TOUT EST DIT

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ǝʇêʇ ɐן ɹns ǝɥɔɹɐɯ ǝɔuɐɹɟ ɐן ʇuǝɯɯoɔ ùO

lundi 5 mars 2012

Et si le problème, c'était les Français ? 


Pour une fois, faisons un moratoire et cessons de taper sur la classe politique, qui n'en peut mais. Certes, elle n'a pas pris la mesure de la crise vers laquelle nous roulons à pleins gaz, le coffre rempli des cadeaux offerts par tous nos Pères Noël présidentiels en campagne. Certes, la classe politique a beaucoup menti, au moins par omission, en nous faisant croire que rien n'allait vraiment changer, alors que notre niveau d'endettement par rapport au PIB flirte maintenant avec les 90 %. Mais bon, il ne semble pas que les Français aient envie, aujourd'hui, de prêter l'oreille à un discours de vérité. Ils vivent depuis trop longtemps dans une bulle où on les entretient et d'où ils ne veulent sortir sous aucun prétexte. Ils restent dans le déni.
C'est l'une des première leçons, proprement hallucinante, de cette campagne électorale : les Français ne demandent pas aux candidats ce qu'ils peuvent faire pour sortir le pays du fossé dans lequel il est tombé. Au contraire, ils leur posent à peu près tous la même question : "Que pouvez-vous faire pour moi ?" Outre que leur attente révèle une perte totale d'esprit collectif, elle montre aussi que notre pays a perdu le sens des réalités. Qu'il ne croit plus guère en lui-même, désintéressé qu'il est de son destin. Qu'il vit désormais dans un monde virtuel.
Trop rares sont les voix qui, en son sein, tentent de le mettre en garde. On peut parler, de ce point de vue, d'une faillite des élites, des clercs et des médias qui participent plus ou moins consciemment à l'enfumage général. Mais une chose est sûre : un jour prochain, sans doute après l'élection, il faudra bien que tous les yeux se dessillent...

Dragui, Papademos, Monti et ... Goldman Sachs 


"Hollande et ses porteurs d'eau"

Le "Tous contre Sarko" assure pour le moment à Hollande le leadership dans la campagne. Au risque d'une dangereuse confusion politique s'il est élu. 

Il ne faut pas s'étonner que François Hollande continue de faire la course en tête. D'abord, il ne manque pas de talent, il a de la répartie, un côté bonhomme et Français moyen, modeste et apaisant qui rassure. Ensuite, il est bien secondé, son équipe est active, elle le relaye solidement, elle est soudée par une méchante ambition de pouvoir, elle oublie le mépris goguenard qu'elle lui portait hier, tout en l'attendant demain au coin du bois s'il est élu. Enfin, sa tactique est habile. Elle repose sur des méthodes très simples. Une grande discrétion sur les sujets essentiels qui fâchent ou qui gênent, à commencer par la crise. Des propositions démagogiques du genre : on va surtaxer les plus riches, assorties d'un cynisme grossier : ça ne rapportera pas grand-chose, mais les pauvres seront contents. Des manoeuvres de provocation vicieuses : connaissant l'irritabilité de Sarkozy, on l'excite, il réagit, et on s'indigne. C'est gagné. Exemple : le coup de Bayonne. Des militants socialistes s'associent aux indépendantistes pour lui jeter des oeufs à la tête en criant : "T'es pas chez toi ici !" Il a le mauvais goût de trouver la chose assez peu républicaine. Manuel Valls juge sa protestation "nauséabonde". Manuel Valls, l'ex-humaniste. Même lui ! Leur arme favorite : la déloyauté sournoise. Mais admettons. Une campagne électorale n'est pas un concours de rosières au village, et Nicolas Sarkozy n'est pas non plus un enfant de Marie.
Le principal atout de François Hollande, qui lui assure pour l'instant le leadership, n'est pas dans ses talents ni dans ces stratagèmes tordus conformes à la tradition d'une démocratie fatiguée, il est dans le concours inespéré que lui apporte, contre nature, l'ensemble des autres candidats dans le combat acharné que tous mènent contre une cible unique, l'homme à abattre : Nicolas Sarkozy. À la limite, Hollande pourrait faire a minima, les autres se chargent du travail. De Dupont-Aignan, qui ne vaut pas cher, mais qui ne répugne pas, lui non plus, à l'insulte jusqu'à Marine Le Pen, c'est un festival, une curée sanglante. Cette dernière est la championne des porteurs d'eau, fidèle à la stratégie de son père, qui n'eut de cesse de brouiller le jeu républicain, tout en sachant qu'il n'aurait jamais de chance d'y participer. Détruire, disait-il. Détruire, dit-elle.
Et les autres ? Mélenchon, l'insulteur patenté, l'artiste du billard à deux bandes, qui démolit aujourd'hui Sarkozy pour mieux atteindre demain Hollande. Eva Joly, l'alliée d'un jour. Villepin, qui règle ses comptes. Et Bayrou, Bayrou le neutre, mélange de Ponce Pilate et du juge Salomon, enfermé dans sa posture morale plutôt que d'obéir à sa pente politique. Tous s'acharnent à faire le jeu du candidat qu'ils s'acharneront, s'il est élu, ou bien à mettre en difficulté ou bien à trahir ou bien à abattre.
Cette coalition aurait un sens si elle reposait sur une cohérence. Or, l'échec de Sarkozy déboucherait sur une dangereuse confusion. Paradoxalement, la majorité électorale des Français récuse le candidat dont elle est politiquement la plus proche. Si nous ne purgeons pas ce problème de personne que pose Sarkozy, nous risquons l'aventure. Est-ce un effort, voire un sacrifice, à ce point intolérable ?

