TOUT EST DIT

TOUT EST DIT
ǝʇêʇ ɐן ɹns ǝɥɔɹɐɯ ǝɔuɐɹɟ ɐן ʇuǝɯɯoɔ ùO

dimanche 11 novembre 2012

Amnésie nationale

Amnésie nationale 

Cravate de travers comme tout le reste......
11 novembre. On fait des courses ? On mange l’oie de la Saint-Martin, ou on finit d’enlever les feuilles mortes ? L’anniversaire de l’armistice de 1918 s’est à ce point banalisé que les drapeaux qui s’inclinent devant le monument aux morts ne signifient rien pour la plupart des Français.
Il y a bien longtemps que les notes du clairon qui sonna l’arrêt des combats se sont perdues dans le vent de l’histoire. Verdun 1916 ou Marignan 1515 se confondent dans les pages jaunies de notre mémoire collective. Une mémoire bien mal en point, à en juger par les sondages qui témoignent d’une méconnaissance grandissante de l’histoire commune, ciment d’une nation.
Pourtant, à en croire les discours officiels, le souvenir est une grande cause nationale. Tourisme mémoriel, lieux ou devoirs de mémoire : toute cette recherche de nos souvenirs perdus est prétexte à colloque. On croirait la France atteinte d’une forme désespérée amnésie nationale, à deux ans de la célébration du centenaire de la Première Guerre mondiale. Les savants multiplient, en vain, les ordonnances : les méninges de Marianne sont en charpie.
Cent ans, c’est si loin, à l’heure de la quête désespérée de la jeunesse éternelle. Les combattants du Vieil-Armand ou du Chemin des Dames ont perdu la leur pour gagner l’éternité des monuments de granit. Ils avaient 18 ou 20 ans quand ils sont tombés au champ d’honneur. Ils auraient aimé vivre. La folie qui a saisi l’Europe en a décidé autrement.
Peut-être aurait-il fallu, à côté des noms de ceux qui furent fauchés par centaines de milliers, ajouter leur âge. Frantz 20 ans, Jules 18 ans : ils avaient l’âge de ceux que leur sacrifice indiffère. Avant d’être alignés comme à la parade dans les cimetières militaires ou mêlés anonymement aux racines des forêts d’Argonne, ils ont aimé, cru qu’ils reviendraient dans leur village pour vieillir tranquillement. Le sort des armes en a décidé autrement.
Le 11 Novembre n’est pas un banal jour férié. C’est l’anniversaire d’une génération à qui on a volé sa jeunesse et qui mérite, au moins, une pensée.

Le temps perdu se rattrape-t-il ?

Le temps perdu se rattrape-t-il ? 


La FRANCE est une des premières puissances économiques mondiales. On veut tous croire qu'une nation comme la nôtre, avec sa vieille culture, ses nombreux savoir-faire, ses très grandes entreprises inscrites au CAC 40, ses non moins grandes écoles, son excellent système de santé, son haut niveau de prestations sociales, ses infrastructures de qualité, la jeunesse de sa population, ne peut que garder son rang.
Mais la mondialisation de l'économie et la crise née en 2008 rebattent les cartes. Éric Le Boucher, dans Les Échos de cette semaine, cite des études propres à remettre en cause nos belles convictions. Elles montrent que les pays du sud, qu'on accuse souvent de laxisme, avaient, avant l'euro, réduit leur déficit budgétaire mieux que les pays du nord.
Leur malheur actuel vient d'un déséquilibre commercial qui s'est creusé dans les premières années de la décennie 2000. Ils ne produisaient et n'exportaient pas assez. Ils étaient donc condamnés à réduire leurs dépenses, par manque de recettes. Depuis le début de la crise, l'Espagne, l'Italie et le Portugal ont commencé de remonter la pente. Ils ont abaissé leurs coûts de production et redressé leurs exportations.
La France, elle, continue de creuser son déficit de la balance commerciale. Nous perdons régulièrement des parts de marché dans le commerce mondial. Pour compenser ce manque à gagner et pour éviter que les revenus ne baissent, les prestations sociales ont pris le relais. Elles ont augmenté, réduisant encore notre capacité de résistance à la concurrence.
Le candidat qui avait promis le changement a placé le président dans une situation très inconfortable. Il est contraint de ramener le déficit budgétaire à 3  % du PIB pour éviter de devoir recourir à l'emprunt à des taux prohibitifs.
Ce président de gauche est condamné à tailler dans les dépenses publiques, à mécontenter les fonctionnaires, à se fâcher avec son camp. Il est amené à augmenter les impôts, en ciblant en priorité les plus riches, certes, mais sans pouvoir épargner totalement les classes moyennes.
Mais le pire est encore à venir. Ces efforts risquent d'être insuffisants. Le budget 2013 a été bâti sur une prévision de croissance de 0,8 % en 2013. Si elle est en deçà, a fortiori si la croissance se transforme en récession, les recettes fiscales seront insuffisantes, et les coupes dans le budget aussi.
Nous paierions ainsi le retard pris par notre pays depuis le début des années 2000 dans la bataille, vitale, de la compétitivité de notre économie. Seule, la qualité de notre production, notre capacité à vendre à l'étranger nous permettront de maintenir notre train de vie et de réduire ce scandale français d'un chômage haut, ancien et constant.

Xi et Barack, le choc des titans

C’est sous une pluie de confettis que le nouveau « patron » des États-Unis a été salué. C’est en manches de chemise et en écrasant une larme qu’il a remercié son équipe de campagne. C’est dans un bunker aux allures staliniennes et protégé par la troupe que celui de la Chine a été intronisé. Les deux principaux « monstres froids » de la planète ont trouvé un chef la même semaine.

En mars prochain, quand il aura pris ses fonctions, Xi Jinping sera le nouvel interlocuteur de Barack Obama. Ils se trouvent l’un et l’autre à la tête des deux puissances qui dominent le monde et le domineront tout au long du siècle. Les États-Unis sont encore la première puissance mondiale. Malgré leur dette monstrueuse, malgré la crise des subprimes, malgré leur désindustrialisation, malgré une montée du chômage et de la pauvreté, ils conservent le leadership économique mondial.
Depuis vingt ans, l’administration américaine, les entreprises, les universités travaillent sur une solution à leur dépendance énergétique. Et ils l’ont trouvée. L’exploitation du gaz de schiste est en plein développement. Les experts prévoient que les États-Unis n’importeront plus de pétrole du Moyen-Orient en 2020. Cette région du monde ne sera plus leur problème, mais celui des Européens. Les États-Unis regarderont, avec plus d’insistance encore, vers le Pacifique, là où se battent des records de croissance.
Leur partenaire principal, leur principal concurrent aussi, sera plus que jamais la Chine. Malgré le ralentissement actuel de sa croissance, malgré les difficultés sociales, environnementales, et énergétiques que posent les besoins colossaux de son immense population, la Chine ne sera rattrapée par personne. La deuxième puissance économique mondiale pourrait même devenir la première dans les toutes prochaines années.
Elle cherche et cherchera à imposer sa loi autour d’elle, pour sécuriser ses approvisionnements, maîtriser les voies maritimes, accéder aux matières premières, restaurer la propriété sur ce qu’elle dit être ses terres, et ses eaux. Et dans cette grande région du monde qu’elle considère comme la sienne, elle rencontrera forcément l’autre géant, la superpuissance américaine.
C’est une confrontation au sommet qui attend le monde, voire un choc de titans. Il n’est pas obligatoire d’ajouter de l’inquiétude au pessimisme ambiant, mais il est bon de prévoir les périls afin d’éviter leur montée. Deux journalistes spécialistes de relations internationales, Alain Frachon et Daniel Vernet, viennent de publier un livre éclairant sur un sujet qui fait peur.


« La Chine contre l’Amérique, le duel du siècle », d’Alain Frachon et Daniel Vernet, éditions Bernard Grasset

Une nouvelle guerre mémorielle

Une nouvelle guerre mémorielle


Le sujet sera-t-il abordé aujourd'hui à Rethondes par Jean-Marc Ayrault ? La création d'une mission interministérielle unique coiffant les commémorations des deux conflits mondiaux et la décision d'associer, en 2014, le centenaire du début de la guerre de 14-18 et le soixante-dixième anniversaire du débarquement de Normandie de 1944, a créé la polémique cet automne. La fronde est partie des rangs du PS, et notamment d'Yves Daudigny, président PS du conseil général de l'Aisne. Avec la crainte de voir la singularité de la Première Guerre mondiale amoindrie par ce que certains historiens n'hésitent pas à qualifier de « régression mémorielle ». Que les deux guerres mondiales aient un lien dans le « court XXe siècle » qu'évoquait le grand historien britannique Eric John Ernest Hobsbawm dans son Âge des extrêmes, c'est une évidence. Mais le centenaire du premier conflit mondial mérite, en soi, un traitement spécifique. Surtout si l'on entend mobiliser sur tout le territoire autour de cet événement. Et le sujet est particulièrement sensible en Picardie et dans les autres régions qui furent en première ligne. L'an passé, la volonté de Nicolas Sarkozy, le regard toujours tourné vers l'Amérique, de créer un jour unique du souvenir, le 11 novembre, avait déjà créé un certain remous et provoqué des critiques à gauche. À défaut d'être revenu depuis sur ce « Memorial Day » bancal à la française, le nouveau gouvernement pouvait, au moins, éviter de donner l'impression, de participer à accentuer encore la confusion. Et cela même si, dans la mémoire collective, on devrait continuer à distinguer le 8 Mai du 11 Novembre.

