TOUT EST DIT

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ǝʇêʇ ɐן ɹns ǝɥɔɹɐɯ ǝɔuɐɹɟ ɐן ʇuǝɯɯoɔ ùO

mercredi 25 janvier 2012

Hélas, Hellas !


Les fins de mois sont de plus en plus difficiles en Europe. Pour les Grecs, elles sont déjà impossibles avec des revenus diminués jusqu’à 50 %. Oh, pas pour les 4 151 fraudeurs du fisc d’une « liste de la honte » communiquée par le gouvernement aux journaux. Ces millionnaires doivent environ 5 milliards d’euros à l’Etat. Qui est incapable de les percevoir, incapable aussi de poursuivre ces personnes…


Ce n’est pas le seul problème du pays. Les douloureuses mesures d’austérité décidées l’an dernier ne colmatent pas le tonneau des Danaïdes. La campagne électorale bat son plein avec du n’importe quoi. Le chef du gouvernement Papademos n’a aucune crédibilité.


Mais tout cela importe peu à la « troïka » (FMI, BCE et UE) : elle exige encore plus de sacrifices pour remettre la Grèce en ordre. C’est-à-dire la désendetter partiellement afin qu’elle puisse percevoir de nouvelles aides, et non pas relancer l’économie – un objectif hors sujet. Or cette négociation achoppe sur les créances privées détenues par les banques et les assurances. Les anciens titres doivent être échangés contre des nouveaux à une valeur inférieure d’au moins de moitié et avec un taux d’intérêt sous les 4 %.


Les 350 milliards de dettes seraient ainsi épongés de 100 milliards. Rien de plus moral, puisque la spéculation et la cupidité rendraient enfin des comptes. Malheureusement, les banques helléniques figurent parmi les plus gros créanciers de l’Etat. Elles risquent la faillite avec d’autres dramatiques conséquences.


Pourtant, un « défaut » de la Grèce, encore inimaginable en 2011 au nom du sauvetage de l’euro, ne semble plus l’être aujourd’hui. Comme si l’Europe de la monnaie unique vivait depuis quelque temps sous tranquillisants et euphorisants administrés par la Banque de Francfort enfin prodigue en liquidités. Mais pour combien de temps ? Que penser de l’accord sur le Mécanisme européen de stabilité (MES) dont se félicitent les grands argentiers ? C’est vrai que ce fonds est plus solide que le fameux FESF et qu’il sera opérationnel en juillet, un an avant la date prévue. Toutefois, ses 500 milliards ne suffiraient pas si un grand pays comme l’Italie devait faire appel aux aides, nul ne l’ignore.


La zone euro nécessite peut-être une politique d’austérité mais aussi une vraie politique de solidarité – par exemple via les eurobonds - vient de rappeler, au nom du FMI, Christine Lagarde à la chancelière Merkel qui est restée de marbre.


Bref, tout va bien, Madame la marquise…

Doutes

Notre Président doute. Il doute de nous, les électeurs, qui pourrons choisir bientôt de le garder ou de le congédier. Il nous sent indécis, pas convaincus par le si beau bilan qu’il a vanté janvier durant, de vœux en vœux. « Mes chers compatriotes », dit-il – et nous, on s’interroge : stop ou encore ? Notre Président doute également de lui-même, de son désir de continuer à faire le job cinq années de plus. À 57 ans, jeune papa, il reste assez ambitieux pour réussir ailleurs, et devenir riche chez son ami Bouygues, où le moindre directeur est mieux payé que lui. Franchement, on le comprend : c’est un métier de chien que de nous gouverner. Voyez François Hollande, condamné à sans cesse jurer son désir de devenir notre Président, tant il paraît hésiter devant la lourdeur de la tâche. Oui, on comprend tout ça. Mais enfin, à un moment, il faudra bien répondre à la chanson : tu veux ou tu veux pas ?

