TOUT EST DIT

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lundi 18 juillet 2011

Πολιτεία: la politique du XXIe siècle est née en Grèce

La société civile —y compris les marchés financiers— a raison: informée comme jamais, elle pousse les politiques à moins de médiocrité. A eux de faire leur révolution, plus que nécessaire: être clairs, tenir leurs engagements, expliquer la réalité, avouer leurs erreurs, se corriger.
 
L'ANNÉE DEVAIT ÊTRE celle du face à face entre les politiques et les marchés. Nous y sommes en plein. Des deux côtés de l’Atlantique, la guerre faite rage entre les endettés et les créditeurs, entre une classe politique faible et/ou désunie et des marchés financiers riches à l’infini, impatients, exigeants. Encore en gestation quelques jours aux Etats-Unis où le président et le Congrès se battent, cette guerre est féroce en Europe depuis 18 mois. Elle a ses victimes: les peuples à qui l’on inflige une austérité de fer. Elle a ses profiteurs: les populistes qui accusent les dirigeants en place de compromission avec les «riches financiers».
Mon espoir est que du conflit pourrait naître une classe politique plus responsable, obligée à plus de transparence et à rendre des comptes. Les dettes ont parfois du bon, si elles sont des investissements sur l’avenir. Mais elles sont le plus souvent le résultat de lâchetés, d’incapacité à décider de la part d’une classe politique habituée à ne pas tenir ses promesses, en clair à mentir.
Les dettes sont de la mauvaise politique accumulée. Aujourd’hui, la société civile demande autre chose: constituée d’êtres intelligents et informés, elle veut la vérité, elle ne veut pas la lune, elle demande aux politiques d’être clairs, de tenir leurs engagements, d’expliquer la réalité, d’avouer leurs erreurs, de se corriger.  La modernité ne supporte plus le mensonge.
Je classe les marchés financiers dans cette société civile. Leur exigence a des allures de diktat mais elle n’est pas, au fond, illégitime: les opérateurs des marchés gèrent l’argent des autres, celui des fonds de pension et de retraite, celui des épargnants. Ils calculent que certains Etats ne rembourseront pas leurs dettes en entier et ils veulent savoir combien il leur en coûtera. Pas plus pas moins. Ils le disent avec violence, celle de l’argent, mais sans autre but que de récupérer cet argent.
Ils n’ont pas d’objectif politique, comme de destituer un gouvernement. Ils ont des a priori de politiques économiques mais pas tant que ça. Le pragmatisme est leur véritable ligne : c’est ainsi qu’ils veulent que les Etats adoptent des plans d’austérité mais, dès le lendemain, ils se ravisent un peu et soulignent que ces plans ne doivent pas non plus provoquer de récession qui aggrave les déficits.
Ce que veulent, les marchés, ce sont des hommes politiques plus efficaces. Aux Etats-Unis, ils pousseront demain à ce que ce pays déchiré retrouve un consensus idéologique. En  Europe, ils veulent comprendre quelle est la réelle solidarité entre les membres de la zone euro et demandent qu’avance l’union politique. Qui leur donnera tort ?
Je sais, on pouvait sortir de cette crise avec une victoire de la politique sur la banque. On pouvait imaginer un retour à une régulation très serrée des marchés financiers et à un adieu net à l’ère ultra-libérale. Mais tel n’est pas le cas. Il n’y a pas de consensus mondial pour revenir à des lois contraignantes pour restreindre le poids et le rôle de la finance dans le monde. C’est un fait. Sans doute parce qu’au fond, personne n’a de doctrine claire sur ce que doit être la finance, l’innovation, la couverture des risques, etc. 
Les dirigeants du G20, sont divisés, ils n’ont pu que commencer à réguler timidement les institutions financières, partiellement, sans insister. Leur seule conviction est qu’il faut laisser-faire en tâtonnant. Peut-être iront-ils peu à peu plus loin dans la régulation, les Britanniques par exemple sont curieusement les plus culottés.
Dans ce contexte, les marchés, bientôt renfloués, ont donc vite retrouvé toute leur puissance. Les banques ont remboursé les prêts que les Etats leur avaient accordés  pour les sauver à l’automne 2009. Elles font des profits record et distribuent des bonus comme avant. Les stress test prouvent que la grande majorité d’entre elles supporterait un nouveau choc. Pour la finance, la crise est finie.
