TOUT EST DIT

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mercredi 29 février 2012

IL S'EN FOUT !!!

Des images du ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble (69 ans) jouant au sudoku sur son iPad en plein débat du Bundestag a fait couler beaucoup d'encre en Allemagne mercredi. Le doyen du gouvernement allemand, membre de l'Union chrétienne-démocrate d'Allemagne (CDU) et personnage-clé des débats autour du sauvetage de la zone euro en crise, a été filmé par la chaîne de télévision publique ARD lundi en flagrant délit de gymnastique intellectuelle à la japonaise. Et ce pendant le débat à la chambre basse du Parlement sur le deuxième paquet d'aide à la Grèce.

L'image, diffusée lors du journal de 20 heures de la chaîne, figurait dans l'édition de «Bild» de mercredi. Le quotidien à grand tirage s'est étonné du fait que le ministre des Finances ait choisi d'aligner ses rangées de chiffres pile au moment où les députés débattaient sur une enveloppe supplémentaire de 130 milliards d'euros pour la Grèce.
Des images interdites de diffusion
Wolfgang Schäuble n'a toutefois donc rien fait de répréhensible, souligne le journal le plus lu d'Allemagne qui a dressé la liste de ce qui est autorisé ou interdit en séance plénière. Le «Bild» indique ainsi qu'il est interdit de boire, manger, fumer, utiliser un ordinateur portable, porter des shorts ou encore de se faire accompagner d’un animal hormis un chien d'aveugle. En revanche, il est permis d'envoyer des sms, d'utiliser une tablette comme un iPad ou encore d’allaiter son enfant avec toutefois l'autorisation préalable du président de séance.

Suite à la diffusion de ces images, la chaîne ARD a présenté des excuses, a déclaré mercredi lors d'un point de presse le porte-parole de Wolfgang Schäuble, Martin Kotthaus. Elle contrevenait en effet aux règles du Bundestag. Celles-ci interdisent de filmer ou photographier les documents consultés par les députés en séance. En outre, le ministre «s'est consacré à la Grèce, la crise et la zone euro sans interruption depuis lundi dernier», a-t-il fait valoir son porte-parole, cité par le site web du journal français «Le Point». «Je trouve normal qu’un ministre des Finances apprenne à compter et j’espère des résultats», a ironisé, pour sa part, Gregor Gysi, chef du groupe parlementaire de Die Linke.

La bataille des trois écoles

L'école est plus que jamais au coeur de la présidentielle. Après François Hollande qui se fait fort de recréer 60 000 postes d'enseignants, Nicolas Sarkozy a répliqué, hier soir, par une salve de projets qui libéreraient, selon lui, le système éducatif de ses carcans. Libéralisation du statut des enseignants. Autonomie des établissements. Libre choix de recrutement. Réaménagement du sacro-saint baccalauréat...

L'école est une grande cause, mais un sujet casse-pipe, car en chaque Français sommeille un pseudo-ministre de l'Éducation, nostalgique de l'école de jadis. En claironnant de grandes réformes scolaires, les candidats prennent le risque de froisser leur électorat, de chagriner les enseignants ou d'exaspérer les parents d'élèves. Mais la crise scolaire est suffisamment profonde ¯ avec notamment ces 150 000 élèves qui sortent chaque année du système éducatif sans diplôme ni qualification ¯ pour que cette fois, la présidentielle ne puisse faire l'impasse. L'école de la République flageole. Trop d'échecs. Trop d'enseignants déprimés. Trop de parents d'élèves inquiets. Trop de mauvais classements internationaux. Dans le brouhaha des tréteaux, on guette les signes d'espoir. Et trois programmes émergent.

L'école selon MM. Hollande, Sarkozy et Bayrou. Le premier parle de refondation, le second veut approfondir la transformation en cours, le troisième, fort de son expérience d'ex-ministre de l'Éducation, demande surtout que l'on « lâche les basques aux enseignants ». 

Depuis la défaite de Lionel Jospin, en 2002, le Parti socialiste cherche à renouer avec le monde enseignant, jadis bastion de la gauche, brutalement échaudé par les éruptives déclamations de Claude Allègre. François Bayrou, professeur de français, se sait homme du sérail et joue de sa proximité avec le monde enseignant. Quant à Nicolas Sarkozy, campé en guerrier terrassant la crise, il ne démord pas de son idée centrale : moins d'enseignants, mais mieux payés et la déprime des profs sera surmontée. Avec un traitement différencié : en primaire, on ne supprimerait plus de postes. 

On n'échappe pas à une querelle de chiffres. Hollande promet des postes. Bayrou réclame le statu quo. Sarkozy poursuit, en l'atténuant, la cure d'austérité. Dans le détail, ces trois politiques sont largement incompatibles. Trois projets opposés sur des points cruciaux : le nombre d'enseignants, leur formation, leur statut, la fin ou non du collège unique, le retour ou non de l'orientation dès l'âge de 14 ans... 

À gauche, on refuse les économies sur l'école. Ce ne sont pas des dépenses, ce sont des investissements sur l'avenir, assure Hollande. Au centre, Bayrou mise avant tout sur la qualité des enseignants et le retour aux fondamentaux. 50 % du temps scolaire devraient être consacrés à la maîtrise du français en primaire. À droite, tout passe par un changement de statut des enseignants. Sarkozy souhaite faire maigrir les effectifs, mais grossir le temps de présence des professeurs dans les établissements. Travailler plus pour gagner plus. 500 € nets par mois, promet-il. 

 La gauche redore le budget de l'éducation. Le centre mise sur la confiance retrouvée des enseignants. La droite s'avance en gestionnaire libérale, faisant sauter les verrous du système. Enjeux fondamentaux. C'est la modernisation et le redressement de l'école de la République qui se jouent. Ni plus ni moins : l'avenir du pays et de sa jeunesse.