La loi de trop qui ne bénéficiera à personne

Ankara est en colère contre la France. Ce ne serait pas très grave si cette ire était provoquée par un enjeu majeur pour notre pays. Mais quelle mouche a donc piqué nos parlementaires, de gauche comme de droite, pour mettre à l'ordre du jour une loi inutile, inapplicable, voire inconstitutionnelle, et contraire à la liberté d'expression protégée, depuis la Déclaration des droits de l'Homme de 1789, par des textes internationaux. Bien sûr, le génocide arménien ne doit pas être nié, et toute forme de négationnisme historique, à propos de crimes contre l'humanité en particulier, est à bannir. Il y a onze ans, une loi a déjà été promulguée pour donner aux tribunaux le pouvoir de sanctionner ces négations. De quoi se mêlent aujourd'hui les parlementaires ? Ils veulent écrire l'histoire ? Mais ce n'est pas leur boulot ! Si leurs calculs sont électoralistes, ils sont tombés bien bas. Et ont égaré leur calculatrice ! Cette loi est proposée par le PS et poussée par l'UMP, mais sans unanimité. Que François Bayrou la qualifie de « faute » est un indice. Qu'Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères, la juge « inopportune » depuis sa genèse, n'est pas neutre. Personne n'en tirera les bénéfices. Surtout pas la France. Seule son image de donneuse-de-leçon-au-monde-entier en sort grandie. Et donne des arguments au Premier ministre turc Erdogan dans sa surenchère nationaliste. Sur le plan intérieur, cette loi à œillères a réussi ce que la paix sociale exige d'éviter : elle cristallise des communautarismes. À moins que ce ne soit voulu pour engager d'autres débats nauséabonds ? Encore un très mauvais calcul.

Crise de la dette: l'Union européenne tance la Grèce et l'Espagne

L'Union européenne a affiché un vif mécontentement mardi à l'égard de la Grèce en menaçant de lui couper les vivres si les réformes économiques promises ne sont pas appliquées, et demandé en parallèle à l'Espagne d'éviter un dérapage de son déficit.
Réunis à Bruxelles, les ministres européens des Finances entendent ne pas relâcher la pression au moment où la zone euro profite justement d'une période d'accalmie dans la crise de la dette sur les marchés financiers.
Après avoir réclamé plus d'efforts de la Grèce lundi soir pour espérer des prêts supplémentaires afin d'éviter la faillite, ils ont demandé mardi des engagements par écrit des principaux partis politiques du pays.
"Nous ne serons en mesure de donner notre feu vert que si les partis au pouvoir et les autres sont d'accord" pour mettre en oeuvre les réformes et "cela doit être fait par écrit", a fait savoir la ministre autrichienne, Maria Fekter.
Les principaux créanciers de la Grèce --Union européenne et Fonds monétaire international-- avaient déjà eu recours à ce procédé à l'automne, après l'annonce d'un référendum finalement abandonné.
L'histoire bégaie quelques mois après. "Le programme (budgétaire) grec a dérapé" par rapport aux prévisions, a déploré lundi soir le chef de file des ministres des Finances de la zone euro, Jean-Claude Juncker.
"Il est clair que la mise en oeuvre des réformes en Grèce a échoué", a renchéri mardi le ministre suédois des Finances Anders Borg. "En matière de réformes structurelles, de réformes budgétaires, ils (les Grecs) n'ont pas été à la hauteur", a-t-il asséné.
Selon une source diplomatique européenne, l'engagement du nouveau Premier ministre Lucas Papademos "n'est pas remis en cause" mais le reste de la classe politique grecque ralentirait ses efforts. Une situation qui pourrait durer jusqu'aux prochaines élections qui doivent avoir lieu en avril.
L'idée, en faisant monter la pression, est donc aussi d'épauler M. Papademos, un "technocrate" chargé provisoirement de diriger le pays, face aux partis qui soutiennent son fragile gouvernement de transition.
"Nous ne pouvons attendre la tenue des élections, les changements doivent avoir lieu maintenant", a estimé cette même source.
Le temps est en effet compté. La Grèce devra rembourser 14,4 milliards d'euros de prêts le 20 mars prochain, ce qu'elle ne peut faire sans l'aide promise. Si cette échéance n'est pas tenue, la défaut de paiement sera inévitable.
Ces craintes pesaient mardi sur les marchés boursiers qui étaient pour la plupart en baisse.
Outre les réformes, Athènes doit aussi au préalable conclure un accord avec ses créanciers privés sur la réduction de sa dette. Les négociations visent à réduire de 100 milliards d'euros la dette détenue par les banques et fonds d'investissement, de manière à ramener l'endettement public du pays à 120% du Produit intérieur brut à l'horizon 2020 contre 160% actuellement.
L'opération doit être réalisée via un échange d'anciennes obligations détenues par le secteur privé contre de nouveaux titres, avec au centre des tractations la rémunération accordée à ces derniers.
Les discussions butent sur les taux d'intérêt qui seront appliqués. La zone euro a renvoyé Athènes et ses banques à la table des négociations en exigeant que le taux soit inférieur à 4%, alors que ce seuil est jusqu'ici considéré comme un minimum par les créanciers privés.
Il devra se situer entre 3,5% et 4%, a demandé M. Juncker, au risque que les banques considèrent la restructuration de la dette grecque comme "contrainte" et non plus "volontaire", avec à la clé un défaut de paiement de la Grèce aux conséquences incalculables.
Le lobby bancaire qui négocie avec la Grèce, l'Institut de la finance internationale (IIF), a réitéré mardi son refus d'aller au-delà de 50% de perte ("décote") sur ses créances. Il s'agit d'une "perte maximale" pour rester dans un cadre "volontaire", a affirmé le directeur général de l'IIF, Charles Dallara.
Or, avec une rémunération inférieure à 4% "la décote sera forcément supérieure à 50%", estime une source gouvernementale européenne.
La Grèce n'est pas la seule à inquiéter. La situation en Espagne, où le déficit public dérape plus que prévu, préoccupe également, bien que dans une bien moindre ampleur.
"Il est essentiel de ramener sans délai les finances publiques (espagnoles) à un niveau soutenable et, de ce fait, nous pensons qu'il est essentiel de respecter les objectifs budgétaires en 2012" dans le pays, où le déficit cette année ne doit pas dépasser 4,4%, a prévenu le commissaire aux Affaires économiques et monétaires, Olli Rehn.
Une fin de non recevoir adressée aux autorités espagnoles qui avaient demandé plus de souplesse.
Globalement, M. Rehn a dit tabler sur une "récession modérée" en Europe. Ce qui à ses yeux rend encore plus indispensable de renforcer les moyens du Fonds de secours de la zone euro. Bruxelles peut compter sur ce point sur le soutien du FMI, de la BCE, de la France ou encore de l'Italie. Mais l'Allemagne reste encore très réservée.