Ce sont au contraire les Etats qui sortent les plus affaiblis de la crise, surendettés pour beaucoup. Grèce, Portugal, Irlande et maintenant Italie sont sous leurs tirs et bientôt les agences pourraient dégrader la note de la première puissance économique mondiale, les Etats-Unis. Est-ce imaginable? Ça l’est: la dette américaine atteindra 100% du PIB en fin 2011 sans compter la quantité d’engagements non encore comptabilisés comme ceux de Freddy Mac et Fanny May, les deux réescompteurs publics des prêts immobiliers qui aujourd’hui doivent racheter des quantités astronomiques de crédits à des ménages en faillite.
Des dettes énormes donc. Sont-elles objectivement trop lourdes? C’est toute la question bien sûr. Difficile d’être affirmatif. Il y a matière à débats. Hier, dans les années 90, Bill Clinton a pu rembourser celle de l’Amérique en quelques années. Mais il est certain que ces sommes ont aujourd’hui atteint, à cause de la crise, des niveaux historiquement très élevés et que la faible croissance prévue en sortie de crise, ne va pas faciliter les remboursements. Dans la tête de certains économistes, plane l’idée que tous les endettés de la terre devraient s’entendre pour soulager leur fardeau, soit en faisant défaut ensemble, au moins partiellement, soit encore suscitant une inflation ; l’autre façon de ruiner les créditeurs.
Mais ces idées-là sont écartées, elles conduisent vers l’inconnu. Alors, trop de dettes: que faire? La solution classique l’emporte: des plans d’austérité pour réduire les dépenses, économiser, retrouver des excédents budgétaires et commencer à rembourser. C’est ce qu’on exige de tous les surendettés, les ménages comme les pays.
Le problème, on l’a évoqué, est que cette austérité risque de pousser le pays dans la récession et une spirale négative: la perte de croissance coupe les recettes et le déficit se creuse au lieu de se réduire. Il faut donc conduire la politique économique avec doigté et une aide provisoire est nécessaire, par le FMI ou, en Europe, par les autres pays membres.
Les marchés se tournent alors vers les gouvernements européens et leur demandent:
1) allez-vous prendre les mesures indispensables de rigueur ?
2) allez-vous aider les plus faibles d’entre vous?
Comment? Combien?
Or, les  réponses sont floues. Les Grecs n’arrivent pas à mettre en place les plans prévus. La solidarité intra-européenne est incertaine, contestée en Allemagne, jamais ferme. La classe politique n’est capable que d’être à son habitude, elle fait des promesses et des discours sur «sa volonté indéfectible de soutenir l’euro».
Les marchés y croient quelques jours puis refont leurs calculs, demandent des détails qui ne viennent pas et se mettent à douter, ce qui veut dire à prendre des «positions»  contre. Les taux accordés aux Grecs et aux autres pays faibles montent, aggravant les difficultés de remboursement.
En sortira-t-on et comment? Depuis 18 mois que dure la crise européenne, le scepticisme des marchés s’est endurci. Ils seront aujourd’hui difficiles à convaincre. L’indécision a aussi provoqué la contagion. L’Italie, longtemps épargnée, est maintenant attaquée, les marchés «découvrant» son endettement de 120% du PIB, un plan de rigueur insuffisamment crédible, des dirigeants politiques pire menteurs que tous les autres.
L’euro s’en sortira, je n’en doute pas. Jean-Claude Trichet a raison de marteler que l’Europe «dans son ensemble» est en meilleure situation financière que les Etats-Unis: un équilibre commercial, un déficit budgétaire global de seulement 80% du PIB (100% aux Etats-Unis), une croissance par tête aussi rapide depuis dix ans, une création d’emplois 20 millions d’emplois contre 14 aux Etats-Unis. Le péril n’est qu’à la périphérie. Il faut donc que les dirigeants finissent par s’entendre vraiment autour d’une plan incontestable: une décote de la dette grecque, l’annonce des conséquences sur le Portugal, l’Irlande et cætera, et aussi sur les banques.
Tout cela va se jouer d’ici à la réunion prévue jeudi 21 juillet. Les hommes et femmes politiques ont-ils compris qu’on leur demande d’être clairs, réalistes, de dire la banale vérité des coûts et de déclarer aux peuples qui va les payer? La crise, sinon, s’aggravera encore. L’enjeu, au delà de l’Eurozone, est l’émergence d’une politique nouvelle, transparente et courageuse.

