TOUT EST DIT

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dimanche 4 décembre 2011

Non, Angela Merkel n'est pas Bismarck

La comparaison d'Arnaud Montebourg ne tient pas debout.

Le sémillant Arnaud Montebourg a indéniablement le sens de la formule. Mais pas celui de la vérité historique. Angela Merkel, a-t-il fulminé, veut "tuer l'euro", elle "mène une politique à la Bismarck" afin que "l'Allemagne fasse fortune sur les ruines des autres pays" et impose "un ordre allemand". Rien de moins.

Il est rare d'accumuler autant de sottises en aussi peu de mots. L'histoire est comme les baïonnettes : on peut tout faire avec, sauf s'asseoir dessus. Le chancelier de fer n'a pas laissé un très bon souvenir en France. C'est Bismarck, en grand uniforme de cuirassier, qui, le 18 janvier 1871, dans la galerie des Glaces de Versailles, lit devant Guillaume, roi de Prusse, la proclamation de l'empire allemand. Des hourras s'élevèrent dans le château de Louis XIV, symbole de la grandeur française humiliée.

Bismarck, fils de hobereau, est l'homme d'une vision et d'une volonté : celle de l'unité allemande, conquise par la force des armes. Il est l'émanation d'une monarchie autoritaire mais aussi un fin politique, adepte des grands équilibres en politique internationale et précurseur en matière sociale. Il est l'inventeur de la sécurité sociale et du système des retraites. Angela Merkel, fille de pasteur, est à la tête d'un État démocratique aux équilibres politiques compliqués. Elle n'a rien d'une visionnaire : c'est une honnête gestionnaire pragmatique. Elle doit composer avec son propre parti, sa coalition, le Bundestag, la Cour constitutionnelle de Karlsruhe.
Prudence de serpent

L'Allemagne d'Angela Merkel est bien éloignée de la Prusse de Bismarck ou de l'empire qui lui a succédé. C'est un pays discipliné où le travail est sacralisé, mais aussi une nation vieillissante, plutôt frileuse, qui redoute le vent du grand large comme le montre la prudence de serpent de Berlin en matière de politique internationale. Angela Merkel ne veut dominer personne et n'a aucun projet hégémonique. Elle-même et ses compatriotes ont été vaccinés pour des siècles contre les folies aventuristes incarnées par la période nazie. Elle cherche à préserver les intérêts des Allemands, qui ont déjà dû consentir un colossal effort (1500 milliards d'euros) pour financer la réunification.

Elle se définit comme une ménagère souabe qui veille au budget de sa famille. Traumatisés par la débâcle du mark des années vingt, les Allemands regardent avec suspicion tout projet qui consisterait à mutualiser et monétiser la dette de la zone euro. Pour eux, l'indépendance de la Banque centrale est un dogme intouchable, la Loi et les Prophètes. Pour que l'Allemagne bouge, il faut la rassurer et non pas vociférer des anathèmes stupides fondés sur des divagations historiques. Si l'on peut reprocher quelque chose à Angela Merkel, c'est plutôt d'être parfois trop timide, un peu indécise. On est bien loin de Bismarck.

La lune entre les dents

L'Europe, on le sait, n'aime pas les horloges. Mais c'est la première fois qu'elle redoute d'y entendre sonner le glas. Les marchés, à son chevet, interrogent le pronostic vital : celui de la confiance du monde dans la survie de son grand corps malade. Est-ce, dites-vous, Dieu possible ? Eh bien, oui ! Il est plausible que se déglingue le Meccano de l'Europe, de son marché commun, de ses institutions. Il est plausible que sombre le plus vaste projet mondial de pays libres pour unifier, enfin, un vieux continent béni et maudit par l'Histoire.

On savait l'Europe communautaire privée de ferveur et chaleur populaires. On la savait oublieuse de l'identité géographique et civilisationnelle qui inspira ses créateurs, et dont aucune grande voix ne perpétue la vision. On la voyait figée dans l'édifice technocrate de sa bureaucratie bruxelloise, et dont le populaire ignorait les mérites. L'Europe s'est de plus en plus élargie et de moins en moins approfondie. Elle est rongée par le doute. Le malheur veut que la crise financière ait porté ce doute à l'incandescence. Qu'elle ait ranimé les rétractions nationales, endormi l'espérance dans l'indifférence de peuples fatigués. L'Europe ne s'aime pas assez. Elle se fait eurosceptique. Hélas, les marchés aussi ! Ils mettent le sel sur une plaie ouverte. Ils enferment l'Europe dans le cycle infernal de la défiance.

Une défiance des marchés, celle qui pointe en Europe une crise de la dette. Une crise de la dette qui déclenche une crise de l'euro. Une crise de l'euro qui sanctionne l'impotence de l'Europe. De bas en haut, un enchaînement implacable ! L'Europe ne s'en sortira - si elle s'en sort - que par le haut.

Que l'agressivité des marchés soit avivée par le dérèglement du système spéculatif, que l'esprit de lucre et l'explosion d'une interconnexion mondialisée ait renversé des garde-fous, c'est indiscutable. Mais sur ces évidences on se défausse en vain. Car les marchés, prêteurs mondialisés, s'alarment - et à juste titre - du sort de leurs créances. Et désormais de la solvabilité des Etats eux-mêmes. La crise ne fait en somme qu'éclairer a giorno les gouffres financiers de pays drogués au déficit.

L'euro, monnaie forte, devrait, à l'évidence, assumer et garantir dans l'épreuve les dettes des traînards. Hélas, l'euro n'est que la monnaie commune d'une Europe qui l'est de moins en moins. Entravée par cette défaillance fondamentale, la banque de l'euro, la BCE, ne peut agir comme les banques centrales américaine ou japonaise. Les marchés le savent, comme vous et moi. Ils doutent que, sans le viatique de la BCE, les surendettés se sortent seuls du gouffre où ils se sont laissés glisser. D'autant que les marchés découvrent que la cure nécessaire des drogués peut tuer à force de guérir. Et qu'étouffés par la récession qui menace les malades ne sortent de l'hôpital que pour la tombe. Et leurs dettes avec !

Nous voici donc menés, d'un degré l'autre, à ce jugement dernier de l'Europe. Si l'euro et sa banque ne peuvent desserrer l'étau, c'est que l'Europe, géant économique, reste un pitoyable handicapé politique. L'Allemagne, premier de cordée, hésite à jeter la corde vers les grimpeurs défaillants avant que soient plantés les derniers pitons de l'escalade européenne : ceux d'une réelle gouvernance économique.

Cette gouvernance, ce serait une révolution ! Car elle installerait l'abandon d'une partie de la sacro-sainte souveraineté budgétaire des Etats. Mais les marchés plaquent les Etats flageolants au pied d'un mur : soit ils choisissent de concéder à l'Europe ce premier abandon de souveraineté, soit ils se livrent, pieds et poings liés, à la souveraineté des marchés.

Bref, ce qui est demandé à l'Europe, c'est un premier saut de nature "fédérale", lourd de conséquences, et à quoi ni l'Allemagne ni la France ne sont prêtes à consentir dans l'urgence. Demain, peut-être ! Mais le processus exige l'approbation soit référendaire, soit parlementaire d'Etats soumis à leurs Constitutions. Or le temps presse. Et les surendettés ont l'épée dans les reins.

Dans l'urgence, l'Allemagne, pressée par tous - et par l'Amérique elle-même ! -, mesure sa responsabilité historique. Et déjà sa propre vulnérabilité dans la menace d'effondrement de la zone euro. Elle concocte donc, pour les jours qui viennent, avec la France, un pacte de stabilité : il proposera, pour un certain nombre d'Etats volontaires, d'apporter, par contrôles et sanctions communes, les garanties immédiates qu'une réelle gouvernance économique ne peut encore assurer. Un noyau de quelques pays bénéficiant encore de la relative bienveillance des marchés pour une sorte de commune caution "bourgeoise"...

Ce pacte suffira-t-il ? Depuis deux ans, 17 sommets franco-allemands n'ont pu trancher le noeud gordien, ce que l'Europe attend encore. Mais peut-être, sous l'extrême contrainte, l'Europe se décide-t-elle enfin, comme on dit en Orient,"à saisir la lune entre les dents."

Hollande à Berlin, déplacement délicat

Le candidat socialiste passe deux jours au congrès du SPD où il s'exprime lundi matin. Sa parole est très attendue alors que la relation franco-allemande est cruciale pour sauver l'euro.
"La gauche ne doit pas, en aucune façon, ranimer des relents et des sentiment anti-allemands". Le communiqué de Pierre Moscovici tombé à l'AFP dans l'après-midi de vendredi sonne comme un avertissement de François Hollande à sa famille politique. Il faut dire que certaines petites phrases germanophobes sont tombées bien mal, à quelques heures de son déplacement à Berlin, au congrès du SPD. Invité par ses amis sociaux démocrates allemands, le candidat du PS joue là un moment important de son début de campagne, à l'heure où la présidentielle devient de plus en plus franco-allemande. "Arnaud a fait une grosse connerie avec sa référence à Bismarck, d'autant plus que pour les Allemands, c'est un compliment. Heureusement, Montebourg, personne ne connaît à Berlin", fait remarquer un dirigeant socialiste. 

