TOUT EST DIT

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vendredi 10 juin 2011

Grèce : la zone euro vers un rééchelonnement de la dette

Berlin, qui veut faire participer les créanciers privés au deuxième plan d'aide à Athènes, semble en voie d'avoir gain de cause.

Bruxelles a annoncé vendredi 10 juin que la zone euro étudiait l'option d'un rééchelonnement de la dette grecque, sur une base volontaire de la part des créanciers, en précisant bien qu'il ne s'agissait pas d'une restructuration.
"Nous avons discuté ces derniers jours d'une initiative du style de celle de Vienne", a reconnu Amadeu Altafaj, le porte-parole du commissaire aux Affaires économiques Olli Rehn. En 2009 dans la capitale autrichienne, les banques créancières de la Roumanie, alors en grave crise, s'étaient engagées en 2009 à maintenir leurs prêts arrivant à échéance.
"Dans ce contexte, nous avons aussi examiné la faisabilité d'une rééchelonnement volontaire de la dette ou reprofilage" de la dette, a-t-il poursuivi.
Il a toutefois insisté sur le fait que cela s'entendait "bien sûr à la condition, extrêmement importante, que ceci ne crée pas un événement de crédit", à savoir "une restructuration de dette" susceptible de créer la panique sur les marchés.

Les créanciers privés entre 20 et 35 milliards ?

D'après l'hebdomadaire allemand Der Spiegel, la zone euro veut faire participer les créanciers privés de la Grèce à hauteur de 20 à 35 milliards d'euros, suivant ainsi la volonté allemande. Selon le magazine, les ministres des Finances européens seraient prêts à considérer un échange d'obligations contre des titres à maturité plus éloignée.
C'est la solution prônée par le ministre des Finances allemand Wolfgang Schäuble, qui veut un allongement de sept ans des maturités pour toutes les obligations en circulation. La Banque centrale européenne (BCE) est catégoriquement opposée à toute action sur la dette qui s'apparenterait à un défaut de paiement, mais pourrait consentir à une solution de "rollover" qui verrait les créanciers réinvestir dans de la dette grecque quand leurs titres arrivent à maturité.
Selon un porte-parole du ministère allemand des Finances vendredi, quelque 80 à 90 milliards d'euros de dette grecque arrivent à maturité d'ici à 2014.
MAIS
Le président de l'Union européenne Herman Van Rompuy s'est dit vendredi "confiant" dans la signature d'ici fin juin d'un nouveau programme d'aide à la Grèce. "Nous travaillons sur des moyens financiers européens supplémentaires pour la Grèce. ...

Le choix de la Grèce : l'empire ou la mort ?

Mercredi 2 juin, Jean-Claude Trichet a proposé l'institution d'un ministre européen des finances, chargé non de gérer le budget fédéral mais de contrôler les finances et les politiques de compétitivité des Etats nationaux. Le président de la Banque centrale européenne (BCE) s'est permis cette sortie alors qu'il recevait le prix Charlemagne, à Aix-la-Chapelle, capitale du premier empire européen. Les symboles ont leur importance : celui-ci montre que le problème des dettes publiques européennes est avant tout une question politique. La Grèce aura à choisir entre la ruine économique et l'abolition de sa souveraineté. Voyons pourquoi.

La Grèce est insolvable : elle ne dispose pas des revenus futurs suffisants pour rembourser sa dette publique, qui s'élève à 144 % du PIB. Le plan de l'Union européenne et du Fonds monétaire international (FMI) de mai 2010 reposait sur l'idée fausse qu'il s'agissait d'un problème de liquidité. Les réformes structurelles rapides devaient permettre de relancer la croissance et les prêts de répondre aux besoins temporaires de liquidité, avant un retour sur les marchés en 2012. L'erreur résulte du fait qu'un tel plan n'est réalisable que si la demande extérieure se substitue immédiatement à la demande intérieure, ce qui exige une dévaluation, chose impossible dans la zone Euro.

La conséquence est que la Grèce va faire défaut. La seule question est de savoir qui va supporter les pertes, ce qui dépend du timing de l'opération. Soit la Grèce fait défaut demain et les pertes sont supportées par les banques et les assurances européennes. Soit elle fait défaut dans quelques années et les pertes seront supportées par les contribuables européens qui auront consenti aux prêts ayant permis à la Grèce de vivre jusqu'à là.

Qui va décider ? Les Européens puis les Grecs. Les Européens doivent choisir entre laisser tomber la Grèce ou payer. La seconde option devrait s'imposer : un défaut souverain est, selon Christian Noyer, le "scénario de l'horreur", un Lehman Brothers puissance 10, du fait des pertes pour les institutions financières privées et publiques et de la contagion possible à d'autres pays. La peur va contraindre les Européens à prêter et à préparer leurs populations à des pertes futures. Ils vont aussi tenter de les limiter en exerçant une pression politique intense sur la Grèce pour que les réformes soient effectives et récupérer ses actifs comme garanties.

Le choix de la Grèce est alors entre l'empire ou la mort. Si elle refuse les conditions des prêts, elle fait immédiatement défaut, ce qui conduit à la faillite immédiate de ses banques, à la sortie de l'euro et à une inflation massive du fait de la monétisation de toutes les dettes : c'est la mort économique sous forme de chute brutale du niveau de vie. Si elle accepte, elle se soumet au contrôle des représentants des institutions européennes et des Etats prêteurs et doit liquider ses entreprises publiques : c'est l'empire sous forme d'une restriction brutale de la souveraineté grecque.

Nous retrouvons là la question politique fondamentale qu'est l'organisation de l'Europe. Depuis Charlemagne, les solutions oscillent entre deux pôles : l'empire ou les nations, avec leurs avantages et leurs défauts. L'empire garantit la paix mais supprime la liberté : le maintien de l'unité dans un ensemble aussi hétérogène n'est possible que grâce à un pouvoir autoritaire. Les nations constituent le cadre originel de la démocratie, mais ont une fâcheuse tendance à se faire la guerre. L'Union européenne constitue une tentative historique unique de dépassement de cette tension entre unité et liberté : un empire démocratique résultant du dépassement volontaire et pacifique des nations. La crise actuelle illustre les difficultés d'un tel projet : pour les Grecs, l'UE apparaît comme le fossoyeur de la démocratie ; pour les Allemands, comme l'instrument d'une solidarité imposée et d'un leadership qu'ils ne veulent pas assumer.

Grèce : une marque de chips parodie l’affaire DSK !

Arrêté le 15 mai dernier pour agression sexuelle présumée sur une femme de chambre, Dominique Strauss-Kahn n’en finit pas de déchaîner les passions … Surfant sur la vague médiatique suscitée par l’affaire, des publicitaires grecs ont reconstitué, dans un spot vantant les mérites d’une marque de chips, les évènements survenus dans la suite 2806 de l’Hôtel Sofitel de New York !

La vengeance des contestataires !

Initiateur du plan de sauvetage visant à remonter la situation financière critique de la Grèce, Domnique Strauss-Kahn ne semble pas avoir contenté tout le monde ! Ainsi, les contestataires du régime socialiste en place, ont puisé dans l’affaire DSK leur nouveau slogan : La femme de chambre, elle, a résisté !

DSK, la femme de chambre et les chips !

Dans le dernier spot pour la marque de chips Jumbo, les publicitaires ont décidé de reconstituer l’agression sexuelle présumée de Dominique Strauss-Kahn sur une femme de chambre dans la suite 2806 de l’hôtel Sofitel de New York. L’ex Directeur du FMI est incarnée par un humoriste grec célèbre tandis que la femme de chambre est jouée par Vana Barba, Miss Grèce 1984. Dans le clip, une femme de chambre est surprise dans son travail par un sexagénaire (heureusement en peignoir de bain). Celui-ci tente de d’accaparer des chips de la jeune femme ! Cependant, celle-ci résiste et parvient à conserver son bien ! Elle déclare alors : Troskan ! (signifiant : tu n’en mangeras pas !).
Diffusée depuis quelques jours à la télévision grecque, cette campagne semble beaucoup amuser les habitants ! Et nous aussi !

Affaire DSK : Vers un accord à l'amiable entre les deux camps ?

Un célèbre avocat américain, Maître Alan Dershowitz, parie dans un entretien au Figaro de ce vendredi qu'il y aura un accord à l'amiable dans l'affaire DSK. Retour sur trois cas possibles.
  Et si DSK était insolvable
« Je parie qu'il y aura un accord avant le procès car il est dans l'intérêt des deux parties - défense et plaignante - de ne pas aller » jusqu'au procès, déclare Me Dershowitz, dans Le Figaro. Il pense en effet au côté financier de l'affaire : « S'ils passent un accord, la plaignante obtiendra 2 ou 3 millions de dollars immédiatement ». Autre volet peut-être méconnu du procès c'est que « Si l'avocat de la plaignante engage une procédure civile, il devra viser DSK en personne. Or c'est surtout la femme de l'ex-directeur général du FMI qui possède l'argent et il sait très bien que dans plusieurs années, il sera toujours en train de courir après la somme réclamée. DSK, en effet, peut très bien se déclarer insolvable », ajoute l'avocat.

Et si Anne Sinclair le lâchait

« Qui sait par exemple si le couple ne décidera pas de divorcer ?  Anne Sinclair pourrait ainsi garder toute sa fortune et les avocats de la plaignante ne pourront jamais récupérer leur argent », déclare Me Dershowitz en précisant que l'avocat de la défense « n'a aucun intérêt non plus à aller jusqu'au procès, car ce serait aussi horrible pour DSK que pour la plaignante et le dossier du procureur semble sérieux ».

Et si Nafissatou Diallo ne témoignait pas

Pour lui, l'avocat de la défense a intérêt à ce que la victime finisse par ne pas vouloir témoigner. « Si elle refuse, c'est fini, le dossier est clos. Dans cette relation triangulaire, le procureur est l'intrus. Les deux autres parties ont des intérêts communs entre elles mais pas avec lui. Reste à savoir si elles seront capables de trouver un accord sans se voir accusées de faire obstruction à la justice », ajoute M. Dershowitz.

Agriculture banalisée

Nicolas Sarkozy a semé avec modération, hier, les aides aux agriculteurs victimes de la sécheresse. Il ne pouvait guère faire plus. Les finances de l’État sont à peu près aussi asséchées que les cultures de nos champs. Les agriculteurs devront donc se contenter de reports d’échéances et d’exonérations de taxes. À voir les mines dubitatives de certains éleveurs qui assistaient à la table ronde à laquelle participait le chef de l’État, ses propositions n’ont pas convaincu tout le monde. C’était à craindre. La situation de l’élevage est si critique que ceux qui en vivent attendent le miracle qui les empêchera de disparaître.

Des troupeaux ont déjà été abattus par leurs éleveurs incapables de les nourrir sans se ruiner. Et, comme souvent en matière agricole, une catastrophe en déclenche une autre : les prix de la viande risquent de s’effondrer sous le poids des bêtes sacrifiées. Déjà sous le coup des calamités naturelles, les paysans se seraient bien passés de la crise sanitaire née en Allemagne. Les producteurs de concombres en sont réduits à jeter leur production et à crier à leur tour « au secours ! »

Cette accumulation de catastrophes naturelles et sanitaires fragilise un secteur qui a beaucoup perdu de son prestige. Il est bien loin le temps où Sully, ministre du bon roi Henri IV, proclamait fièrement que « labourage et pâturage sont les deux mamelles de la France ». Quand l’Europe a mis en place sa politique agricole commune, elle s’inscrivait dans cette continuité. Les Européens devaient bénéficier d’une agriculture nourricière, si possible capable d’enrichir la Communauté.

Aujourd’hui, les agriculteurs sont accusés de coûter trop cher aux budgets nationaux et communautaires. Les consommateurs regardent valser les étiquettes et tremblent à chaque crise alimentaire. Dans une société fortement urbanisée, l’agriculture est devenue un secteur économique comme un autre. La reconnaissance du ventre n’est même plus de mise dans un monde où la pomme chilienne est moins chère au supermarché que sa cousine de Normandie. Le désespoir des éleveurs peint en noir le folklore du Salon de l’Agriculture. Les paysans ne sont pas des magiciens qui produisent des petits animaux beaux comme des peluches. Ils ont besoin de vivre pour nous nourrir.

Aide à la Grèce : la moitié des Français réclame la fermeté !

Alors que la Grèce est toujours en train de discuter d'un éventuel second plan d'aide avec l'UE et le FMI, après celui de 110 milliards d'euros accordé l'année dernière, le baromètre économique BVA du mois de juin réalisé pour 'Challenges' et 'BFM', s'est attaché à recueillir l'avis des Français sur ce sujet... Le constat est clair : ils ne sont plus prêts à faire de cadeaux aux Grecs !

"L'année dernière, 60% des personnes interrogées soutenaient le plan d'aide à la Grèce. Cette fois, malgré les images répétées du mouvement spontané des indignés et le grand nombre de sujets médiatiques soulignant les difficultés quotidiennes des Grecs, les Français sont beaucoup moins conciliants", souligne Gael Sliman, directeur adjoint de BVA.

Ainsi, la moitié d'entre eux réclame la fermeté et exigent que les Grecs remboursent selon les engagements pris. A l'inverse 48% estiment qu'il faut être "conciliant en lui prêtant de nouveau et en faisant des efforts sur le remboursement".

Plus largement le baromètre, note une nette amélioration de l'indice de confiance en l'avenir (-28 contre -55 en mars), un plus haut depuis deux ans, même si les Français sont toujours majoritairement peu confiants (65% contre 35%)...

QUI SONT CES FRANÇAIS QUI NE CONNAISSENT DE LA GRÈCE QUE LA RÉALITÉ TOURISTIQUE ? 
SÛREMENT DES ÉGOISTES, J'EN SUIS PERSUADÉ.

Et de deux

Après l’Irlande, la crise de la dette a dévoré son deuxième gouvernement. Tout comme les Irlandais avaient débarqué Brian Cowen en février, les Portugais ont renvoyé, le 5 juin, José Sócrates et son Parti socialiste à l’opposition.

Au Portugal comme en Irlande, les électeurs ont sanctionné les exécutifs en place pour ne pas avoir proposé d’autre solution que des mesures d’austérité afin de rassurer les marchés (encore eux) quant à la solvabilité de leurs banques ou de leurs Etats, et de rembourser les milliards prêtés par l’UE et le FMI.

Pourtant, au Portugal comme en Irlande, les nouveaux locataires de la salle des commandes reprennent à leur compte les grandes lignes des plans de rigueur qui avaient coûté leur poste à leurs prédécesseurs. "Nous n’avons pas le choix", disent-ils: leur capacité à récolter de l’argent sur les marchés (et donc de financer les politiques publiques) — ainsi que la survie de l’euro, ajoutent leurs partenaires européens — sont en jeu.

Jamais dans l’histoire de l’Europe des Etats souverains ont vu leur marge de manœuvre dans des secteurs clé tels que les finances publiques et la fiscalité ainsi réduite, au point que l’on a à présent du mal à distinguer les gouvernements de gauche de ceux de droite dans leur action.

Jamais également l’intégration européenne n’aura-t-elle apparu aussi concrète aux yeux des opinions publiques comme des responsables politiques. On pourrait regretter toutefois que ces derniers semblent davantage réagir aux événements plutôt que d’en être les acteurs. Et les Européens n’ont pas l’air de l’apprécier. Et ils le font savoir, dans les urnes et dans la rue.

Gian Paolo Accardo

Gian Paolo Accardo est un journaliste italo-néerlandais né à Bruxelles en 1969. Il a travaillé comme rédacteur à Internazionale et à Courrier international et comme correspondant pour l'agence de presse italienne ApCom. Il est rédacteur en chef adjoint de presseurop.eu. Il a un fil sur Twitter.

 




De la clandestinité à l'air libre

Cesare Battisti, l'ex-activiste de la gauche radicale italienne, est âgé de 56 ans. Il a passé plus de la moitié de sa vie dans la clandestinité, à échapper à la justice de son pays. Il est désormais un homme libre. Ainsi en a décidé la plus haute juridiction du Brésil. Inspirée, ou influencée, par Lula, elle a rejeté son extradition vers l'Italie où il avait été déclaré coupable d'avoir commis ou été complice de quatre meurtres, et condamné à la perpétuité. Cette décision appartient à la souveraineté nationale ; elle obéit donc à un principe intangible. La vérité judiciaire - ou politique ? - l'emporte sur la vérité des faits et ces faits, vus d'Italie, sont marqués d'une encre indélébile. Noire comme les polars de l'auteur Battisti ; rouge comme le sang répandu par la lutte armée. Figure des « années de plomb », Cesare Battisti a participé à une histoire criminelle. Celle où des groupes terroristes, au nom d'une utopie, semaient la terreur et assassinaient les « ennemis » du peuple. Il s'est certes toujours dit innocent et a rompu avec son passé militant. Il n'empêche que les familles des victimes ne peuvent que ressentir une offense face à sa libération. Et que l'Italie, en vertu du même principe tout aussi inaliénable de sa propre souveraineté, ne peut que concevoir colère et humiliation, droite et gauche confondues. En dépit d'une condamnation définitive, le processus judiciaire ne sera pas mené à son terme ; sa dette envers la société ne sera pas réparée. Entre l'amnistie et la vengeance, il y avait pourtant un chemin. Existe-t-il encore dans les méandres de la justice internationale ?

Social de gauche, social de droite

L'attention portée aux plus fragiles - les agriculteurs hier, les handicapés avant-hier, les femmes demain - et les débats acharnés sur l'ISF ou le RSA le montrent : la présidentielle se jouera en partie sur la justice sociale et l'équité fiscale. Toute la difficulté sera de ne pas se laisser embrumer par des demi-mensonges ou des quarts de vérités.

La droite rappelle très justement que l'on n'a jamais consacré une telle part de la richesse - près d'un tiers, un record dans l'OCDE - à la solidarité. La gauche a raison de déplorer qu'il n'y a jamais eu autant de pauvres en France. L'UMP débat, d'ailleurs sans langue de bois, de la meilleure manière de rendre les allocations utiles à l'insertion. De l'autre côté de la Seine, les députés de gauche accusent la majorité d'alléger l'ISF de deux milliards, alors que les caisses sont vides.

Comprenne qui peut ! Ou plutôt si : ces contradictions apparentes illustrent deux conceptions de la justice sociale : pour la droite, c'est plutôt aide-toi et l'État t'aidera à t'intégrer par le travail ; pour la gauche, globalement, la collectivité doit t'assister au maximum. Pour la première, il faut dépenser moins pour un meilleur résultat. Pour la seconde, le meilleur résultat suppose un système plus protecteur, quitte à augmenter les impôts.

Mais les positions ne sont pas aussi nettes. À cause d'une question compliquée : peut-on à la fois réduire les déficits, sauver les solidarités, conserver à l'État et au pays leur compétitivité ?

Dépenser plus et alourdir la dette serait une catastrophe. Taxer et imposer davantage serait suicidaire pour la consommation et pour l'avenir du « made in France » dans le monde. Il faut donc répartir autrement les recettes et les dépenses.

Première piste : les Français paient peu d'impôts directs, moyen de corriger les inégalités, et beaucoup de charges qui pénalisent l'emploi. Il n'est pas normal, aux yeux de classes moyennes surtaxées, qu'un foyer sur deux ne soit pas assujetti à l'impôt sur le revenu, ni que certains des plus riches y échappent grâce aux « niches » fiscales. La surimposition des hauts revenus, la modification du barème ou l'instauration d'une TVA antidélocalisation, alliée à une hausse des salaires, font partie des idées explorées pour tenter un rééquilibrage.

Seconde piste : à cause de frais en plus et d'aides en moins, on peut gagner moins en travaillant qu'en pointant à Pôle Emploi. Continuons ainsi et l'on aura toujours des chômeurs d'un côté et des emplois vacants de l'autre. La solution n'est évidemment pas de baisser les allocations, mais d'augmenter le revenu tiré du travail en jouant sur les charges et la fiscalité.

Troisième piste : les revenus du travail sont plus lourdement imposés que ceux du capital et du patrimoine. La justice fiscale et la recherche de recettes nouvelles supposeraient un rapprochement des taux, une taxation des transactions financières, une imposition alourdie de la spéculation, des plus-values sur les ventes de filiales, de métaux précieux ou d'oeuvres d'art.

Ces idées sont-elles de droite, de gauche ou centristes ? Et d'ailleurs, tout le monde, à l'UMP, au PS et au centre les soutient-il ou les rejette-t-il ? En 2012, sans doute plus que d'habitude, plus que la couleur de l'étiquette, il faudra regarder le contenu de la boîte.

Michèle Alliot-Marie sort de sa réserve médiatique

"Se taire pendant un certain temps, c'est toujours intéressant." C'est ainsi que Michèle Alliot-Marie présente les choses, alors qu'elle sort volontairement de trois mois de silence. Une cure débutée après son éviction du gouvernement, lors du remaniement fin février, faisant suite à près de dix ans de services ministériels. Poussée vers la sortie à cause de ses vacances en Tunisie et de ses déclarations pendant la révolte contre le régime de Ben Ali

Début juin, elle a commencé à organiser son retour médiatique : entretien sur Europe 1 avec Jean-Pierre Elkabbach et publication d'une tribune dans Le Figaro. Ce jeudi 9 juin, on apprend aussi que l'UMP a accepté que l'ancienne chiraquienne se saisisse, pour le parti, d'un thème de réflexion qu'elle a proposé : la solitude.
Cette discrétion médiatique, Michèle Alliot-Marie se l'est imposée, tout comme son retour était prévu : mi-avril, une de ses proches citée par Le Figaro annonçait qu'elle allait faire son "retour sur les sujets nationaux" le mois suivant.
"FÂCHÉE AVEC PERSONNE"
A l'heure de tenter sa rentrée médiatique, le 1er juin, Michèle Alliot-Marie tient à montrer qu'elle est dans la plus grande loyauté vis-à-vis de la majorité et de Nicolas Sarkozy : "Je ne suis ni dans la nostalgie ni dans la rancune, répond-elle quand on l'interroge sur ceux qu'elle pourrait tenir responsables de son départ du gouvernement. Je ne suis fâchée avec personne."

Il est vrai que les leaders de la majorité avaient pris soin de ne pas accabler totalement cette ministre de longue date, au moment de justifier sa sortie du gouvernement : François Fillon avait ainsi expliqué qu'elle n'avait "pas commis de faute" et que son éviction n'était "'pas une décision morale […] mais politique".
Jeudi 9 juin, Mme Alliot-Marie a prononcé une forme de mea culpa, expliquant sur LCI avoir commis "une erreur de jugement et de communication". Elle se défend par ailleurs de toute rancœur. "Ça ne sert à rien d'être fâché avec qui que ce soit. Ce qui m'intéresse, c'est d'agir pour la France", a assuré l'ancienne ministre.
UNE INITIATIVE À LA RENTRÉE SUR "LA SOLITUDE ET LE REPLI SUR SOI"
La "disparition" de l'ex-détentrice du record de longévité gouvernementale n'était d'ailleurs pas totale. De toutes les réunions du parti et du groupe parlementaire à l'Assemblée, elle a également publié récemment une tribune dans Le Figaro sur le thème des classes moyennes, cher à Laurent Wauquiez. Mme Alliot-Marie y évoque la nécessite de "relancer l'ascenseur social".
C'est d'ailleurs par le biais du parti qu'elle compte rebondir : selon Europe 1, elle va diriger prochainement une convention sur "la solitude et le repli sur soi". Contacté par Le Monde.fr, le parti présidentiel précise qu'elle a proposé l'idée lors du bureau politique hebdomadaire du parti, et que Jean-François Copé, le secrétaire général de l'UMP, "lui a proposé de mener cette idée à bien". On précise cependant que "la forme qui sera donnée à cette initiative", qui pourrait être lancée à la rentrée, "n'est pas encore décidée".
Alexandre Piquard

Crise grecque : la réponse européenne

Loin d'avoir redressé son économie, la Grèce entre dans sa troisième année de récession. Mais pour Julia Cagé et Thomas Chalumeau, ni la cure d'austérité qu'on lui impose ni une hypothétique restructuration n'y changeront quelque chose, c'est l'Europe qui doit racheter la dette. 

  Ni les promesses d’un paquet de privatisations de 50 milliards, ni les engagements d’une cure d’austérité sans précédent sur ses dépenses publiques n’auront suffit.

La Grèce est en train d’échouer dans ses efforts de stabilisation financière et est à nouveau au bord du gouffre : son économie s’enfonce, le semblant de consensus national sur les efforts demandés se lézarde (appel à la Grève générale le 15 juin), et les  experts de la « Troïka », mandatés par ses créanciers (FMI, Banque centrale européenne et Commission) viennent de rendre leur verdict : la Grèce ne respectera probablement pas l’engagement de réduire son déficit à 7.5% du PIB à la fin de l’année (contre 10,5%  l’an dernier),

Privée de tout accès aux marchés financiers (les dernières émissions à 2 ans se sont faites à des taux d’intérêts totalement prohibitifs de près de 20% !), la Grèce, même en bénéficiant d’une nouvelle rallonge de l’Europe, ne fait que gagner du temps : avec 100 milliards de plus – un montant vertigineux actuellement en cours de discussion entre Européens et qui s’ajouterait aux 100 milliards de 2010 –,  la Grèce pourrait au mieux tenir jusqu’à fin 2014. Et ensuite ?

Même en 2015, il est très peu probable que la Grèce puisse acquitter les intérêts d’une dette qui pourraient atteindre alors près de 180% du PIB, et afficher l’excèdent primaire délirant de quelques 3% du PIB qui lui permettrait de stabiliser ses déficits. Le Financial Times a même calculé qu’il lui faudrait une croissance du PIB de 4% par an alors que la Grèce affiche sa 3e année de récession, avec une chute du PIB de -3,5% attendue cette année, récession qui sera sans doute encore plus importante si les mesures d’austérité sont renforcées.

Dans ce contexte, la spéculation sur une possible restructuration de la dette souveraine grecque a repris de plus belle. A tort.

Disons le clairement : ce serait la pire des solutions. Ses conséquences seraient incalculables : effondrement du secteur financier grec, déstabilisation de la BCE (qui détient 90 milliards de prêts sur les banques grecques), contagion à l’Espagne, l’Irlande et le Portugal, avec à la clé une explosion des coûts de financement dans toute l’Europe. Pire encore : elle ne changerait rien au problème grec. Même après une restructuration « hard » ou « soft » (« reprofilage », « rééchelonnement », « offre d’échange volontaire » ou « roulement des positions », lesquels s’avéreraient tous par ailleurs techniquement périlleux), la Grèce se retrouverait très probablement à nouveau… en situation de non solvabilité en 2015 ou 2016.

En réalité, la crise grecque durera tant que la Grèce n’arrivera pas à redresser son économie. Et elle ne pourra redresser son économie tant qu’elle restera écrasée par le poids de sa dette. La Grèce par ailleurs ne pourra s’en sortir seule.

Dans de telles conditions, entre l’Europe et le chaos, nous choisissons l’Europe !

La seule décision qui fasse sens sur le long terme et donne de la consistance au projet de gouvernance économique européenne est une européanisation de la dette grecque, c’est-à-dire son rachat par la Banque Centrale Européenne (BCE) et par le Mécanisme Européen de Stabilité (MSE).

Les avantages seraient majeurs. D’abord, l’arrêt de toute spéculation en Europe sur la dette grecque, et de tout risque de contagion aux autres pays européens. Placée intégralement sous le « masque à oxygène » européen, la Grèce verrait immédiatement chuter le taux moyen appliqué à sa dette souveraine à 4% environ. Ce rachat se ferait au cours actuel du « marché », soit à un taux inférieur entre 30% et 40% au nominal des titres. Les délais de remboursement très favorables octroyés en mars à une partie de la dette grecque seraient immédiatement appliqués à sa totalité, avec un paiement des dernières échéances reportées en mai 2021 contre 2015 aujourd’hui.

Trop favorable à la Grèce ? L’« européanisation » de la dette grecque ne signifiera pas son annulation. La Grèce devra consentir de lourds sacrifices pour revenir à une trajectoire financière plus « acceptable », mais dans le cadre d’échéances de remboursement assouplies, de taux d’intérêts abaissés, et d’un engagement politique de redressement pluri-annuel avec son unique « créancier » désormais : le reste de l’Europe, à la place de la pression spéculative incessante des marchés.

Trop favorable au secteur financier ? Le rachat de la dette que nous proposons se ferait avec une importante décote – de l’ordre de 30% par rapport au nominal. N’oublions pas en outre que, les difficultés de la Grèce viennent moins des banques prêteuses que… des libertés prises par le gouvernement grec avec ses comptes publics à une certaine époque…


Un accord déséquilibré pour l’Europe et inacceptable pour l’Allemagne ? Non, si en contrepartie l’Union européenne en profite pour acter une nouvelle étape de son intégration dans deux directions impératives :

1- L’intégration : institutionnalisation de l’Euro-groupe, renforcement de la supervision et de la coordination « préventive » des politiques macro-économiques et budgétaires, jusqu’à l’établissement d’un Conseil des Ministres des Finances doté d’un véritable droit de veto sur certaines décisions de politique économique nationale des pays en dérive financière après avoir sollicité l’aide de la zone,

2 - La restauration d’une politique macro économique européenne orientée vers la croissance. Car si la Grèce devra payer, elle ne pourra s’en sortir seule. L’Union européenne devra aussi aider la Grèce à rebâtir une nouvelle stratégie de compétitivité économique, autour de programmes d’investissement « de relance » au bénéfice de l’industrie et des infrastructures grecques.

A cette condition, l’Europe pourra sauver la Grèce. Et ce faisant, se sauver elle-même.


Retour à la case nation

L'Union européenne était ce qui pouvait arriver de mieux au continent. Mais, au fil du temps, elle s'est transformée en un Golem bureaucratique échappant à tout contrôle par les citoyens. Pour lui éviter de s'effondrer et lui redonner souffle, un renouveau s'impose, qui partirait des Etats nationaux et de leurs mécanismes démocratiques. Extraits.
 L’Union européenne est ce qui pouvait arriver de mieux au continent depuis la chute de l’Empire romain. Mais il a fallu d’abord en passer par la catastrophe totale, afin que les Etats conquérants de l’Occident cessent de se jeter les uns sur les autres. Ce n’est qu’à partir de 1945 que les gens sensés n’ont plus cherché leur salut dans le nationalisme. L’idée européenne était simple : en intégrant progressivement les économies nationales, on supprimerait tout mobile, voire toute possibilité logistique de violence interétatique. Qui, en effet, ouvrirait le feu sur lui-même ?
Le rêve est aujourd’hui réalité. Sur le plan administratif et juridique, le continent est l’espace économique le plus solide de la planète. Sans conflits internes, sans pauvreté de masse, sans dictature. Et maintenant ? Maintenant, l’Europe est au bout du rouleau.

Le rebut monétaire d'une petite bande de banquiers

La devise commune s’effondre, transformée en rebut monétaire par une petite bande de banquiers et d’économistes aux abois à coups de renflouements d’urgence. L’UE ne conçoit l’immigration que par des hordes désespérées qui jouent à la roulette russe dans des barcasses de fortune sillonnant la Méditerranée. Face à la libération du Proche-Orient, chaque pays se lance dans sa propre guerre coloniale. Ou détourne pudiquement le regard.
Aujourd’hui, les producteurs de légumes italiens apprennent à leurs dépens ce qu’est un marché commun : quand, à cause d’une bactérie mortelle à Hambourg, ils ne peuvent plus exporter leurs produits en Russie. La France défend l’énergie nucléaire à la frontière allemande, tandis que les Allemands, eux, préfèrent fabriquer des éoliennes. Dans l’espace Schengen, les Danois construisent des préfabriqués pour abriter de tout nouveaux douaniers, parce que désormais, c’est de l’étranger que vient tout le mal. Et qui va expliquer à un ouvrier slovaque que sa retraite est aujourd’hui fichue parce que ces fraudeurs de Grecs veulent continuer à se la couler douce dès l'âge de 53 ans?
Faut-il vraiment s’étonner si les discours sans pitié contre l’UE récoltent en ce moment près de 20% des voix ? Ce qui est énigmatique, en revanche, c’est que la proportion de ceux qui souhaiteraient en finir tout de suite reste si faible. Et si l’Europe suscite encore l’approbation, c’est uniquement à cause du passé.

Le citoyen complètement oublié

L’UE, avec ses ordonnances toujours plus nombreuses, qui ont imperceptiblement lié tous les Etats membres, est passée par la porte de derrière. Au début, il n’était question que d’acier et de la ferraille issue de la guerre. Puis, d’un accord sur la production de charbon. Ensuite, sur la production d’électricité. