TOUT EST DIT

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ǝʇêʇ ɐן ɹns ǝɥɔɹɐɯ ǝɔuɐɹɟ ɐן ʇuǝɯɯoɔ ùO

vendredi 6 juillet 2012

La craie et le tableau


Le grand amphithéâtre de la Sorbonne pour lancer la concertation sur l'École ! Le gouvernement n'a pas lésiné sur l'endroit pour donner le caractère le plus solennel qui soit à cette refondation de l'École de la République annoncée comme un chantier prioritaire par le chef de l'État. Alors que sont proclamés aujourd'hui les résultats du bac, il fallait donner une dimension à un parcours qui, de la maternelle à l'université, réserve pour beaucoup plus d'obstacles que de sprints parfaits.
C'est la réflexion des experts et de tous les acteurs du système éducatif qui doit être le terreau capable de nourrir le projet de loi d'orientation et de programmation promis par le nouveau gouvernement. S'il est utile de faire un diagnostic, il est indispensable de le dépasser pour proposer des solutions alternatives à même de corriger les faiblesses identifiées et les insuffisances constatées.
Un simple discours syndical ne peut y suffire. S'il n'y a pas d'audace, il n'y aura pas le sel et le poivre capables de pimenter les échanges, donc de faire bouger les lignes. La réussite pour tous ne doit pas être un slogan commode. Placer les élèves au cœur de la refondation ne peut pas être une posture clientéliste. En outre, on ne peut pas décréter un système éducatif juste. Il doit apporter la preuve qu'il l'est par les résultats que les élèves obtiennent. Enfin, la formation des personnels et leur place dans la vie de la cité ne se règlent pas par deux ou trois formules bien léchées. On mesurera vite si cette démarche de concertation n'est pas conduite dans la précipitation et si elle n'est pas une machine mise en route pour se donner bonne conscience.
Il est patent que l'effort doit porter sur l'école primaire. Le socle commun des connaissances et la manière de maîtriser les savoirs indispensables pour mener une scolarité fructueuse sont deux sujets qui ne peuvent pas être biaisés. Ce qui oblige à se poser la question des outils à utiliser dans un monde conquis par le numérique, où la place de l'image dégrade souvent l'écrit dont on finit par sous-estimer le rôle irremplaçable pour donner de la cohérence aux apprentissages. Espérons que ce temps d'échanges et de réflexions sera un authentique bouillonnement intellectuel. Le plus dangereux serait de rafistoler ce qui est déjà bien usé.

L’Aristocratie de l'influence

Arnaud Montebourg souhaite déléguer des experts au chevet d'entreprises fragilisées par la crise. Que faut-il en penser ?
Je viens d'apprendre que notre ministre de la croissance érectile, souhaite déléguer des experts au chevet d'entreprises fragilisées par la crise.
Imaginez-vous dans cet état d'esprit, et abstraction faite de l'ingérence intolérable de l'État dans les affaires privées, qui choisiriez-vous comme experts ?
Sans aucun doute, feriez-vous appel à des hommes et des femmes d'expériences, ayant déjà vécu des situations comparables, ou, au contraire, ayant réussi à développer des entreprises avec des résultats probants. Des Business Angels, par exemple. Des Xavier Niels (fondateur de Free), des Alain Afflelou, des Marc Simoncini (fondateur de Meetic), Olivier Heckmann (co-fondateur de Multimania) ou d'autres personnes de cette trempe dont la réussite éclatante permettrait de libérer un peu de leur temps pour devenir les pompiers d'entreprises en difficulté, en leur prodiguant conseils et expériences.
Que nenni !
En Socialie, on ne valorise pas le mérite ou le talent.
C'est un peloton de 22 commissaires régionaux, dont voici la liste et les CV, qui vont intervenir ! Des gens qui n'ont jamais été confronté aux affres de la création d'entreprise, mais, au dire même du ministre (et c'est bien ça le plus scandaleux), des hommes de réseaux, qui connaissent les bons interlocuteurs, qui peuvent avoir de l'autorité (menacer ?) sur une banque par l'intermédiaire de la Banque de France par exemple ou par les services fiscaux.

