sur la sécurité, l’immigration, l’Europe, l’Afrique, la modernisation de l’économie, etc. c’est lui qui les a toujours lancés volontairement. On pouvait être d’accord ou pas, on pouvait  l’accuser de diviser, de  polémiquer… Au moins, on parlait du fond. Depuis son départ, un vide impressionnant à gagné la sphère  des idées. Aujourd’hui, plus personne ne parle plus de rien, en dehors des petites phrases et des querelles de personnes débiles. L’opposition a un boulevard devant elle. Sur l’Europe, comment concilier l’indépendance nationale et la solidarité entre des Etats souverains? C’est un immense sujet laissé en jachère et abandonné au grignotage bureaucratique quotidien de Bruxelles (voir mon précédent billet). Sur l’immigration, comment gérer, canaliser la pression migratoire colossale des pays du Sud tout en préservant la cohésion sociale et l’unité nationale? Sur la sécurité, quelle mesures drastiques faut-il prendre pour combattre le chaos qui ne cesse de se répandre? Comment réindustrialiser le pays pour assurer un emploi à nos enfants? Aura-t-elle l’intelligence de s’en saisir ? 
Tout ce que nous attendons d’une opposition responsable est qu’elle rouvre ces grands chantiers de réflexion et de décision.  
Sinon, nous le ferons sans elle…

Najat Vallaud-Belkacem : Liberté, Égalité, Sororité

Pour l'égalité des sexes, le gouvernement souhaite "agir sur les mentalités". Une revue des moyens de Najat Vallaud-Belkacem.
Quand la société ne répond pas aux objectifs des collectivistes, ils cherchent à "agir sur les mentalités" avec des moyens pourtant très matériels - et, accessoirement, liberticides.
Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, souhaite que les mentalités changent pour qu'hommes et femmes soient, enfin, égaux. Elle détaille l'arsenal de mesures prises pour favoriser cette égalité : gouvernance, éducation, sanctions. Le grand bond en avant du féminisme, c'est maintenant.
Une fois la petite leçon d'esquive donnée en transformant un jugement des Français sur la lenteur de l'action gouvernementale en jugement sur le niveau de leurs attentes, la ministre nous explique que "Tous les projets de loi font l'objet d'une étude d'impact sur l'égalité entre les sexes" - oui, tous les projets de lois, qu'ils concernent l'automobile, l'énergie, la grande consommation ou le travail. D'ailleurs, chaque ministère dispose désormais d'un "haut fonctionnaire à l'égalité", et "Les ministres eux-mêmes ont participé à des séminaires de sensibilisation".