Le festival socialiste est commencé

Difficile de se distinguer quand tous les adversaires ont adopté le même programme politique. C'est pourtant le pari et l'enjeu de la primaire socialiste. Forcément, autant que des idées, il sera ici question des hommes (et des femmes) qui les portent, de leur manière d'agir et d'être… Ainsi, ce week-end a donné lieu à un festival socialiste. Ou, plutôt, au début de la tournée d'été des grands rendez-vous de l'Hexagone. Sur le pont en Avignon avant d'aller suivre le Tour de France. Comme pour les festivals de l'été, chacun ne joue pas dans la même catégorie. D'un côté les grosses machines bien rodées, avec leurs nombreux fidèles… et aussi parfois un manque de surprise. François Hollande et Martine Aubry - qui se partagent les soutiens des principaux hiérarques socialistes picards - sont dans ce registre. Le premier dans une version plus « starisée » joue la carte présidentiable personnelle ; la seconde plus bûcheuse et collective. À côté, donc, les petites manifestations, plus ciblées, où se trouvent parfois les plus belles découvertes. Au PS aussi, les trois « outsiders » se démarquent le plus. Ségolène Royal moins par ses propositions - recyclage de la précédente campagne mûri par l'expérience acquise depuis - que par son positionnement régional ; Arnaud Montebourg, sur l'aile gauche, en surfant sur son concept de démondialisation. Et Manuel Valls, à droite toute, avec des accents churchilliens pour faire entendre sa vérité, aux intonations de moins en moins socialistes (ou moins encore que chez ces concurrents). Mais, pour tous, le défi est le même. Il s'agit de ne pas décevoir le public.

La pause ? Quelle pause ?




Après six mois d’actualité politique intense, on aurait pu croire que le rythme allait se ralentir. Les acteurs n’étaient-ils pas fatigués ? Le 14 juillet apparaissait plus que jamais comme une date de rupture. Le final d’une saison 2010-2011 haletante qui avait besoin d’une pause salvatrice pour réanimer son inspiration.


Après tout, le parlement s’était mis en vacances. Plus de question au gouvernement jusqu’en septembre… Il suffisait de suivre l’exemple de bon nombre d’honorables députés qui ont choisi de dételer dès le défilé terminé.


Et bien non. Décidément, rien, cette année, ne se passera comme on l’avait imaginé. La semaine qui s’ouvre sera loin d’être vide si on en juge par l’activité intense des ténors du parti socialiste. La primaire de l’automne fera chanter tout l’été sans qu’on sache qui, de la stratégie de la cigale ou de celle de la fourmi, sera récompensée.


François Hollande a choisi d’être partout, sillonnant le pays jusqu’aux lacets du Tour de France pendant que Martine Aubry accumule tranquillement quelques positionnements présidentiels pour construire patiemment une nouvelle image de chef d’État potentiel.


Son intervention d’hier matin sur Europe 1 s’est voulue calme, structurée, argumentée, comme si elle avait décidé de s’écarter délibérément du registre polémique pour valoriser un style sérieux au risque d’être ennuyeux. Ségolène Royal, de son côté, ne renonce à aucun désir d’avenir malgré des sondages qui pourraient être inhibants.


Mais le plus extraordinaire, c’est qu’aucun des trois protagonistes de la bataille de la candidature ne se laisse aller à des commentaires assassins sur ses rivaux et rivales. Un effort surhumain pour priver Nicolas Sarkozy de sa meilleure arme : les déchirements de l’adversaire. Une petite déception pour le chef de l’État dont la cote, selon la formule consacrée, « frémit ».


Le sortant, justement, confisque lui aussi une arme à ces futurs challengers en dominant sa nature. Le voilà qui, nous dit-on, entre enfin dans la fonction sans qu’on sache vraiment ce qui l’emporte du calcul ou de la maturité dans cette évolution. Il aurait trouvé la bonne distance avec les Français mais qu’on ne s’y trompe pas, ce n’est pas un triomphe de la sérénité.


Il n’y aura de petits airs de vacances pour personne cette année sur l’avant-scène de 2012.