« À quoi vont servir les vingt-deux commissaires au redressement productif que vous avez nommés ? » demande le journaliste du Parisien
« Ils accompliront dans les régions, auprès des entreprises de moins de 400 salariés, le même travail que nous faisons tous les jours au ministère pour les plus grosses. Par exemple, convaincre un banquier ou un donneur d’ordre, demander des efforts à l’État, aussi, pour aider à recapitaliser, via des fonds spécialisés, ou étaler des créances. » (Extrait de Le Parisien)
« Nous fonctionnons au cas par cas, explique-t-on au service de communication du ministre. Mais nous allons nous appuyer sur la BPI [Banque publique d'investissement] pour remettre du cash dans l'économie réelle, essayer de recouvrer la souveraineté de l’État sur certains secteurs stratégiques, négocier avec les banques. On peut également proposer un arsenal législatif et réfléchir aux moyens de favoriser la préférence française. » (Marianne)
À part les commissaires du Limousin, de la Lorraine et du Languedoc Roussillon qui ont eu au moins une expérience dans des entreprises privées, les autres n'ont jamais connu le lien qui existe entre leur efficacité, la qualité de leur travail et la réussite de la structure qui les employait.
Si vous connaissez les bons interlocuteurs, vous pourrez vous en mettre plein les fouilles. Sinon vous n'êtes là que pour payer les largesses du prince.
La victoire de Hollande était déjà celle des réseaux d'énarques. Nous voilà en pleine immoralité affirmée, revendiquée même, tout en se grimant sous les traits de justice sociale, de relance juste et de normalité. Voici venu le temps, toute honte bue, de la Société de l'influence, du copinage, des réseaux, de la collusion et des passe-droits. Ayn Rand était vraiment une visionnaire !

H. Mariton : " Quoi qu'en dise le gouvernement, les salariés sont les grands perdants de ce collectif budgétaire"

Le Conseil des ministres a examiné mercredi le projet de loi de finances rectificative, qui corrige celui voté fin 2011 par le précédent gouvernement. Au total, 7,2 milliards d'euros de hausses d'impôts pour 2012 et 6,1 milliards pour 2013. Des mesures qui privilégient les recettes à la baisse des dépenses publiques, au détriment du pouvoir d'achat et de la compétitivité des entreprises.

Le Conseil des ministres examine ce mercredi le projet de loi de finances rectificative, qui corrige celui voté fin 2011 par le précédent gouvernement. Au total, Jean-Marc Ayrault prévoit plus de 7,2 milliards d'euros de hausses d'impôts pour 2012 et 6,1 milliards pour 2013. Les résidents étrangers, les grandes entreprises et les riches contribuables sont en première ligne. Pareille stratégie vous semble-t-elle appropriée ? Au final, qui va réellement payer ?

Hervé Mariton : On voit bien que tous les contribuables vont participer et être atteints par cette hausse d'impôts. Quand je dis tous les contribuables, je pense avant tout aux salariés, à ceux qui bénéficient d'heures supplémentaires et souffriront de la fin de l'exonération sur ces dernières. Je pense également à ceux qui bénéficient de la participation, et qui seront pénalisés avec l'augmentation du forfait social. Les perdants les plus évidents de ce collectif budgétaire, ce sont les salariés...

De fait, la stratégie poursuivie par les socialistes n'est pas appropriée, parce que l'effort est très mal réparti entre l'augmentation des recettes et les diminutions des dépenses. Il faudrait jouer davantage sur les diminutions des dépenses, et par ailleurs relocaliser les recettes, de manière à ce qu'elles pèsent moins sur les salariés.

La TVA sociale sera supprimée, les dividendes versés par les entreprises seront taxés à 3%, les contributions sociales sur les stock-options passeront de 22 à 40%, et la taxe sur les transactions financières sera doublée. Ne s'agit-il pas de mesures directement dommageables pour la création d'emplois et la performance économique de nos entreprises ? Ne risquent-elles pas de pénaliser le nécessaire retour à la croissance ?

Clairement, la suppression de la TVA anti-délocalisation est défavorable à la compétitivité des entreprises, la suppression de l'exonération de charges sur les heures supplémentaires l'est également - ainsi qu'au pouvoir d'achat des salariés -, et la ribambelle de mesures fiscales le sont aussi.

On est donc en présence d'un texte qui est à la fois désincitatif, défavorable aux salariés, et pénalisant pour la compétitivité de nos entreprises. Par conséquent, ce dernier ne peut être favorable à la croissance, et donc à la création d'emplois.
 