La visite de François Hollande à Berlin dimanche et lundi prend une tournure particulière alors que Nicolas Sarkozy doit recevoir lundi à Paris la chancelière Angela Merkel pour travailler à une nouvelle gouvernance européenne capable de sauver l'euro. A Toulon, en fin de semaine, le président de la République a voulu expliquer aux Français qu'un abandon de souveraineté budgétaire était désormais indispensable pour lutter à armes égales face aux nouvelles grandes puissances et assurer le désendettement du pays. Quitte à coller à la stratégie économique de la droite allemande. Cette position de Nicolas Sarkozy est critiquée par les socialistes français qui lui reprochent de trop céder à Berlin depuis des mois. "Nicolas Sarkozy suit Angela Merkel", affirme François Hollande tandis que Laurent Fabius explique que "la relation franco-allemande est déséquilibrée". 
 
"On verra le moment venu"
 
Mais vu le peu de marge de manoeuvres que laisse l'économie française face à l'Allemagne, François Hollande peut-il dire autre chose que Nicolas Sarkozy à Berlin ?  "Oui", répond sans hésiter le député parisien Jean-Christophe Cambadélis, chargé de l'Europe et des relations internationales au PS. "Est-on obligé de se faire hara-kiri face à Angela Merkel ?", explique-t-il dans une longue interview à TF1 News, affirmant que les euro-obligations et une stratégie globale de croissance sont indispensables pour sortir de cette crise européenne par le haut. François Hollande lui-même a refusé la semaine dernière de se mettre dans les pas de la politique européenne de Nicolas Sarkozy, lors d'un déplacement à Bruxelles. Mais poussé dans ses retranchements par les journalistes sur sa marge de manoeuvre en cas de victoire en 2012, le candidat PS a fini par lâcher : "on verra le moment venu", comptant sur le respect par la chancelière allemande du vote des Français et d'une nouvelle légitimité en place. Un pari en quelque sorte.
 
En réalité, dans le camp Hollande, on estime qu'un nouveau président de la République pourrait mener une autre politique face à Berlin. D'une part en s'appuyant sur les forces politiques allemandes qui ne soutiennent pas les choix d'Angela Merkel, les sociaux-démocrates, les écologistes et la gauche plus radicale, mais également en comptant sur une évolution d'une partie de la droite, certains dirigeants de la CDU affirmant que Berlin devra évoluer dans ses choix européens pour ne pas risquer l'isolement. "On ne peut pas exclure catégoriquement le recours aux euro-obligations. Elles pourraient devenir indispensables", a ainsi affirmé vendredi dans le quotidien Die Welt le commissaire européen à l'Energie, l'Allemand Guntler Oettinger, issu pourtant des mêmes rangs CDU qu' Angela Merkel.
 
D'autre part, les conseillers de François Hollande estiment qu'une nouvelle ère dans la relation franco-allemande peut s'établir, "à condition de savoir créer de la confiance et de la stabilité dès le début" comme l'explique l'historien Jacques-Pierre Gougeon.  Cet universitaire germaniste a été présenté à François Hollande par le patron des députés PS Jean-Marc Ayrault, lui-même bon connaisseur de l'Allemagne. Pour Jacques-Pierre Gougeon, le manque de confiance d'Angela Merkel en Nicolas Sarkozy s'expliquerait par les choix de Paris lors des deux premières années du quinquennat "sans concertation avec l'Allemagne" (Union pour la Méditerranée, résolution de la crise bancaire en 2008 avec Cameron, etc..). "Tout cela a laissé des traces", affirme cet universitaire.
 
Reste que la dégradation rapide de l'économie européenne et la grande urgence à trouver des solutions pour sauver l'euro rendent un peu caduque la déclaration commune du PS et du SPD qui date de juin dernier et dans laquelle il n'est pas fait mention de la BCE et de son rôle à jouer dans la crise. "François doit trouver des solutions qui vont au-delà du bon travail préparé pendant trois ans par Martine Aubry", confie un de ses soutiens. L'urgence est plus grande". Comme pour faire oublier l'accélération subie de son début de campagne, François Hollande va devoir trouver les mots justes lundi matin lors de son discours devant le congrès du SPD. Pour rassurer les Allemands, de droite comme de gauche.

L'Allemagne risque de se retrouver isolée, dit Helmut Schmidt

L'Allemagne risque de se retrouver isolée si elle cherche à imposer ses vues à ses partenaires européens face à la crise de la dette, a déclaré dimanche l'ancien chancelier social-démocrate Helmut Schmidt lors du congrès du SPD à Berlin.

"Si nous succcombons à la tentation de dominer les autres, nos voisins se dresseront contre nous", a averti l'ancien chef du gouvernement, aujourd'hui âgé de 92 ans, qui s'exprimait à la

tribune assis sur un fauteuil roulant. "Nous devons nous montrer généreux envers nos amis et voisins, et particulièrement envers la Grèce", a-t-il ajouté dans un discours d'une heure devant une salle comble.

Législatives test pour Poutine

MOSCOU (AP) — Environ 110 millions d'électeurs russes étaient appelés aux urnes dimanche pour renouveler la Douma, la chambre basse du Parlement. A trois mois tout juste de la présidentielle, le scrutin pourrait être marqué par une certaine érosion de la domination de Russie unie, le parti de Vladimir Poutine, en dépit des efforts déployés par le Kremlin pour marginaliser l'opposition.
Des formations rivales et plusieurs observateurs ont fait état d'irrégularités importantes dans le déroulement du vote et la participation semblait faible dans de nombreux secteurs. Dans les régions de Sakhaline et du Kamtchatka, sur la côte Pacifique, la mobilisation électorale oscillait notamment entre 45% et 48% seulement à deux heures de la fin du scrutin dans ces zones.
Vladimir Poutine s'apprête à briguer de nouveau la présidence en mars prochain pour succéder à son protégé Dmitri Medvedev. Mais après plus d'une décennie de domination politique, le style de l'ex-chef d'Etat et actuel Premier ministre, symbole d'une dérive autocratique de l'exercice du pouvoir, semble susciter un mécontentement populaire croissant. La corruption officielle et le fossé entre les citoyens "ordinaires" et les très riches provoquent aussi l'insatisfaction. Considérée comme un outil de répression de l'opposition et la représentation d'une bureaucratie corrompue, Russie unie est souvent accusé d'être le "parti des escrocs et des voleurs".
Avec 315 sièges sur 450, Russie unie dispose d'une majorité des deux tiers dans la Douma sortante. Mais selon une enquête diffusée fin novembre par le centre indépendant Levada, la formation ne serait créditée cette fois-ci que de 53% des intentions de vote, un résultat qui pourrait la priver du nombre des députés nécessaire pour modifier la Constitution sans contestation possible.
Un bon score de Russie unie serait cependant précieux pour Vladimir Poutine qui entend reprendre les rênes du pays lors de la présidentielle du 4 mars après ses deux mandats à la tête de la Fédération entre 2000 et 2008.
A la veille de la journée du "silence" électoral, il a averti vendredi, à l'instar du président Dmitri Medvedev, que trop de diversité politiques à la chambre basse du Parlement conduirait à l'instabilité et à la paralysie. Avant le vote, il a par ailleurs accusé des gouvernements occidentaux de vouloir influencer le cours des élections. La seule organisation indépendante de suivi des élections, Golos ("vote"), qui reçoit des fonds européens et américains, a subi de fortes pressions officielles durant la semaine qui a précédé le vote.
Son site web ne fonctionnait pas dimanche, tout comme celui de la radio indépendante "Echo de Moscou". Tous deux ont invoqué des actes de piratage informatique. "L'attaque contre le site, un jour d'élection, est évidemment liée aux tentatives de s'immiscer dans la diffusion d'informations sur les violations", a estimé sur Twitter le rédacteur en chef de la radio, Alexeï Venediktov.
Seuls sept partis ont été autorisés cette année à présenter des candidats, les formations d'opposition les plus virulentes n'ayant pu s'inscrire pour le scrutin.
Dimanche, le Parti communiste (57 élus dans la Douma sortante), qui pourrait bénéficier d'un vote de protestation, ainsi que la formation Iabloko se sont plaints de violations électorales visant à favoriser Russie unie.
Selon le chef de file des communistes Guennadi Ziouganov, les observateurs de son parti ont déjoué une tentative de bourrage des urnes dans un bureau de vote de Moscou. Ils auraient découvert 300 bulletins déjà présents dans l'urne avant le début du vote.
Il a précisé que des incidents du même type avaient été signalés dans plusieurs bureaux de vote de la capitale, Rostov-sur-le-Don et de nombreuses régions. A Krasnodar (sud), des personnes non identifiées se faisant passer pour des observateurs du parti communiste se sont présentées à des bureaux où les vrais observateurs n'ont pas été autorisés à entrer, a encore précisé M. Ziouganov.
A Vladivostok (Extrême-Orient russe), des électeurs se sont plaints auprès de la police que Russie unie proposait de la nourriture gratuite en échange de promesses de vote pour le parti. Et à Saint-Pétersbourg, un photographe de l'Associated Press a vu un emblème de la formation de Poutine collé sur le rideau d'un isoloir.
Selon Golos, des observateurs et des membres de partis d'opposition ont été empêchés à Samara, sur la Volga, de vérifier l'état des scellés des urnes dans tous les bureaux de vote.
Nombre des violations concernaient des votes par correspondance, a aussi rapporté la directrice de l'organisation, Lilia Chibanova, qui avait été contrainte vendredi de remettre son ordinateur portable aux forces de sécurité après avoir été retenue une douzaine d'heures dans un aéroport. L'ambassadeur des Etats-Unis en Russie John Beyrle dit avoir appelé samedi Golos pour exprimer son "soutien".
Mikhaïl Kassianov, ancien Premier ministre sous la présidence de Poutine, a précisé qu'il ne se faisait aucune illusion sur le respect des règles électorales. Pour lui, "les autorités ont créé une contrefaçon d'une institution très importante qui a pour nom élection libre, mais qui n'est pas libre et n'est pas une élection".
Quelques dizaines de militants du Front de gauche (opposition) ont tenté dimanche d'organiser une manifestation devant la Place rouge à Moscou avant d'être rapidement dispersés par la police. Une dizaine d'entre eux ont été interpellés.
A Bryansk (ouest), un inconnu a jeté une bombe incendiaire dans la vitre du bureau local de Russie, sans faire de blessé. Les flammes ont été rapidement éteintes, d'après la police.
Les premiers résultats complets sont attendus lundi vers 6h GMT (7h à Paris). AP

