TOUT EST DIT

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jeudi 28 juin 2012

Robert Sabatier, auteur des Allumettes suédoises, est décédé

L'écrivain français disparaît ce jeudi à l'âge de 88 ans, laissant derrière lui une oeuvre engagée et poétique. 
Robert Sabatier est décédé ce jeudi en région parisienne à l'âge de 88 ans, a-t-on appris auprès de son éditeur Albin Michel.  
Doyen de l'Académie Goncourt, l'écrivain s'est imposé comme un grand de la littérature populaire avec Les allumettes suédoises, une saga autobiographique qui connut un énorme succès à la fin des années 1960, mais aussi comme un poète exigeant, auteur d'une monumentale Histoire de la poésie française. Cet enfant de Montmartre, qui peuplait ses livres de personnages truculents et fit revivre dans une vingtaine de romans le Paris gouailleur, insouciant, un peu anar, des années 1930. "J'écris par besoin, pour essayer de rejoindre quelque chose que j'ignore", disait-il, encore étonné par son parcours improbable dans la vie littéraire.  
Né le 17 août 1923 à l'emplacement de ce qui fut le domicile de Verlaine, il passe son enfance sur les escaliers de la butte. Orphelin à 12 ans, il quitte pourtant Paris pour la Haute-Loire où il apprend le métier de typographe. En 1943, le jeune Sabatier prend le maquis, puis rentre à Paris au lendemain de la guerre pour vivre sa passion de la littérature. Son premier roman, Alain et le nègre (1953), est salué par la revue Les lettres françaises comme "le premier roman français antiraciste" et adapté par Julien Duvivier au cinéma.  
Une saga autobiographique vendue en millions d'exemplaires
Encouragé par Albert Camus et quelques figures de l'après-guerre, il publie une quinzaine de livres en quinze ans. Mais c'est avec Les allumettes suédoises (1969), premier volet des aventures du jeune Olivier, orphelin lui-même, qu'il rencontre le succès populaire. Une histoire de poulbot pur jus, dont il eut bizarrement l'idée en observant jouer des gamins de New York. "Le manuscrit a été assez vite achevé et je l'ai porté à mon éditeur qui a trouvé cela charmant, tout en prédisant que cela ne se vendrait pas parce que mon enfance n'intéressait que moi", racontait-il, la pipe vissée à la bouche. Les allumettes suédoises ratent de peu le Goncourt, mais Sabatier ajoutera sept épisodes en trente ans aux aventures d'Olivier: Les noisettes sauvages (1974), David et Olivier (1986), Olivier et ses amis (1993)... La saga s'est vendue depuis à des millions d'exemplaires dans le monde et France 2 a adapté Les allumettes... en 1996 pour un téléfilm en trois épisodes.  
Un poète parmi les jurés du Goncourt
Recalé au Goncourt, Robert Sabatier entre pourtant en 1971 au jury du prix, dont il sera un membre influent pendant une quarantaine d'années. Le romancier célébrissime mettait la poésie au dessus de tout. Au point de lui consacrer une Histoire de la poésie française en neuf volumes, pour laquelle il disait avoir lu 25 millions de vers en 40 ans. Il a publié lui-même une dizaine de recueils de poèmes -Les fêtes solaires (1952), Dédicace d'un navire (1984)... -dépouillés, austères, à l'opposé de la prose truculente du romancier. En 1969, il obtient le Grand prix de poésie de l'Académie française. L'auteur de best-sellers savait aussi être plus grave, avec des romans comme Les années secrètes de la vie d'un homme(1984) ou Diogène (2001). Sabatier, gamin de Paris, ne rigolait pas avec la littérature. En 1994, il n'hésita pas, à 71 ans, à boxer l'écrivain Louis Nucéra avec qui il était en désaccord pour l'attribution d'un prix littéraire: "Ca s'est transformé en pugilat au cours duquel j'ai flanqué une raclée à Nucéra", racontait-il, amusé de cet épisode inattendu de la vie littéraire. 

La raison et la vertu

Dans le présent article, je vais m'appliquer à démontrer pourquoi nous ne pouvons pleinement développer notre raison sans notre vertu. Ce faisant, je montrerai également qu'il est une autre voie pour arriver à la raison que la religion et je nommerai cet autre moyen d'y accéder la voie laïque.

En préambule, rappelons que j'entends par vertu la même chose que le dictionnaire, à savoir : "Force morale avec laquelle l'être humain tend au bien, s'applique à suivre la règle, la loi morale. [...] Disposition à accomplir des actes moraux par un effort de volonté" (Le Robert). Pour ma part, je la définirai comme suit : elle est le désir ardent d'accomplir le bien.
Notons aussi qu'il y a au moins trois sortes de rationalité qui couvrent tout le spectre de nos acceptions du mot de raison : la rationalité pratique, qui nous permet d'assouvir nos désirs, la rationalité scientifique, qui nous permet d'expliquer le monde, et la rationalité morale, qui nous permet de critiquer nos propres désirs pour leur substituer des buts moraux. On voit ainsi que, si la rationalité pratique est, pour parodier Hume, "la servante des passions", la rationalité morale, au contraire, est leur maîtresse en les soumettant à ses commandements. Mais l'on va comprendre ici que la rationalité morale a aussi besoin de nos passions, et plus particulièrement de la vertu, pour pouvoir se déployer. Car la vertu est bel et bien une passion en tant que "désir ardent de faire le bien".
Admettons que nous ne soyons pas du tout rationnels. Comment alors devenir moraux ? Il y faut la vertu et nous allons voir comment elle naît.
Les Grecs disaient que l'être humain idéal possédait au plus haut point la kalokagathía. Le mot est composé des adjectifs kalós kaì agathós qui signifient littéralement "bel et bon". Pour les Grecs, la bonté était inséparable de la beauté. La bonté morale était aussi une beauté morale. Nous retrouvons en français cette intuition quand nous disons de quelqu'un de bien qu'il est une "belle personne", qu'il a une "belle personnalité".
Il est donc inutile d'être rationnel pour aimer la bonté morale ; il suffit de l'admirer en y décelant la kalokagathía des Grecs. Et la vertu consiste précisément en ce désir ardent, né de l'admiration de la bonté morale, de l'imiter et de devenir bon soi-même.
La vertu est même, en dehors de la religion, le seul autre moyen de se "convertir" à la rationalité morale. C'est pourquoi je l'ai nommée voie laïque.
Nous pouvons en effet nous convertir à la bonté morale pour obéir à l'ordre que nous donne une divinité d'agir ainsi. C'est la voie religieuse. Cette dernière comporte cependant une contradiction ou, du moins, une tension internes. Comment en effet se convertir à la rationalité morale au nom de religions dont les dogmes, par ailleurs, sont une insulte à l'intelligence et à la raison ? Comment être raisonnablement bons en effet au nom d'une religion qui, par exemple, nous demande de déraisonnablement croire que son prophète est le fils de la divinité, qu'il est revenu à la vie trois jours après son exécution et qu'il est ensuite "monté au ciel", si tant est que cela veuille dire quelque chose, etc. ?
Inversement la raison toute seule et par elle-même ne peut nous amener à être rationnellement bons car elle se heurte rapidement aux limites que lui impose la faiblesse de la volonté. Par exemple, je peux être rationnel et savoir que la cigarette est mauvaise pour la santé, mais cette connaissance seule ne suffira pas à me faire arrêter de fumer, tous les fumeurs invétérés le savent bien.
La vertu est donc une passion irrationnelle, un amour irraisonné de la raison, qui nous poussera à écouter notre rationalité et à arrêter de fumer. De la même façon, je peux très bien savoir qu'il est mal, moralement inacceptable de faire ceci ou cela et, pourtant, ne pas pouvoir m'empêcher de le faire. Pour m'en empêcher, c'est-à-dire pour obéir aux recommandations de ma raison qui voudrait que je fisse le bien, il me faudra l'assistance d'une autre passion, plus puissante que celle qui me pousse à faire le mal tout en sachant que c'est mal, et cette autre puissante passion est la vertu.
Bien sûr, la vertu en elle-même est dangereuse si elle n'est pas tempérée par la raison. On l'a bien vu sous la Terreur où la vertu était constamment invoquée par Robespierre et Saint-Just pour justifier les actes les plus irrationnels.
Mais, inversement, la raison sans la vertu sera impuissante. Il se pourrait par exemple que j'adhérasse à la rationalité pratique mais que je ne voulusse pas passer ensuite au stade supérieur d'accomplissement de la raison, la rationalité morale. C'est par exemple le cas de ceux qui, à l'instar de la philosophe américaine Ayn Rand, affirment la pertinence de l'égoïsme rationnel. Or il n'est pas rationnel d'être égoïste, en quoi l'égoïsme rationnel est une contradiction dans les termes, puisqu'il n'est pas moralement rationnel de sacrifier les intérêts des autres, si besoin est, à ses propres intérêts, ce que l'égoïsme soi-disant rationnel de Rand nous recommande pourtant de faire.
Cependant, admettons que je vous démontre ainsi l'inanité de cet égoïsme pseudo-rationnel et que vous me répondiez "Oui, et alors ?". Vous pourrez très bien continuer à vous servir de votre rationalité pratique sans vous astreindre à la rationalité morale car, après tout, rien ne vous y oblige.
Je pense d'ailleurs que ce dernier cas est de même farine que celui de la faiblesse de volonté : dans les deux exemples, vous avez beau savoir que ce que vous faites est mal, rien n'y fait.
Pour vous convertir à la rationalité morale, il faut donc que vous succombiez à une passion plus forte que votre envie de fumer ou votre égoïsme et cette passion est la vertu.
Cela explique pourquoi des gens très intelligents peuvent être de parfaites crapules morales et, réciproquement, des gens peu instruits de vrais héros : les premiers sont dépourvus de ce que les seconds ont en abondance, la vertu.
On voit donc par là qu'il ne saurait y avoir d'accomplissement de la raison sans les passions : la raison est vaine sans la vertu. Mais, tout à l'inverse, la vertu est dangereuse sans la raison. Les passions ont tout autant besoin de la raison.
Si nous ne sommes pas encore rationnels, alors la vertu, avec la religion, est le moyen premier d'accéder à cette rationalité morale qui, en retour, guidera notre vertu. Or on peut être vertueux sans être religieux, sans croire le moins du monde en une divinité ; donc la vertu trace effectivement devant elle une voie laïque vers le bien.
Comment cultive-t-on la vertu ? Par l'exemple de sa propre conduite et par l'éducation que l'on donne à ses enfants.
Si je ne suis pas encore rationnel, notamment dans l'enfance, la vertu est en effet le seul moyen de justifier à mes yeux mon effort pour être moral. Car la vertu me représente le bien comme beauté morale, beauté que je perçois dans l'être moral et que je veux imiter par admiration pour lui.
Si je ne suis pas encore rationnel, je n'ai pas forcément raison d'être vertueux car quelque Ayn Rand particulièrement retorse pourrait me démontrer que le fait que nous trouvions tous unanimement belle la bonté morale ne prouve en rien que nous ayons raison de vouloir l'imiter. Il se pourrait en effet que nous eussions tous très mauvais goût de la trouver belle. Oui, mais comme je ne suis pas encore rationnel, nul argument rationnel ne pourra me convaincre ni d'être bon ni d'être plutôt égoïste. Seule la vertu le pourra et nous devrons nous en contenter.
Ce n'est que postérieurement et non antérieurement à notre conversion à la rationalité morale par le truchement de la vertu que nous comprendrons la justification rationnelle de la vertu.
Car même si la vertu n'est pas rationnelle, il est en effet nécessaire de recourir à cette déraison pour passer de la raison en puissance à la raison en acte. La vertu est l'amour passionnel et déraisonnable de la raison. Elle peut être vertu religieuse ou vertu laïque.

Dépense publique, austérité et croissance

Le débat  doit être tranché : il faut choisir entre austérité et croissance. Ce sera nécessairement soit l’un, soit l’autre, ces deux notions s’excluant mutuellement. C’est en tout cas ce que les médias ressassent à longueur de journée. Évidemment, poser la problématique sous ces termes biaise le débat.

Cela correspond d’ailleurs à une manipulation de rhétorique assez grossière, identifiée par Arthur Schopenhauer dans son livre L'art d'avoir toujours raison sous la dénomination de ‘fausse alternative’. Il s’agit de donner le choix entre deux options A et B, suggérant par là même que l’univers des possibles se réduit à ces deux choix et qu’ils s’excluent l’un l’autre. Si nous ne sommes pas pour B, alors nous sommes nécessairement pour A. Ou alors vous êtes pour A, donc vous êtes contre B. Et pour mieux emmener son interlocuteur où l’on veut, une des deux propositions doit être communément admise. Dans le cas présent, nous ne pouvons être que pour la croissance, donc nous devons rejeter l’austérité. CQFD.
D’ailleurs, les médias ne cessent de le rappeler : l’austérité a déjà été testée et est responsable de la situation économique actuelle. Et qui plus est, elle vient d’être rejetée en bloc par les électeurs grecs et français. On aboutit ainsi à cette conclusion absurde que pour sortir de cette crise de la dette, il faut… plus de dettes !
Selon wiktionnaire, l’austérité est une « politique visant à réduire la dépense publique ». Regardons donc l’évolution des dépenses publiques sur les 5 dernières années connues :

On voit que la zone euro est loin d’avoir subi une cure d’austérité massive puisque l’on observe juste un léger reflux en 2010 et 2011, après une nette augmentation entre 2006 et 2009. On ne constate des baisses qu’en Espagne et surtout en Grèce. Sinon, les dépenses publiques restent à chaque fois au-dessus du niveau d’avant crise. La France a de son côté augmenté de manière ‘remarquablement’ régulière ses dépenses publiques. Celles-ci sont passées de 952,6 à 1 118,5 milliards d’euros entre 2006 et 2011, soit une progression de 165,9 milliards d’euros.
Pour compléter voici ci-dessous les évolutions non plus en euros courants mais en pourcentage du PIB

On le voit clairement, les dépenses publiques ont significativement augmenté jusqu’à 2009 avant de redescendre en 2010 et 2011, sans retrouver leurs niveaux de 2006. À noter que la décrue la plus faible entre 2009 et 2011 a eu lieu en France, là où précisément les dépenses publiques étaient pourtant les plus élevées.
Les Français ne sont toutefois pas aussi réticents à l’austérité que l’on veut bien le croire. En effet, un récent sondage montrait que pas moins de 60% d’entre eux plébiscite cette solution pour relancer la croissance. De nombreuses études (par exemple ici et ) ont d’ailleurs montré que pour ramener un budget à l’équilibre il convenait de privilégier les baisses de dépenses plutôt que les hausses d’impôts. Cette deuxième étude, menée par l’American Enterprise Institute, détermine même une configuration optimale : 85% de baisse des dépenses et 15% de hausse des impôts.
Mais l’austérité entraînerait-t-elle une baisse du niveau de vie ? Réduire les déficits affecte nécessairement le train de vie : on vit toujours mieux à crédit qu’à budget équilibré ! Mais chacun comprend que cela n’est pas un mode de vie soutenable (même pour un État), que la fuite en avant ne peut durer éternellement et que la réalité finit toujours par nous rattraper. Quant au niveau absolu des dépenses publiques, il est neutre pour le pouvoir d’achat global des citoyens d’un État. En effet, comme l’avait justement noté l’économiste français Frédéric Bastiat, « l'État ne peut rien donner aux citoyens qu'il n'ait commencé par le leur prendre ».
L’augmentation des dépenses publiques, qui a creusé les déficits, est défendue par la théorie keynésienne comme un remède censé pallier une baisse de l’activité économique. Pour analyser l’efficacité de cette relance keynésienne, on étudie donc la corrélation entre la croissance et l’évolution de la dépense publique :

Alors que l’on aurait pu s’attendre à court terme à une augmentation (certes payée à crédit) de l’activité économique plus importante dans les pays ayant procédé à une relance keynésienne, les résultats empiriques font au contraire apparaître une corrélation négative de -20% entre les deux variables. L’augmentation des dépenses publiques pour relancer la croissance n’est donc en général même pas efficace à court terme, elle est contre-productive.

Le destin de l'Europe est-il suspendu à l'état psychologique d'Angela Merkel ?

"Moi vivante, il n'y aura pas d'eurobonds". La chancelière a catégoriquement rejeté mardi l'idée de mutualisation des dettes avancée par Hollande. La politique allemande du "nein" obsessionnel aux propositions européennes en général, et aux propositions françaises en particulier, est-elle l'expression de la personnalité, de ses convictions, ou simplement le reflet de la culture allemande ?
L’intransigeance allemande, le « Nein » obsessionnel de la Chancelière à toutes les propositions, aux propositions Françaises en particulier, croissance, euro-bonds, assouplissement vis-à-vis des Grecs, prennent une dimension tragique. L’Allemagne est-elle sur le point de quitter l’Euro et l’Europe ? Le veut-elle ? En prend-elle le risque lucidement et délibérément ? Est-ce l’appel du vide ou la tentation d’une  rupture : « du passé faisons table rase ? ». Prétendrait-elle se débarrasser des chaines  d’une conception dépassée de l’Europe pour aller vers un futur européen riant et heureux ?
Cette politique, est-elle, celle personnelle, d’Angela Merkel ? La Chancelière  exprimerait dans une attitude cabrée, une personnalité, une culture et des convictions essentielles.  Ou bien, est-ce la traduction de ce que « tous les Allemands » pensent ? Pourtant, cette expression même, «  Tous les Allemands », mérite qu’on s’interroge sur son vrai sens.
C’est par là qu’il faut commencer pour comprendre : l’attitude de l’Allemagne est-elle l’attitude de « tous les Allemands » ? « Tous les Allemands » ont vécu une expérience « Union Monétaire ».  Ils n’en sont pas morts, ni ne se sont retrouvés ruinés mais la fusion des deux Allemagnes n’a pas été  un petit bout de chemin sympathique vers l’unité. Lorsque les lumières de la fête unitaire se sont éteintes, le petit matin est arrivé, blême et glacé.
Les Allemands de l’Est, les «Ossi» », ont découvert un monde auquel ils ne s’attendaient pas qui les a infériorisés et ruinés. Ils ont payé cher, moralement et socialement,  les paysages ensoleillés que leur annonçait H.Kohl. Les Allemands de l’Ouest, les «Wessi» », quant à eux, ont payé pour ensoleiller les paysages ! En vingt ans, 1300 milliards d’euro, la moitié du PNB allemand de 2008, 65% de la dette publique allemande auront été déversés sur l’Est de l’Allemagne, peuplée,  aux yeux des «Wessi» » de paresseux, d’incapables et de profiteurs. Aujourd’hui, l’Unité allemande est faite des aigreurs de l’Est et des rancœurs de l’Ouest.
Alors, payer pour les Grecs ? Peut-on imaginer que les Allemands l’envisagent comme une bonne nouvelle ? Même si l’addition est moins élevée?
Les «Ossi» ne peuvent décemment pas prendre le problème grec à cœur. N’ont-ils pas été, « les Grecs de l’Allemagne » ? La Chancelière Allemande est une «Ossi». Elle a vécu cette contradiction sociale et morale : être une «Ossi» pour qui le meilleur vient de l’Ouest et être considérée par ses « compatriotes Wessi» comme membre d’une sous-catégorie d’incapables et de paresseux. Par extension, la Chancelière ne peut pas se présenter comme le défenseur d’une Europe ruinée et malmenée. Une «Ossi» qui défendrait des frères en laxisme, laisser-aller et amateurisme ! Y croirait-elle elle-même ? Toute attitude compassionnelle ne lui est-elle pas interdite, à elle qui a peut-être envie d’être réhabilitée pour devenir une authentique Allemande?
Les Allemands, «Ossi» ou «Wessi», n’ont pas envie de recommencer le film.
C’est aussi une bonne occasion de rompre avec le passé ! Celui du poids des responsabilités. Celui où il fallait se taire ou se limiter à dire « oui » aux bonnes idées françaises. La Chancelière se conformant et répercutant l’hostilité des Allemands à un nouvel effort pour une Union, quelle qu’elle soit, leur permet  de briser les chaînes de la Défaite de 1945. La Chancelière se fait ainsi le héraut de trois générations d’Allemands. Celle de l’après-guerre qui a dû dire pardon pour les fautes des générations antérieures. La seconde, priée d’être reconnaissante aux Alliés, à qui elle devait liberté et protection. La troisième, celle de l’après Empire Soviétique, qui juge qu’elle ne doit plus rien à personne et qui estime avoir assez payé, moralement et économiquement pour tous. Ce n’est pas une mission difficile pour elle : La chancelière ne doit rien aux Vieux Européens Occidentaux. Elle n’était, pendant qu’ils construisaient l’Europe, qu’une «Ossi» » !
Cette politique de rupture que semble affectionner la Chancelière ne serait alors que la façon nouvelle dont l’Allemagne entend se comporter en Europe et, plus tard, dans le monde : elle larguerait les amarres qui la retenaient encore prisonnière du passé et  appellerait les peuples et les gouvernements d’Europe à suivre l’idée allemande, quitte à ce que cela soit dur au début et que cessent les plaisirs de la facilité. Quand elle en appelle à davantage de Fédéralisme, quand elle annonce que rien n’est plus possible sans Unité renforcée, elle sait qu’elle prend à revers les Français qui ont toujours voulu donner des leçons « d’européanisme » et les Anglais qui n’en ont jamais voulu. Dans tous les cas, elle rompt avec les tenants d’une « vieille idée de l’Europe » comme avec ses « vieux adversaires ».
Ce serait donc positif ? L’Allemagne, simplement, voudrait dire des choses simples à l’Europe, pour l’Europe ! La Chancelière ne détruirait pas : elle proposerait de construire le futur sur de nouvelles bases.
Mais lesquelles ? Et quel futur ? La politique veut le bonheur des peuples. Quel bonheur ? Parce que si on sait bien ce dont la Chancelière ne veut pas et ce qu’elle ne veut plus, on ne sait pas ce qu’elle veut. Or, le « plus de fédéralisme », ça ne se mange pas, ça ne donne pas de travail, ça n’a jamais été une garantie de croissance économique. La Chancelière a-t-elle seulement des idées précises sur ce que doit être l’Europe du futur, cette « nouvelle Europe » que les Allemands appelleraient de leurs vœux, qui serait meilleure et coûterait moins cher ?


SMIC 
Coup de pouce au smic : dans l’œil, ouais ! Tous les observateurs rigolent (sauf les syndicats) : 1,4 d'inflation, 0,6% d'augmentation= une baguette de pain par semaine !

Le rapport pipeau du Conseil économique, social et environnemental sur la dette publique

Le Conseil économique, social et environnemental (CESE), vaste organe de concertation lourdement subventionné, vient de publier un rapport intitulé : « La dette : un pont entre passé et avenir ».
Le rapport publié est loin d’apporter une analyse et des propositions de qualité. Il s’agirait presque d’une gentille mascarade, censée prouver que la dette n’est pas aussi capitale que ça, et que des arrangements à la marge seraient possibles, quitte à créer un autre modèle de société, dont rien ne sera dit…

À la lecture approfondie de ce rapport, pas de propositions nouvelles autre que des vœux pieux formulés dans un langage aux circonvolutions et euphémismes navrants : « évaluer systématiquement les niches fiscales », procéder « à une véritable évaluation des politiques publiques », et une « analyse critique » des coûts de protection sociale ou mettre en place « un nouveau modèle de développement responsable et durable, créateurs d’emploi »…
La mesure phare du rapport semble être la préconisation de modifier le rôle des agences de notation, et de créer « un gendarme des agences de notation » qui seraient (avec une certaine légitimité, reconnaissons-le) « incapables d’anticiper les crises financières ».
On aurait à ce sujet une critique des administrations en tout genre des multiples instances publiques de contrôle qui ont également échoué dans cet exercice. Mais l’analyse de la responsabilité de l’État semblait ne pas faire partie des objectifs du rapport.
Plus grave que l’absence de propositions concrètes, ce rapport, regorge d’une jolie collection de perles et d’approximation idéologiquement grossières. Les pires sont celles imputant l’origine de l’endettement des États depuis les chocs pétroliers à la fin des politiques Keynésiennes au profit de « politiques plus libérales », du « dogme de l’économie néolibérale mondialisée », favorisant « une vision de plus en plus à court terme pour attirer des capitaux »… S’en suivent les litanies à l’encontre de la dégradation du partage de la valeur ajoutée travail / capital (qui n’a pas bougé en France)…

La dépense  publique a pris 10 points depuis 1980

Et encore ! La malhonnêteté devient patente quand le texte laisse entendre que les baisses d’impôts opérées depuis 2000 sont responsables de la plus grosse partie de la dette (au moins 400 milliards), alors que le niveau de prélèvements obligatoires  est resté à « un niveau remarquablement stable depuis plus de 15 ans » (Graphique 3 du rapport (page 12) à l’appui).
Le même graphique vient d’ailleurs contredire l’affirmation du rapport sur la tendance à la baisse des dépenses publiques (hors crise) alors qu’elles ont pris au moins 10 points depuis 1980 (par rapport au PIB) !
Enfin, pour couronner le tout, des sources largement orientées, aussi bien dans le choix des personnes auditées que dans les publications citées en références. Sur les 6 personnalités nommées, 4 sont ancrées résolument à gauche. Pour contrebalancer le parti pris idéologique, un seul parlementaire, Gilles Carrez, plutôt modéré (partisan de l’équilibre budgétaire) et un spécialiste de la finance (Dautresme) sont appelés à la rescousse.
Les références bibliographiques sont encore plus parlantes et placent clairement la barre à gauche : 27 publications, livres et articles cités, dont 10 pour la seule revue Alternatives Économiques, 5 ouvrages dans la mouvance des idées écologistes et d’Attac (par exemple : « Les dettes illégitimes, quand les banques font main basse sur la politique publique »). Les publications pouvant être classées dans le registre libéral ou financier sont au nombre de 5 seulement.
Vu le parti pris de l’étude, se cachant à peine de son idéologie, pas étonnant que l’ensemble des représentants des entreprises aient voté contre l’avis !
L’indigence du rapport et la faiblesse des propositions porteraient à sourire si le CESE n’était pas financé par le contribuable, pour la bagatelle de 40 millions € par an. Il conviendrait de mettre un terme à son existence une bonne fois pour toute, Attac et Alternatives économiques n’ont pas besoin d’un organe subventionné pour faire entendre leurs thèses

Entre idéologie et banalité


Heureusement qu’il y a la philo. Cette particularité française de faire plancher les candidats au baccalauréat, quelle que soit leur orientation, est une survivance étonnante d’une époque où l’examen ouvrant aux études supérieures vérifiait, aussi, une capacité à penser, à argumenter, à analyser. Les sujets de cette année – je m’en tiendrai aux séries scientifiques et littéraires – comportaient de beaux sujets de dissertation.
« Avons-nous le devoir de chercher la vérité ? » Et : « Serions-nous plus libres sans Etat ? » De facture classique, les sujets de philosophie des Terminales S permettaient une réflexion de fond. Pour les littéraires, la richesse des dissertations pouvait être grande aussi, voire magnifique : « Que gagne-t-on en travaillant ? » Et : « Toute croyance est-elle contraire à la raison ? »
Se posent tout de même deux problèmes. Celui de la capacité des jeunes à raisonner, rudement mise à mal chez beaucoup par une formation qui réduit l’analyse à la portion congrue et aboutit à ce que la plupart des élèves de Terminale ne savent pas tirer une idée générale d’un texte. Et – deuxième difficulté – la charge idéologique des sujets, qui peuvent aboutir à une correction orientée. Il n’est pas certain que le fait de citer Benoît XVI et ses réflexions sur les nécessaires rapports entre foi et raison assure une bonne note…
Pour les autres matières, les épreuves ont varié entre l’encyclopédique (et donc la superficialité), le banal et le carrément orienté.
Les textes à étudier à l’épreuve de français anticipée étaient pourtant rassurants, eu égard à l’insistance des autorités éducatives à mettre au programme des œuvres lestes et des films « explicites ». Les « S » devaient se pencher sur la satire, à travers quatre poèmes de Du Bellay, La Fontaine, Verlaine, Rimbaud – on se dit qu’ils apportent par ailleurs la preuve qu’ils pouvaient mieux faire. Chaque texte était assorti d’un lexique plus que miséricordieux. On peut être en première, ont dû se dire les rédacteurs des sujets, et ne pas comprendre que « par ses ongles » veut dire, pour un lion, « par ses griffes », et que « me doit échoir » se dit, en bon français, « doit me revenir ». On apprend aussi, en note : Seigneur : apostrophe conventionnelle en début de sonnet ; Du Bellay adresse son poème à un puissant. » Ou que ce qui « me dépite », m’irrite et me peine. « Surplis » et « frac », « appareil » (comme dans « plus simple appareil) et « drille » (il en est de joyeux), « cornac » sont supposés inconnus.
Le sujet d’invention était, comme vous allez le voir, du plus haut intérêt : « Vous imaginerez un dialogue entre deux critiques littéraires au cours d’un débat sur la poésie. L’un pense que la poésie doit être utile et éveiller l’esprit critique du lecteur ; l’autre estime que l’on ne saurait la réduire à cette seule fonction. »
Pour les littéraires les textes étaient axés sur le bon sauvage, les « victimes de la colonisation » et la découverte de l’autre à la Renaissance. Sujet pipé. Deux textes sur quatre étaient de Jean de Léry : son voyage au Brésil, raconté en 1578, lui a permis de gagner une relative notoriété que la qualité de sa plume n’eût pas expliquée. « Que je lui dis, qu’elle me dit », tel est « presque » le niveau de son reportage à propos de ses rencontres amérindiennes. Et là aussi, il y a un lexique : mais passons.
L’histoire-géographie permet aussi de faire passer l’idéologie avant les faits. Les élèves de 1re de la série S, qui passaient pour la première fois une épreuve anticipée sanctionnant un programme vaste comme le monde, devaient parler de « la guerre d’Algérie » – gare ! – ou bien de « la mutation de la population active de 1850 à nos jours » – ce qui pourrait bien occuper dix sociologues pendant trois ans au CNRS.
Les Terminales S de cette année planchaient sur le programme désormais caduc, et des sujets non moins chargés dans tous les sens du mot : « La décolonisation de la fin de la Seconde Guerre mondiale aux années 1960 » et « La Ve République : institutions et vie politique ». Deux gros manuels de première année de droit ne suffiraient pas à répondre en la matière…
Le sujet de sciences anticipé en Première L était attendu car pour la première fois il comportait le fameux thème lié à la théorie du genre, « Féminin-masculin, devenir homme, devenir femme ». Les élèves n’ont pas été interrogés sur ce point mais en revanche ils ont dû plancher sur le meilleur moyen de traiter une stérilité dans un cas concret : insémination artificielle avec ou sans donneur extérieur au couple, fécondation in vitro avec ou sans les gamètes du couple. Frais.
Les littéraires ayant choisi une option science en Terminale ont planché sur une « pasta party » à avaler avant un marathon, et un thème au choix. Le premier, « la place de l’homme dans l’évolution », comportait cette citation mémorable : « L’homme ne descend pas du singe comme on le dit trop souvent. C’est un singe. » Le propos d’André Langaney était soutenu par une note fournie par les rédacteurs du sujet : « 99 % des gènes sont communs aux deux espèces. » L’option maths, d’une simplicité quasi enfantine en ce qui concerne le calcul, invitait les candidats à réfléchir à l’indice de masse corporelle, à vérifier si une jeune fille était anorexique et à calculer sa perte de poids en fonction de son régime…
En SVT, l’épreuve générale des Terminales S les a fait entre autres travailler sur l’hypogonadisme, l’affection qui fait que les garçons, à la puberté, des organes génitaux trop petits. Frais, encore. Les « spécialistes » étaient épargnés.
Quant aux épreuves écrites de langues vivantes en espagnol et anglais, elles ont été d’une banalité, voire d’une vulgarité consternante par le choix des textes, pris dans des romans ou des articles de journaux tous postérieurs à 2005, au langage relâché, argotique ou médiocre. Quant aux questions posées, elles consistaient presque toutes à chercher des informations dans les textes et à les restituer telles quelles.
Avec tout ça, les correcteurs auront comme tous les ans des consignes de clémence et on remontera les notes qu’il faudra !