Selon le rapport préparatoire du débat d'orientation des finances publiques, la dépense publique ne progressera que de 0,8% par an sur le quinquennat, soit une hausse de 4% à la fin du mandat. Un chiffre rabaissé suite à la baisse de la prévision de croissance (0,3% pour 2012 et environ 1,2% pour 2013). Pourtant, d'après certaines projections économiques, la pente naturelle des dépenses conduirait à une augmentation des dépenses publiques d'au moins 2% par an en volume (co­mpte tenu du vi­ei­lli­sse­ment de la po­pula­tion, des dépe­nses ma­la­die, etc.). Le gouvernement Ayrault va-t-il devoir réaliser de nouvelles coupes dans les dépenses publiques et sociales pour tenir ses engagements ?

Je pense que le gouvernement Ayrault a beaucoup de mal à se confronter et venir à l'idée de réduction des dépenses publiques, qui n'en sont pas moins indispensables... Dans tous les cas, ils n'auront d'autre choix que de procéder à de larges coupes dans les dépenses publiques et sociales, ce qui sous-entend moins d'argent pour les collectivités territoriales et les aides sociales.
A eux d'engager les coupes nécessaires pour le budget 2013, il leur reste quelques mois.

Parallèlement aux efforts supplémentaires demandés aux Français, le budget rectificatif supprime la prise en charge par l’État des frais de scolarité des enfants français inscrits dans un établissement français à l'étranger, l'exonération de charges sociales sur les heures supplémentaires... Les groupes pétrolier devront, eux, s'acquitter d'une taxe exceptionnelle de 550 millions d'euros, qui pèsera sur les prix des carburants à la pompe. Nous l'avons déjà abordé, mais cela peut être précisé, ne s'agit-il pas d'une série de mesures qui portera un coût fatal au pouvoir d'achat des Français ?

Je ne sais pas si le coup est fatal... Mais dans tous les cas, l'ensemble de ces mesures pèsera nécessairement sur le portefeuille des Français. Pour être plus précis, la taxation des stocks pétroliers aura un impact sur le prix du carburant, et les autres mesures arrêtées vont peser sur le pouvoir d'achat.

Dans ce budget rectificatif, il y a plus de 7 milliards d'euro de recettes pour seulement 90 millions non pas d'économies, mais de dépenses réaffectées, prises au tiers à notre budget de la Défense. Je le répète, ce gouvernement a un problème de curseur entre économies et impôts supplémentaires ! Ce dernier étant très mal placé.
 

Paradoxalement, le relèvement de 2% du SMIC depuis le 1er juillet coûtera à l’État et aux administrations publiques 500 millions d'euros en 2012, "300 millions d'euro l'année prochaine" et "au total sur la mandature 1,2 milliard", a précisé le ministre du Budget Jérôme Cahuzac. Sachant que cette hausse du SMIC est annihilée par une hausse des cotisations, pourquoi le gouvernement Ayrault s'inflige-t-il des dépenses supplémentaires ?

Il faut considérer en réalité que c'est une hausse du SMIC assez modeste, qui pour l'essentiel n'est qu'une avance sur une hausse préalablement prévue. Il ne s'agit que d'un rite politique post-électoral.
Cela reste une dépense supplémentaire évidemment, et même si elle n'est pas considérable compte tenu de la modestie de l'initiative, ce n'est clairement pas le meilleur choix que le gouvernement aurait pu faire. Pour ma part, le sujet réside davantage dans l'encouragement à l'évolution de carrière de nos concitoyens, en particulier ceux qui ont des revenus modestes. Bien davantage que la politique du SMIC.  


L’Éducation s'est vue attribuer 89,5 millions d'euro de crédits supplémentaires en 2012 pour financer les recrutements prévus à la rentrée, en particulier les 1 000 postes de professeurs dans le primaire et les 500 assistants de prévention et de sécurité. Était-ce une priorité ou valait-il mieux engager une réforme globale de l’Éducation nationale, sur le modèle scandinave ou allemand ?

Je ne suis pas certain qu'il faille faire une réforme globale de l’Éducation nationale, tant l'exercice est périlleux et difficile... Reste que le gouvernement Ayrault a choisi pour la rentrée 2012 de recruter là où il pouvait. Mais il ne recrute pas en fonction des besoins, seulement là où il y a des candidats potentiels.

Le gouvernement sera bien embêté pour recruter dans le secondaire en 2013, puisqu'il n'y a pas assez de candidats. Notre intuition, celle évoquée pendant les campagnes du Printemps, selon laquelle la priorité était de mieux rémunérer les enseignants plutôt qu'en recruter davantage est une réalité qui va mordre à la rentrée 2013, car le gouvernement ne pourra recruter des enseignements supplémentaires du secondaire, sachant que les candidats manquent.

Presse écrite : résister ! 


Une grève a gravement perturbé la fabrication de votre journal, jeudi, empêchant même totalement l'impression des exemplaires destinés à quatre départements des Pays de la Loire. Nous avons été contraints de regrouper en deux éditions les journaux des départements bretons, normands et de la Mayenne. Nous vous prions de bien vouloir nous en excuser.De quoi s'agit-il ? Ni plus, ni moins que de l'avenir, en France, de la presse écrite et peut-être même de sa disparition.
En effet, plusieurs journaux sont en très graves difficultés, notamment deux confrères du Groupe Hersant (Paris-Normandie et L'Union de Reims). Un éditeur belge, le Groupe Rossel, avait formé le projet de reprendre les titres de ce groupe. Mais, pour cela, il exigeait la mise au clair de leur situation et leur remise en équilibre financier. Cela entraînait plusieurs centaines de licenciements. Malgré de longues et difficiles négociations, le Syndicat du Livre CGT a refusé les propositions qui étaient avancées concernant l'accompagnement social des départs de ces personnes. Le Groupe Rossel s'est alors retiré du projet. Le Syndicat du Livre CGT, pour protester et continuer son bras de fer, a appelé depuis Paris à une grève dite de solidarité dans toute la presse française.
C'est ainsi que Ouest-France s'est trouvé dans cette affaire qui ne le concerne en rien. Il faut signaler que seuls sept journaux sur trente-quatre titres de la presse quotidienne régionale ne sont pas parus. La section syndicale du Livre CGT d'Ouest-France a lancé l'ordre de grève auprès du personnel du journal, sans même lui demander son avis, sans même procéder à un vote. Le résultat a été le suivant : en définitive, 74 personnes sur 1 518 salariés se sont mises en grève. Fort heureusement, grâce à la mobilisation des équipes, il a pu être décidé de maintenir l'édition du journal de jeudi qui a été finalement réalisée partiellement.
Bien évidemment, nous ne mettons pas en cause le droit de grève. Nous contestons la méthode autoritaire unilatérale qui ne laisse pas de place au vote des personnels concernés. De plus, nous mettons en garde contre les conséquences économiques de tels mouvements dans les circonstances actuelles.
Difficultés de la presse
Les difficultés de la presse sont réelles : 700 000 exemplaires de quotidiens ont disparu depuis 2007 l'équivalent d'un grand journal  et le recul, hélas, se poursuit. Tout cela se passe sous les coups de la concurrence, née des nouveaux moyens de communication ainsi que de la multiplication des sites web gratuits et des nouvelles télévisions.
De plus, les investissements publicitaires destinés aux journaux ont accusé une baisse brutale considérable ; les petites annonces ont pratiquement disparu de la presse écrite pour se reporter par exemple sur des sites Internet. Ces pertes de recettes sont si importantes qu'elles mettent en cause l'existence même de nombreux titres.
Devant ces problèmes, on reste confondu par l'attitude du Syndicat du Livre CGT car, enfin, ce n'est pas par des non-parutions que l'on pourra finalement maintenir l'importance des tirages de journaux ; pas plus qu'en asphyxiant le malade, on peut espérer le sauver ! Ce n'est pas en exprimant une solidarité par la non-parution que pourront être aidés les titres actuellement les plus menacés !
Nous sommes particulièrement sensibles aux difficultés de nos confrères en péril immédiat. Ils sont victimes, en effet, de pratiques que nous avons réprouvées. Ils ont été achetés, revendus, parfois plusieurs fois. Ils en ont perdu, malgré eux, leur âme, leur flamme, leur rayonnement et leur attrait. C'est une perte lourde pour la diversité de la presse, pour le pluralisme nécessaire à la vie de notre démocratie. Cependant, il ne faut pas se tromper de moyens pour les sauver. Il ne faut pas non plus, au risque de les faire disparaître à leur tour, accroître les difficultés des titres qui se battent encore pour vivre.
Ouest-France dépend, nous le rappelons, d'une association loi de 1901 à but non lucratif, l'Association pour le soutien des principes de la démocratie humaniste. Son objectif n'est pas d'abord le profit, mais l'information. Si nous avons, jusqu'à présent, mieux résisté à la crise, il nous faut pouvoir poursuivre nos adaptations, nos innovations pour encore mieux remplir notre mission. Dans ce but, nous résisterons et nous nous battrons autant qu'il le faudra avec vous et pour vous, chers lecteurs.