On découvre également des féministes de tous sexes au gouvernement :
Certains ministres sont des féministes convaincus, comme Michel Sapin ou Aurélie Filipetti. Vincent Peillon s'est révélé un très bon partenaire. Il sait que la question de l'égalité entre filles et garçons est centrale dans la réussite scolaire. Le fait que les garçons décrochent en lecture au collège explique en partie la chute de la France dans le classement PISA de l'OCDE.
La chute de la France dans le classement PISA ne s'explique bien sûr pas par un système scolaire qui touche le fond et que l'on veut pousser à creuser encore ; Vincent Peillon est décidément un très bon partenaire, qui fait primer l'égalité entre les sexes sur l'éducation. Ce qu'il faut également comprendre, c'est que l'égalité entre les sexes doit être imposée, parce que laisser les gens décider n'est pas une bonne chose (ils pourraient exprimer autre chose que ce que la ministre souhaite) :
En matière d'égalité professionnelle, nous travaillons à l'émancipation des femmes, mais aussi à ce que les hommes puissent mieux concilier leur vie professionnelle et personnelle. Ils le demandent.
On ira donc sans doute alourdir un peu le code du travail, pour l'agrémenter de moyen d'émanciper les femmes et de permettre aux hommes d'avoir un vie plus équilibrée, qu'ils le veuillent ou non. La faute au sexisme, qui est partout et qu'on porte en soi dès l'enfance :
Tous les pays ont un fond de sexisme. Dès le plus jeune âge, on enferme les sexes dans des rôles préétablis. Ces représentations ont justifié pendant des années qu'on n'accorde pas le droit de vote aux femmes. Aujourd'hui, on continue à réduire le champ des possibles pour les filles. Elles réussissent mieux à l'école que les garçons : pourtant la moitié des femmes actives est concentrée dans 12 familles professionnelles sur 87.
On réduit le champ des possibles pour les filles : avec leurs meilleurs résultats scolaires, elles choisissent les filières qu'elles veulent et apparemment, leurs aspirations sont concentrées sur quelques métiers : horreur ! On enferme les filles dans des rôles préétablis en les forçant à choisir à peu près librement ce qu'elles veulent !
Nous avons connu par le passé deux générations de droits des femmes. Après la seconde guerre mondiale, les discriminations ont été retirées des lois. Dans les années 1970, des droits spécifiques leur ont été accordés, comme la contraception et l'IVG. Nous sommes maintenant à une troisième étape. Pour obtenir l'égalité, il faut agir sur les mentalités.
Étape 1 : fin des discriminations. Étape 2 : reconnaissance de droits spécifiques, liés aux spécificités du beau sexe. L'étape 3, c'est donc de supprimer toute différence entre hommes et femmes dans les faits alors que ces différences ne résultant plus que des comportements et choix individuels. Comment s'y prendre ?
En premier lieu à l'école. Un module de formation à l'égalité et à la déconstruction des stéréotypes sera obligatoire dans les futures écoles supérieures du professorat, et dans la formation des autres personnels de l'éducation. Les enseignants pensent de bonne foi qu'ils se comportent de la même façon avec les deux sexes, mais toutes les études montrent qu'ils créent plus d'interactions avec les garçons, développant chez eux davantage que chez les filles des qualités précieuses dans le monde du travail. Pour les élèves, un apprentissage de l'égalité sera mis en place de la fin de la maternelle à la fin du primaire. Il sera expérimenté dans cinq académies en 2013, puis généralisé en 2014. Enfin, l'éducation à la sexualité deviendra effective : il ne s'agit pas de parler de pratiques, mais d'apprendre l'égale dignité et le respect entre les sexes.
Toues les études montrent que les enseignants interagissent plus avec les garçons et que les filles sont ainsi pénalisées dans le monde du travail, où elles auront sans doute, par désespoir, renoncé à lever la main pour solliciter l'attention de leur supérieur... Il faut donc apprendre aux enseignants à déconstruire les stéréotypes et soumettre aux élèves un apprentissage de l'égalité - et surtout, de la sexualité, pour leur apprendre la dignité et le respect. Mais le pire outrage fait aux femmes, c'est, bien entendu, le recours à la prostitution, c'est-à-dire leur laisser jouir librement de la propriété de leur corps :
Mon propos est abolitionniste. En résumé, la prostitution est une violence faite aux femmes et il faut la faire reculer. Évidemment, elle ne va pas disparaître totalement. [...] Je réaffirme que l'achat de services sexuels systématisé est incompatible avec l'égalité entre les sexes.
Dernier cheval (ou dernière jument, dans un souci de parité) de bataille, les salaires :
Un nouveau décret paraîtra dans les prochains jours afin de faire enfin appliquer la loi. Nous passons d'un contrôle aléatoire des inspecteurs du travail sur place à un contrôle systématique sur pièce. Les entreprises devront envoyer aux directions régionales du travail leur plan pour l'égalité, qui seront examinés systématiquement. Si elles ne se mettent pas en conformité, elles paieront les pénalités, jusqu'à 1% de la masse salariale.
Oui, oui, un plan pour l'égalité, examiné systématiquement à la kommandantur régionale du travail, permettra enfin d'atteindre enfin une égalité des salaires - dont deux tiers s'expliquent "par des différences dans les carrières", mais passons. Ce qui est bien avec Najat Vallaud-Belkacem, c'est qu'à la différence d'autres ministres qui tentent de dissimuler ce qu'il y a de nauséabond dans leurs actions, elle ne dissimule pas ses convictions constructivistes :
Les politiques publiques sont là pour construire un projet de société.
Construire un projet de société, c'est-à-dire imposer une vision de la société, c'est le rôle qu'elle s'est fixé. Espérons que, très rapidement, les filles choisiront de devenir maçon plutôt que coiffeuse, que les enfants auront des relations sexuelles empreintes de dignité et de respect mutuel, qu'hommes et femmes seront payés de la même façon au centime près (quelles que soient leur productivité, leurs contraintes et leurs aspirations personnelles), que femmes et hommes s'émanciperont et que tous les ministres et projets de loi soient féminismo-compatibles ; sinon, de nombreuses lois, comités, agences veilleront toujours plus ardemment sur notre égalité, au prix de notre liberté.