Euro : une crise si politique


Danger, avis de tempête. L'ouverture des marchés financiers sera, ce matin, scrutée à la loupe par tous les gouvernants européens, à l'aube d'une nouvelle semaine cruciale pour la monnaie unique.

Depuis le début de la crise grecque, il y a dix-huit mois, ce scénario s'est déjà répété à plusieurs reprises. Chaque fois, les spéculations sur la capacité des Européens à résoudre la crise de la dette créent l'alarme (elle-même rentable pour les spéculateurs). Chaque fois, un sommet européen esquisse une riposte. La tempête passe, puis revient. Toujours plus menaçante.

Car les craintes d'une contagion de la crise grecque pèsent sur des pays chaque fois plus importants. La semaine dernière, les cibles n'étaient plus le Portugal ou l'Irlande, mais l'Italie et sa gigantesque dette. Autrement dit la troisième économie européenne. Ce ne sont plus les régions périphériques de la zone euro qui sont en danger, mais son coeur même. Le jeu se fait très sérieux. Si sérieux que le parlement italien n'a pas mis quarante-huit heures pour adopter un rude plan d'austérité. Du jamais vu.

Jeudi, les dirigeants de la zone euro se retrouvent à Bruxelles. Ils doivent définir les modalités du deuxième plan de sauvetage de la Grèce, dont le principe a été acquis le mois dernier. Une nouvelle fois, des divergences sur la stratégie à adopter se font jour et c'est là une des raisons du regain de pression de la part des marchés.

D'un côté, l'Allemagne (plus la Finlande et les Pays-Bas) exige une participation contrainte des créanciers du secteur privé (les banques). De l'autre, la France et la Banque centrale européenne préconisent une participation du privé sur une base volontaire, par crainte d'un défaut de paiement d'Athènes aux conséquences imprévisibles.

Un compromis sera sans doute trouvé à Bruxelles, mais sera-t-il suffisant s'il n'est pas accompagné d'un sursaut politique ? On peut en douter. De nombreux économistes estiment que l'Union monétaire européenne, telle qu'elle a été conçue à Maastricht, a créé un déséquilibre (entre une politique monétaire fédéraliste et une politique budgétaire restée nationale) dont on paie le prix fort.

Ce hiatus, par temps de crise, tire dans deux directions : le repli national ou le fédéralisme. Et plus les spéculateurs s'acharnent contre l'attentisme de nos politiques, plus l'alternative se radicalise. Les marchés révèlent (jusqu'à l'acharnement) la moindre faiblesse politique. Aux États-Unis, en Italie ou pour la zone euro, le même schéma opère partout.

Or, cette faiblesse porte un nom : l'endettement. C'est la dette qui a fait perdre à la plupart des pays de la zone euro une précieuse part de leur souveraineté, pas l'Europe dont le budget est si dérisoire. Même s'il est facile de se défausser sur Bruxelles, la crise de l'euro nous montre surtout des responsables politiques pris en tenaille entre leur calendrier électoral (si personnel) et le monde opaque des usuriers de la finance sans frein. Un grand écart qu'aucun pays européen ne peut tenir seul. Pas même l'Allemagne. Puissance fédérale s'il en est, mais qui tourne désormais le dos au fédéralisme européen.

C'est pourtant bien la question fédérale, longtemps tabou, que la crise de l'euro est en train de remettre au coeur du débat politique sur l'avenir de l'Europe. Et le pire, c'est que ce sont les économistes qui sont, pour l'instant, les seuls à le penser clairement.

Grèce: Pécresse "espère" une aide rapide

La France "espère" que le nouveau plan d'aide à la Grèce, toujours en discussions, sera adopté lors du sommet extraordinaire de la zone euro jeudi à Bruxelles, a déclaré aujourd'hui la ministre du Budget Valérie Pécresse sur LCI. Interrogée pour savoir si le plan serait adopté "cette semaine", elle a répondu: "nous espèrons qu'un plan soit adopté et de ce point de vue, les déclarations de (la chancelière allemande) Angela Merkel disant qu'elle souhaite qu'il y ait du concret jeudi (...) vont dans le très bon sens".  La chancelière allemande a prévenu dimanche qu'elle ne se rendrait au sommet de Bruxelles "que s'il y a un résultat en vue".