Hollande : le changement... de veste !

Dans son discours du Bourget, le candidat PS à la présidentielle s'attaque à un système qu'il a, en partie, contribué à ériger.

François Hollande ferait-il dans la politique à géométrie variable ? Difficile à croire tant le candidat socialiste à la présidentielle a insisté dimanche sur la sincérité du combat qu'il mène. Pour son premier grand meeting de campagne, François Hollande a pointé du doigt son "véritable adversaire" : le monde de la finance. Un exercice de style logique et prévisible, la contestation des dérives du capitalisme étant ancrée dans l'ADN du PS. Dimanche au Bourget, François Hollande a parfaitement ressorti la boîte à outils du candidat de gauche pour clouer au pilori la sphère financière.
Un combat qu'il aurait toujours mené depuis son entrée en politique. Logique, alors, qu'il lance avec conviction et emphase : "J'ai toujours suivi la ligne que je m'étais fixée." Pourtant, la ligne politique de l'ancien premier secrétaire du PS n'est pas aussi droite qu'il voudrait bien le faire croire. Sa carrière politique ne restera pas marquée par une contestation sans faille de la finance mondiale. Il a même, à plusieurs reprises, appuyé des décisions qui vont à l'encontre des grands principes énoncés dimanche au Bourget.

Président, moi ? vous rêvez là !!!