Fragilités en sous-sol 

 La victoire de Vladimir Poutine s’explique d’abord par l’immense faiblesse structurelle de la vie politique russe. Les contestations qui grandissent depuis trois mois, trop dispersées, n’ont pas dégagé de leader. 

Aucune des jeunes forces n’était en mesure de proposer une alternance, d’autant que la pseudo-campagne électorale a comme d’habitude été confisquée par le Kremlin. Les opposants ont les forces et faiblesses de la blogosphère dont ils sont issus: capacité à organiser des manifestations publiques, ce qui est nouveau, mais incapacité à prendre un pays en mains dès le lendemain d’un scrutin. 

Poutine agit depuis douze ans selon un principe unique: faire le vide autour de lui, écarter ceux qui auraient pu se mettre sur sa route, à commencer par le brave Dmitri Medvedev obligé de renoncer au second mandat auquel il avait un temps rêvé. L’hypothèse de la relève de Poutine par un Medvedev plus libéral et plus attaché à l’Etat de droit était un leurre. Poutine n’a dirigé le gouvernement sortant que parce que c’était la meilleure façon de continuer à tirer les ficelles. 

Ce n’est pas le parti communiste qui aurait pu le défier. Usé jusqu’à la corde, soutenu par un électorat plus nostalgique que combatif, il est conduit par Guennadi Ziouganov, un apparatchik exhumé du siècle dernier qui se félicite de chaque nouvelle défaite, car elle le pousse à croire qu’il n’est pas encore mort. Poutine aimerait que son retour en première ligne, sans Medvedev pour faire écran, lui donne des airs d’homme fort. Mais son assise est bien plus fragile qu’il y a huit ans. 

Ce nouveau mandat est à haut risque. Il faut moderniser l’économie, la diversifier sans tout attendre des conglomérats confiés à quelques oligarques préalablement agréés. La dépendance à la rente gazière et pétrolière est une grande source de vulnérabilité. Même si le cours du baril reste haut, Poutine aura beaucoup de mal à financer les promesses considérables faites à la classe moyenne et à l’armée. 

Et surtout, il doit dès aujourd’hui stabiliser la situation politique. Poutine a une hantise: que les mouvements de foule à Moscou se terminent comme en Tunisie, en Égypte ou en Ukraine après la «Révolution orange» de 2004. Il n’y aura pas de second tour dans les urnes, qu’en sera-t-il dans la rue?

Démesure(s) 


Nicolas Sarkozy a marqué de son empreinte les quinze jours qui ont suivi sa déclaration de candidature en multipliant les annonces-choc : référendum en cas de blocage d’une réforme, refonte de la Prime pour l’emploi, réforme du RSA et du bac professionnel, entre autres. Le président-candidat a promis une campagne à cinq-cents à l’heure, que François Hollande s’essoufflerait à suivre. Le démarrage en trombe a été réussi, et les sondages ont commencé à frémir. Mais depuis que les roues avant ont à nouveau touché terre… le bolide patine. La semaine passée, le chef de l’État a été pris à son propre jeu de la saturation des médias. C’est son adversaire qui a repris la main en annonçant la taxation à 75 % des super-riches.
François Hollande fait du Sarkozy, au moins sur la forme : il magnifie un symbole. Sa mesure ne rapporterait presque rien ; pire, elle pourrait coûter très cher en faisant fuir des capitaux par millions. Peu importe : elle « réenchante le rêve français », pour reprendre le slogan de début de campagne du candidat PS. Et elle stigmatise le « président des riches » qui a instauré en 2007 un bouclier fiscal inégalitaire, finalement abrogé pour cause de crise et de scandale Bettencourt-Woerth.
Ces 75 % ont sonné le début d’une très mauvaise séquence pour Nicolas Sarkozy : ses propositions pour l’éducation sont passées inaperçues — en plus, il a oublié de lire un paragraphe-clé de son discours, ce qui relève de l’acte manqué —, sa visite à Bayonne a été pourrie par les indépendantistes basques et il a cafouillé sur le rapatriement de la journaliste française blessée en Syrie.
Résultat enregistré par l’ensemble des enquêtes d’opinion : François Hollande a creusé l’écart, au 1 er et au 2 e tour. Depuis que la France élit son président au suffrage direct, celui-ci est constamment arrivé en tête au 1 er tour, même Giscard, qui a finalement été battu par Mitterrand. Et les rapports de force se figent presque toujours dans les deux derniers mois de campagne. Chirac était passé devant Balladur à la mi-février.
C’est dire que pour Nicolas Sarkozy le temps presse. Que va-t-il trouver cette semaine pour inverser la tendance ? Non seulement il faudra du « lourd », mais le président-candidat est désormais prévenu : en face, François Hollande sait manier, également, la démesure.

Poètes 

 « La popularité ? C’est la gloire en gros sous ». Il fallait un poète, et un poète populaire, pour énoncer cela… Il se nomme Victor Hugo. Il nous serait bien utile dans cette campagne, morne plaine, le père Hugo. Il aurait su, en ce lundi où nous célébrons le Printemps des poètes, faire chanter et danser un peu la présidentielle. Lui donner du rythme, de l’ampleur et de la rime, en un mot : du verbe ! Car le pire n’est pas que nos candidats s’injurient, il est qu’ils le fassent avec des mots si pauvres… Engueulez-vous, mais avec style, panache et lyrisme. De l’émotion, que diable ! Osez l’alexandrin ou, pour les plus rebelles, pratiquez le vers libre — ni strophe, ni mètre. Mais de grâce, Mesdames et Messieurs les candidats, ne nous ennuyez pas… Allez, concluons avec le père Hugo. Un dernier vers, pour la route : ceux qui vivent sont ceux qui luttent.

Traité européen : Angela Merkel veut mettre la pression sur François Hollande

Angela Merkel voit-elle déjà le candidat du PS François Hollande à l'Elysée ? Bien que démentie par le porte-parole de la chancellerie à Berlin, une information de l'hebdomadaire allemand Spiegel parue le 3 mars le laisse penser : Mme Merkel, le président du Conseil italien Mario Monti, le chef du gouvernement espagnol Mariano Rajoy et le premier ministre britannique David Cameron se seraient entendus pour ne pas recevoir M. Hollande pendant la campagne présidentielle.

Si la chancelière voulait établir un rapport de forces avec un éventuel futur président français, elle ne s'y prendrait pas autrement. En jeu : le pacte budgétaire européen que vingt-cinq chefs d'Etat et de gouvernement européens viennent de conclure mais qui doit encore être approuvé par les parlements nationaux, voire par un référendum en Irlande. M. Hollande assure vouloir le renégocier.
Mme Merkel y est d'autant plus hostile que, même en Allemagne, l'adoption du pacte est loin d'être acquise. Le 2 mars, Berlin a reconnu qu'en raison de la possibilité, prévue par ce texte, de poursuivre devant la Cour de justice de l'Union européenne (UE) un pays qui ne respecterait pas les nouvelles règles budgétaires, ce projet de loi qui porte atteinte à la souveraineté des Etats devra être adopté par une majorité des deux tiers dans chacune des chambres du Parlement allemand. Sans l'accord de l'opposition sociale-démocrate (SPD), le texte ne pourra être ratifié.
Alors qu'on attend prochainement un soutien explicite du SPD à M. Hollande, une subtile partie va donc se jouer dans les semaines à venir entre Mme Merkel, le SPD et M. Hollande. Avec en filigrane une question : quel équilibre entre rigueur et croissance en Europe ? Pour faire pression sur un éventuel président socialiste, la chancelière n'a d'autres moyens que de trouver d'autres alliés.
L'Italie et l'Espagne, proches traditionnellement de la France en tant que "pays du Club Med", sont actuellement dirigées par des conservateurs et promues partenaires privilégiées de l'Allemagne. M. Rajoy s'est rendu à Berlin dès sa prise de fonction et M. Monti a su s'imposer comme un interlocuteur incontournable de Mme Merkel.
CONTOURNER PARIS
Cette tentative de contourner la France n'est pas seulement liée à l'élection présidentielle française. La perte du triple A pour la notation de la dette de la France, par l'agence Standard and Poor's le vendredi 13 janvier, a également été un élément déterminant. Même si la chancelière soutient Nicolas Sarkozy durant la campagne présidentielle, les liens entre les deux pays ne sont déjà plus ce qu'ils étaient.
Contrairement aux sommets précédents, le Conseil européen du 30 janvier n'a pas été précédé par une rencontre préparatoire entre les deux responsables (ceux-ci ne se sont vus que le 9 janvier) alors que Mme Merkel a multiplié les entretiens avec les autres leaders européens. Résultat : au conseil, la chancelière a présenté, contre l'avis de la France, l'idée d'envoyer en Grèce un commissaire européen aux économies.
Même désaccord lors du sommet du 1er mars. Alors que le président français affirmait que la crise appartenait au passé, Mme Merkel jugeait qu'un retour à la normale n'était pas pour demain.
La stratégie de la chancelière ne fait pas l'unanimité en Allemagne. Elle est non seulement critiquée par le SPD mais aussi par Guido Westerwelle, le ministre (libéral) des affaires étrangères. Comme il l'avait déjà fait le 6 février lors de la prestation télévisée commune à M. Sarkozy et à Mme Merkel, le ministre "recommande à tous les partis politiques allemands de faire preuve de retenue. Les divergences politiques allemandes ne doivent pas être exportées vers la France", estime-t-il dans un entretien au quotidien Die Welt du 4 mars.

La tête dans le sable 


François Hollande veut renégocier le pacte budgétaire signé par vingt-cinq pays de l’UE sur vingt-sept. Nicolas Sarkozy affirme que « nous sommes en train de tourner la page de la crise financière ». Les hommes politiques français sont incorrigibles : à gauche comme à droite, la présidentielle les incite à mettre la tête dans le sable. La zone euro est en feu, mais les candidats français n’ont pas le temps de jouer les pompiers en cherchant des idées crédibles pour allier lutte contre les déficits et recherche de la croissance. Ils sont trop occupés à en découdre.
L’Espagne et les Pays-Bas ont annoncé hier des déficits plus importants que prévu. Et le Fonds monétaire international a tenu à prévenir : « Nous sommes toujours dans la zone de danger. Il s’agit d’un marathon, pas d’un sprint. »
Nicolas Sarkozy annonçait déjà une sortie de crise en 2010. Hier, il a salué le premier sommet européen depuis un an « qui ne soit pas un sommet de crise ». Que lui faut-il donc ? De sommet en sommet, la stratégie européenne n’a pas changé : c’est celle de la rustine. Il a fallu des mois et des mois pour en trouver une capable de masquer le problème grec. C’est la rustine la plus chère de l’histoire du continent ! Le plus dramatique, c’est qu’elle ne résout rien et que le pare-feu européen, que les Allemands ne veulent pas étendre (où trouver des fonds pour le renforcer, d’ailleurs ?), sera incapable de boucher le trou espagnol, si jamais Madrid venait à être réattaqué. Ce qui ne manquera pas de se produire après le dérapage budgétaire annoncé hier.
Nous voilà, comme à l’automne, devant la quadrature du cercle : l’austérité est un remède qui se révèle pire que le mal… mais il n’y en a aucun autre. Quand les Pays-Bas annoncent à leur tour le dépassement de la barre psychologique des 3 % de déficit, il y a vraiment de quoi s’inquiéter. Si même les pays de l’ex-zone Mark sont victimes d’anémie, que dire des malades en soins intensifs que sont l’Italie et le Portugal, ou de la France, qui a elle-même deux plans de rigueur en cours d’application ?
Tout est fait, à gauche et à droite, pour éviter d’angoisser les électeurs avant les rendez-vous électoraux. On n’attrape pas des mouches avec du vinaigre. Le réveil d’après scrutins s’annonce difficile pour tout le monde.