"Nous, aujourd'hui, nous voulons boucler le deuxième plan d'aide à la Grèce", a insisté Mme Pécresse, précisant que "la seule question qui reste à trancher est celle de la participation du secteur privé à ce plan de sauvetage".  Pour autant, il faut "explorer toutes les pistes" pour que la participation du secteur privé se fasse "sans impacter la stabilité de la zone euro, c'est-à-dire sans lui faire perdre son attractivité pour les investisseurs. C'est une équation complexe (...) mais nous faisons confiance aux chefs d'Etat de la zone euro pour trouver la solution", a ajouté la ministre. "Depuis le début de la crise, chaque fois que l'Europe a été au pied du mur, elle a su trouver en elle-même les ressources pour être solidaire et trouver des solutions", a-t-elle assuré.

Un sommet de la zone euro a finalement été convoqué pour jeudi afin de tenter de boucler un deuxième plan de sauvetage financier de la Grèce, qui pourrait passer par un rachat de la dette du pays, et alors que le pression des marchés est de plus en plus forte sur la zone euro.

Die Welt évoque un prélèvement bancaire pour aider la Grèce

  Les gouvernements de la zone euro envisagent la création d'un prélèvement bancaire comme moyen d'impliquer les créanciers privés dans un deuxième plan d'aide à la Grèce, écrit le journal allemand Die Welt lundi.

"Quelques jours avant un sommet de crise à Bruxelles, les gouvernements des 17 pays de la zone euro envisagent d'impliquer le secteur privé dans un futur sauvetage de la Grèce via un nouveau prélèvement bancaire", rapporte Die Welt, citant des sources diplomatiques, dans un communiqué avant publication du journal.
"Le prélèvement bancaire sera aussi valable pour les institutions financières dans les pays de la zone euro qui ne sont pas directement engagées en Grèce", ajoute le journal sans plus de précisions.
L'Allemagne envisage déjà de créer son propre prélèvement bancaire d'ici fin septembre pour lever environ un milliard d'euros par an afin d'alimenter un fonds de sauvetage financier. (Annika Breidthardt; Bertrand Boucey pour le service français)

Zone euro: plus de discipline (Trichet)

Le président de la Banque centrale européenne Jean-Claude Trichet considère que les gouvernements de la zone euro seront "responsables" de la dette grecque en cas de défaut de paiement d'Athènes, dans un entretien diffusé sur le site internet du Financial Times Deutschland (FTD).

Jean-Claude Trichet estime que si les décisions des gouvernements conduisent à un défaut de paiement, même partiel, d'Athènes, "ceux-ci devront faire en sorte d'apporter des garanties au 'système euro'"  - c'est-à-dire à la Banque centrale européenne (BCE) et aux banques centrales des pays membres de la zone euro, afin de protéger la monnaie unique. "J'ai prévenu plusieurs fois en détail les chefs d'Etat et de gouvernement qu'en cas de défaut de paiement d'un pays, on ne pourra plus accepter ses obligations comme des garanties normales. Dans ces conditions, les gouvernements (responsables de cette situation) devraient alors eux-mêmes s'engager pour corriger la situation. Cela serait leur devoir", a déclaré Jean-Claue Trichet, dans cette interview mise en ligne dimanche soir.

Les dirigeants des pays de la zone euro doivent décider d'un deuxième plan d'aide à la Grèce à l'occasion d'un sommet extraordinaire, jeudi à Bruxelles. Les tractations portent principalement sur les modalités de la participation du secteur privé créancier de la Grèce. L'Allemagne exige que les banques mettent cette fois la main au portefeuille, afin de faire passer la pilule à une opinion publique réticente à payer pour les autres.

«Il faut plus de concurrence sur le marché de la notation»

Spécialiste des notations souveraines, Norbert Gaillard décrypte la politique des petites agences, dont la chinoise Dagong, qui a dégradé la France, les États-Unis et la Grande-Bretagne. Il plaide pour une réforme de cette industrie.