L'oracle de Naxos résiste toujours

Manolis Glezos est un héros grec. Pas un demi-dieu de l'Antiquité, mais un homme bien vivant et toujours actif de 89 ans – "dont 75 ans de luttes" –, qui résume à lui seul l'histoire blessée de la Grèce moderne, de l'Occupation allemande au combat actuel contre la "troïka". 
L'homme qui a décroché le drapeau nazi de l'Acropole en 1941 conserve en lui une part de jeunesse. Il n'est pas très grand. Sa chevelure blanche ondule légèrement sur la nuque. Il a l'oeil vif et souriant. Sa moustache et ses sourcils fournis lui donnent une "gueule" qui porte sur elle toute la fierté de la Grèce. Et son humanité passe dans son regard clair.
Dimanche 12 février, alors qu'il était assis avec le musicien Mikis Theodorakis – son cadet en résistance, âgé de seulement 86 ans –, devant les députés qui s'apprêtaient à voter de nouvelles mesures d'austérité, un ministre s'est senti obligé de rendre hommage aux deux "monuments" présents ce soir-là. Les deux monuments en question venaient d'être atteints par des gaz lacrymogènes, alors qu'ils demandaient à entrer dans le Parlement, comme ils en ont le droit en tant qu'anciens députés, suivis par un cortège de 100 000 manifestants.
Quelqu'un a demandé au chef des MAT (les CRS grecs) pourquoi il ne voulait pas les laisser passer. "On ne va pas laisser les communistes occuper le Parlement", a répondu l'officier. Manolis Glezos éclate de rire en racontant cette histoire, qui lui rappelle bien des souvenirs. Les deux compères ont fini par entrer au Parlement, après avoir fait étape à l'infirmerie pour se faire soigner.
un documentaire sur la crise
"JE NE SUIS PAS UNE STATUE"
Dix jours après, Manolis Glezos prend encore des médicaments pour mieux respirer. Sur une feuille, il dessine. L'endroit où il se trouvait, place Syntagma, ce jour-là ; puis la tribune où ils siégeaient avec Theodorakis, à la gauche du président, face aux députés. "Nous n'avions pas le droit de parler, mais j'étais là pour transmettre l'angoisse du peuple grec devant les mesures qu'ils allaient voter." C'était un silence parlant.
"Toute ma vie, on a essayé de faire de moi un monument pour me faire taire. Je ne suis pas une statue ou un tableau, et je parle tout le temps." Il est infatigable pour parler du passé, du présent, du futur et de l'avènement d'une démocratie directe qu'il appelle de ses voeux.
Il n'y a qu'un sujet dont il ne souhaite plus parler : la nuit du 30 au 31 mai 1941, quand, à 18 ans, il est allé avec son ami Apostolos Santas, mort en avril 2011, décrocher le drapeau nazi qui flottait sur l'Acropole. Il bascule lentement la tête en arrière en disant dans un sourire "Oxi" ("non"). "Je ne suis pas une star. Ce serait ridicule de raconter toujours la même chose." Mais il veut bien expliquer leur geste : "Nous avions entendu qu'Hitler avait déclaré la victoire allemande en Europe. On s'est dit que, si tel était son avis, on allait lui montrer que la lutte ne faisait que commencer. Et nous sommes partis le lendemain vers l'Acropole."
Dans le documentaire sur Les Combattants de l'ombre, Apostolos Santas raconte cette nuit de clair de lune, les gardes allemands qui font la fête avec des femmes pour célébrer la victoire du Reich, leurs vaines tentatives pour grimper au mât glissant et le drapeau gigantesque qui finit par tomber. Ils découpent chacun un morceau de la croix gammée, avant de jeter le reste de l'enseigne dans un puits où, selon la mythologie, se tenait le serpent qui gardait l'Acropole. "A ce moment-là, explique Apostolos Santas, nous avons ressenti, Manolis et moi, une grande fierté. Nous étions au sommet de l'Acropole. Nous ne portions aucune arme et nous avions réussi à enlever le symbole des forces qui avaient traumatisé l'Europe entière."
Manolis Glezos n'a guère le temps de savourer son acte d'héroïsme, ni pendant ni après la guerre. Il a été condamné à mort trois fois, a subi neuf tentatives d'assassinat et passé seize ans de sa vie en prison. Victime des Allemands pendant la guerre ou, la plupart du temps, de son propre pays, qu'il a pourtant contribué à libérer.
Après la défaite allemande, les troupes anglaises combattent les résistants communistes qui ont gagné la guerre et refusent de désarmer. Le pays entre dans quatre années de guerre civile. En 1949, Manolis Glezos est condamné à mort pour trahison. Un dirigeant grec l'annonce à une presse incrédule, en leur affirmant que sa tombe est déjà prête. "Ma mère est allée voir mon tombeau", explique-t-il. Il se souvient de la radio grecque diffusant, le dimanche après sa condamnation, un extrait de la radio française, qui annonce : "Le général de Gaulle s'adresse au gouvernement grec pour qu'il n'exécute pas le premier résistant d'Europe.""Dans mon village, sur l'île de Naxos, tout le monde a signé en ma faveur, même le pope. Et ils n'étaient pas tous communistes", souligne-t-il.
"Le général de Gaulle a exagéré. Je ne suis pas le premier résistant d'Europe." Il se lève et sort de sa bibliothèque les deux gros volumes de son histoire de la Résistance ainsi que la photo en noir et blanc d'un jeune homme. "C'est lui le premier partisan." Il s'agit de Mathios Potagas. "Le 2 mai 1941, il s'est mis sur la route devant une colonne allemande pour leur demander d'arrêter et leur dire : "Vous n'avez pas gagné. Vous n'allez pas nous rendre esclaves, car notre âme est toujours libre. Je suis seul, mais derrière moi il y a tout le peuple grec." Il avait 17 ans. Ils lui ont écrasé la tête à coups de pierres."
Dans sa maison du quartier résidentiel de Neo Psychiko, dans le nord d'Athènes, le portrait d'un jeune homme fait face à l'entrée. C'est celui de son frère, exécuté à 19 ans par les Allemands. "C'est un peintre allemand qui l'a fait à partir d'une photo. Il est venu me l'apporter à Naxos." S'il milite, depuis bien avant la crise actuelle, pour que l'Allemagne rembourse l'argent que la Grèce a dû lui prêter pendant la guerre, Manolis Glezos s'est toujours défendu de tout antigermanisme, pourtant à la mode en ce moment dans le pays.
ATHÈNES, CAPITALE DE LA RÉSISTANCE
L'homme, emprisonné à nouveau sous le régime des colonels (1967-1974), a déserté les rangs communistes depuis longtemps. Il est aujourd'hui membre du Syriza, le parti d'extrême gauche parlementaire, farouchement opposé aux mémorandums signés avec la "troïka" û les représentants du Fonds monétaire international (FMI), de la Commission européenne et de la Banque centrale européenne (BCE) –, qui ont prêté 110 milliards d'euros à la Grèce en mai 2010 en échange de sévères mesures d'austérité ; et s'apprêtent à remettre au pot 130 milliards d'euros, contre des mesures encore plus sévères de baisse des salaires et des pensions de retraite.
"L'ancien président de l'Institut français d'Athènes, Roger Milliex, avait dit pendant la guerre que la capitale de la Résistance de l'Europe était Athènes. Cela redevient vrai aujourd'hui. Face à ces mouvements populaires, le gouvernement est en panique." Le 12 février, la police a lancé très tôt des gaz lacrymogènes pour disperser la manifestation et des bandes organisées en ont profité pour incendier plusieurs immeubles. Les pompiers ont eu du mal à intervenir dans la foule. Les gens qui fuyaient les gaz se heurtaient à ceux, nombreux, qui continuaient d'arriver, donnant une impression de chaos.
"Le gouvernement n'a pas de légitimité populaire, alors que les mesures qui sont prises vont engager la Grèce pendant plus de vingt ans", explique Manolis Glezos. En novembre 2011, Lucas Papadémos a remplacé le premier ministre Georges Papandréou, contraint à la démission. L'ancien vice-président de la BCE a alors formé un gouvernement de coalition avec les socialistes du Pasok, la droite de la Nouvelle Démocratie et l'extrême droite du Laos, qui a quitté le navire début février.
"Les gens sont en colère. La marche incontrôlable de cette colère peut nous entraîner dans un très grave conflit, explique le vieux militant. Il y a des suicides, des gens qui sont arrêtés parce qu'ils volent pour nourrir leurs enfants. Mais que va-t-il se passer quand les ressources des gens seront complètement épuisées ? Si cette colère ne se transforme pas en un acte politique, nous serons perdus. C'est pour ça qu'il faut des élections le plus vite possible. L'écart entre le peuple et le gouvernement devient trop important. Les députés n'osent pas apparaître en public."
Du haut de ses 70 années de résistance, il affirme : "On vit un changement historique, qui va bouleverser le monde entier, dans dix ans, vingt ans, quarante ans. Si nous ratons cette occasion, nous allons reculer." A près de 90 ans, il aspire à une démocratie directe, qu'il a mise en pratique pendant douze ans dans son village d'Apiranthos, sur l'île de Naxos. "C'est le seul village de 1 000 habitants avec cinq musées et trois bibliothèques. Aujourd'hui, les Constitutions des principaux pays sont les mêmes : le pouvoir vient du peuple et il est exercé en son nom. Il faut que le pouvoir soit exercé par le peuple. Il y a de plus en plus d'assemblées populaires, dans des entreprises ou des municipalités... Il suffit de quelques ministères - pour les affaires étrangères ou la défense - et, après de vrais débats, on organise des référendums pour les grandes décisions."
C'est le retour à la cité antique, la polis. Outre ses activités politiques, Manolis Glezos a publié des livres sur la géologie et la linguistique, deux sciences apprises, pour l'essentiel, à l'université de la prison. Le linguiste poursuit sa leçon. "Polis a donné polites, le citoyen, et politismos, la culture. Nous avons donné tout ça à l'Occident et qu'avons-nous reçu en échange ?" Il laisse passer un moment de silence et répond en français : "La police !" A ce moment-là, ses yeux pleins de malice ont l'air d'éclater de rire.

Silences trompeurs


Les fracassantes annonces électorales assourdissent de cruelles réalités qui, apparemment, n’inquiètent pas les candidats à la présidentielle. Pourtant, les évidences ne manquent pas. D’abord, avec l’euro, la France ne contrôle plus sa politique monétaire et – théoriquement – pas davantage sa politique budgétaire. Ensuite, il y a cette vérité rappelée par le G20 à Mexico et rabâchée par le FMI : la crise de l’euro est loin d’être terminée.

Une crise qui prend même une nouvelle ampleur politique. Ainsi, lundi, le Bundestag a ratifié grâce à l’opposition sociale-démocrate et « verte » le nouveau plan d’aide à la Grèce. Mais la chancelière n’a pas fait le plein des voix dans sa propre majorité. Ce n’est pas le seul revers subi par Angela Merkel : dans son arrêt d’hier, la Cour constitutionnelle de Karlsruhe soumet désormais toute décision concernant la monnaie unique, donc tous les engagements de l’Allemagne, à l’assentiment préalable des députés. En d’autres termes, l’exécutif berlinois est paralysé. Or, depuis des mois, Paris navigue dans le sillage de Berlin, en fidèle second prônant la « Merkozy » à toute l’Europe...

Mais voilà : des élus allemands, le ministre Schäuble en tête, ont livré leurs calculs. Ainsi, les 110 milliards du premier plan d’aide à la Grèce, les 135 du deuxième (s’ils sont versés) et les quelque 100 milliards de désendettement « volontaire-forcé » ne suffiront pas ! Manqueraient encore 70 milliards dans un énième plan. Parce que la Grèce est à bout. En théorie, une faillite déclarée du pays – comme en Argentine en 2001 - serait la meilleure des solutions, pour les Grecs aussi.

Malheureusement interviendrait l’« effet domino » dans la zone euro, faute d’une vraie politique monétaire, sous une vraie Banque centrale, dont les partis conservateurs allemands au pouvoir ne veulent pas. Ce jusqu’au-boutisme idéologique est sidérant. Face aux surendettés grecs (et les autres...), les garants se comportent en « sur-créanciers », exigeant toujours plus de garanties pour ne pas avoir à réaliser leurs cautions (plusieurs dizaines de milliards pour les Allemands et les Français). 

Mais pour combien de temps encore ? La facture viendra pour toute la zone euro. La campagne électorale française ne dit pas comment la payer. Quant au sommet européen de demain, inutile d’en attendre une réponse...

Il rêve la Grèce en future «Apple de la Méditerranée»

Les plus grands groupes grecs ont financé une campagne pour changer l'image de leur pays auprès des Européens. L'auteur de la campagne n'est autre que celui qui a renouvelé l'image de la firme à la pomme en 1997.

La Grèce veut regagner la bataille des coeurs. Une vingtaine de grands groupes grecs, comme la compagnie aérienne Aegean ou Coca-Cola Hellenic, ont financé de pleines pages de publicité ces derniers jours dans les journaux français, allemands, néerlandais, belges et britanniques. Le message: «donnez sa chance à la Grèce».
Le public visé est large: la campagne a non seulement été diffusée dans les élitistes quotidiens financiers Wall Street Journal Europe et Financial Times, mais aussi dans le très populaire journal allemand Bild. Bien que financée sur des fonds privés, la publicité a également été relayée par les ambassades grecques en Europe. Au-delà du slogan, elle insiste sur les réalisations de la Grèce. Ainsi, le pays «a adopté le plan d'austérité le plus sévère de l'ère moderne», affirme-t-elle en se basant sur un constat de l'OCDE.
Cette campagne vient combler un vide: depuis le début de la crise, la Grèce n'a pas su mettre en avant ses avancées, estime un bon connaisseur du pays. Après avoir obtenu auprès des dirigeants de la zone euro et du FMI un second plan d'aide international de 130 milliards d'euros en échange d'un nouveau plan de rigueur, le pays l'assure: «la Grèce change».
Redresser l'image du pays s'annonce ardu. Particulièrement en Allemagne: selon un sondage publié dimanche, 53% des personnes interrogées outre-Rhin s'opposaient au versement d'une nouvelle aide à la Grèce, voté lundi par le Bundestag.
Le défi ne fait pas peur à Peter Economides. Ce Grec de la diaspora né en Afrique du sud a été mandaté pour réaliser la campagne. Il a l'expérience des clients désespérés: le publicitaire a participé au renouvellement de l'image d'Apple en 1997 en créant avec Steve Jobs le slogan «Think different» («Pensez autrement»). Il compare la Grèce actuelle à la firme à la pomme à la fin des années 90: «Il n'y avait aucun nouveau produit, les ordinateurs étaient lents, la société perdait des parts de marché. Nous nous sommes concentrés sur l'ADN d'Apple en montrant à quoi pourrait ressembler un futur fondé sur l'innovation.»
Le publicitaire veut faire de la Grèce «l'Apple de la Méditerranée». Il a lancé en 2011 une campagne personnelle en ce sens sur les réseaux sociaux, «rebranding Greece» (changer la marque Grèce). Ambitieux programme: s'adresser aux Grecs les plus talentueux et innovants pour leur redonner l'espoir et l'envie de rester dans leur pays. Malgré les faits. Le taux de chômage a atteint 20,9% en novembre, la récession pourrait se prolonger encore deux ans et la dette publique culminera toujours aux alentours de 120% du produit intérieur brut en 2020. «Il ne s'agit pas d'opposer les faits et l'espoir», répond Peter Economides. Et de paraphraser Obama: «Yes we can! Oui, nous pouvons sortir de la crise par le haut.»

Une France hollandaise

Qui, en Europe, connaît François Hollande ? Le candidat socialiste à l’élection présidentielle française est beaucoup plus discret que le président sortant Nicolas Sarkozy, et il a pour l’instant peu fréquenté la scène internationale. Mais le 6 mai au soir, il pourrait être le chef du deuxième Etat le plus influent de l’UE, le nouvel alter-ego de la chancelière Angela Merkel. Pour l’instant, les sondages le donnent gagnant avec jusqu’à 20 points d’écart sur Sarkozy. Il faut donc commencer à s’intéresser à ce personnage longtemps considéré comme un politicien d’appareil un peu falot.
En décembre, François Hollande a fait son entrée dans le débat européen en annonçant que s’il était élu, il renégocierait le pacte budgétaire signé par vingt-cinq Etats membres. "S’il n’y a pas une dimension de croissance, de soutien de l’activité et de l’emploi et une coordination efficace des politiques économiques, nous ne pouvons pas en l’état reprendre ce traité", a-til réaffirmé début février. Le moins que l’on puisse dire est que cette position, qualifiée d’irresponsable par Nicolas Sarkozy et ses ministres, a été accueillie à Berlin avec un certain scepticisme.
Venu à la politique avec François Mitterrand, longtemps proche de Jacques Delors, François Hollande est ce que les Français appellent “un Européen de raison” plutôt que de coeur. Un trait générationnel qu’il partage avec de nombreux dirigeants actuels. Mais il est le candidat d’un parti qui s’est profondément divisé lors du référendum de 2005 sur la Constitution européenne, ce qui le pousse peut-être à une plus grande prudence sur les dossiers européens.
En témoigne le vote qui a eu lieu le 21 février à l’Assemblée nationale. Les députés français ont ratifié le Mécanisme européen de stabilité, la caisse de 500 milliards d’euros destinée à aider les Etats en difficulté. Pris entre sa promesse de renégocier le pacte budgétaire et la nécessité de ne pas bloquer une mesure essentielle pour garantir la stabilité de la zone euro, Hollande a prôné l’abstention des députés du Parti socialiste. Ce qui n’a pas empêché 20 élus de voter contre, démontrant ainsi que s’il accédait au pouvoir, le président Hollande pourrait être contesté par son camp politique lorsqu’il s’agit d’Europe.
Est-ce à dire qu’il serait impuissant ? Même s’il doit encore préciser sa vision européenne et lever les ambiguités de son parti, Hollande ne serait pas isolé. Certes l’Allemagne d’Angela Merkel, appuyée par des pays comme la Finlande et les Pays-Bas et par le Commissaire européen aux Affaires monétaires, Olli Rehn, maintient sa ligne de discipline budgétaire et de réduction des déficits. Mais comme l’a démontré la lettre signée cette semaine par 12 chefs de gouvernements, dont le Britannique David Cameron et l’Espagnol Mariano Rajoy, que l’on ne peut pas qualifier de dépensiers, l’idée d’une politique de croissance fait son chemin en Europe.
S’il est élu, François Hollande ne pourra certainement pas renégocier le pacte budgétaire, qui a pour l’instant apaisé la crise. Mais il sera une voix de plus pour infléchir la politique de rigueur actuelle. Dans la discrète compétition qui se joue entre la France et l’Italie de Mario Monti pour être le partenaire-contrepoids de l’Allemagne, ce que dira Hollande d’ici le 6 mai aura son importance. C’est pour cela que tous les Européens doivent être attentifs. Et c’est pour cela qu’il doit parler clairement.

Hollande va-t-il tuer l'assurance-vie?

En cas de victoire de François Hollande, l'assurance-vie perdrait la majeure partie de son attrait fiscal: les intérêts seraient soumis au barème de l'impôt sur le revenu, a déclaré le candidat socialiste. "Il n'y aura plus d'abattement", précise Michel Sapin, en charge du programme du candidat. Seul le régime spécifique de transmission serait maintenu.

L'annonce est passée quasiment inaperçue, lundi soir. Interrogé par Laurence Ferrari sur l'avenir de la fiscalité de l'assurance vie, s'il accède au pouvoir, François Hollande a précisé que celle-ci relèverait du régime commun. "Les revenus du capital doivent avoir le même traitement que ceux du travail", a-t-il répondu. Une réponse assez vague, pour laisser une place à l'ambiguïté sur le futur régime fiscal de ce placement fétiche des Français ? Pas le moins du monde. C'est ce que nous a indiqué mardi Michel Sapin, en charge du programme économique du candidat Hollande: "L'assurance-vie sera soumise au barème de l'impôt sur le revenu. Nous ne prévoyons pas de maintenir des abattements exonérant le fruit de ces placements. Par définition, les personnes disposant au total de faibles revenus (salaires ou pensions de retraites, plus fruit de l'épargne) continueront d'être non imposables. Les autres paieront comme tout le monde."
Des intérêts taxés jusqu'à... 75%
Autrement dit, les intérêts accumulés sur les contrats d'assurance vie seront taxés à 5,5% ou 14%, 30%, etc... jusqu'à 75%, selon le niveau de taxation atteint en fonction du montant global de revenu. En revanche, précise Michel Sapin, "la fiscalité de la transmission de l'assurance-vie restera inchangée". Autrement dit, les épargnants petits et moyens bénéficieront toujours d'un abattement lors de la transmission de ces contrats. Ce serait donc le dernier avantage qui serait associé à l'assurance-vie. Aujourd'hui, le taux d'imposition (hors prélèvements sociaux) sur les rachats de contrats s'établit à 35% pour les contrats détenus depuis moins de 4 ans, à 15% pour ceux souscrits depuis moins de 8 ans, et à 7,5% au-delà de 8 ans.
Michel Sapin sort son jocker
Retirer à l'assurance-vie son principal argument de vente et de détention, à savoir la baisse de la fiscalité en cas de rachat au bout de 8 ans, c'est tuer ce placement ultra-sensible à la fiscalité. L'assurance-vie est d'autant plus fragile aujourd'hui que de nombreux contrats arrivent à maturité. Un changement de régime fiscal pénaliserait donc de nombreux épargnants qui ont attendu 8 ans, voire davantage, avant de retirer leur argent : fin 2010, 64% des encours ont plus de 8 ans d'âge, un niveau historiquement élevé. Et à la question de savoir si ce changement de fiscalité toucherait les contrats toujours en cours de détention ou les seuls nouveaux contrats, Michel Sapin a répondu : « Joker ! Nous aurons à en discuter avec les professionnels ! ». Il est donc possible que cette réforme ne soit pas rétroactive et ne concerne que les futurs contrats...
17 millions de détenteurs de contrats
François Hollande n'est pas le premier à agiter le chiffon rouge de la taxation de l'assurance-vie. Déjà l'an dernier, ce support d'épargne était la cible d'une taxe dans le cadre de la réforme sur la fiscalité du patrimoine. Par un lobbying appuyé, le Landerneau de l'assurance avait fait en sorte que ce projet soit éventé. La Fédération française des sociétés d'assurance (FFSA) avait à l'époque dégainé des chiffres éloquents : en 2010, les trois quarts des détenteurs de contrats sont des ouvriers, des employés, des agriculteurs, des cadres intermédiaires ou des retraités. Et les deux tiers des ménages détenteurs d'un contrat gagnent moins de 36.000 euros par an, soit 3.000 euros par mois. Au total, environ 17 millions de personnes disposent aujourd'hui d'un contrat d'assurance-vie et 24 millions de personnes en « profitent » (souscripteurs et bénéficiaires confondus).
Hors ISF et taxation des capitaux décès, la FFSA avait en outre chiffré à plus de 5 milliards d'euros par an les recettes fiscales et sociales générées par l'assurance-vie, dont 500 millions au titre de l'impôt sur le revenu et 4.6 milliards d'euros pour les prélèvements sociaux.
Changer de stratégie d'épargne en cas d'un durcissement de fiscalité
En avril dernier, pendant la période d'élaboration du projet de réforme sur la fiscalité du patrimoine, une enquête Ipsos/Logica avait été réalisée sur l'assurance-vie. Ses enseignements étaient sans appel : 59% des souscripteurs de contrats interrogés envisageaient de changer leur stratégie d'épargne dans le cas d'un durcissement du régime fiscal de l'assurance-vie, 35% en privilégiant d'autres supports d'épargne, 24% en fermant leur contrat. Et parmi les sondés interrogés sur les supports d'épargne à taxer pour que la réforme sur la fiscalité du patrimoine soit la plus juste possible, 8% d'entre eux répondaient l'assurance-vie, 72% les œuvres d'art et 71% les actions.
Toujours est-il que le retour d'un projet de taxation de l'assurance-vie, même dans le cas où il ne serait pas mis en oeuvre, nuit à l'image d'un placement qui n'a déjà pas besoin de mauvaise publicité. L'assurance-vie a en effet enregistré son sixième mois de collecte nette négative en janvier, c'est-à-dire que les épargnants ont retiré plus d'argent qu'ils n'en ont versé sur leurs contrats.