Les cyberattaques, une arme contre les détracteurs du régime russe

Les cyberattaques en Russie contre des sites indépendants et les blogs d'opposants, comme cela a encore été le cas dimanche, jour des législatives, se sont multipliées au fur et à mesure que l'opposition s'est tournée vers l'internet.
La méthode utilisée dimanche pour bloquer les sites d'une demi-douzaine de médias indépendants et l'ONG d'observation électorale Golos consiste à bombarder leurs sites de demandes de connexion.
En début de soirée, les sites du quotidien Kommersant, de l'hebdomadaire New Times, de la radio Echo de Moscou, du site d'information slon.ru, de Golos et de sa carte des fraudes électorales étaient toujours inaccessibles. D'autres sites, bloqués dans la journée, fonctionnaient de nouveau dimanche soir.
Les autorités n'ont pas réagi à ces attaques, qui ont aussi visé la plate-forme de blogs LiveJournal, très populaire en Russie, sans pourtant la mettre hors service, selon un message affiché sur ce site.
Dmitri Merechko, porte-parole de Golos, a expliqué que l'attaque dans la matinée par déni de service (DDoS), dont son organisation a été victime, avait été "massive", avec "50.000 demandes par seconde".
"C'est une organisation importante avec beaucoup de moyens qui a dû faire ça", a renchéri Lilia Chibanova, la dirigeante de Golos.
L'ONG, dont les adresses électroniques des collaborateurs ont aussi été bloquées, est depuis jeudi dans la ligne de mire de la justice après avoir recensé des milliers d'infractions dans la campagne électorale, imputées pour la plupart au parti au pouvoir, Russie Unie.
Pour Ilia Barabanov, l'un des rédacteurs en chef de l'hebdomadaire New Times, il n'y a aucun doute que le régime russe est derrière cette offensive.
"Il est clair, selon moi, que les responsables (des attaques) sont les mêmes que ceux qui mènent la campagne contre Golos", a-t-il dit.
"Les personnes chargées d'assurer un score élevé à Russie Unie ne veulent pas que l'on sache comment ces bons résultats ont été bricolés", a-t-il ajouté, selon le journal en ligne Gazeta.ru.
Alexeï Venediktov, directeur de la rédaction d'Echo de Moscou, a dénoncé sur son compte Twitter "une tentative d'empêcher la publication d'informations sur les fraudes".
Echo de Moscou a annoncé avoir demandé au Parquet, à la Commission électorale et au ministère de l'Intérieur d'enquêter, ainsi qu'au service de sécurité de la division médias de Gazprom, le géant du gaz et propriétaire de la radio.

Cette forme de cyberattaques n'est pas nouvelle en Russie, mais jusqu'à présent ces attaques visaient principalement les blogs d'opposants. LiveJournal.ru, régulièrement victime d'attaques DDoS, avait subi une offensive d'ampleur au printemps.
A l'époque, les soupçons s'étaient concentrés sur des mouvements proches des autorités, comme les jeunesses pro-Poutine Nachi. Le président Dmitri Medvedev, féru de l'internet, avait dénoncé avec vigueur le procédé.
Le site spécialisé sur les services secrets Agentura.ru a relevé que depuis le début des années 2000, le FSB (ex-KGB) s'était doté de tous les outils pour surveiller les publications et les bloquer.
Des boîtes noires ont été installées chez les fournisseurs d'accès à cette fin et les services spéciaux se sont dotés de programmes informatiques dits "sémantiques" pour repérer les publications susceptibles de les intéresser.
Par ailleurs, des cadres des services de sécurité n'ont pas caché leur volonté d'aller plus loin. Au printemps, le chef du centre de sécurité des communications du FSB avait proposé d'interdire des messageries en Russie si ces dernières refusaient de livrer les clés de leur système de cryptage.
"L'utilisation généralisée sur l'internet de moyens de communication chiffrés et cryptés, en premier lieu des produits étrangers, suscite une grande inquiétude au FSB", avait expliqué Alexandre Andreetchkine, citant "Gmail, Hotmail et Skype" comme des services pouvant représenter "une menace d'ampleur pour la sécurité de la Russie".

TROIS DESSINS DE LA SEMAINE


Sarkozy : refonder l’Europe… aux dépens de la France

Les gesticulations toulonnaises du président de la République, qui cèlent mal celles du candidat tant elles paraissent les calquer, ne sont pas faites pour rassurer les Français, dont Nicolas Sarkozy n’a pas voulu ignorer l’inquiétude. « La peur est revenue, a-t-il lancé ; cette peur qui détruit la confiance, qui paralyse les consommateurs, qui empêche l’investisseur d’investir, l’entrepreneur d’entreprendre, le patron d’embaucher, le banquier de prêter. Cette peur porte un nom : la peur de perdre la maîtrise de son destin. »

Constat honnête, et qui a suffi à François Fillon pour louer « la franchise, la vision et le sens des responsabilités d’un homme d’Etat ».

Peut-être… sauf qu’on ne demande pas à un homme d’Etat, a fortiori à un chef d’Etat, de dresser le constat d’une situation politique. Du moins, lui faut-il ne pas s’arrêter en si bon chemin, mais proposer des solutions.

Sarkozy a certes prétendu s’y atteler, sans qu’on sache bien toutefois si le candidat ne perçait pas trop, au détour de certaines phrases, sous le chef d’Etat. Au point que son discours – allez donc l’entendre ou le lire ! – donnait à certains moments le sentiment désagréable d’être tenu par un irresponsable – voire un schizophrène !

Pensez donc, le président nous invite à plus d’efforts et plus d’Europe (aux dépens de notre souveraineté), quand le candidat s’élève contre toute supranationalité européenne et raille les idées de la gauche – de peur, ricane aujourd’hui l’opposition, qu’on évoque son bilan ?

Elle n’a pas tout à fait tort, l’opposition. Le plan social du Sarkozy 2012 revisitera la protection sociale, l’emploi, la retraite à 60 ans et les 35 heures (« fautes graves » qu’il reproche à la gauche), etc. Pourquoi pas ?

Mais cette perspective a un gros défaut ! C’est d’être essentiellement du réchauffé – la faute au climat, peut-être ? Sarkozy nous ressort des propos déjà entendus qui, au lieu de sonner comme un programme nouveau, condamnent le bilan d’un quinquennat.

Il est vrai que ce quinquennat, Sarkozy l’aura beaucoup passé à l’étranger. Trop, peut-être, pour une économie exsangue… Mais surtout trop pour gouverner réellement le pays dont il est le garant. Comment ? Sa politique se décide désormais à Bruxelles, voire à Berlin ?

C’est là, justement, que Sarkozy nous refait son numéro de funambule. Ce n’est pas parce que le constat est juste que les solutions avancées sont bonnes.