A côté des mastodontes Fitch, Moody's et Standard & Poor's, les «petites» agences de notation se montrent un peu plus sévère dans leurs notations de la dette souveraine…
En fait, en début d'année, plus de la moitié des notations souveraines par la canadienne DBRS, et par les nippones JCR et Rating & Investment (les trois «petites» agences jouissant d'une certaine notoriété) sont assez corrélées entre elles, et apparaissent en moyenne équivalentes à celles de Fitch, Moody's et Standard & Poor's. La chinoise Dagong, en revanche, sort du lot, puisqu'au mieux, un tiers de ses notes sont les mêmes que celles de Moody's, Fitch et S&P. Ces notes présentent plusieurs spécificités. Tout d'abord, les «ratings» attribués par Dagong aux grands pays émergents [Brésil, Chine, Inde, Russie, Arabie saoudite, Afrique du sud, ndlr] sont nettement plus élevés que ceux des agences occidentales. Ensuite, ses notes aux grands pays industrialisés [Amérique du Nord, Europe et Japon] sont bien plus basses que celles des agences occidentales. Dans ces deux cas, les différentiels de notes peuvent atteindre quatre crans, ce qui est considérable.
Quel crédit peut-on accorder à ces agences?
Elles ont surtout une influence locale, au mieux régionale. Ainsi, même si DBRS bénéficie d'une bonne réputation, est surtout active au Canada et aux États-Unis. Elle est d'ailleurs accréditée par la SEC [Securities and Exchange Commission, le gendarme des marchés américains]. Mais elle souffre d'un déficit de notoriété hors d'Amérique du Nord. Quant à JCR et Rating & Investment, ces agences ont une influence sur le continent asiatique, mais ont tendance à «surnoter» les émetteurs de dette asiatiques. Toutes deux sont également accréditées par la SEC. En revanche, Dagong s'est vu refuser cette accréditation il y a deux ans. Les autorités américaines ont notamment estimé qu'elle était trop sous l'influence politique de Pékin. Depuis, Dagong n'a de cesse de publier des rapports critiquant aussi bien la politique monétaire et budgétaire américaine, que l'action des trois grandes. En résumé, Dagong tente d'incarner l'alternative dans l'industrie de la notation. Elle est consciente que les difficultés financières des États-Unis et de plusieurs États européens confortent son point de vue. Reste que les événements récents comme les doutes sur la pérennité de la zone euro ou les incertitudes sur la capacité des États-Unis à enrayer la spirale de l'endettement donnent raison à Dagong.
Certains économistes de renom, comme Patrick Artus (Natixis), estiment maintenant que Dagong, reflète mieux la réalité, s'offusquant notamment de voir les «trois grandes» conserver une notation très élevée concernant la dette américaine. Qu'en pensez-vous?
Je partage le point de vue de Patrick Artus sur le fait que les notations de plusieurs pays industrialisés sont excessivement élevées. Fitch, Moody's et S&P ont «surnoté» la Grèce et plusieurs pays européens car elles ont considéré, à tort, que l'appartenance à la zone euro réduisait le risque d'insolvabilité… Ce fut une erreur. Les États dont la dette publique a fortement augmenté depuis une décennie, qui n'ont pas encore réorganisé leur État-providence et qui ont insuffisamment réformé leur système de retraite, devraient être dégradés. Cependant, je pense également que Dagong «surnote» certains émergents, tels que la Chine, la Russie et l'Afrique du sud. Dans le détail, elle «surpondère» des critères comme la croissance économique et les réserves de change, mais néglige les indicateurs de stabilité politique et institutionnelle, sans penser suffisamment en termes de soutenabilité de la dette. Car les pays industrialisés notés d'un triple ou double «A» par Fitch, Moody's et S&P peuvent se permettre des niveaux d'endettement supérieurs à ceux des pays émergents, compte tenu de l'importance de la classe moyenne, d'une meilleure cohésion sociale, et d'une plus grande facilité à accéder aux marchés de capitaux.
Dans un contexte de crise de la dette, et après les déboires des «trois grandes» pendant la crise (très critiquées, notamment pour avoir estampillé de notes élevées des produits financiers toxiques), ces agences, pour l'heure peu écoutées par les marchés, peuvent-elle gagner en influence?
Depuis quatre ans, c'est vrai que les petites agences, peu impliquées dans ces scandales, ont l'opportunité de tirer leur épingle du jeu. Mais percer dans l'industrie de la notation reste très difficile car les trois grandes agences détiennent la quasi-totalité (95%) des parts de marché. D'après moi, les petites agences n'ont que deux stratégies possibles: soit elles se spécialisent dans des niches sectorielles ou géographiques, soit elles se différencient par leurs diagnostics et leurs notations, à l'instar de Dagong.
Faut-il plus de concurrence dans l'industrie de la notation?
Oui, et encore une fois, l'arrivée de nouveaux entrants sera d'autant plus positive que leurs notations divergeront par rapport à celles des « trois grandes ». Cela peut notamment contribuer à réduire les effets de mimétisme sur les marchés. Mais les régulateurs devront cependant veiller à ce qu'une concurrence accrue ne débouche pas sur une inflation des notations qui pourrait s'avérer déroutante. En plus de la concurrence, il faut que les agences révisent leurs méthodologies. A l'avenir, les agences devraient abaisser les notes de pays qui, même en période de croissance, sont incapables de réduire leur déficit, car ces États seront vulnérables au premier retournement conjoncturel. Ce type de vigilance permettrait notamment aux agences de mieux anticiper les crises de la dette.

Un sommet crucial pour l'avenir de l'euro

Jeudi, les dirigeants de la zone euro examineront un second sauvetage de la Grèce. Une date clé face à des marchés extrêmement nerveux. 

Avec la crise de la dette souveraine, les marchés n'en finissent pas de tester la force de caractère des dirigeants de la zone euro. Depuis quinze mois, chaque rendez-vous européen a réussi un replâtrage, sans prévenir le coup suivant. La Grèce. L'Irlande. Le Portugal. Sauver l'euro ? Il en sera à nouveau question cette semaine pour un sommet d'urgence. Avec cette fois une différence de taille : tout le monde, ou presque, peut se sentir visé.
Lorsque les dix-sept chefs d'État et de gouvernement se retrouveront jeudi à midi, ce ne sont pas les options techniques qui manqueront à l'appel. Renflouement accru, baisse des taux d'intérêt, allongement des échéances, appel au secteur privé, voire restructuration en bonne et due forme, toutes les solutions sont sur la table depuis que la Grèce a frôlé la faillite pour la première fois, au printemps 2010.
Ce qui a toujours fait défaut, en revanche, c'est la volonté politique et la responsabilité dans une Europe que les capitales perçoivent non plus comme un projet commun, mais comme une variable de politique intérieure. À l'inverse, l'effet de contagion peut conduire au sursaut collectif. Avec l'Italie la semaine dernière, le péril s'est retrouvé d'un seul coup au cœur de l'euro.
C'est de Rome aussi que sont tombées les deux mises en garde les plus percutantes. «La solvabilité des États souverains n'est plus un fait acquis», dit Mario Draghi, futur président de la BCE, à l'adresse des dix-sept capitales. Et «comme sur le Titanic, les passagers de première classe eux-mêmes ne pourront pas s'en sortir», a prédit le ministre des Finances, Giulio Tremonti.

Rachat de dette grecque 

L'avertissement transalpin a porté. Pour la première fois, les ministres des Finances de l'euro viennent d'admettre ce que les marchés et les experts financiers clament depuis des mois. Oui, la Grèce, plongée dans l'austérité et la récession, peut se retrouver incapable de régler une échéance sur sa dette ou sur les intérêts. Et non, un défaut de paiement n'est plus à exclure dans la zone euro. Seule la BCE refuse encore d'en convenir.
C'est sous cette contrainte, reconnue mais encore virtuelle, que le sommet de jeudi devra ficeler un second renflouement de la Grèce. «La clé, c'est d'améliorer la capacité de la Grèce à soutenir et à rembourser sa dette» , insiste le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble. Dans tous les cas de figure, les créanciers privés - banques et fonds d'investissement - devront faire la part du feu, ou participer à l'effort.
La solution la plus en vue est d'aider la Grèce à racheter une partie de sa dette publique grâce à des prêts consentis par le FESF, le fonds de renflouement de la zone euro. L'Allemagne s'y est longtemps opposée, au nom de l'orthodoxie financière. Mais la ­dépréciation accélérée des titres grecs sur le marché secondaire permet à Athènes de se désendetter à bon compte, ce qui répond à l'objectif affiché à Berlin. L'autre option serait d'échanger les titres pour des échéances plus lointaines.
Le plan doit couvrir les besoins de financement public d'Athènes jusqu'en 2014, soit quelque 100 milliards d'euros. Il fait peut de doute que Dublin, Lisbonne et tout autre capitale assistée voudront bénéficier des mêmes assouplissements le moment venu.