Plaidoyer pour la redevance audiovisuelle

Nous avons besoin que l’État contrôle d’une main plus ferme l’audiovisuel, et si l’extension de la redevance aux ordinateurs est une bonne idée, elle est bien peu de chose au regard des immenses responsabilités éducatives qu’a le gouvernement envers petits et grands.
Depuis l’édification des enceintes et des routes, la collectivité bénéficie de biens indispensables et dont chaque individu peut profiter sans payer, prétendant n’y trouver aucun intérêt pour échapper à la contribution qu’on lui réclamerait. C’est l’objet du service public que de prendre en charge ce que le marché peinerait à fournir efficacement mais qui concourt à l’évidence à l’intérêt général.
Parmi les routes, la défense, la justice et l’école, la télévision d’État serait-elle intruse ? Alors que le gouvernement s’apprête à étendre la redevance audiovisuelle aux ordinateurs, on trouvera des hypocrites – et ils sont nombreux – pour nier l’impérieuse nécessité de voir l’État se soucier de notre distraction et de notre correcte compréhension du monde. Comble de mauvaise foi, ils prétendront utiliser leurs ordinateurs pour lire Contrepoints plutôt qu’écouter la bonne parole de David Pujadas. Ils affirmeront sans rougir préférer jouer en ligne que regarder les Z’amours sur France 2. En vérité chacun sait que ces filous téléchargeront en cachette Plus belle la vie, œuvre dont l’humanité n’aurait eu la jouissance si elle se limitait à ces rapaces individualistes.
Mais ces profiteurs ne constituent pas la pire engeance d’égoïstes peuplant l’audience télévisuelle française. Croyez-le ou pas, certains sont si idéologues et bornés, que même contraints de s’acquitter de leur juste contribution au service public, ils préfèrent continuer à regarder des chaînes gratuites. Franchement, quel toupet ! Si le secteur privé pouvait offrir gratuitement ce que l’État facture 125€ l’année, ce serait un scandale. Or, une fois la chose de meilleure qualité payée, pourquoi s’entêter à se cantonner à la version gratuite ? Avez-vous jamais dans un magasin déboursé 125€ pour finalement partir avec un truc gratuit ? C’est pourtant ce que font les gens qui préfèrent regarder TF1, une chaîne totalement gratuite, alors qu’ils ont payé 125€ pour bénéficier des programmes de France télévisions. Qu’attendre d’une discussion avec pareilles têtes de mules ?
On ne saurait pour autant simplement les oublier tant elles sont nombreuses. Leur entêtement à regarder d’autres chaînes dégrade la culture de notre belle nation. Or s’il est clair que le politique dérive vers l’autoritarisme quand il agite l’épouvantail de l’identité nationale, il est tout aussi évident qu’attendre de la République qu’elle ne se préoccupe pas des goûts et des couleurs tient de l’anarchisme le plus délirant. Heureusement, grâce à la sagesse paternelle du législateur, dès que l’un d’entre nous s’égare en regardant Bruce Willis, il doit alors déposer une pièce dans le cochon du trésor public. Et à chaque fois qu’il regarde un film avec Christian Clavier, Aurélie Fillipetti casse sa tirelire pour qu’il puisse s’offrir les popcorns. Songez que sans ce mécanisme, Gérard Depardieu serait peut-être mort de faim !
Il y a le mécénat des arts, mais aussi la promotion des idées. Et c’est une vérité établie par l’Histoire que les grandes idées ont toujours germé de la bienveillance des gouvernants envers les grands intellectuels. Des témoignages l’attestent au moins depuis l’invention de la philosophie par Socrate, enfant chéri que la démocratie athénienne dorlota jusqu’à son dernier souffle. Ce fait historique devrait faire consensus tant il dépasse les clivages : et Voltaire et Rousseau peuvent apporter leur témoignage reconnaissant. Dans cet art, notre télévision publique excelle, faisant d’intellectuels comme Éric Zemmour des leaders d’opinion. On ne transforme hélas plus l’eau en vin gratuitement. Et si ce n’était pour les 125€ dont elles devront s’acquitter cette année, mes concitoyennes n’auraient peut-être jamais connu son opinion sur la féminisation de la société.
Cependant, sur la question politique, certains objectent que l’argent du contribuable est utilisé à des fins propagandistes et profite à des idéologies particulières. Je pense, par exemple, à ces ultralibéraux à la solde des loups de Wall Street pour qui tout est toujours trop socialiste. Pourtant leur analyse ne résiste pas à l’observation objective des faits. Reprenons le cas Zemmour. Certes d’un côté le mécénat fiscal rétribuait 1400€ chacune de ces émissions sur France 2, mais de l’autre côté il subventionne aussi l’amicale des antiracistes qui poursuit en justice notre philosophe de droite préféré à chaque fois que les excès de la liberté d’expression menacent la quiétude du troupeau. Un comptable pourrait donc certifier que le service public est aussi neutre qu’efficace.
Nous l’avons dit au début de ce billet, ce que le service public apporte, c’est ce que l’initiative privée ne pourrait fournir efficacement. Évidemment que si France télévisions était privatisée aucune chaîne ne retransmettrait plus ni le Tour de France ni Roland Garros. D’ailleurs si les chaînes capitalistes étaient prêtes à donner la parole à Audrey Pulvar, le contribuable ne pourrait jamais profiter de sa docte opinion à aussi bon marché qu’il rétribuait l’éclairage avant-gardiste d’Éric Zemmour.
Car oui, l’enjeu principal, c’est la qualité. Et l’immense dynamisme culturel de notre pays dérive aussi de la captation d’un tiers de l’audience télévisuelle par la Télévision d’État, qui sauve tant d’entre nous de la télé-réalité. Et tout français instruit et ouvert sur le monde sait que les pays où l’État abreuve moins l’esprit de ses citoyens sont peuplés d’abrutis. D’ailleurs si les néo-libéraux américanophiles regardaient un peu plus France 2, ils sauraient que le français moyen est bien moins crétin que l’américain moyen convaincu que Dieu a littéralement chassé Adam et Ève du jardin d’Éden. D’ailleurs, eussions-nous taxé plus tôt les ordinateurs, davantage de nos têtes blondes auraient peut-être regardé les frères Bogdanov, éminences scientifiques au service du téléspectateur contribuable, plutôt que de lire n’importe quoi sur internet.
À propos des fables subversives qu’on peut y trouver, savez-vous que l’enquête PISA de l’OCDE voudrait nous faire croire que la culture scientifique des petits américains est supérieure à celle des petits français ? Franchement, j’en serais étonné, car si les redevances reçues par France télévisions et Arte atteignent environ 24€ par habitant en France, l’effort du contribuable au fonctionnement de PBS, équivalent américain, reste en deçà de 2€ par citoyen. Privé de Jamie et Fred, le petit américain est donc nécessairement 10 fois plus bête, c’est mathématique. L’OCDE ne sait pas compter !
Ce qu’on peut regretter, c’est la nonchalance du législateur qui laisse une grande partie de nos concitoyens s’abêtir devant les chaînes réellement gratuites. Nous avons à travers le pays des dizaines de milliers d’Assurancetourix dont le talent n’est pas justement apprécié des ignares et barbares que nous sommes. Pour éviter que ces gens ne doivent travailler dans des commerces, des usines ou des garages comme leurs concitoyens moins talentueux, la loi oblige les chaînes, publiques et privées, à consacrer 15% de leur chiffre d’affaires au financement d’œuvres audiovisuelles françaises. Mais craignant que notre bêtise nous fasse zapper sur une chaîne proposant un programme étranger inepte, les grandes chaînes renoncent souvent à diffuser ces chefs-d’œuvre ou essayent de les refourguer à d’obscures chaînes câblées qui les diffuseront à trois heures du matin afin de respecter les quotas légaux de diffusion d’œuvres nationales. C’est du vol ! Qu’on arrête de nous prendre pour des enfants… Ces chefs-d’œuvre, nous les avons payés, nous avons donc le droit d’en profiter !
La situation serait évidemment bien pire sans ces quotas providentiels, mais ne soyons pas naïf. Le CSA a beau jeu de rappeler à Disney Channel ses obligations de diffusion d’œuvres françaises. Cependant un simple avertissement n’aura pas raison du sectarisme des responsables de cette chaîne. Ne soyons pas candides, seule une action coercitive est susceptible d’obtenir le remplacement de Mickey par Casimir sur cette chaîne capitaliste.
Donc oui, nous avons besoin que l’État contrôle d’une main plus ferme l’audiovisuel, et si l’extension de la redevance aux ordinateurs est une bonne idée, elle est bien peu de chose au regard des immenses responsabilités éducatives qu’a le gouvernement envers petits et grands.

 La redevance devrait aussi s'étendre sur les miroirs, on y peut regarder les écrans de TV et des ordinateurs !

Jean-Pax Méfret : “Sur l’autre rive… en 1962”

Des déracinés dans une France marâtre 

Dans un précédent livre de « souvenirs » – et quels souvenirs, mon Dieu… –, 1962, l’été du malheur, Jean-Pax Méfret avait dit « la tragédie des pieds-noirs », certes, mais aussi, car son exemple est emblématique, son histoire. Celle d’un gamin d’Alger emprisonné, pour cause d’Algérie française, dans les geôles gaullistes. Il n’avait alors que 17 ans…
Sur l’autre rive… en 1962 est la « suite » de cette « histoire ». Avec un bandeau significatif : « Que les pieds-noirs aillent se réadapter ailleurs » (Gaston Deferre, maire de Marseille, 26 juillet 1962). Car, en cette époque du cinquantenaire, et au moment où l’on voit des pieds-noirs aller faire la danse du ventre à Marseille (avec des Gaudin), à Nice (avec des Estrosi), à Perpignan (avec des gens que je ne veux même pas qualifier), il n’est pas mauvais – et Jean-Pax le fait avec une plume d’historien, mais aussi avec les mots d’un « blessé » dont les plaies ne cicatrisent jamais – de rappeler comment les déracinés furent « accueillis » en France.
Les Deferre, les communistes, les gaullistes, tous la mano en la mano pour ostraciser ces naufragés de l’Histoire à qui l’on va refuser des canots de sauvetage et tout faire pour qu’ils se noient. « L’un criait “assomme”, l’autre criait “tue” », comme disait ma grand-mère. Pour le sinistre Louis Joxe, c’était de la « mauvaise graine de fascisme ». Pour Robert Boulin, « des vacanciers ». Pour De Gaulle, personnage au racisme effrayant, des étrangers : « Ce ne sont pas des Français, ils ne raisonnent pas comme nous. » Quant à Sartre, il avait donné le la : « Abattre un Européen, c’est faire d’une pierre deux coups, supprimer en même temps un oppresseur et un opprimé. Restent un homme mort et un homme libre. » Une France marâtre ? Ce n’est rien de le dire. Nous n’avons rien oublié. Nous n’avons rien pardonné.
Mais, par-delà l’Histoire, comme dans 1962, l’été du malheur, il y a aussi, dans Sur l’autre rive… en 1962, l’histoire de Jean-Pax Méfret et de sa famille. Sa mère et son frère qui, dans l’hiver 1962 (cette année-là le thermomètre oscilla de moins dix à moins vingt-cinq), débarquent à Rouen. Pourquoi Rouen où ils ne connaissent personne, où ils n’ont pas de toit, sans bagages, sans argent ? Parce que c’est là que Jean-Pax a été emprisonné (1). Et là que, « libéré », il sera assigné à résidence avec interdiction de sortir du taudis où sa famille a trouvé refuge.
La vie des pauvres. « On a mangé ensemble / Le pain de la misère / On a souffert ensemble / En traversant la mer. » (chanson de Jean-Pax, Le Pain de la misère). La soupe populaire. Le vestiaire de la Croix-Rouge pour récupérer des vêtements chauds. Un duffle-coat hors d’âge, « trop large, trop long, trop grand ». On s’écrase quand on vous fait la charité. Et en plus, on dit merci… « Le manteau qu’j’ai / Sur les épôles / Même pas je savais / C’que c’était » (chanson de Jean-Pax, Un Noël à Alger). France, qu’as-tu fait de notre jeunesse…
(1) A la prison… Bonne Nouvelle…
• Editions Pygmalion. A commander à diffusia.fr ou au téléphone au 09 52 66 16 21. Diffusia, BP 20005, 75462 Parix Cedex 10.

Valérie Trierweiler et «la femme qui gène»

Valérie Trierweiler est de retour. De retour dans les colonnes de Paris Match où la compagne de signe une chronique sur la biographie de Rosalind Franklin*, la découvreuse de la structure de l'ADN. Un papier intitulé « Une femme qui "gène" par Valérie Trierweiler ».