Quand Hollande fait du Roosevelt

En proposant lundi soir d'imposer à 75% les plus hauts revenus, François Hollande a pris une "mesure rooseveltienne", ont estimé mardi plusieurs responsables socialistes. Une référence à Franklin D. Roosevelt et sa politique du New Deal pratiquée aux Etats-Unis dans les années 1930. Une comparaison pertinente? Eléments de réponse. 

François Hollande a "voulu frapper fort." C'est ce qu'affirme mardi Jean-Marc Ayrault, le président des députés PS, à propos des déclarations du candidat socialiste, lundi soir sur TF1. Ce dernier a annoncé qu'il souhaitait, s'il est élu, imposer les revenus "au-dessus d'un million d'euros par an" à hauteur de 75%.

Sous Roosevelt, le taux d'imposition est passé de 25% à 91%

Pour le maire de Nantes, il s'agit d'une "mesure rooseveltienne". Allusion à la crise économique de 1929 et à la politique du New Deal menée ensuite par le président des Etats-Unis, Franklin Delano Roosevelt, élu en 1932. A l'époque, le démocrate avait également "frappé fort", à en croire Jean-Marc Ayrault, en demandant "un effort à tout son pays", ce que fait également, selon lui, le candidat socialiste aujourd'hui.
Lors de son arrivée au pouvoir, Roosevelt avait effectivement augmenté le taux d'imposition des revenus équivalents aujourd'hui à 770.000 euros. De 25%, il l'avait porté à 63% dès 1933 puis 79% en 1936 et 91% en 1941. "Quand il est arrivé au pouvoir, il a fait passer quinze grandes réformes en trois mois", explique l'économiste Pierre Larrouturou, qui s'est engagé au Parti socialiste puis à Europe Ecologie – Les Verts avant de quitter ce parti fin 2011. Il vient d'ailleurs de créer le collectif "Roosevelt 2012", qui propose quinze mesures inspirées de l'action de l'ancien président américain pour réformer la France.

"Le succès de Roosevelt est une rumeur"

"Il a rétabli la confiance dans le système bancaire. Bien sûr, certains ont été furieux qu'il augmente la fiscalité, mais il n'a provoqué aucune catastrophe. Ce qu'il a fait a donné 50 ans de stabilité aux Etats-Unis", affirme celui qui est également conseiller régional d'Ile-de-France au JDD.fr.Guillaume Duval, rédacteur en chef du magazine Alternatives économiques, rappelle que "le niveau des inégalités qui était très fort aux Etats-Unis avant 1929 a fortement baissé pendant trente ans". Pour lui, le New Deal de Roosevelt "n'a donc pas du tout freiné l'activité économique".
Un constat que réfute l'économiste libéral Jacques Garallo, professeur à l'Université Paul Cézanne Aix-Marseille III. "Le succès de Roosevelt est une rumeur. Le pic du chômage a été atteint en 1938, bien après son élection", affirme-t-il, ajoutant que le New Deal a été "la porte ouverte a tous les débordements". "Quand on augmente les impôts, on augmente la dette puisque ceux qui veulent entreprendre refusent de travailler plus", explique-t-il.

La décision de Hollande, "nécessaire" mais "symbolique"

Au contraire, pour Pierre Larrouturou, "le volontarisme" de Roosevelt et "l'idée de sa politique doivent inspirer" les gouvernements d'aujourd'hui. "Tout n'a pas marché. Si les Etats-Unis n'étaient pas entrés en guerre, le pays serait probablement retombé en récession économique. Il ne s'agit donc pas d'idéaliser sa politique, mais, au moins, il était libre par rapport aux lobbys", précise l'économiste.
Pour autant, la mesure prônée par François Hollande est encore loin de se rapprocher de la politique américaine des années 1930. Si l'ancien socialiste évoque "une décision nécessaire", elle reste avant tout "symbolique", au vu du peu de contribuables visés par cette annonce. "On peut aller plus loin et plus vite, mais c'est un premier pas."
Selon Jacques Garello, cette référence à la politique de Roosevelt n'est pas inédite : "Si François Hollande s'en inspire, soyons tout de même prudents. Pratiquement tous les candidats à l'Elysée, y compris le président actuel, sont plus ou moins keynésiens. Si on en est là aujourd'hui, c'est bien parce qu'on a creusé le déficit budgétaire depuis des décennies". Or, selon lui, il faudrait faire l'inverse, à savoir "diminuer la progressivité des impôts et réformer le modèle de la protection sociale". Ce qu'avait fait le gouvernement Reagan aux Etats-Unis à partir de 1980, mettant fin à l'héritage laissé par Franklin D. Roosevelt.