Ricardo, Keynes, la dette publique et la jeunesse

La connaissance de l’équivalence ricardienne est indispensable à la compréhension de ce qu’est une dette publique, de ce qu’est une relance économique, et des rapports politiques qu’entretiennent entre elles les générations.
Est-il possible d’être à la fois une des  principales sources théoriques du marxisme, le plus important penseur du libre-échange et en première ligne de la critique contemporaine du keynésianisme ?
En 1974, Robert Barro croit trouver une faille majeure dans la théorie keynésienne. Mais alors qu’il expose son argument, les bons lecteurs d’un auteur du XIXème, David Ricardo, réalisent que son argument fondamental se trouve dans un texte de 1820. Mais comme le raisonnement en question précède de 116 années la publication de la Théorie Générale de John Maynard Keynes en 1936, personne n’en avait rétrospectivement compris l’importance.

En 1820, David Ricardo s’interrogeait sur l’endettement du Royaume-Uni suite aux Guerres Napoléoniennes. Sa problématique : comment en étaler le remboursement ? Sa réponse : en principe, cela n’a aucune importance.
Ricardo a conscience que sa réponse surprenante est fausse et la nuance de nombreuses objections dérivant d’imperfections économiques. Cependant, sa réponse théorique, l’« équivalence ricardienne », est essentielle. En effet, si elle était vraie, la relance de l’économie par le déficit public, recommandation centrale de la Théorie Générale, serait juste impossible. Dès lors, le raisonnement de Ricardo explicite certaines imperfections économiques absolument nécessaires au keynésianisme.
La connaissance de l’équivalence ricardienne – principe économique totalement inconnu du public – est indispensable à la compréhension de ce qu’est une dette publique, de ce qu’est une relance économique, et des rapports politiques qu’entretiennent entre elles les générations.

Un exposé de l’équivalence ricardienne  

Le financement d’une dépense publique par un déficit est équivalent à une taxe immédiate.
L’argument théorique de David Ricardo repose sur le fait qu’un déficit présent est un impôt futur.
Si le gouvernement prélève l’impôt aujourd’hui, mais que le citoyen préfère payer demain, il lui suffit de réduire son épargne présente. Cette réduction de l’épargne lui permet de consommer aujourd’hui autant que s’il n’avait pas été taxé, et réduit son revenu de demain du montant qu’aurait été la taxe demain. Dans le cas inverse, le citoyen n’a qu’à augmenter son épargne aujourd’hui, et utiliser cette épargne pour payer l’impôt demain.
Le tableau suivant prend l’exemple d’une dépense publique de 10£ et d’un taux d’intérêt à 10%. En ajustant son épargne, le citoyen peut décider du moment où cette dépense affectera son pouvoir d’achat, immédiatement ou plus tard.
Par exemple, si le gouvernement veut différer les impôts (déficit public) mais pas le citoyen (cas en haut à droite), ce dernier augmentera son épargne de 10£, lui conférant demain un surplus de revenu de 11£ qui lui permettra de payer l’impôt différé. Ce dernier s’élèvera d’ailleurs désormais à 11£ vu que 1£ d’intérêts s’est ajoutée aux 10£ initiales.
On remarque que, quelle que soit la décision budgétaire du gouvernement, le citoyen peut, par le biais de l’ajustement de son épargne, répliquer le scénario qui lui plaît. Dans le cas en bas à gauche, le gouvernement choisit l’équilibre budgétaire, mais le citoyen préfère payer demain. Il réduit son épargne présente de 10£, ce qui implique qu’il aura 10+1£ de moins demain. Et ainsi, il retrouve le même profil de consommation que si le gouvernement avait opté pour le déficit public.
S’il comprend cela et qu’il a effectivement accès au marché de l’épargne (et si besoin de l’emprunt), alors il devrait être indifférent à la décision du gouvernement. Seule la manière dont il préfère répartir ses dépenses dans le temps devrait commander le niveau de sa consommation dans chaque période.

Pourquoi est-ce si important pour le keynésianisme ?

Le principe de la relance budgétaire keynésienne est de déplacer du pouvoir d’achat futur vers une situation présente dont la morosité économique est attribuée à une demande globale insuffisante. Ce faisant, elle prétend réduire l’épargne nette des ménages en leur mettant sur le dos une dette publique.
Or si le citoyen définit son épargne en fonction de ses projets de vie, d’après le raisonnement de la section précédente, le fait que la dépense publique soit financée par l’impôt immédiat ou le déficit ne change pas sa capacité à répartir sa consommation dans le temps comme il le souhaite. Il n’a donc aucune raison logique de se laisser forcer la main. On ne peut pas le forcer à consommer maintenant ce qu’il souhaitait consommer plus tard.
Ainsi, si l’État réduit l’épargne nette de l’individu en lui imposant une dette publique, il réagira en revenant au niveau qui lui semble optimal en augmentant son épargne privée. Ce qu’il peut faire sans affecter sa consommation grâce précisément à l’absence de l’impôt.
En d’autres termes, si les individus sont conscients des contraintes de la politique budgétaire et qu’ils ont pleinement accès au marché de l’épargne et du crédit, alors tout stimulus budgétaire pour relancer la consommation devrait provoquer une hausse équivalente de l’épargne privée. Et ainsi, l’effet de la relance serait inexistant.
J’explique dans la suite de ce billet pourquoi l’équivalence ricardienne n’est probablement jamais totale. Cela ne signifie pas que le keynésianisme fonctionne : la non totalité de l’équivalence est nécessaire au modèle keynésien, mais n’est pas suffisante !

Discussions sur les hypothèses

Les économistes keynésiens ne contestent pas ce que je viens de vous exposer. D’ailleurs ils ne le peuvent pas, c’est mathématique. Ce qu’ils contestent, c’est les hypothèses.
Pour eux, les individus ne comprennent pas que le déficit public est un impôt futur ou alors contestent l’accessibilité du marché du crédit. James Buchanan, un libéral penseur du « marché politique » a aussi souligné l’importance de l’hypothèse d’immortalité des individus dans le raisonnement de Ricardo.
Bref, comme l’avait déjà remarqué Ricardo en son temps, de nombreuses hypothèses semblent réduire la portée de l’équivalence. Dans les faits, les conclusions des études empiriques sur la question vont dans tous les sens, de l’absence totale de réaction de l’épargne privée au déficit public (pas d’équivalence ricardienne) jusqu’à une hausse très forte de l’épargne (forte équivalence ricardienne). Il faut dire qu’il n’y a pas que le déficit public qui explique le niveau de l’épargne, ce qui rend difficile l’isolement des effets dans les séries statistiques.
Analysons de plus près les trois hypothèses nécessaires (une des trois suffit) à l’efficacité de la relance keynésienne. Pour les deux premières, je cite Paul Krugman, un des plus fervents supporters des déficits actuels.
Incompréhension de la contrainte budgétaire de l’État
Paul Krugman :
[…] very few people have the knowledge or inclination to estimate the impact of current government budgets on their lifetime tax liability.
[…] très peu de gens ont la connaissance ou la volonté nécessaires pour évaluer l’impact des budgets publics actuels sur leurs feuilles d’impôts futures.
Cette hypothèse suppose que vous ne comprenez pas qu’un déficit présent signifie un impôt différé, ou en tout cas que vous peinez à le mesurer pleinement. Aussi, vous ne parviendrez pas à reproduire correctement les ajustements de votre épargne que j’expliquais plus haut. Donc, l’efficacité de la relance induit votre manipulation, elle vient de ce qu’en brouillant votre perception du futur, l’État vous conduit à agir différemment de ce qui vous aurait paru optimal si vous aviez pleinement compris votre situation. On vous cache votre dette (publique) pour que vous vous sentiez plus riche que vous ne l’êtes réellement. Vous conduisant donc à faire ce que vous estimeriez être des erreurs.
Deux questions philosophiques se posent. D’abord, le droit d’un gouvernement d’induire délibérément en erreur ses citoyens. Ensuite, la question de savoir si une politique qui se fonde sur l’incompréhension de la population est démocratique. Le peuple peut-il souhaiter quelque chose précisément parce qu’il ne le comprend pas ?
Puis, se pose la question des effets économiques. Il y a peut-être de bonnes raisons pour lesquelles vous auriez épargné si vous aviez compris les implications du déficit. Quels seront les effets pervers quand vous serez, plus tard, surpris par la hausse des impôts ?
Limitation de l’accès au crédit
Paul Krugman :
[…] many people are liquidity constrained.
[…] beaucoup de gens ont des contraintes de liquidité.
La deuxième hypothèse est que certaines personnes n’ont pas un accès total au marché de l’épargne. Ce que veut dire Krugman n’est pas qu’ils ne peuvent pas épargner, cela vous le pouvez toujours. Il évoque plutôt le fait que la banque n’accepte pas toujours de vous prêter de l’argent. C’est donc le crédit qui vous est restreint.
Autrement dit, si on vous taxe maintenant, et que votre épargne est nulle, vous consommerez l’ensemble de votre revenu après impôts, mais pas davantage car la banque refuse de vous financer. Aussi, si on diffère votre impôt, vous pourrez désormais consommer davantage que vous n’auriez pu précédemment. Dans votre cas, Krugman a raison de dire que l’équivalence ricardienne ne fonctionne pas.
Mais alors se pose une autre question : pourquoi la banque n’acceptait-elle pas de vous avancer de l’argent ? Il y a peut-être de bonnes raisons. D’ailleurs, on reproche souvent aux établissements de crédit de prêter à n’importe qui (la crise des subprimes est l’exemple brûlant). Que veut dire Krugman ? Que l’État, lui, peut s’amuser à avancer de l’argent à des gens à la solvabilité incertaine, là où la morale condamnerait les établissements privés qui le feraient ?
Les gens sont mortels
Le débat sur cette dernière hypothèse est peut-être le plus cynique. Pourquoi l’équivalence ricardienne a-t-elle effectivement besoin de supposer les contribuables immortels ? Simplement parce que si un citoyen s’attend à mourir entre le moment où la dépense publique a lieu et celui où elle sera remboursée, alors il ne paiera pas l’impôt différé. Le transfert de pouvoir d’achat du futur vers le présent est donc net du moindre coût pour lui. Il n’a donc aucune raison d’ajuster son épargne.
Robert Barro n’est pas un fou, et dans son modèle il n’avait pas considéré les individus immortels. Il avait formulé cette hypothèse sous la forme d’une « dynastie immortelle », qu’on pourrait reformuler plus simplement en altruisme intergénérationnel. Autrement dit, l’hypothèse ricardienne tient si les contribuables sont aussi sensibles à l’intérêt de leurs descendants qu’au leur. S’ils sont égoïstes, il n’y a plus d’équivalence ricardienne et les hommes politiques arrosent la génération des électeurs actuels du pouvoir d’achat des électeurs futurs.
James Buchanan, qui avait étudié le texte de Ricardo avant l’article de Barro, était pour cette raison devenu un avocat d’une interdiction constitutionnelle des déficits. En effet, si on suppose les individus rationnels et pleinement conscients des implications fiscales futures, alors l’intérêt principal de la politique budgétaire vient de la capacité d’une génération à capter les revenus des générations suivantes, pas nées, trop jeunes, ou trop inconscientes pour s’y opposer.
 SUR LE WEB :
Bibliographie :

Barro, Robert J, 1974.”Are Government Bonds Net Wealth?”, Journal of Political Economy, University of Chicago Press, vol. 82(6), pages 1095-1117, Nov.-Dec..
Buchanan, James M., [1958] 1999f. “Public Principles of Public Debt: A Defense and Restatement”.  Vol. 2 of The Collected Works of James M. Buchanan.  Indianapolis, Ind.: Liberty Fund.
Ricardo, David, 1820. Essay on the Funding System
Les citations de Paul Krugman viennent de son blog et son retrouvables facilement.

L'isolement du PS

Loin des débat d'idées, ou même des politique de "redressement dans la justice" (expression du gouvernement pour éviter de prononcer les vilains mots d'austérité ou de rigueur), portons notre regard sur la triste réalité de la tambouille électorale de la gauche. Une constatation s'impose :  les socialistes sont seuls. Leurs alliés les ont quitté ou sont sur le point de le faire, de gré ou de force. Pour Montebourg, les communistes sont dans l'opposition et Placé s'interroge sur la place des écologistes au gouvernement.
Voila pour les faits. Même sur les sujets sociétaux, les différentes factions de la gauche ne sont pas d'accord entre elles.
Avant les élections, la droite disait :

  • "Comment allez-vous concilier l’exigence des Verts de sortir du nucléaire et de rejeter le gaz de schiste et celles des rouges d'y rester ?",
  • ou "Pour la France régionalisée/landerisée et l'Europe fédérale sauce EELV ou pour une France ultra jacobine, nationaliste et protectionniste façon Montebourg ?",
  • ou encore "Pour le sauvetage de l'industrie automobile française ultra diésélisée ou pour son bazardage au profit de la transition écologique ?" (voir PSA Aulnay, le PS et la transition écologique sur le blog Écologie Libérale)
Même là où la gauche aurait pu faire preuve d'unité dans l'humanisme, elle a prouvé qu'elle n'avait rien de différent de la précédente majorité, "socialiste de droite". Les expulsions de Roms n'ont pas cessé, pas plus que les interventions armées à l'étranger ou l'abus de détention préventive, cause de surpopulation carcérale.
Gauche, droite, ça ne veut plus dire grand chose. Alors, à quand de vrais débats de fond, d'idées, plutôt que des bricolage d'arrière-cour ? Et si les socialistes répondent "ce qui unit les gauches, c'est l'amour de l’État et du dirigisme", dans ce cas pourquoi ne pas avoir fait un gouvernement vraiment dirigiste avec Montebourg, Mélenchon, la fille à papa de Saint Cloud, Dupont-Aignan, Royal et Chevènement ? Il n'y a pas un jour qui ne prouve que le socialisme est forcément nationaliste, première étape avant, hélas, les chemises brunes. Il ne peut pas y avoir de socialisme en économie et en société ouvertes, d'ailleurs, Bercy et le renforcement de la taxe anti-déplacement de sièges sociaux d'entreprise l'a bien compris.
François Normal 1er Hollande, comme Sarkozy, parce qu'il n'a pas d'idées en dehors des "toujours plus d’État" et "moins de libertés", fait la même erreur que son prédécesseur qui ne ne demandait pas, le matin en se levant, ce qu'aurait fait Hayek - en revanche, tous les deux se demandent ce que peut faire Bercy.
On ne peut pas, dans un gouvernement, avoir des types nuls en anglais et des gens pour qui c'est la langue de travail, des ultra protectionnistes et des gens plutôt ouverts sur la question du libre échange, des prohibitionnistes et des abolitionnistes. Il faut de la cohérence !
Mais en dehors du consensus sur le fait de créer un impôt par jour, on ne voit guère de cohérence dans ce gouvernement. Voila pourquoi, comme le note Pierre Chappaz, même une mesure éventuellement potentiellement positive devient en fait une jolie usine à gaz. Enfin, comme dit h16, ça nous fait une belle brochette de losers, tout ça ! Et si en plus ces losers, comme le remarque Authueil, n'y connaissent rien en droit constitutionnel... c'est trop !

Exil fiscal : ceux qui partent à l’étranger trahissent-ils la France ?

En France, les experts estiment à 800 le nombre d’exilés fiscaux chaque année. Soumis à une forte pression fiscale, ils seraient de plus en plus nombreux à quitter la France pour échapper à sa fiscalité. Les français exilés fiscaux manquent-ils de patriotisme ?

En France, l’administration et les experts estiment à 800 le nombre d’exilés fiscaux chaque année. Et selon eux, ils seraient de plus en plus nombreux à quitter la France pour échapper à sa fiscalité. Soumis à une forte pression fiscale, les français exilés fiscaux ont-ils raison de s’en aller ?


Pierre Kosciusko-Morizet : C’est un choix très personnel. Personnellement, je ne partirai pas pour des raisons fiscales. On peut avoir envie de vivre à l’étranger pour d’autres raisons, cela n’est arrivé par le passé. Mais j’estime que la fiscalité n’est pas un sujet suffisamment important pour que ce facteur décide de l’endroit où l’on vit.
J’ai eu la chance de gagner beaucoup d’argent, mais cet argent je l’ai gagné pour devenir plus libre, notamment. Il me permet d’accéder à une certaine liberté, de choisir le travail que je fais, de partir en vacances où j’en ai envie, d’aller au restaurant lorsque j‘en ai envie, de m’occuper de ma famille. C’est une énorme chance, et une liberté. Je vis aussi en France pour cette liberté.
L’exil fiscal correspond au contraire à un rapport à l’argent contraignant, à un manque de liberté. Si le fait d’avoir de l’argent nous pousse à choisir un pays pour ses règles fiscales, et donc pas pour son climat, ni sa culture, ou les gens qu’on y rencontre, alors la liberté gagnée en gagnant de l’argent est inutile, gâchée. Je pense qu’il y a un manque de cohérence dans l’exil fiscal, c’est accorder trop d’importance à l’argent ou au fait de payer le moins d’imports possible. Je ne juge pas les personnes qui le font. Mais ce n’est pas mon cas, ce n’est pas ma manière de voir le monde.
Jacques Sapir : Les « exilés » fiscaux ont certainement tort de se comporter comme ils le font, tant socialement que politiquement. Mais, pour eux, la réussite sociale n’est que le résultat d’un choix individuel, comme si l’ensemble des services publics qui ont permis cette réussite (avec bien entendu un coefficient personnel important comme dans toute réussite), n’existait pas. C’est ce que l’on nomme, en économie, un comportement de « cavalier solitaire » (Lone Rider).
Michel Rousseau : Si vraiment les experts estiment à 800 le nombre d’exilés fiscaux chaque année, cela veut dire qu’il y a eu un doublement du rythme annuel depuis 25 ans de départs de personnalités françaises qui se sont tournées vers l’étranger. On peut dire que c’est une hémorragie soutenue de nos activités économiques car beaucoup sont des entrepreneurs qui recréent leur entreprise à l’extérieur ou qui vont aller créer leur entreprise à l’extérieur.
On ne parle ici que de nombre d’exilés fiscaux mais en réalité la fiscalité dissuade beaucoup de créateurs d’entreprise de créer en France. On les retrouve aux Etats-Unis, en Angleterre et en Belgique et ceux-là ne sont pas comptabilisés. C’est une calamité nationale ! Il ne faut pas juger ces gens-là, ils prennent une décision en toute liberté. Dans l’Europe qui se construit, pourquoi leur interdire d’aller poursuivre leur entreprise dans un pays voisin. Je trouve qu’il est ridicule de les culpabiliser. C’est à l’Etat à réfléchir à la manière dont il traite ses citoyens, compte tenu de l’environnement. Il n’est pas question de leur donner raison ou tort, ce sont des décisions individuelles que l’on doit respecter.
Ces gens ne veulent pas se faire dépouiller par la pression fiscale, par l’ISF, par tout l’arsenal fiscal mis en place selon des espèces de réflexes marxistes, comme celui de faire payer les riches, qui en réalité affaiblissent considérablement les pauvres.

D’un point de vue éthique, n’est-il pas problématique de refuser de payer ses impôts dans le pays duquel on tire sa fortune ? Est-ce moral ? 

Pierre Kosciusko-Morizet : Ont-ils raison ou pas de partir ? Tout est question de la responsabilité que l’on considère avoir vis-à-vis de son pays, en l’occurrence la France. Personnellement, je ressens une certaine responsabilité, à mon petit niveau. J’ai grandi en France, je suis allée à l’école française, j’ai bénéficié de nombreux avantages, des routes, de la sécurité sociale, etc. Il se trouve que j’ai la chance de ne pas être très malade, donc je contribue plus que je ne reçois. Mais j’ai tout de même bénéficié de beaucoup de choses, et je trouve qu’il est un peu facile de partir à un moment ou le pays va mal. La fiscalité c’est comme l’amitié : on ne peut pas être l’ami de ses amis uniquement lorsqu’ils sont drôles et en pleine forme. Sinon, ce ne sont pas des amis, mais des clowns. On ne peut pas se dire français lorsque le pays va bien et le quitter lorsqu’il va mal. Je suis assez dur avec les gens qui partent pour des raisons fiscales, si ce sont mes amis cela peut m’énerver.
 Il faut cependant ajouter un bémol : j’ai remarqué que de plus en plus de personnes quittent la France pour de multiples raisons, pour une accumulation de facteurs. La fiscalité est une des raisons, elle peut être l’élément déclencheur, mais n’est pas nécessairement la raison principale. Les départ procèdent souvent d’un ras le bol, d’une incompréhension, chez les personnes qui paient beaucoup d’impôts parce qu’elles ont déjà gagné de l’argent, mais aussi chez celles qui ont de l’ambition professionnelle et pensent gagner beaucoup d’argent et donc payer beaucoup d’impôts plus tard, parce qu’elles comptent créer des entreprises.
Ces personnes ont l’impression de ne pas être les bienvenues dans le pays, et que le fait d’avoir de l’argent est mal vu en France, que c’est considéré comme un tort. Ils ne partent pas seulement pour payer moins d’impôts, mais parce qu’ils en ont assez de se voir reprocher d’avoir de l’argent. Ils considèrent être dans une situation injuste : ils paient beaucoup d’impôts, et au lieu de les remercier de contribuer, on leur dit qu’ils sont des salops et qu’ils devraient en payer beaucoup plus. Ils déplorent cette ambiance délétère, cette chasse aux riches qui selon eux tue le pays. Je comprends davantage cette position. Pour autant, je ne pense pas qu’ils aient raison.
Michel Rousseau : Je ne crois pas qu’on tire sa fortune d’un pays. En réalité, on tire sa fortune de son travail et de son entreprise. Nous sommes premiers en France en termes de prélèvements et de taxes sur les entreprises en Europe. Croyez-vous que les gens vont se laisser ponctionner le travail d’une vie ? Cela me parait incroyable qu’on puisse s’étonner que ces gens-là partent pour préserver leur patrimoine et ce qu’ils ont préparé pour eux et leurs enfants, cela me parait d’une humanité évidente ! Il n’y a pas d’état d’âme à avoir. Ce pays ponctionne de manière indécente le travail des entrepreneurs et des cadres supérieurs, il ne faut pas avoir de remords vis-à-vis d’un pouvoir aussi excessif.
La société est victime des décisions prises par les leaders politiques, en particulier de gauche. C’est elle qui paye malheureusement les pots cassés. La société a choisi des gouvernants, il faut maintenant en assumer les conséquences.  
Jacques Sapir : Le problème est moral, mais il est d’abord politique. Si nous considérons que les institutions, qu’elles soient politiques, sociales ou économiques, qui nous entourent sont le produit des luttes qui ont été menées, en choisissant la fuite plutôt que le combat collectif, ils ne contribuent pas à la construction de nouvelles institutions. La démocratie a commencé par la lutte pour que l’impôt soit librement consenti. En refusant cette logique, en substituant ce que Alfred Hirschman appelait « l’exit » à la « voice » (le conflit organisé) leur comportement trahit une absence complète de sens démocratique. D’un point de vue moral, il est indéfendable de vouloir approprier la totalité du bénéfice d’une action qui n’a été possible que parce qu’il existait des institutions économiques (droits de propriétés, régime des brevets, etc…) mais aussi sociales (l’éducation nationale, la recherche publique, mais aussi le système de santé,…) qui ont rendu possibles cette action. Les « exilés » fiscaux voudraient se comporter comme Robinson sur son île, sans rendre de compte à personne. C’est la négation de la Res Publica, de l’espace collectif et organisé, qui fait de nous des Hommes et nous différencie des animaux.

Ces évasions fiscales représentent-elles une grosse perte économique pour la France ?

Jacques Sapir : En fait, non. L’évasion fiscale est, à plus de 80%, le fait d’entreprises et de montages financiers. Mais, ces comportements individuels peuvent provoquer des réactions violentes dans la société, et ce hors de proportion des effets économiques engendrés.
Michel Rousseau : Les autorités françaises sont depuis toujours dans le déni. La Fondation Concorde a publié en 2004 un ouvrage intitulé La France a besoin de capitaux et d’entrepreneurs. Les autorités françaises, en particulier Bercy, a toujours sous-estimé l’exil fiscal des Français parce qu’elles ne recensaient que les citoyens redevables de l’ISF et non pas l’exil des chefs d’entreprises, propriétaires de leur outil de travail et non redevable de leur outil de travail et ce sont ces départs qui sont les plus pénalisants pour notre économie.
L’entrepreneur qui a émigré par exemple en Belgique pour bénéficier de l’absence d’impôts sur les plus-values lors de la vente de son entreprise ou lors de la succession, n’est pas comptabilisé. On ne parle pas non plus de l’entrepreneur qui crée son entreprise à l’étranger pour échapper à la fiscalité française. Cela représente 2 expatriés sur 10 selon une enquête menée en 2012 par Mondissimo.
Selon l’économiste Christian Saint-Etienne, l’ISF nous a coûté 0,3% de croissance annuelle depuis 12 ans ce qui représente selon lui 500 000 emplois perdus. D’après ses estimations, 20 000 chefs d’entreprises se sont expatriés sur la période 1997-2009, et cela s’est accentué sur la période 2009-2012. Ce qui explique une ^partie de notre déficit de PME. Pour nous c’est une catastrophe économique qu’il est honteux de nier comme le font les hauts-fonctionnaires Bercy. Il n’y a pas d’excuses pour cela. On veut créer de l’emploi et on fait fuir ceux qui créent de l’emploi.
Pierre Kosciusko-Morizet : Si le gouvernement poursuit dans la direction prise depuis quelques semaines avec le projet de loi de finance, être « business angel » ne fera plus grand sens en France. C’est déjà un petit peu le cas : cela revient à du mécénat. En moyenne, en investissant dans une entreprise qui démarre, on a déjà deux chances sur trois de tout perdre. Ce n’est pas une question de fiscalité, c’est une question de probabilités. Mais cela devient très problématique si dans la chance sur trois où cela fonctionne, où l’investisseur ne perd pas tout et gagne de l’argent, c’est alors l’état qui prend les deux tiers. Car il s’agit en général de gens qui se situent dans les tranches supérieurs de l’impôt sur le revenu, et l’impôt est à 70%. Donc les business angels ne peuvent pas gagner d’argent. Certains peuvent donc considérer qu’ils doivent partir, car ils refusent de faire du mécénat et veulent continuer à être business angel. Mais je pense que ce genre de situation reste à la marge, entre autres car la plupart des business angels ont aussi d’autres activités.
Si le projet de loi de finance passe, il aura des conséquences terribles sur l’économie française, car il donnera un énorme coup de frein à la création d’entreprise. Mais je persiste à penser que la fiscalité n’est qu’un élément parmi les nombreuses motivations des personnes qui s’exilent.
Je suis presque plus inquiet face aux créateurs d’entreprises en herbe, qui n’ont pas nécessairement déjà de l’argent de coté qui veulent monter une entreprise et qui prévoient déjà de partir car ils n’envisagent pas de créer une entreprise en France, car ce pays ne cesse d’envoyer des messages négatifs aux entrepreneurs, et ils ont le sentiment que ce pays refuse de les accueillir.
Je n’ai jamais vu autant de créateurs d’entreprises à HEC qu’aujourd’hui, c’est très impressionnant. Cependant, nombreux sont ceux qui veulent quitter la France, soit pour créer leur entreprise à l’étranger, soit simplement pour y vivre car ils refusent de faire leur carrière dans un pays aux yeux duquel la réussite est quelque chose de négatif. Cette perception de l’entreprenariat en France est liée à la politique fiscale confiscatoire. Mais de la part des exilés, ce n’est pas une décision de nature fiscale, en tout cas pas essentiellement. Ils partent car ils veulent vivre dans un pays qui favorise la création d’entreprise. Et au-delà de la création d’entreprises, c’est finalement la réussite professionnelle qui est en jeu, et aujourd’hui elle se mesure beaucoup par la réussite financière.
Certes, j’ai de nombreux arguments à opposer à ces critiques. Je pense que la France est un très bon pays pour créer des entreprises, qu’il y a beaucoup de bonnes raisons de rester et d’ailleurs j’y reste. Mais je constate que beaucoup d’entrepreneurs et notamment des jeunes, parfois même futurs entrepreneurs, doutent de la France.

L’exil fiscal des individus est-il le vrai problème par opposition au montage financier des grandes entreprises, placements offshore, etc… ?

Michel Rousseau : Tous ces montages sont faits pour échapper à la fiscalité française. Le problème est le même puisque ces montages financiers ont pour but d’échapper à la fiscalité française. Les mêmes causes créent les mêmes conséquences.

Quelles conséquences peuvent avoir un niveau d’imposition trop élevé sur l’Investissement et donc sur l’emploi en France ?

Michel Rousseau : Nous sommes au centre de tout cela, nous connaissons des grosses entreprises internationale qui ne déplace non pas leur siège, mais qui vont le vider progressivement et qui sont sur le point de partir à Londres, ou ailleurs. Ce sont des gens qui décident d’investissements et ils ne seront plus là et les capitaux iront probablement chercher des endroits plus prospères pour se fixer. Le résultat : moins de capitaux, moins d’entrepreneurs. Tout cela va dans le mauvais sens pour notre pays, il y aura moins d’emplois. Comment voulez-vous que dans l’état actuel des choses des quartiers généraux de grandes entreprises viennent s’installer en France.
Jacques Sapir : À priori, aucun. L’investissement est bien plus déterminé par la perspective de croissance. Personne ne quittera un pays où l’on paye beaucoup d’impôts mais où les perspectives économiques sont brillantes. Par contre, si nous sommes en récession, le taux d’imposition peut être la goutte d’eau qui convaincra des entreprises et des entrepreneurs de partir. Mais ce ne sera que la dernière goutte d’eau il faudra bien d’autres facteurs pour convaincre ces entrepreneurs de partir.
Pierre Kosciusko-Morizet: Quiconque sait comment fonctionne une entreprise ne peut qu’être opposé à cette politique fiscale. Même au sein du gouvernement, de nombreux responsables pensent que cette politique est une erreur fondamentale. Mais il faut respecter le dogme et tenir les promesses de campagne.
C’est incompréhensible : le gouvernement revient sur l’augmentation de la TVA, après l’avoir refusé dans un premier temps, ce qui est positif, mais il ne revient pas sur la fiscalité du capital. Pourtant, lorsqu’il s’agit de création d’entreprise, il ne s’agit pas de rentes. Aligner la fiscalité du capital sur la fiscalité du travail, pourquoi pas lorsque l’on parle de gens qui placent des millions dans les sociétés du CAC 40 par un simple coup de fil, mais pas pour des entrepreneurs qui créent des entreprises, et prennent le risque de tout perdre, qui créent des emplois et réinjectent tout l’argent gagné dans l’économie. Mélanger cela avec la fiscalité des revenus du capital, c’est une absurdité.

La règle de Laffer veut que trop d’impôts tue l’impôt, ne vaudrait-il pas mieux baisser le niveau de fiscalité afin d’éviter l’exil des plus hauts revenus ?

Pierre Kosciusko-Morizet : Je ne pense pas qu’il faille alléger la fiscalité : je pense qu’il faut l’augmenter, car nous devons tous contribuer davantage au redressement des comptes publics. Par contre, il faut augmenter la fiscalité aux bons endroits. Je ne comprends pas par exemple que l’immobilier soit deux fois moins taxé que la création d’entreprise. Un investisseur qui achète des chambres de bonne dans Paris pour les louer à des étudiants ou un studio pour le louer à des Américains de passage, ne crée aucun emploi, fait monter le taux des loyers à Paris. Outre le loueur, les seules entités qui gagnent de l’argent sont les banques, grâce au crédit contracté par le loueur. L’Etat ne gagne rien car les revenus des loyers sont compensés par les intérêts payés à la banque, donc l’Etat ne prélève aucun impôt la dessus. Et pourtant, cela est taxé deux fois moins que les créations d’entreprises, qui, elles, paient de la TVA, paient des charges patronales sur les salaires, que le salarié paie des charges salariales, puis l’impôt sur le revenus, alors qu’ensuite il dépense l’argent… Qu’est-ce que ce pays où l’on pousse les gens qui ont des moyens à acheter les appartements et à les louer plutôt qu’à investir dans des sociétés ? On marche sur la tête. Il faut augmenter la fiscalité, mais aux endroits où elle ne nuit pas à la création d’emploi, et non pas là où il y a de l’investissement qui crée de l’emploi.
Michel Rousseau : Les socialistes ont donné un coup d’arrêt à la croissance et nous risquons d’aller droit dans le mur. Faire partir les riches et faire partir les pauvres, vous voyez un peu ce que cela peut donner dans un pays développé. Cela n’a pas de sens, ce n’est pas avec des pauvres qu’on va innover et entreprendre, et ceux qui peuvent le faire partent. C’est une calamité nationale.
Un investisseur aujourd’hui ne peut plus résider en France. On lui a donné une espèce de feu vert pour l’exil. Je vais jusqu’à dire que c’est absolument contre la morale citoyenne, la morale républicaine de forcer les gens à quitter le pays. Je trouve cela scandaleux. Aller jusqu’à obliger les gens à partir pour protéger leur patrimoine, ce qu’ils ont gagné pendant toute une vie, est scandaleux ! Je connais des gens qui pourtant sont des patriotes et sont forcés à l’exil parce qu’ils se disent qu’on va tout leur prendre.
Tous nos voisins estiment que c’est formidable parce qu’ils vont pouvoir accueillir les fortunés. Ils se disent que les Français font entrer les personnes du Tiers Monde et nous les milliardaire.
Jacques Sapir : La règle de Laffer attend toujours sa démonstration empirique. En fait, on constate un mouvement général, mais depuis des niveaux très différents, à la hausse tendancielle des impôts dans tous les pays. Le problème est bien plus quand on impose à un pays un choc fiscal et budgétaire brutal. Alors, on peut provoquer une baisse de la croissance plus que proportionnelle au choc d’austérité, et par conséquence le montant des impôts diminue. Mais ceci est de la macroéconomie, et n’a rien à voir avec la règle de Laffer.


Une semaine en Hollandie

Cette semaine, pas ou peu de bourdes, les conseillers ont bien bossé et pour une fois, ils semblent avoir été écoutés. En tout cas pas de couacs en direct, seulement à posteriori… Et puis un hommage surréaliste à la « pensée sarkozyste » puisque non seulement le diagnostic mais aussi la solution a été reprise de l’ex président par le nouveau pour essayer de sauver ce qui peut l’être de la production française. Petit worst of de la semaine en Hollandie…
Back to the future !
On se souvient de la virulence du candidat Hollande contre l’idée de son prédécesseur de transférer une partie des charges sociales et patronales pesant sur le travail vers la consommation, via la TVA Sociale. Jugée comme injuste parce « qu’antisociale » et comme une menace à la croissance, le candidat Hollande abrogerait le dispositif une fois élu président. Ce qu’il fit dès juillet dernier. Mais il a remis au goût du jour cette TVA sociale en reprenant la préconisation du fameux rapport Gallois… Si quelqu’un comprend la politique mise en œuvre et surtout la pensée économique du président… En tout cas, après avoir nié la crise, ignoré le problème de compétitivité et rejeté catégoriquement l’hypothèse d’une hausse de la TVA, le voilà qui en quelques semaines reconnait que la crise est violente, qu’il faut agir pour redonner de la compétitivité des entreprises et que la TVA est un excellent moyen d’y parvenir… En tout cas celui qui aura suivi les positions présidentielles doit avoir un sacré torticolis : pour un choc de compétitivité avant l’été, puis contre en été, puis de nouveau pour en octobre… Soulignons d’ailleurs que le coup est habile : promettre en 2013 de l’argent de 2014… On savait les socialistes généreux avec l’argent des autres… Ils deviennent particulièrement créatifs en promettant de l’argent futur, dont on n’est pas sûr qu’il existera ! Pervers, non…?
La leçon de « triple z’Ayrault ». Au moment de présenter les mesures prises par le gouvernement, Ayrault nous explique qu’attention, la hausse de la TVA de son gouvernement n’a rien à voir, mais alors absolument rien à voir avec celle décidée par la droite ! On se croirait revenu aux temps anciens où les Inconnus faisaient rire la France avec « les bons chasseurs et les mauvais chasseurs… ». Dans le cas qui nous occupe, la différence entre la bonne et la mauvaise TVA se chiffre à 3 milliards : L’immonde hausse de la « TVA de droite » rapportait 10 milliards, la gentille hausse de la TVA de gauche ne rapportera « que » 7 milliards. Quand on vous dit que ça n’a rien à voir…. En tout cas, une chose est certaine : notre premier ministre a abandonné toute estime de lui-même…
Les bourdes… à retardement ! En fait de bourdes, ce sont les déclarations passées (septembre !) des ministres sur le refus catégorique d’une hausse de la TVA qui nous reviennent aujourd’hui en écho… Moscovici : « L’évidence, c’est que la TVA sociale, c’est nous qui l’avons supprimée, car nous la jugeons injuste et inefficace dans un moment où il fallait soutenir le pouvoir d’achat et la consommation. Dès lors que nous l’avons supprimée, nous n’allons pas la rétablir. »!». Alain Vidalies : « L’option TVA est totalement écartée : en l’état il n’y a pas de projet de l’augmenter d’ici à la fin du quinquennat, les choses sont claires.» On se parle là de prises de position de septembre dernier… Bref, on voit que la politique économique de la France est claire puisque ceux qui ont la charge de l’appliquer savent exactement où ils vont d’un mois sur l’autre… Laissons à Marie-Noëlle Linemann la conclusion : « Quand on fait l’inverse de ce qu’on a dit, on s’expose politiquement ». Et la sanction, c’est maintenant : pas une semaine sans que le Sénat ne mettre un camouflet au gouvernement. Ce coup-ci, c’est la loi de programmation financière qui est retoquée, les sénateurs PC ayant voté avec les sénateurs UMP et centristes. Déjà que l’exécutif est singulièrement affaibli dans l’opinion par ses 2 têtes (mal) pensantes, mais si en plus la majorité se délite après 6 mois aux affaires, on peut dire qu’on part sur des bases très incertaines…
« Chacun son tour, et poussez pas, y en aura pour tout le monde ! » : à la rentrée, c’était le président qui en prenait plein la poire chez les faiseurs d’opinion (ou ceux qui se considèrent comme tels) parisiens. Puis les faiblesses du premier ministre ont été si criantes qu’il a déporté les tirs sur ses frêles épaules. Retour de bâton cette semaine avec une seconde salve, violente, des hebdo : L’Express s’interroge en Une « Y a-t-il vraiment un président en France ? ». Barbier, en verve, note que « La présidence de la République est une des rares fonctions où le moine fait l’habit. Hollande cherche encore l’étoffe… » Sévère. Le Point titre, lui, sur «le grand méchant doute » que Sylvie-Pierre Brossolette résume ainsi : « le triple doute qui entoure aujourd’hui le président concerne sa ligne, son autorité et sa méthode ». En d’autres termes, ce qui fonde l’exercice du pouvoir. Rien que ça ! Même l’Obs tire sur l’ambulance hollandaise : cette semaine, il note goguenard, que le « président fixera un cap lors de la conférence de presse du 15 novembre. Mais à quoi cela sert-il quand on est inaudible (cf les 36% d’opinions favorables)? » Déjà que les socialistes au pouvoir viennent de rendre un hommage inattendu au programme sarkozyste, il ne reste plus qu’ils considèrent, comme l’ex président, qu’« Hollande est nul ». Patience, on y arrive… Déjà que le voile se brise pour la presse si enamourée au printemps dernier. Ses plus proches soutiens l’interpellent par presse interposée… Les Verts grognent et votent comme bon leur semble, le PC fait capoter des votes emblématiques au Sénat… Valérie, vite, un Tweet, et le tableau sera complet !
On peut tromper une fois une personne… : A propos de tableau, celui dépeint par les autorités économiques internationales sur la situation de la France est assez unanime. « La France va dans le mur », comme le dit en off un haut dignitaire du FMI. Cette semaine, l’institution a rendu un pré-rapport sur la situation de notre pays, qui est alarmante : la croissance pour 2013 et 2014 est surévaluée, les déficits ne seront pas contenus contrairement aux engagements pris et surtout la méthode est contestée puisque les économies dans la dépense publique sont inexistantes. La Commission de Bruxelles ne dit pas autre chose. Pour Cahuzac, les avis ne font pas autorité. Bon. Rendez-vous donc en 2013, Jérôme. Et compte sur une France vigilante…
« Un cap, que dis-je… » : Notre président nous a fait un aveu, terrible, dans son interview au Monde de la semaine dernière. La crise n’est qu’une question de cycles et il faut en espérer un meilleur pour que nous nous en sortions ! Sa tactique devient d’un coup parfaitement lisible : un service minimum de réformes pour ne pas effrayer les marchés en attendant que les Allemands et la BCE acceptent la monétisation de notre dette et que l’économie redémarre miraculeusement. Mais où est le plan B si le cycle est plus long que prévu, les difficultés structurelles et les Allemands intransigeants ? Euh…. Hélas, pour avoir d’ores et déjà tardé à adopter une politique de réformes courageuses et se contenter de mesurettes comme dans les suites du rapport Gallois, il s’est rapproché des échéances législatives allemandes qui empêchent la chancelière de céder quoi que ce soit à des pays-cigales. Et, d’ici la fin 2013, il y a de fortes chances pour que la récession et la hausse du chômage soient devenues insupportables aux Français…. On se rapproche du moment de vérité, on dirait.
L’Obs, nouveau résistant ? En conclusion d’un article sur le président que n’aurait pas renié Le Figaro, Joffrin nous régale : « Hollande arbitre tardivement et souvent dans la confusion ce qui avait été caché sous le tapis durant une campagne qui ne visait qu’une seule chose : gagner. La gauche, sa gauche, a boudé depuis trop longtemps tout un travail de clarification intellectuelle qui, s’il avait été fait, aurait au moins évité les malentendus qui crispent l’opinion et lézardent sa majorité. Aujourd’hui, c’est le temps des factures, conclut le mag. Pour Hollande aussi elle est salée ”. Laurent, au fond, t’es plutôt Copé ou Fillon ?
Aurélie, un répit ? Cette semaine, ma divine Aurélie a allumé une lueur d’espoir dans mon œil de réactionnaire indécrottable. Elle a décidé de s’attaquer, suite au rapport Françaix, aux aides publiques à la presse. Alors là, je dis chapeau Aurélie, et courage ! Surtout ne t’arrête pas en route, sois forte et résiste aux scribouillards de tous bords qui ne survivent que grâce aux deniers publics (via les impôts) et qui continuent de produire des papiers dont personne ou presque ne veut ! On apprend dans ce rapport que Le Monde touche la modique somme de 17 millions d’euros par an de la part de l’Etat (donc nos impôts!), Télérama 9 millions, Libération 8 millions, Télé 7 jours 7 millions (!)… Là où ma sublime gâche tout, c’est qu’elle souhaite des aides « ciblées ». Ben voyons ! Il y a donc des rédactions « dignes » de toucher de l’argent public et d’autres qui ne le sont pas. Aussi, le projet qui consistait à penser que le marché (à savoir la rencontre d’une offre rédactionnelle avec une demande de lecture) pouvait enfin s’envisager dans l’univers de la presse écrite française, est complètement irréaliste. Ce que veut en fait Filippetti, c’est une presse d’Etat. Le ministère décidera donc des journaux qui devront être subventionnés… et tout ira pour le mieux dans le meilleur des mondes. Ce qui doit ressembler à des pratiques dignes de la Corée du Nord, non ? Mais, pire, c’est la conception de la société qui inspire une telle réflexion qui fait froid dans le dos. En effet, dans la tête des gouvernants socialistes, l’individu est absolument incapable de décider de lui-même ce qu’il veut lire et quel prix il est prêt à payer pour cela. Il faut donc lui prendre de l’argent par l’impôt et décider pour lui de le donner à certains journaux qui doivent être encouragés. Donc l’Etat doit décider pour moi. Aurélie, j’entends bien que tu me considères comme un demeuré débilopathe profond, mais peux-tu s’il te plait envisager l’idée que si j’estimais que l’information de Libé ou de l’Huma valait les quelques pièces jaunes qu’ils demandent, et bien je les achèterais ? Remarque, au fond, peut être que tu penses que je ne sais pas lire…
La vérité sort de la bouche des enfants : formidables bambins ! C’est l’histoire, véridique, d’un dictionnaire qui a été écrit par des écoliers pour les inciter, justement à lire et à écrire. Ainsi quelques 17000 mots se sont retrouvés compilés et définis par des enfants de grande section jusqu’au CM2. Au-delà de l’exercice, complètement inepte au demeurant, pour faire aimer les mots à des enfants, le résultat est immonde, inacceptable, impubliable. Le ministère a d’ailleurs suspendu la mise en ligne de ce travail. Pourquoi ? Parce que les enfants sont « sexistes » selon les mots du ministère ! Et oui, il ressort que « le père est le chef de famille parce qu’il protège ses enfants et sa femme » … et que « la mère a des seins et qu’elle repasse les affaires de toute la famille ». C’est donc ça : les enfants décrivent une réalité, la leur, et pas (encore) celle édictée par l’Education Nationale… Va falloir que le lavage de cerveau commence plus tôt… Surtout, ils ont osé utiliser les mots « Père » et « Mère » en lieu et place de « Parent 1 » et « Parent 2 »… Les maisons de correction (de la pensée) vont reprendre du service d’ici peu…
Les divers de la semaine : Aubry est mise en examen, bon. En même temps, Ayrault et Montebourg ont été condamnés par la justice, les hiérarques régionaux socialistes en affaires avec la justice donnent encore de la voix à Montpellier, Marseille ou encore Lens… Martine valide donc ce point de vue, la trajectoire de son parti: le PS était historiquement un parti épris de justice, il n’est plus qu’un parti de repris de justesse ! / Dans la série nausées, on subit les affaires sexuello-financières de Rachida Dati. Mais non de dieu, quand tout le monde voulait savoir qui était le père, tu drapais ta fille dans un mystère des plus opaques ! Que n’as-tu besoin aujourd’hui de clamer à la terre entière, par justice interposée, qui est son père ? A commencer par le type concerné, d’ailleurs ? Et puis, le mec en question, c’est le Parent1 ou le Parent 2 ? Nan, parce que quitte à la reconnaitre, autant être Numéro 1, non ? Bref, c’est lamentable. Et je prédis que d’ici peu, on saura tout de ses frottis, à Rachida… / Hollande écrit à Obama pour le féliciter, Obama dont la réélection a l’air de plonger à peu près 150% de la population interplanétaire dans une hystérie absolument incroyable, mais balance une faute d’orthographe dans la signature… Amateur ? / Ca se chicorne grave à Nantes (chez le premier ministre) : en effet pas une semaine sans que les flics (de Valls) cognent allègrement sur la tronche des opposants (amis de Duflot) au futur aéroport de Notre Dame des Landes. Mais pendant ce temps-là, tout va bien dans les réunions ministérielles… Une chose est certaine en tout cas, le cas ne dérange pas nos ministres verts qui peuvent donc laisser leurs militants se faire casser la gueule sans dire un mot… On se rend compte chaque jour davantage que les verts ont des convictions et que ces convictions sont à vendre contre quelques avantages ministériels. Jolie conception de la politique qui semble ne choquer absolument personne, nulle part. Pendant ce temps-là, Jean-Luc et Marine se frottent les mains… Allez, bon week end et bon courage.

Madame la Ministre Déléguée m'écrit

J'ai été assez surpris lorsque Nestor, mon maître d'hôtel, m'a amené, avec mon courrier matinal et mon Earl Grey sans lequel une journée ne peut commencer correctement, une missive d'Hélène Conway-Mouret. Vous ne la connaissez sans doute pas, et c'est normal puisqu'il s'agit de l'une de ces innombrables sous-fifres d'un gouvernement pléthorique. Ici, nous parlons donc de la Ministre Déléguée chargée des Français de l'étranger. Je n'ai pas l'habitude d'échanges épistolaires avec des délégués, c'est donc une première...

J'ai rapidement décacheté l'enveloppe, afin de découvrir ce que me dit la brave déléguée du ministère. Vu la longueur de la lettre, je n'ai mobilisé qu'une toute petite partie de ma matinée à ce genre de choses. Tant mieux, après tout, puisqu'après la lecture, j'éprouvais un vague sentiment d'agacement.
Rien de bien violent, en fait. La déléguée explique en quelques lignes serrées comme un expresso de Clooney qu'elle va claquer le non-pognon de son ministère dans des services que les expatriés n'ont pas vraiment demandés. On trouve ainsi un enseignement français, dont on peut se douter qu'il n'est pas la clef de voûte de leur expatriation, ainsi que la réforme des bourses, qui sent bon le petit clientélisme électoral.
Juste en dessous, on trouve l'amélioration de leur sécurité, qui ne devrait dépendre que d'eux-mêmes ou de la compagnie qui les emploie sur place, en toute bonne logique, mais pour laquelle on va tout de même investir un chouilla pour montrer qu'on fait "quelque chose". C'est d'ailleurs d'autant plus comique que les autres Français, restés au pays, attendent toujours que cette fichue sécurité revienne sur le territoire. À moins bien sûr que la lettre soit aussi envoyée aux compatriotes expatriés à Marseille (et là, tout s'éclaire).
Dans la catégorie des petites bidouilles qui améliorent l'ordinaire des administrations et des fonctionnaires français sur place, la déléguée propose la modernisation du réseau consulaire (qui ne concerne les expatriés que dans la mesure où leur pays leur impose des papiers pour circuler) et la "refonte à l'échelon local de leur représentation", ce qui est une belle tournure pour justifier une énième dépense en rapports, commissions, études, consultance et autre mousse d'administration coûteuse.

Les efforts n'ont jamais tué personne, mais c'est illégal à certains endroits

À la limite, une déléguée qui écrit pour nous expliquer tout ça, ça irait sans trop de problème. Mais il faut bien comprendre que si l’État français s'agite autant pour marquer son territoire et poursuivre les expatriés de ses assiduités, ce n'est pas pour rien. C'est même pour une raison parfaitement explicitée dans le texte :
Notre pays est engagé dans un effort de redressement sans précédent qui doit être à la hauteur des défis auxquels il est confronté. Les Français établis hors de France ont toute leur place dans cette démarche. Ils peuvent apporter leur expérience et leurs sensibilités. La situation nous impose d’être attentifs aux bouleversements du monde dont vous êtes les acteurs et les témoins.
Et voilà l'idée : "On va faire des choses pour vous, et en échange, vous allez faire des choses pour nous. Bisous."
Joli marché, en fait. C'est un peu comme si je débarquais demain matin chez vous, sans prévenir, pour changer la plomberie, manu militari éventuellement. Une fois la plomberie changée, je vous tiendrais ce discours : "Comme votre plomberie a été changée et qu'elle marche du tonnerre de Zeus à présent, veuillez payer la facture ci-jointe. Bisous." Certes, vous n'avez rien demandé. Certes, en changeant de quartier, de ville, de région voire de pays, vous aviez tenté de faire comprendre au plombier compulsif que vous ne cautionniez plus ses interventions intempestives. Mais voilà : il n'y a pire sourd que celui qui ne veut pas entendre et en avant la facture.
Avec l’État français, c'est la même chose, surtout lorsqu'il est aux abois : vous avez tenté de vous extraire de son joug, vous avez fui ce pays où tous ceux qui le peuvent n'ont que solidarité, morale, redistribution au bec, et égoïsme, malhonnêteté, dissimulation, fraude ou parasitisme dans leurs actes, mais non, cela n'est pas une indication claire que vous ne voulez plus des services du parrain républicain. Vous avez réussi à éviter les semelles de béton et la leçon de natation avec, à minuit dans la Seine, vous êtes parvenu à vous éloigner de la délicieuse ambiance de jalousie et de délation qui s'installe de plus en plus dans le pays, mais clairement, même éloigné ainsi de la Mère Patrie, vous désirez ardemment retrouver ce parfum, cette ambiance si caractéristique. Mais si, mais si ! Eh oui : vous ne pensiez pas vous en sortir à si bon compte, non ? Alors, la déléguée et son ministère vont vous poursuivre.
impots : ce n'est pas du vol si on vous demande de remplir des papiers.

Parce que, comprenez bien : en naissant Français, vous avez hérité du fumeux fameux contrat social qui vous transforme immédiatement en débiteur de 27.000 euros. À ce titre, vous avez un contrat de servage avec votre pays. En quelque sorte, vous lui appartenez, vous êtes sa chose qu'il aura le loisir d'utiliser à bon ou mauvais escient quand bon lui semblera. La Révolution étant passée par là, les gouvernants ont maintenant l'obligation de dire "s'il vous plaît" avant de vous faire cracher au bassinet, mais le principe est bien celui-là : même expatrié, même sorti du giron de l’État français, vous lui devez ce que vous êtes puisque, par définition, vous n'êtes pas un individu mais une excroissance pratique de son existence.
D'ailleurs, toute la missive va bien dans ce sens puisqu'elle est conclue par la phrase suivante :
J’ai aussi la certitude qu’en étant à votre écoute, la France pourra davantage compter sur vous et se grandir encore.
Voilà : pendant que certains se payent des machines à calculer, l’État, lui, est devenu une machine à compter sur les autres. C'est bien simple : l'idée d'être à l'écoute ne se comprend dans ce contexte que pour que la France puisse ensuite davantage compter sur vous. L'idée que la France serait, in fine, responsable des expatriations et redevable des expatriés qui ont été chercher ailleurs ce qu'ils ne trouvaient pas au pays semble difficile à faire passer dans un texte officiel. L'idée, pourtant aussi simple, que l’État français ne doit rien à ses expatriés et qu'en retour, ces expatriés ne doivent rien à l’État français, cette idée-là semble impossible à admettre, à formuler, à imaginer.
Ce qui est intéressant dans le comportement ainsi décelable en filigrane de cette missive, c'est qu'il est symptomatique du rapport de l’État aux personnes qui le font vivre. Dans un monde normal, tous ses agents (depuis ceux du fisc jusqu'aux ministres en passant par les jardiniers municipaux ou que sais-je) devraient être imprégnés de l'humilité d'avoir à gagner leur vie sur le travail des autres, et devraient avoir conscience que leurs actions, leurs inactions et leurs erreurs impactent directement ce peuple qui les fait vivre. Dans ce monde normal, le citoyen, respecté comme celui qui, finalement, fait chauffer la marmite tous les jours, serait choyé, et n'aurait pas de mal, en retour de ce respect et de cette humilité, à respecter les commis qu'il aurait désignés pour s'assurer des charges de l’État.
Dans la France telle que nous la voyons, telle que les expatriés la voient et la fuient, le citoyen est littéralement méprisé. Il est vu tour à tour comme un mouton dont le vote est manipulable moyennant les bonnes campagnes de lavage de cerveau, comme un bovin qu'on peut traire à volonté, comme un pigeon qu'on pourra plumer sans s'attirer de problèmes. Et par un magnifique retournement de la logique, ce sont les commis de l’État qui lui réclament le respect avant de montrer qu'ils en ont à revendre et qui s'étonnent, voyant la grogne monter, qu'on soit encore trop bon avec cette piétaille qui ronchonne à tort et à travers.
Ce genre d'attitude n'a jamais mené à rien de bon.

Pour Rocard, la France est "au gaz de schiste ce que le Qatar est au pétrole"

"La France est bénie des dieux". Pour Michel Rocard, la France a tort de se priver de l'atout que représenterait l'exploitation des gaz de schiste. L'ancien Premier ministre socialiste désapprouve la décision du gouvernement de ne pas retenir la proposition de reprise des recherches sur l'exploitation des gaz de schiste, préconisée dans le rapport Gallois sur la compétitivité.

Le seul vrai social démocrate de France
"Sur ce sujet, étant très écolo, je me suis longtemps abstenu. Mais je n'ai rien lu qui soit complètement convaincant", confie Michel Rocard dans une interview au Monde (article abonnés) publiée samedi 10 novembre. "On a un réflexe fantasmé un peu du même type que face aux OGM, estime l'ancien Premier ministre de François Mitterrand. Quand on sait que le gaz de Lacq était extrait par fracturation hydraulique sans dégâts sur place, on s'interroge (...) Pour l'Europe, [la France] serait au gaz de schiste ce que le Qatar est au pétrole. Peut-on s'en priver ? Je ne le crois pas", explique Michel Rocard.
Le gaz de schiste, point sensible entre le PS et les écologistes
Lundi, dans la matinée, le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, avait affirmé vouloir "réfléchir" à l'exploitation du gaz de schiste. En réponse à cette déclaration du ministre, Jean-Vincent Placé, président du groupe écologiste au Sénat, avait alors déclaré qu'"un revirement du gouvernement serait une violation absolue de l'accord passé [entre] le PS" et Europe Ecologie-Les Verts. Car le gaz de schiste, source d'énergie contestée par les écologistes, est un point sensible au sein de la majorité. "Si le Premier ministre reprend ces propositions du rapport Gallois, il y aura une large fracture dans la majorité avec les écologistes", avait prévenu Jean-Vincent Placé.
Le Premier ministre a visiblement pris cette menace au sérieux. Il referme ainsi le débat sur le sujet, comme l'avait fait François Hollande lors de la conférence environnementale, le 14 septembre. Après quelques semaines de flottement gouvernemental, le président de la République avait annoncé le rejet de sept demandes de permis d'exploration d'hydrocarbures du fait des inquiétudes locales sur le gaz de schiste.

Une exception française

Il y a, comme cela, des rapports qui se suivent et se ressemblent. Voyez plutôt : après le rapport Gallois sur la compétitivité, c'est le rapport de la commission Jospin sur la rénovation et la déontologie de la vie publique qui a été remis hier à François Hollande. On s'autorisera un parallèle entre Louis Gallois et Lionel Jospin. Ce sont là deux hommes intègres qui ont pris leur tâche au sérieux. Leurs propositions sont précédées d'un diagnostic identiquement sévère. Louis Gallois insistait, en préambule, sur l'inquiétant décrochage de la France. Lionel Jospin, lui, a pointé d'emblée la « crise de confiance » entre les citoyens et les institutions politiques.
Pas davantage que Louis Gallois, Lionel Jospin n'a hésité à bousculer nos conformismes. Le rapport de l'ancien Premier ministre, qui ne comporte pas moins de 130 pages et 35 propositions, prône un véritable « renouveau démocratique ». Et c'est là que l'on guette la suite, non sans une certaine gourmandise. Jusque-là, les tentatives de rénovation de notre vie publique ont toujours capoté.
C'est que les parlementaires sont bien souvent rétifs aux réformes qui les concernent. Prenons la principale mesure de la commission : celle, emblématique, concernant la limitation drastique du cumul des mandats. Notre Assemblée a, en Europe, l'une des moyennes d'âge les plus élevées, le taux de masculinisation y est parmi les plus forts (81 %) et le pourcentage de « cumulards » le plus important (70 %), avec l'absentéisme pour corollaire.
Cette exception française génère une inamovibilité électorale et interdit la régénération de la classe politique. Il faut évidemment éviter le simplisme mais on voit, en tout cas, que les engagements pris par le PS et le candidat Hollande suscitent déjà une vive opposition, y compris à gauche. Alors, on espère que les députés, qui font la loi pour les autres, sauront aussi la faire pour eux-mêmes, en évitant ces batailles de chiffonniers qui nourrissent précisément l'antiparlementarisme.

Un brevet Apple fait polémique

D'où vient cette nouvelle polémique sur un brevet d'Apple ?
Si le brevet d'Apple sur le rectangle aux bouts arrondis a pu faire rire, celui permettant de désactiver un appareil sans fil à distance fait plutôt hurler. Déposé en juin 2008, ce brevet (U.S. Patent No. 8.254.902) a été accordé à Apple en août dernier. Dévoilé dès le début septembre par plusieurs sites spécialisés anglo-saxons, comme ZDNet, ou hexagonaux, comme Numerama, il suscite un début de polémique en France depuis la publication jeudi d'un article du Daily Mail en raison des atteintes potentielles aux libertés individuelles. Au point que le site Reflet.info a publié un post au vitriol ouvrant sur cet appel : " Journalistes, citoyens, jetez vos putains d'iPhone... Maintenant ". Aussitôt suivi par une vague de commentaires sur les réseaux sociaux...
Et il est si terrible que ça, ce brevet ?D'après son intitulé, il définit des " méthodes et des moyens pour appliquer des mesures de police sur un appareil sans fil ". Il s'agit notamment de pouvoir " changer un ou plusieurs aspect fonctionnel ou opérationnel (...) dans certaines circonstances ". Si vous ne comprenez pas ce jargon, sachez que l'objectif est concrètement de pouvoir désactiver à distance des fonctionnalités de l'iPhone, comme son appareil photo ou sa camera par exemple, ou de lui fermer carrément l'accès au réseau. Comment ? En envoyant un signal capable de bloquer sélectivement telle ou telle fonctionnalité d'un smartphone se trouvant dans un certain périmètre. Apple affirme qu'il s'agit principalement de prévenir des atteintes au droit d'auteur (enregistrer un concert ou capter un film dans une salle de cinéma), d'empêcher la prise de photo dans des endroits inappropriés (des cabines d'essayage) ou des communications dans une salle d'examen. Parmi les autres motifs de recourir à une telle fonctionnalité, le groupe évoque la gêne occasionnée par les sonneries et les risques d'interférences dans les avions ou les hôpitaux. Le brevet précise clairement qu'Apple ne ferait qu'implémenter cet interrupteur à distance : la décision de l'utiliser ou non revenant entièrement aux autorités, aux entreprises ou aux opérateurs télécoms...
C'est donc pour la bonne cause alors... Chacun appréciera ce qui peut justifier ou pas une limitation à l'usage de son smartphone... Mais ce qui inquiète surtout les défenseurs des droits de l'homme, c'est qu'Apple indique tout aussi clairement que son brevet " couvre les opérations de police ou du gouvernement qui peuvent requérir un blackout complet ". Autrement dit, la fonctionnalité pourrait servir à empêcher des manifestants de communiquer entre eux ou de prendre des photos ou des vidéos d'exactions des forces de l'ordre. Le Daily Mail rappelle ainsi le rôle important joué par les téléphones mobiles dans les révolutions arabes et pointe les risques de mettre une telle arme à disposition de la police... et pas seulement dans les dictatures. Le journal évoque aussi le cas d'une manifestation d'étudiants de l'Université Davis de Californie, aspergés de gaz au poivre par un policier, et indemnisés à hauteur de 30.000 dollars par personne grâce à une vidéo tournée avec un smartphone.
Faut-il jeter son iPhone?Ce n'est pas la première fois qu'Apple est mis en cause pour des atteintes à la vie privée des utilisateurs d'iPhone. On se souvient de la polémique sur l'archivage des données géolocalisée. Le problème, c'est qu'il n'y a pas forcément de gentille alternative facilement disponible. Si Apple a déjà prévu la possibilité de supprimer des applications à distance sur ses iPhone actuels, Google a déjà procédé à de telles suppressions. Et on se souvient du scandale provoqué par Amazon quand il a effacé des livres sur les Kindle de ses clients. iGeneration.fr rappelle qu'un employé de Microsoft a révélé que " Windows Phone est aussi doté d'une telle fonction kill switch ". Et qu'il l'avait utilisé en 2011 pour désinstaller des versions pirates de jeux sur les smartphones de ses clients. Enfin, les dictatures n'ont pas attendu Apple pour couper les accès internet. De façon générale, les télécoms et l'informatique sont connues pour l'installation de portes dérobées permettant éventuellement aux autorités de contrôler les communications voire les appareils eux-mêmes. Raison de plus, diront certains, pour ne pas leur donner des armes supplémentaires. Car si les opérateurs télécoms sont déjà capables de désactiver les téléphones volés, le brevet d'Apple permettrait de couper les communications dans une zone donnée. C'est donc beaucoup plus puissant... Mais là encore, Numerama rappelle que la firme à la pomme n'est pas la seule : Microsoft a également déposé un brevet du même type.

Un vrai mandat

Oui, le magnifique mandat de parlementaire est une mission à plein temps ! Non, le lourd travail d’élaboration et de vote des lois, ainsi que le contrôle de leurs effets trop souvent négligé, ne coupe pas nécessairement du terrain. Avec d’autres mots bien sûr, Lionel Jospin, au terme de sa mission sur la rénovation de la vie publique, a raison de rappeler ces évidences. Même et surtout si elles contrarient la pelote indémêlable d’intérêts croisés, de petites combines et de clientélisme à la papa devenus banals dans notre République.
Disons-le clairement : cumuler un exécutif de collectivité territoriale et une fonction parlementaire n’est pas raisonnable. Pas davantage que d’assumer un département ministériel tout en dirigeant une ville ou une région. La démocratie française s’honorerait à mettre fin à ces pratiques dépassées. Produire une meilleure législation, moins circonstancielle et plus régulièrement évaluée, ne peut être que le fait de personnes s’y engageant complètement. Les travées souvent désertées du Parlement, lorsque la télé n’est plus là, témoignent assez d’une faiblesse de notre vie politique que les citoyens commencent à bien percevoir et à rejeter. En filigrane, ce sont tout le fragile échafaudage des collectivités et l’enchevêtrement des responsabilités qui sont en cause. Les exécutifs territoriaux, faut-il le rappeler, souffrent tout autant des effets du cumul.
Le risque de perdre l’ancrage local, de s’éloigner de la réalité des Français, est souvent avancé, notamment par les sénateurs dont l’élection est indirecte. Cet argument n’est pas très convaincant. Rien n’empêche un député ou un sénateur d’aller à la rencontre des forces vives du pays, sociales, économiques ou associatives. Les parlementaires sont, en France, toujours reçus avec de grands égards. Ils en doivent autant en retour à leurs concitoyens en les écoutant, en travaillant leurs dossiers, en défendant leurs convictions… Et en votant de bonnes lois.
L’agenda infernal des cumulards, qui flatte leur ego, ne permet évidemment pas de concevoir pleinement ce rôle. Un mandat moderne devrait aussi prévoir un dispositif de réinsertion pour le parlementaire. Se trouvera-t-il une majorité pour voter pareille réforme ?