Privatisations

Alors, même si François Hollande n'a jamais été au pouvoir en tant que tel, son soutien à l'action gouvernementale de Lionel Jospin entre 1997 et 2002 n'est plus à démontrer. D'ailleurs, pour atténuer ce handicap de poids dans la course à la présidentielle - il a longtemps été attaqué sur le fait de n'avoir jamais exercé le pouvoir -, le député de Corrèze n'hésite pas à rappeler qu'il a été associé à toutes les grandes décisions prises par Lionel Jospin pendant la cohabitation.
Une période marquée par un vaste chantier de privatisation des entreprises publiques françaises. À cette époque, le gouvernement Jospin cède face à la pression de la concurrence internationale. Du coup, nombre de groupes emblématiques sont cédés par l'État. Et non des moindres. Au chapitre des différentes privatisations (totales ou partielles) et autres ouvertures de capital, on retiendra notamment France Télécom, Air France, Aérospatiale, Thomson-CSF, Thomson Multimédia, le Crédit lyonnais, la Société marseillaise de crédit, le CIC et le groupe d'assurances Gan.
François Hollande, alors premier secrétaire du Parti socialiste, n'a jamais manifesté le moindre désaccord, assurant une indéfectible loyauté à son Premier ministre. Pire, à l'époque, il présente même ce gouvernement comme une "référence". D'ailleurs, Lionel Jospin lui a rendu la pareille en votant pour le candidat corrézien aux deux tours de la primaire socialiste. François Hollande pâtit indéniablement des discours et des soutiens qu'il a pu apporter dans le passé. De quoi apporter de l'eau au moulin de ceux qui le décrivent comme le candidat du système.

Social-démocratie

D'ailleurs, à la fin des années 1990, il est un des premiers à se réclamer ouvertement démocrate à l'image de Tony Blair en Grande-Bretagne. Il sera d'ailleurs reçu par le Premier ministre britannique fin 2002. Rien d'étonnant puisque la carrière politique de l'ancien maire de Tulle est marquée par la social-démocratie : il est lancé en politique par Jacques Delors, précurseur de la social-démocratie à la française, et il a même dirigé le club Témoin, centre de réflexion des idées deloristes. Malgré cela, pendant la primaire à l'investiture socialiste, l'entourage de François Hollande n'hésite pas à attaquer Martine Aubry pour avoir préfacé en 1997 l'ouvrage de Tony Blair, La nouvelle Grande-Bretagne, jugé trop à droite de la gauche. C'est pourtant Manuel Valls, grandement influencé par l'ancien leader du Labour Party, qui a été désigné par le candidat Hollande pour gérer sa communication pendant la campagne présidentielle.
Autre exemple de cette ambivalence en 2005. Alors dans l'opposition, François Hollande se rallie à la majorité présidentielle en se faisant un fervent défenseur du oui au référendum sur le projet de Constitution européenne. Une position clairement sociale-démocrate, la ligne plus traditionnelle du PS préférant opter pour le non, à l'image de Jean-Luc Mélenchon, encore membre du Parti socialiste, Henri Emmanuelli ou Arnaud Montebourg. Alors quand François Hollande se pose en adversaire farouche de la finance, il effectue un exercice de synthèse politique compréhensible étant donné le contexte de campagne présidentielle. Mais il s'agit aussi d'un opportunisme certain dont l'objectif est de rallier - ou, du moins, froisser le moins possible - l'aile gauche de son parti.

Ambivalence

Preuve de cette politique à deux vitesses quand François Fillon déclare : "François Hollande pourrait soumettre son programme électoral à Standard and Poor's. Il serait intéressant de savoir ce qu'une agence de notation pense d'un programme dans lequel il n'y a que des augmentations de dépenses et des hausses d'impôts." C'est alors Bruno Le Roux, un des quatre porte-parole du candidat PS, qui monte au créneau : "Le Premier ministre aurait lui-même une mauvaise surprise en regardant le projet socialiste, qui est tout à fait de nature à rassurer les agences de notation."
Le camp Hollande est devenu maître dans l'art du grand écart politique. Car il aurait été logique de rejeter purement et simplement la question de l'avis des agences de notation, intimement liées au monde de la finance donc alliées de l'ennemi juré. Mais la politique est un habile jeu d'équilibriste qui va et vient au gré du vent. D'ailleurs, le slogan de campagne de François Hollande illustre cet état de fait. Au Bourget, on pouvait lire : "Le changement, c'est maintenant". Le changement de veste aussi ?

Sarkozy parle de défaite ? N'en croyez pas un mot !

Hervé Gattegno, rédacteur en chef au "Point", intervient sur les ondes de RMC du lundi au vendredi à 8 h 20 pour sa chronique politique "Le parti pris".

Vous revenez sur les propos attribués à Nicolas Sarkozy et selon lesquels il envisagerait lui-même son échec à la présidentielle. Votre parti pris : Sarkozy parle de défaite ? N'en croyez pas un mot ! Qu'est-ce qui vous fait dire cela ?
Le bon sens, d'abord, et l'expérience de ce que le vertige présidentiel produit sur ceux qui exercent la fonction. Aucun des prédécesseurs de Nicolas Sarkozy n'a jamais pu croire à sa propre défaite : ni Mitterrand ni Chirac, qui ont été au fond de l'abîme - mais qui ont bien été réélus ; ni Giscard, d'ailleurs, qui, lui, a été battu. Et on sait que s'il y a un trait de caractère qui domine chez Nicolas Sarkozy, c'est plutôt la confiance en soi que l'incertitude et le doute introspectif. Comme l'UMP lance, au même moment, une vague de tracts dans toute la France pour vanter son bilan, que lui-même parlera dimanche à la télévision et qu'il envoie une flèche par jour vers François Hollande, il faut plutôt parier qu'il y a de la manoeuvre, de l'intox dans l'air. C'est la stratégie de Volpone...
Pourquoi la stratégie de Volpone ? Que voulez-vous dire ?
Volpone, c'est cette pièce du théâtre classique où un marchand vénitien fait semblant d'être à l'article de la mort pour tromper ceux qui convoitent sa fortune. Nicolas Sarkozy est en train de faire la même chose. C'est vrai qu'il est en grande difficulté : il reste impopulaire, le chômage est très haut, la droite commence à douter. Objectivement, il a plus de chances d'être battu que d'être vainqueur. Il n'empêche qu'il ne renoncera à rien. Et sûrement pas à la ligne qu'il s'est fixée - et qui consiste à se montrer le plus possible en président et le moins possible en candidat. Laisser filtrer des propos sur son avenir après la politique, sur sa distance à l'égard du pouvoir, c'est utile pour peaufiner son autoportrait en homme d'État désintéressé ; et pour dramatiser le moment. C'est un signal pour mobiliser ses partisans et un coup pour déstabiliser ses adversaires.
Ça peut marcher ?
La mobilisation de son camp, oui - elle passe aussi par le retrait des autres candidats de droite (Villepin et Morin) et on sait que l'Élysée s'y emploie. La déconcentration de ses adversaires, c'est moins sûr. François Hollande est dans une bonne dynamique, il aurait tort de se laisser piéger. En fait, Nicolas Sarkozy joue sa meilleure carte - la dernière : il cherche par tous les moyens à renforcer sa stature présidentielle. Dans le sondage du Parisien/Aujourd'hui en France d'hier, c'est le seul point sur lequel il apparaît supérieur à François Hollande - et de loin.
Si je vous comprends bien, vous ne croyez pas au coup de blues du président. La presse se fait manipuler ?
Disons que certains médias se prêtent à la manipulation. Ces petites phrases citées dans les journaux, Nicolas Sarkozy les a prononcées en réalité devant un groupe de journalistes dans l'avion qui le ramenait de la Guyane, il y a quelques jours. C'était du "off" comme on dit : des propos que les journalistes peuvent reprendre sans dire que le président leur a parlé. Résultat : on fait croire que ce sont ses états d'âme que Nicolas Sarkozy a confiés à ses proches, alors que ce sont des confidences millimétrées distillées aux médias pour qu'ils les répètent. Donc, oui, il y a instrumentalisation. Comme quand François Hollande impose aux médias les images de son discours, avec les bons cadrages sur ses partisans et la salle en liesse, mais pas un gros plan sur Ségolène Royal qui boudait. Pendant la campagne, il va falloir faire attention à ne pas laisser le spectacle prendre le pas sur la réalité.

Crise de mémoires


Si un combattant de la Grande guerre revenait parmi nous, il pourrait lire les journaux presque normalement. On y parle des massacres perpétrés par les Turcs, des souffrances des Arméniens, des incompréhensions entre une Europe en pleine crise et un Proche Orient en ébullition.


Et pourtant, un siècle a passé. C'est la mémoire des victimes de ce temps qui est en jeu, et notre revenant, passés les premiers titres, comprendrait bien vite qu'il vient de buter sur un débat complexe et sensible. Un débat où se mêlent, de façon souvent confuse et contradictoire, diverses vérités. Celle de l'historien, celle du législateur, celle du diplomate. Celle, sacrée, des descendants des victimes arméniennes.