D’abord, parce qu’il eût pu les mettre en œuvre plus tôt. Le président ne fait pas toujours ce qu’il veut ? Qu’il ne vienne donc pas redemander les suffrages de ses concitoyens, qui fatiguent de travailler plus pour gagner moins…

Ensuite, et surtout, parce que ses solutions ne sont pas neuves ; pire ! nous les avons déjà testées.

Concentrons-nous un instant sur cette Europe à qui l’on abandonnerait les derniers pans de notre souveraineté (politique qui pourrait s’assimiler à de la haute trahison, le président n’ayant pas été élu pour ce faire, et n’en ayant donc pas le pouvoir), sans pour autant devenir un super-Etat.

Si l’on passe sur la difficulté qu’il y a à ce que Sarkozy nous dise tout à la fois blanc et noir, que nous propose, au fond, le président-candidat ?

Une « Europe plus démocratique » ! Le moins qu’on puisse dire est que le propos est singulièrement galvaudé. Voyez comme on l’utilise à toutes les sauces au cours du printemps arabe…

Nicolas Sarkozy précise : « La France milite avec l’Allemagne pour un nouveau traité (…). Plus de discipline, plus de solidarité, plus de responsabilités assumées devant les peuples, un véritable gouvernement économique. »

Nous n’aurons de précisions effectives qu’à partir de lundi, quand le président aura reçu le chancelier.

En attendant, et par-delà les dithyrambes de Copé ou les critiques de ses adversaires, Sarkozy nous a pourtant livré le principal. A savoir : plus d’Europe : « Les sociétés fermées n’ont qu’un destin possible : le déclin. Déclin économique, intellectuel, moral… »

C’est un mensonge, Nicolas ! Le traité de Lisbonne nous a été vendu comme la solution-miracle, il y a quatre ans. Et aujourd’hui, il faut le renégocier pour aller plus loin ! Et pourquoi le croirons-nous, alors que la première fois, nous avons assisté à une catastrophe ?

Pire encore ! C’est Angela Merkel qui, ce vendredi devant le Bundestag, devait donner les détails auxquels l’Allemagne s’arrêtera. Et que ses partenaires n’auront, comme c’est le cas depuis le début, que le choix de suivre…

L’Allemagne, et donc l’Europe.

L’histoire a de ces ironies…

"Poutine veut gouverner la Russie jusqu'à la fin de ses jours"

Ancien vice-premier ministre sous Boris Eltsine, l'opposant Boris Nemtsov explique pourquoi les élections législatives de ce dimanche sont une farce. 

Que signifient, selon vous, les élections législatives du 4 décembre?
Rien. Car ce ne sont pas des élections, mais une parodie d'élections. En fait, le vrai "scrutin" a déjà eu lieu. C'était le 24 septembre dernier, pendant le Congrès de Russie Unie, lorsque Poutine a fait connaître sa décision de succéder à Medvedev à la tête de l'Etat. Car Poutine veut gouverner la Russie jusqu'à la fin de ses jours. Depuis les jeux sont faits: en mars prochain, Poutine réintègrera le Kremlin. Et dès ce week-end, son parti Russie Unie sera reconduit à la Douma (parlement) où il remportera une majorité absolue. 
Le suspense est tellement absent de cette farce électorale que je peux déjà vous donner les résultats: numéro un: Russie Unie; deux: les communistes de Guennadi Ziouganov; trois: les nationalistes de Vladimir Jirinovski; enfin, quatre: le parti La Russie Juste, inféodé au Kremlin. Quant à l'opposition véritable, elle n'est pas autorisée à participer au scrutin, car le Kremlin lui refuse une existence légale. 
A quoi ressemble la campagne électorale d'une élection jouée d'avance?
Mais il n'y a pas eu de campagne! Aucun débat, rien. Tout juste un peu d'affichage, pour la forme. Personne -même pas les élus du parti poutinien- ne prend au sérieux ce scrutin. Le gouvernement est dans l'incapacité de faire croire à la population qu'il s'agit d'un vrai moment de démocratie.  

Quant à nous, nous avons décidé de transformer ce 4 décembre en une journée de protestation. Notre slogan est: " Votez contre tous les candidats. Votez contre le gouvernement des escros et de voleurs." Car, de facto, tous les politiciens élus à la Douma, qu'ils appartiennent ou non à Russie Unie, sont des corrompus achetés par le système poutinien. 
A quoi ressemble ce système?
La manipulation règne à tous les étages. Pour commencer, le pouvoir contrôle toutes les chaînes de télévision où des gens comme moi sont blacklistés. Il m'est donc impossible de faire entendre ma voix. Non seulement la censure règne mais, de plus, elle est aggravée par l'esprit d'autocensure qui a été instillé un peu partout. 

Au niveau institutionnel, le Kremlin contrôle le comité électoral (censé veiller à l'équité des scrutins) dont elle nomme le président. Dans les régions, les gouverneurs, nommés par le pouvoir, se mettent d'accord à l'avance avec le Kremlin pour déterminer, au pourcentage près, le résultat des élections. Ce travail est effectué de manière sophistiquée: il mobilise des sociologues afin que le résultat paraisse crédible. 
Au niveau politique, le Kremlin contrôle tous les partis qu'il finance au moyen de sa caisse noire. Seulement sept d'entre eux sont autorisés. Si l'un d'entre eux franchit la ligne jaune de la critique autorisée, alors le Kremlin assèche ses finances. Quant à ceux qui, comme moi, veulent sérieusement s'opposer au pouvoir, ils sont exclus du débat et victimes d'intimidation, d'agression, d'attaques physiques. 
Des exemples?
En 2009, j'étais candidat aux élections municipales de Sotchi. On m'a jeté un flacon d'ammoniaque à la figure à l'entrée d'une conférence de presse. Par chance, en me rinçant abondamment le visage à l'eau, je n'ai pas eu de séquelles. Récemment, ma voiture a été écrasée par un W.C. jeté depuis un immeuble. 
Le 31 décembre dernier, après un meeting autorisée en plein Moscou, j'ai été arrêté et emprisonné pendant deux semaines. A l'extérieur de la prison, la fausse information selon laquelle j'étais soi-disant agressé sexuellement par des co-détenus a été lancée par les sbires du pouvoir. Leur but: m'affaiblir moralement et me discréditer. Heureusement, malgré la prime de 3000 dollars qui leur était proposée, aucun détenu n'a accepté de produire un faux témoignage devant la caméra. Le code d'honneur des détenus de droit commun est supérieur aux cynisme absolu des gens en place au Kremlin ! 
Pour toutes ces basses oeuvres, le pouvoir utilise le mouvement de jeunesse Nachis (Les Nôtres). Créé en 2005, il se compose de quelques milliers de hooligans qui constituent un corps d'inspiration nazi. Ce sont les "Poutine-jugend". Leur mission : intimider l'opposition, occuper la rue s'il le faut et empêcher la naissance de toute protestation populaire. 

Élections législatives sous tension en Russie

Le scrutin est voué à renforcer la domination du parti Russie unie de Poutine. Plusieurs sites d'information indépendants sont inaccessibles.

Les Russes ont commencé à voter dimanche lors de législatives vouées à maintenir la domination du parti Russie unie de Vladimir Poutine sur le pays, mais entachées par des accusations de pressions, à l'image de cyber-attaques visant des sites indépendants. Plusieurs sites étaient inaccessibles dimanche matin, dont ceux de médias et d'une ONG qui recense les fraudes électorales, dans le collimateur du pouvoir depuis une semaine. Il s'agit notamment des sites de la radio Écho de Moscou, du quotidien Kommersant, de l'hebdomadaire New Times, de l'ONG Golos ainsi que son site interactif La carte des fraudes.
"C'est une attaque massive", a déclaré à l'AFP un porte-parole de Golos, Dmitri Merechko. "L'attaque est dirigée contre tous les sites qui vont essayer de raconter ce qui se passe dans les élections", a-t-il ajouté. Quelque 110 millions d'électeurs sont appelés à désigner les 450 députés de la chambre basse du Parlement (Douma) lors d'un scrutin-test pour le Premier ministre russe Vladimir Poutine qui s'apprête à revenir en 2012 au Kremlin, après deux mandats de président (2000-2008).

Médias muselés

Le rédacteur en chef de la radio Écho de Moscou Alexeï Venediktov a été le premier à dénoncer dimanche matin une attaque. C'est "clairement une tentative de gêner la publication d'informations sur les fraudes", a écrit sur Twitter le responsable de cette radio contrôlée par le géant gazier Gazprom, mais restée jusqu'à présent la principale station russe à offrir des informations indépendantes. Samedi, des blogueurs russes avaient déclaré qu'ils avaient été victimes d'une attaque contre la plate-forme LiveJournal, un des principaux sites hébergeant des blogs.
Une autre porte-parole de Golos, une association financée par des fonds occidentaux, a de son côté indiqué que l'ONG avait des difficultés à poursuivre son activité. "Notre messagerie électronique ne fonctionne plus, nous n'avons plus que Skype et les blogs pour communiquer avec notre réseau dans les régions", a déclaré Olga Novossad. Golos avait dénoncé, samedi, une "campagne de harcèlement par le pouvoir" après que sa dirigeante a été retenue à la douane d'un aéroport de Moscou pendant douze heures et qu son ordinateur avait été confisqué. Cette ONG a été reconnue coupable, vendredi, de violations de la loi électorale et condamnée à une amende de 30 000 roubles (700 euros).
Ses ennuis se sont multipliés depuis l'intervention de Vladimir Poutine le 27 novembre au congrès de Russie unie où il a fustigé le financement par l'étranger d'ONG russes ayant pour but "d'influencer le cours de la campagne électorale". Il a comparé ces ONG à "Judas".
Par ailleurs, le rédacteur en chef de Gazeta.ru, Mikhaïl Kotov, a indiqué à Interfax qu'il avait été convoqué pour dimanche par le service fédéral des médias (Roskomnadzor), qui l'accuse de "violations sur la couverture des élections". Un de ses adjoints avait démissionné jeudi dénonçant des pressions "sans précédent" exercées sur le site à l'approche des élections. Le site était toujours accessible dimanche matin.

Scène politique verrouillée

Les bureaux de vote ont ouvert à 8 heures, heure locale à Moscou, huit heures après les régions d'Extrême-Orient, et fermeront à 18 heures (heure de Paris) dans l'Ouest. Outre Russie unie, trois autres formations de l'assemblée sortante - le Parti communiste, le Parti libéral-démocrate et Russie juste (centre gauche) - devraient franchir le seuil minimum de 7 % pour être de nouveau à la Douma. Le parti d'opposition Iabloko, crédité de 4 % des suffrages, a peu de chances d'y d'entrer. Quant au parti d'opposition libérale Parnass, il a été écarté du scrutin et a appelé, comme l'opposition radicale, à le boycotter ou à voter nul en signe de protestation.
À Vladivostok, l'adjudant Nikolaï Ponomarev a indiqué avoir voté pour Russie unie : "Dès le printemps, ma famille va recevoir un appartement dans un nouveau district", a-t-il dit, soulignant que le parti de Poutine défendait les intérêts de l'armée et qu'il attendait une hausse de salaire en janvier. En revanche, Anastasia Levtchenko a, elle, donné sa voix à Russie juste après avoir voté pour le parti de Poutine en 2007 : "Je suis déçue, presque rien n'a été fait en quatre ans", a déploré cette retraitée de 62 ans.
Russie unie, qui domine une scène politique verrouillée depuis une décennie, ne devrait cependant pas parvenir à maintenir son écrasante majorité des deux tiers à la Douma. Selon le dernier sondage de l'institut indépendant Levada, le parti de Vladimir Poutine, dont la liste est conduite par le président Dmitri Medvedev, était créditée de 56 % des intentions de vote en novembre, après avoir perdu 12 points en un mois. ONG et opposition ont dénoncé des pressions innombrables sur les électeurs pendant la campagne. Pour parer à tout éventuel rassemblement contestataire, le mouvement de jeunesse pro-Kremlin Nachi a annoncé qu'il réunirait jusqu'à 15 000 militants dans le centre de Moscou pour "neutraliser" toute action visant à contester le scrutin.
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LES RUSSES SE RENDENT AUX URNES POUR ÉLIRE LEURS DÉPUTÉS

Les Russes se rendent aux urnes dimanche pour élire les députés de la Douma (chambre basse du parlement). Sept formations sont en lice: le parti au pouvoir Russie unie, le parti social-démocrate Russie Juste, le Parti libéral-démocrate, le Parti communiste, le parti socialiste et nationaliste Patriotes de Russie, le parti libéral Iabloko et le parti de droite Juste Cause.

A 14h00 GMT), le taux de mobilisation des électeurs en Russie a atteint 50,4,% , selon la Commission électorale centrale.
A 14h00 GMT, 94% des électeurs avaient voté en Tchétchénie et plus de 90% en Kabardino-Balkarie..A 11h00 GMT, 56,4% des électeurs se sont rendus aux urnes au Daghestan, 55,4% en Ingouchie,  et 65,8% dans la république des Karatchaïs-Tcherkesses , selon les commissions électorales républicaines.
Selon les données fournies par le bureau du représentant spécial du président russe dans la région fédérale du Caucase du Nord, à 11h00 GMT, 52,4% des électeurs avaient voté en Ossétie du Nord et 30,33% dans le territoire de Stavropol.
A Moscou, le taux de mobilisation était de50,03% à 14h00 GMT contre 33,89% à 11h00 GMT, selon la Commission électorale moscovite. 3.374 bureaux de vote sont ouverts à Moscou qui compte plus de 7 millions d'électeurs. Près de 100.000 personnes sont engagées dans la capitale russe pour organiser le scrutin et en contrôler le déroulement, dont les représentants de tous les partis politiques en lice. Le vote est également suivi par les observateurs internationaux représentant l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), la Communauté des Etats indépendants (CEI) et l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE).
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Au 1er juillet, 1,8 million d'électeurs russes vivaient à l'étranger, dont 1,6 million y résidaient en permanence. 369 bureaux de vote ont été ouverts à leur intention dans différents pays.
En Lituanie, le taux de participation a atteint 12,59% à 13h00 (11h00 GMT), a annoncé la porte-parole de l'ambassade de Russie Marina Birioukova. Près de 13.500 Russes résident en Lituanie.
Plus de 2.000 Russes ont voté en Lettonie à 11h00 (09h00 GMT), a annoncé l'ambassadeur de Russie à Riga Alexandre Vechniakov. Environ 30.000 électeurs russes résident en Lettonie. 1.850 ressortissants russes y ont voté par anticipation.
En Estonie, environ 7.500 ressortissants russes ont donné leur voix pour un candidat à la Douma à 10h00 GMT, selon la porte-parole de l'ambassade russe à Tallinn.
Au Bachkortostan (Oural), le taux de participation a dépassé 65% vers 14h00 GMT, selon la secrétaire de la Commission électorale centrale de la république.
Près de 7.000 Russes résidant au Tadjikistan ont voté à 11h00 GMT, selon l'ambassade russe à Douchanbé.
Afin d'être représenté à la chambre basse, un parti doit recueillir au minimum 7% des suffrages exprimés à l'échelle nationale. Cependant, un parti réunissant 5% à 6% des voix recevra un siège, et deux sièges en cas de score compris entre 6% et 7%.

La crise rebat les cartes de la présidentielle

Nicolas Sarkozy a-t-il repris la main? François Hollande l’a-t-il perdue? Décidément, la campagne électorale emprunte de drôles de chemins.
Après la polémique sur le nucléaire, c’est la relation franco-allemande qui sert de terrain d’affrontement entre les principaux rivaux de la présidentielle. Deux sujets qui faisaient jusqu’à présent consensus entre les deux partis de gouvernement. Mais voilà, la crise bouscule les clivages, chahute les candidats. À moins de 140 jours du premier tour, le candidat socialiste peine à trouver la bonne carburation. En baisse dans les sondages et malmené par ses alliés écologistes et communistes, le député de Corrèze fait toujours la course en tête, mais l’écart se resserre. "La dynamique n’est plus de son côté", jubile-t-on à l’Élysée, où l’euphorie semble revenue.
Imperturbable malgré l’inquiétude de plusieurs barons socialistes, François Hollande concentre le tir sur le chef de l’État, désormais ouvertement en campagne. Trois jours après le discours prononcé à Toulon, François Hollande lui apporte la contradiction dans nos colonnes en livrant sa propre vision de l’Europe. Par un curieux hasard de calendrier, le Président recevra lundi à déjeuner à l’Élysée la chancelière Angela Merkel, tandis que François Hollande sera à Berlin au côté de Sigmar Gabriel, le patron des sociaux-démocrates allemands et candidat à la chancellerie.
Nicolas Sarkozy n’en revient pas. Pour un peu, il finirait presque par trouver le match contre François Hollande trop facile. "Sa campagne est presque aussi nulle que celle de Ségolène. Qu’est-ce que ça patine, chez les socialistes! s’exclame-t-il en petit comité. Depuis la primaire, c’est une erreur par semaine. Et ces attaques politiciennes contre l’Allemagne, quelle folie!" Dans le camp sarkozyste, on est passé en un mois de l’abattement le plus complet à un excès d’optimisme. Brice Hortefeux, qui a croisé Daniel Cohn-Bendit la semaine dernière au Parlement européen, n’a pas pu s’empêcher de lâcher : "Tu m’as retiré le mot de la bouche. Hollande est vraiment en voie de ségolinisation!"

"L’opposition aphone"

Nicolas Sarkozy est rentré satisfait de Toulon. "L’opposition est aphone. Ils ont trouvé comme seule riposte d’attaquer l’Allemagne", grince un conseiller. D’autres avouent avoir été déçus par les critiques de la presse : "On n’a jamais dit que ce serait un discours historique." En attendant, les attaques du PS contre la campagne du "Président payé par les contribuables" laissent l’Élysée de marbre. "Un marronnier de campagne. On avait fait le même coup à Mitterrand et Chirac", réplique un homme du Président. Sarkozy ne changera rien à sa tactique et continuera à sillonner la province le plus longtemps possible.
Depuis un mois, il reçoit chaque semaine, par petits groupes, anciens Premiers ministres, ministres, dirigeants de l’UMP, etc. "Son proche entourage s’affaire pour que tout soit prêt quand il se déclenchera", assure un sarkozyste dans la confidence. L’équipe rapprochée ne devrait pas dépasser la demi-douzaine. "On tiendra dans un appartement de 200 m2. L’opérationnel sera délégué à l’UMP", sourit l’un des privilégiés. Quant au QG, il aurait été localisé. Rien de clinquant, dit-on. Il ne serait pas éloigné de l’Élysée quand même.

Le couple Poutine-Medvedev en campagne d'adulation

Avant les législatives de dimanche, le premier ministre et le président jouent la modestie face à leurs partisans. 

Au terme d'une campagne électorale en trompe-l'œil, spécialement formatée pour la victoire de la formation hégémonique Russie unie, Dmitri Medvedev a appelé jeudi ses supporteurs à «ne pas idéaliser la situation dans le parti et dans le pays». Chemise blanche sans cravate et costume sombre assortis à la tenue de son premier ministre, Vladimir Poutine, le président russe a ainsi achevé à Moscou son tour de Russie préélectoral. Dimanche, les Russes éliront un nouveau Parlement.
Les deux membres de l'exécutif ont répondu trois heures durant aux questions d'un groupe de deux cents supporteurs réunis dans un quartier branché de la capitale. Comme à l'habitude, les participants avaient été sélectionnés par le parti pour leur humeur docile: un militaire bardé de médailles qui célèbre les vertus de sa «grande patrie», un médecin qui avait ausculté devant les télévisions l'épaule de Poutine, démise lors d'une séance de judo, la lauréate 2011 d'un concours de beauté… Une assistance trop révérencieuse pour être sincère, et qui avait reçu pour consigne de célébrer les mérites du couple Poutine-Medvedev.

Signes d'impatience 

Mais ce dernier n'a pas été dupe des louanges. «Votre salaire n'est pas vraiment hors normes», a fait remarquer le chef du Kremlin à un chirurgien qui se félicitait de gagner, grâce à l'État… 19.000 roubles par mois (450 euros). «Grâce aux nouvelles salles d'opérations de notre clinique, nous travaillons dans des conditions très confortables et, chaque année, la qualité de nos diagnostics progresse», a insisté le praticien. Peu convaincu, Poutine a jugé que le système de santé russe «ne répondait pas toujours aux standards modernes».
À son tour, une habitante de Nijnyi Novgorod, dont l'habitation a disparu dans les incendies de l'été 2010, a qualifié les deux chefs d'État de «magiciens». Grâce à vous, a-t-elle ajouté, «je vis dans une maison bien chauffée». «Mais les autres problèmes ont-ils été résolus?», a demandé Poutine, obligeant son interlocutrice à changer de partition pour avouer que, faute de fosses sceptiques adéquates, les eaux usées des maisons gouvernementales sont aujourd'hui évacuées par camion… Le premier ministre est théoriquement informé de ces malfaçons : en septembre 2010, il avait fait installer une caméra dans son bureau pour suivre en direct l'avancement des travaux.
À plusieurs reprises, face à ces discours convenus, les deux hommes ont manifesté des signes d'impatience. Depuis quelques semaines, Vladimir Poutine, dont la cote de popularité subit un effritement, reproche au parti Russie unie de placer le pouvoir exécutif sous couveuse, tout comme les anciens dirigeants soviétiques reprochaient à leur entourage de leur «cacher la réalité du pays». «Russie unie n'est pas toujours à la hauteur et ne réagit pas forcément de manière adéquate», a déclaré le premier ministre, lors du congrès de la formation, dimanche. Le président du parti à la Douma, Boris Gryzlov, terne apparatchik, pourrait être prochainement démis de ses fonctions.
«Depuis l'URSS, le conservatisme règne en politique, déplore le cinéaste Fiodor Bondartchouk, membre de Russie unie. Nous n'avons aucune culture du débat, qui n'a cours que sur Internet. Or, comme l'a montré le printemps arabe, on ne peut pas en faire l'économie.»

Russie unie remet en jeu son hégémonie

Le parti de Vladimir Poutine et Dmitri Medvedev pourrait sortir affaibli des législatives de dimanche. 

L'amorce d'un tournant dans la vie politique russe est attendue demain à l'occasion des élections législatives. Près de 110 millions d'électeurs sont appelés à se rendre aux urnes pour élire la nouvelle Douma, un Parlement aujourd'hui dominé par Russie unie, le parti de Vladimir Poutine. Pour la première fois depuis sa création en 2001, l'hégémonie de cette formation sur la vie publique est en ­cause. Selon les derniers sondages, Russie unie, qui dispose aujourd'hui de 315 sièges sur les 450 que compte la Douma, pourrait perdre sa majorité des deux tiers, qui lui permet aujourd'hui de modifier la Constitution. Le Parti communiste et, dans une moindre mesure, le parti nationaliste LDPR ­seraient les principaux bénéficiaires de cette érosion.
Fait inédit, l'hypothèse d'une coalition parlementaire est évoquée. Ainsi, la primauté que Vladimir Poutine exerce sur le pays depuis dix ans s'en trouverait entamée, tout comme l'autorité de l'actuel président, Dmitri Medvedev, qui dirige en personne la liste de Russie unie. Un véritable test à l'approche de l'élection présidentielle de mars 2012, en vue de laquelle les deux hommes ont déjà «échangé» leurs fonctions. En province, le fatalisme l'emporte : «Quoi que l'on vote, rien ne change et on voit toujours les mêmes têtes», soupire Alexandra, professeur d'anglais à Pavlovsk, un village de Sibérie orientale. À Moscou, l'humeur est plus frondeuse. «Il y a un intérêt pour cette élection que je n'avais pas ressenti lors du précédent scrutin, il y a quatre ans», témoigne Natalia, une enseignante qui s'apprête à voter pour Iabloko, un petit parti indépendant. À des années-lumière de la propagande officielle servie par la télévision d'État, la blogosphère est devenue le lieu de rencontre virtuel des opposants au régime qui, le reste du temps, peinent à réunir plus de cent personnes dans les meetings de la capitale. La dernière vidéo qui a fait fureur sur Internet montre Vladimir Poutine se faire siffler sur un ring de boxe.

Craintes de falsifications 

Les internautes décrivent les multiples pressions exercées par les autorités pour convaincre les électeurs de voter pour Russie unie. Les partis ou les hommes politiques trop critiques ou indépendants à l'égard du pouvoir, comme l'oligarque Mikhaïl Prokhorov, ont été écartés de la course. «Toutes les formations en lice ont été créées par le Kremlin, à l'exception du LDPR», accuse le président de ce parti, Vladimir Jirinovski, qui n'est pourtant pas avare de soutiens occasionnels à Poutine.
Des falsifications sont attendues dans les bureaux de vote. L'OSCE, qui est chargée de contrôler la régularité du processus électoral, a dû, sous la pression des autorités, réduire la taille de sa mission d'observateurs. Nachi, le mouvement de jeunes pro-Kremlin, prévoit d'envoyer 15 000 militants dans le centre de Moscou afin de «neutraliser les provocateurs qui mettraient en doute le soutien à Russie unie».
Une période délicate s'ouvre pour le tandem exécutif au pouvoir. Vendredi, Dmitri Medvedev a appelé les électeurs à «faire le bon choix», sans citer Russie unie, mais en agitant le spectre d'un Parlement multicolore, «déchiré par les contradictions».

Russie : Des élections législatives sous tension

110 millions d'électeurs sont appelés aux urnes ce dimanche pour renouveler la Douma.

Vingt ans après, quasiment jour pour jour, la chute de l'Union soviétique, 110 millions de Russes sont appelés aux urnes pour les élections législatives et élire les 450 députés qui constitueront la sixième Douma. Mais si le régime dictatorial est tombé, la liberté n'est pas encore naturelle – et garantie – sur les rives de la Volga. Les élections entamées ce dimanche sont déjà entachées de pressions. Ainsi, seuls sept partis ont été autorisés à prendre part à l'élection, contre 11 en 2007 et 13 en 2003. Parnas, le parti fondé par les leaders de l'opposition Mikhaïl Kacianov et Boris Nemtsov.
Face à Russie Unie, la parti de Vladimir Poutine, l'opposition est bien faible. Le parti est donné largement vainqueur, même si selon le dernier sondage de l'institut indépendant Levada, la formation a perdu 12 points d'intention de vote en un mois. En novembre, Russie Unie était créditée de 56% des intentions de vote. Selon d'autres sources, le parti ne pourrait recueillir « que » 41% des voix et obtenir, ainsi, 224 sièges de députés. Russie Unie pourrait-elle perdre la majorité qualifiée, établie à 300 sièges ?
Rien n'est impossible. Et Russie Unie semble le percevoir. Dimanche, plusieurs sites Internet étaient inaccessibles, dont ceux de médias et d'une ONG recensant les fraudes électorales. Pour le rédacteur en chef de la radio Echo de Moscou Alexeï Venediktov, c'est « clairement une tentative de gêner la publication d'informations sur les fraudes ». « L'attaque est dirigée contre tous les sites qui vont essayer de raconter ce qui se passe dans les élections », a commenté pour sa part un porte-parole de l'ONG Golos.

LE CADEAU DE NOËL DE LA SNCF

Déraillage incontrôlé

La menace de grève d'un syndicat de conducteurs de trains pour les week-ends de décembre à propos du « cadencement » est un symptôme de l'immobilisme à la française. Elle démontre comment aucune des parties du dialogue social n'a encore vraiment pris en compte l'urgence de faire évoluer les pratiques habituelles. Sur la forme, il s'agit d'une négociation où le rapport de forces finit trop souvent par l'emporter sur la concertation, avant de parvenir à un accord. Et quel meilleur levier que l'usager, toujours prêt à payer, en impôts ou en temps perdu ! Sur le fond, on retrouve toujours la même inaptitude au compromis. Un État et des gouvernants dont le goût des travaux de prestige, comme les lignes de TGV, finit par saigner à blanc la société nationale chargée de les exploiter, tant elles sont chères et souvent peu rentables, au détriment du reste du réseau. Une direction trop dépendante et soumise aux pouvoirs publics et politiques, écartelée entre exigences de la performance économique et du service public. Des syndicats surenchérissant pour défendre des acquis et obtenir des garanties. Une médiatrice contestée. Et des associations d'usagers, dont le poids réel doit être évalué, qui s'insurgent. L'intérêt à court terme l'emporte ainsi sur une vision d'avenir au profit du plus grand nombre, l'affrontement primant sans culture du dialogue constructif, comme dans un jeu de rôles trop bien rodé. Une vraie politique de rigueur au sein des services d'État devrait pourtant commencer par l'exigence générale et collective d'un plus grand souci de moindre coût, d'efficacité et de service au profit de la collectivité.

Les Iakoutes résistent au pouvoir central

Attachée à ses traditions, cette république sibérienne se méfie de Moscou. 
Emmitouflé dans ses vêtements polaires, Alexandre Doudinkova désigne un point imaginaire au-delà de la Lena, le grand fleuve sibérien. Homme endurant et volubile, le directeur général de la société Transtroï Vostok, se veut confiant : le tronçon de la ligne de chemin de fer qui prend sa source du Transsibérien, plus au sud, et s'achève aujourd'hui près du petit village de Bestiakh, sur la rive droite de la Lena, s'élancera dans le futur, à travers un pont jusqu'à Iakoutsk, capitale de la Iakoutie située vingt kilomètres plus loin sur l'autre rive. C'est ce qu'a annoncé le président russe, Dmitri Medvedev, venu visiter le chantier, le 15 novembre, en promettant une aide de 1,2 milliard d'euros.

Un train vers l'Alaska 

Pour l'instant, ce dernier se résume à des traverses posées par un petit groupe d'ouvriers iakoutes. «Mais ce qui se prépare est un changement révolutionnaire qui résoudra le problème de transports de la Iakoutie pour les cinquante ans à venir», affirme Alexandre Doudinkova. De Iakoutsk, rêve l'ingénieur, la ligne se poursuivra jusqu'à Magadan, l'un des grands ports de l'Extrême-Orient russe. Un autre tronçon rejoindrait l'Alaska.
Ce matin de novembre, il fait - 33 °C, et comme c'est le cas sept mois par an, la Lena est prisonnière des glaces. Les riverains la traversent à l'aide de boudins pneumatiques tractés par un énorme moteur à hélices. Grâce au projet ferroviaire, expliquent les officiels locaux, les marchandises circuleront librement entre l'Extrême-Orient et la Sibérie orientale, les prix baisseront et la république Iakoute, essentiellement dépendante du trafic aérien, se désenclavera. Des arguments que Russie unie, exploite à satiété avant le scrutin. En 2007, le parti de Vladimir Poutine avait récolté 64 % des voix, le même résultat qu'au niveau national. «La construction de la gare de chemin de fer permettra la création de 1 000 emplois. Les revenus des habitants et nos ressources budgétaires augmenteront, tandis que les prix des produits alimentaires baisseront », promet le chef de l'arrondissement de Bestiakh, Vladimir Ptitsyn.

Rites chamaniques 

Bien qu'elle ne soit pas insensible à ces sirènes, la population iakoute reste méfiante. «De nouvelles personnes vont arriver ici et la drogue risque de se répandre», craint Ivan Chamaev, directeur d'un des lycées de la capitale. «Tout comme à l'époque tsariste, où l'on envoyait les bandits en Iakoutie, la construction du pont conduira au retour des malfaiteurs », renchérit Fedor Toumoussov, tête de liste de Russie juste, un parti d'opposition au Kremlin. Ces opinions, qu'aucun fait ne vient étayer, s'expriment en boucle, à tous les échelons de la société.
Vivant sur un territoire grand comme six fois la France, mais peuplée de seulement un million d'habitants, la société iakoute reste rétive aux changements imposés du haut. Sous le joug stalinien, elle avait su préserver sa langue - de racine turcophone - ses rites chamaniques et sa culture musicale. Et refuse aujourd'hui de succomber à la verticale du pouvoir, façon Poutine.
Déjà, en 2006, l'État fédéral avait mis la main sur la compagnie de diamants, Alrossa, l'une des principales richesses de la région, avec le charbon et les minerais de fer. À présent, certains craignent que Moscou cherche à fusionner le territoire avec les régions voisines de Magadan et de la Tchoukotka, au risque que la Iakoutie perde son statut de république, et le iakoute, son statut de langue officielle, garanti par la Constitution. «Medvedev explique que les fusions ne seront pas imposées du haut et que la population décidera elle-même. Mais vous savez tout comme moi comment on prend des décisions dans ce pays», ironise Ivan Chamaev.
Dans cette région assommée par le froid polaire, où les échos de la campagne électorale moscovite arrivent assourdis, la résistance est souterraine. À la différence d'autres régions sibériennes voisines, les Iakoutes ont massivement investi les postes de pouvoir locaux. Bien que nommé par le Kremlin, le président de la petite République est un représentant de cette ethnie. Même en cas de mauvais résultat de la liste Russie unie, que conduit personnellement l'apparatchik, ses opposants en viennent à souhaiter que ce dernier poursuive son mandat. La stabilité, voire l'inertie politique, est le meilleur gage de longévité de la société iakoute, que ne devrait pas même pas bouleverser l'arrivée du chemin de fer. L'idée d'un tel projet ferroviaire, font remarquer les élites locales, avait déjà été lancée à la fin du XIXe siècle, sous le règne de Nicolas II…

Russie : des sites indépendants paralysés

Les Russes ont commencé à voter dimanche à des législatives vouées à maintenir la domination du parti Russie Unie de Vladimir Poutine sur le pays, mais entachées par des accusations de pressions, à l'image de cyber-attaques visant des sites indépendants.
Plusieurs sites étaient inaccessibles dimanche matin, dont ceux de médias et d'une ONG qui recense les fraudes électorales, dans le collimateur du pouvoir depuis une semaine.

"Les hivers seront plus chauds"

Jean Jouzel, climatologue, explique les risques d’un dérèglement climatique grandissant. Il est également directeur de recherches au CEA et vice-président du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec). Extraits de l'interview à paraître dans le Journal du Dimanche du 4 décembre.

Violents coups de mer sur la Côte d’Azur, trombes d’eau et inondations dans le Sud… Le dérèglement climatique frappe-t-il à nos portes?
En France comme en Europe, clairement, le réchauffement climatique fait des siennes. Si rien n’est fait pour lutter contre ce réchauffement, les vagues de chaleur seront dix fois plus fréquentes à la fin XXIe siècle qu’elles ne l’étaient à la fin du XXe, trois à quatre fois plus dès 2050. Le changement climatique pourrait aussi expliquer la plus grande fréquence de très fortes pluies, avec d’énormes quantités d’eau tombant en très peu de temps, comme dans le Var le mois dernier. Là aussi, si nous n’agissons pas, il y aura à la fin du siècle deux fois plus de fortes précipitations qu’il y en a aujourd’hui, avec des risques importants de crues.
Aujourd’hui la neige se fait désirer en montagne. Il n’y a plus de saisons? Finis les sports d’hiver?
Le constat est là : en trente à quarante ans, la température a augmenté d’au moins 1°C. La tendance est donc au raccourcissement de la saison d’enneigement, surtout à basse et moyenne altitudes. Mais il est impossible de savoir quel temps il fera cet hiver. À court terme, jusqu’à cinq jours, la prévision météo est très bonne. Jusqu’à dix jours, à peu près fiable. Et à long terme, nous avons aussi une capacité de prédiction : sans pouvoir annoncer que l’hiver 2050 sera plus froid que le suivant, nous savons grâce aux tendances climatiques qu’ils seront tous deux plus chauds que les hivers actuels, effet de serre oblige. Par contre, à l’échelle saisonnière, deux à trois mois, on a de réelles difficultés de prévision dans nos régions, où le temps est très influencé par l’Atlantique. Or, nous ne savons pas prévoir les températures à sa surface.
Quelles certitudes avons-nous aujourd’hui sur la mécanique du réchauffement?
Deux ou trois. Première certitude : la concentration des gaz à effet de serre augmente rapidement avec 40 % de plus de gaz carbonique qu’il y a deux cents ans, deux fois et demie de plus de méthane, 20% de plus de protoxyde d’azote. Deuxième certitude : cette modification est due aux activités humaines. Pour le gaz carbonique, c’est l’utilisation des combustibles fossiles – pétrole, charbon, gaz naturel –, la déforestation aussi. Troisième certitude : cela se traduit par une accumulation de chaleur dans les basses couches de l’atmosphère. Qui plus est, la fonte des glaces de l’Arctique et la diminution de la neige suppriment des surfaces réfléchissantes au profit de surfaces absorbant la chaleur, comme les océans.
Retrouvez l'intégralité de l'interview demain dans le Journal du dimanche.

Jacques Delors interview: Euro would still be strong if it had been built to my plan

Former president of the European Commission Jacques Delors talks to Charles Moore about the fate of the euro. 


To use that British understatement that Continentals enjoy, one might suggest that it has not been a good year for the euro. And now, some say, only about a week remains to put things right. So who better to question than the man who invented it? In Paris on Wednesday, I called on Jacques Delors.

Mr Delors, who was President of the European Commission from 1985 to 1995, is the only foreign bureaucrat ever to have become a household name in Britain. In 1988, he enraged Margaret Thatcher by coming to address the British TUC on the joys of the European “social dimension”. Her famous Bruges speech later that month was her attempt to stand against the tide of European integration that he represented.
It was Mr Delors whose report produced the plan for what we now call the euro. He was such a demon figure for British eurosceptics that The Sun produced the headline “UP YOURS, DELORS” and invited its readers to turn, face the English Channel and make a rude gesture at him in unison.
I climb several twists of typical steep Parisian stairs to a modest office. The small, bespectacled figure who greets me is old in years — he was born in July 1925, three months before Mrs Thatcher — but with undiminished physical and mental vigour. We talk for two hours, and one feels he would happily continue for another two.
Mr Delors is known for his austerity, but the man I converse with is not stiff or pompous. He remembers his old adversary with a slightly amused respect, noting her immense capacity for work and her vision in looking for change in the Soviet Union before others did.
He reflects on their difference of background and character: “I think for Mme Thatcher I was a curious personage: a Frenchman, a Catholic, an intellectual, a socialist.”
Deciding not to beat about the bush, I ask the man who prides himself on being an architect of European Union whether he got it all wrong. Unhesitatingly, he denies it. It is a fault in the execution, not of the architects, which he claimed to have pointed out in 1997 when the plans for introducing the euro finally came together. At the time, he says, the best of the eurosceptic economists, whom he refers to as “the Anglo-Saxons”, raised the simple objection that if you have an independent central bank, you must also have a state.
Mr Delors thinks “they had a point”, but the way round this problem was to insist on the economic bit of the union as much as the monetary. As well as creating a single currency, you also had to create common economic policies “founded on the co-operation of the member states”.
I get the impression from Mr Delors that he thinks Mrs Thatcher would have agreed with this view. She certainly would not have agreed, however, on the Delors version of what that co-operation should produce — the harmonisation of most taxes, plans to deal with youth and long-term unemployment, and that social dimension for which he always called because “it is not just a question of money. I said all these things, but I was not heard. I was beaten.”
There was also a problem of “surveillance”. The Council of Ministers should have made it its business to police the eurozone economies and make sure that the member states really were following the criteria of economic convergence. This did not happen.
For a long time, the euro did remarkably well, Mr Delors argues, bringing growth, reform and price stability to the weaker members as well as the stronger. But there was a reluctance to address any of the problems. “The finance ministers did not want to see anything disagreeable which they would be forced to deal with.” Then the global credit crisis struck, and all the defects were exposed.
Whom does he blame most for this? He thinks that “everyone must examine their consciences”. He identifies “a combination of the stubbornness of the Germanic idea of monetary control and the absence of a clear vision from all the other countries”.
What of his own country’s role? Mr Delors patriotically declined to be drawn on this point, though I detect some dissatisfaction. He reminds me that he is, after all, speaking to an English not a French newspaper.
By way of a friendly aside, Mr Delors adds that Britain, though not in the euro and therefore not “sharing the burden”, is “just as embarrassed” as the Europeans by the financial crisis.
“I can see Mr Cameron’s worries,” he goes on, “It is a big worry for the British if we can create and trade eurobonds in Paris and Frankfurt.’
In general, says Mr Delors, among all the 17 member states of the eurozone, the reaction to problems from 2008 to today has been “too little, too late”.
Surely, I say, that is exactly what you would expect from such a system faced with such difficulties. No, he replies sharply: look at what happened at the end of the 1980s with the fall of the Berlin Wall. Helmut Kohl, François Mitterrand, George Bush senior and Mikhail Gorbachev (Mrs Thatcher is not included in his gallery) “could all have spoken and acted too little, too late”. But in fact “they reacted quickly to this revolution, thanks to the intelligence of these men. There was an aspect of sangfroid and political vision”.
He clearly sees the fall of the Wall as the high-water mark of Western strength. He equally clearly sees no such political vision today.
So will the euro survive? Mr Delors does not, of course, deviate from his belief in the European single currency. He is also very conscious of the danger of someone in his position saying anything that might help to destabilise the situation. I am struck, however, by his downbeat interpretation of events.
“Jean Monnet [the founding father of the European Union] used to say that when Europe has a crisis it comes out of the crisis stronger … but there are some, like me, who think that Monnet was being very optimistic. You must be very vigilant to make sure that you do come out of a crisis in a better state … I am like Gramsci [the Italian Marxist philosopher]: I have pessimism of the intellect, optimism of the will.”
Right now, Mr Delors judges, “even Germany” will have great difficulty in sorting out the mess. “Markets are markets. They are now bedevilled by uncertainty. If you put yourself in the position of investment funds, insurance companies and pension funds, you will understand they are looking for a clear signal.”
All the heads of government need to give this signal together. Instead, there has been, at least until the end of October, “a cacophony of statements”.
The euro can emerge from this crisis only if two conditions are met. “The first is that the firemen must put out the fire. The second is that there must be a new architecture. If you have one of these things without the other, the markets will be sceptical.”
The choice is “either to accept a greater transfer of sovereignty or to submit to a common discipline”.
But surely, I ask, as someone who has always advocated more European democracy, isn’t he worried by the takeover of the technocrats? In Greece and Italy, leaders have been parachuted in without anyone asking the voters. This does not bother Mr Delors at all.
“This is not the first time in history that we have put in a non-political person to ensure the transition. The markets are reassured that there is a man in place who knows what he’s doing. He can calm the many, many antagonisms.”
Jacques Delors is a master of all the technicalities of the argument, and all the Byzantine structures of the institutions, and speaks confidently in their jargon, but his mind seems burdened by deeper thoughts, too. He sees the crisis of the euro as part of something deeper and wider even than the credit crunch itself. He believes that the main social and economic “players” have their doubts about European policies.
“You hear it every day. You hear it in the markets. This is reinforced by populism in certain countries. Whether we like it or not, we are part of the West, and the West could possibly lose its leadership, and it is important that we preserve the values that matter not only to Europe, but to Britain and the United States — the values that are Judeo-Christian in origin — Greek philosophy and Greek democracy and Roman law, and the Age of Enlightenment and the French Revolution.”
Yet obviously, at the same time, we cannot “tell the President of China what to do. Other peoples want to preserve their values, and we want to preserve ours. This is the great challenge.”
So the crisis of the euro is all part of a crisis of the Western way of doing things? “Oui, c’est ça.”

LA PHRASER À LA CON DE LA SEMAINE :





“Trop peu, trop tard” dit Jacques Delors