Si le titre contient un jeu de mots en lien avec le sujet - les gènes - difficile de ne pas en avoir une double lecture après l'affaire du tweet et les commentaires qui ont suivi...

Trois semaines après ce fameux tweet de soutien à l'opposant à Ségolène Royal, Olivier Falorni, la Première dame de France revient, discrètement, sur le devant de la scène. Elle a assisté, mercredi, aux obsèques d'Olivier Ferrand, le jeune député socialiste et président de Terra Nova, décédé d'une crise cardiaque le week-end dernier. On l'a vue, aussi, lors des 10 ans du théâtre du Rond Point, le 30 juin dernier à Paris. Mais toujours en retrait, à quelques mètres de François Hollande. Présente avec lui dans la berline présidentielle, elle en descendra après et n'apparaîtra pas à ses côtés... Elle sera néanmoins bien présente dans la tribune avec le président lors du défilé du 14 juillet.

Effacée du site de l'Elysée

Mais l'affaire du « tweetgate » a laissé des traces. « J’ai commis une erreur », a confié la Première dame à une de ses amies. Une erreur qu'elle paiera comptant. Effacée du site de l'Elysée où plus aucune mention n'est faite à celle qui avait jusqu'alors une rubrique – coïncidence, répondra-t-on au Palais. Ses relations avec les enfants du président ne sont pas au beau fixe. « Ils ont certes fait des efforts avec Valérie pour leur père. Thomas a joué le jeu, pendant la campagne présidentielle notamment, mais là, c’est fini», déclarait récemment un élu socialiste cité par Gala et Voici.

Reconquérir l'opinion. C'est aussi, et surtout, le déferlement de réactions, de propos et commentaires violents, les petites piques de celles qui l'on précédée à l'Elysée, mais aussi l'image que renvoie d'elle sa marionnette des Guignols de l'Info, qui ont meurtri Valérie Trierweiler. Ses proches ont évoqué un « lynchage » médiatique, selon RTL. Pour regagner les faveurs de l'opinion, la Première dame semble mettre à profit les recommandations insistantes de discrétion qui lui ont été faites... Ainsi, Paris Match et Voici évoquaient la semaine dernière une note de « recadrage » qui lui aurait été remise par les conseillers du président l'incitant à « réduire le nombre de personnes membres de son cabinet, de fermer son compte Twitter et de réfléchir à son avenir professionnel ». Une chronique au titre à double sens, ça compte ?

*« Rosalind Franklin. La “Dark Lady” de l’ADN », de Brenda Maddox, éd. Des Femmes-Antoinette Fouque, 281 pages, 20 euros.

La clé de l’univers 


On le sait désormais : la science est capable de trouver une aiguille dans une botte de foin. Elle peut bousculer Dieu, ou l’idée que l’on s’en fait ce qui revient finalement au même, et le Diable qui aime tellement se cacher dans les détails et qui n’est plus à l’abri nulle part.
En validant une théorie élaborée il y a un peu plus de cinquante ans, la découverte du « Boson de Higgs » ouvre un champ infini. Infiniment petit, ce qui en physique quantique est paradoxalement la promesse d’immenses horizons.
Il s’agit en effet là d’une découverte fondamentale. Comparable à celle de Newton établissant la loi universelle de la gravitation au XVIIe siècle, nous dit-on.
Pas étonnant que les scientifiques en parlent comme les Vénitiens devaient autrefois parler de la Canée. Qu’ils évoquent le « chaînon manquant de l’univers », le « Graal » ou bien encore la poétique mais un tantinet blasphématoire « particule de dieu ».
Du coup, ce matin, on se sent tout penaud de s’être levé et couché tant de fois sans jamais imaginer un seul instant qu’autour de nous flottait un tel parfum de mystère. Sans même jamais ne serait-ce que soupçonner l’existence de cette mondialement célèbre particule, sans laquelle nous ne serions pas.
Pour le commun des mortels, la dimension de l’annonce faite hier reste difficilement appréciable. Mais elle a déclenché une telle vague d’euphorie dans un monde d’ordinaire tout en retenue qu’on veut bien croire qu’il s’agisse là d’un moment historique. Historique à 99,999 %, le scientifique étant un homme par nature prudent et qui ne s’engage pas à la légère.
Si les plus grandes aventures se racontent mal, celle-ci a en revanche tout pour nourrir les épopées et l’imaginaire. L’univers est le dernier espace à conquérir et on y a posé le pied.