Passionnant et passionné, ce débat existe surtout, il est nécessaire de le dire d'emblée, parce que nous sommes en campagne électorale. On ne saurait comprendre autrement la hâte avec laquelle l'Assemblée, le mois dernier, et le Sénat, lundi, ont adopté des textes pénalisant la négation du génocide arménien. Pour une fois, comme pour ajouter à la singularité du sujet, l'UMP et le PS sont en phase. Ce pourrait être une curiosité de campagne.


Mais le sujet est grave. Non seulement parce qu'il porte sur des faits inouïs, un génocide, mais parce que le vote du Parlement français vient de déclencher une sérieuse crise avec la Turquie. Aucune rétorsion n'a été annoncée pour l'heure, Ankara attendant la promulgation de la loi (qui interviendra avant les élections). Le ton n'en est pas moins menaçant. Tout laisse penser qu'un boycott des entreprises françaises est désormais inévitable. Quelle sera son ampleur ? Son efficacité ? Difficile de l'évaluer pour l'heure. Sur le plan stratégique, en revanche, les tensions franco-turques vont se faire sentir, à l'Otan comme dans la gestion de la crise syrienne.


On pourrait y voir les inévitables effets collatéraux d'une juste cause. Encore faudrait-il que les termes de cette cause soient limpides, ce qui n'est pas le cas. Les tenants de la nouvelle loi estiment que la mémoire arménienne a droit aux mêmes égards que la mémoire juive, que le droit peut innover et que la liste des revendications mémorielles éventuelles (de la Vendée au Rwanda) ne serait pas interminable.


Les opposants à ce texte estiment en revanche que ce n'est pas au législateur de dire l'histoire, que la loi Gayssot de 1990, sanctionnant la contestation des crimes contre l'humanité, pouvait suffire. Ou, pour reprendre les termes de l'historien Pierre Vidal-Naquet qu'il ne faut pas introduire « des vérités d'État ». La France elle-même, pourtant directement responsable, a mis des décennies à reconnaître la Déportation et peine encore ne serait-ce qu'à parler, par la voix de ses représentants, de la guerre d'Algérie.


Si les fondements juridiques du texte adopté font, en soi, l'objet de lectures divergentes, son caractère inopportun est évident. Non seulement en raison de la crise avec Ankara ou parce que les pressions arméniennes et les manifestations turques, comme à Paris samedi, ouvrent un nouvel espace aux revendications communautaristes. Mais aussi parce que les efforts de réconciliations, menés en Turquie même par des intellectuels et des militants courageux, sont maintenant fragilisés par le raidissement du pouvoir turc.

Grèce : décès accidentel du cinéaste Theo Angelopoulos

Le réalisateur grec Theo Angelopoulos, 76 ans, a succombé mardi soir à une hémorragie cérébrale dans un hôpital près du Pirée, le port d'Athènes, où il avait été admis après avoir été victime d'un accident de la circulation. Le cinéaste a été renversé par un motard alors qu'il traversait une intersection d'un périphérique à Keratsini, banlieue ouest du Pirée.
Auteur d'une quinzaine de longs métrages, Théo Angélopoulos avait reçu la Palme d'or au en 1998 pour son "L'Eternité et un jour", interprété notamment par Bruno Ganz. Il incarnait la «nouvelle vague» du grec des années 70 et 80, et avait été très influencé par le cinéma français de l'époque.

Deux autres de ses films avaient été primés à Cannes : «le Regard d’Ulysse», avec Harvey Keitel en 1995, Grand Prix et Prix de la Critique internationale, et «Voyage à Cythère» en 1984, prix du scénario et prix de la Critique internationale. Il avait également reçu deux récompenses à la Mostra de Venise : un Lion d'or en 1980 pour «Alexandre le Grand» et un Lion d'argent en 1988 pour «Paysage dans le brouillard».

Né le 17 avril 1935 à Athènes, il avait étudié la littérature à Paris, à la Sorbonne, et le cinéma à l'IDHEC. A son retour en Grèce, il avait débuté dans le journalisme, comme critique dans un quotidien qui allait être interdit par les militaires après le coup d'état. C'est alors que, sans emploi, il avait réalisé son premier film, «Reconstitution» (1970). Il avait obtenu une reconnaissance internationale avec une trilogie retraçant l'histoire de son pays des années 1930 à 1970, «Jours de 36», «Le voyage des comédiens» et «Les chasseurs». A la chute de la dictature, il s'était installé en Italie.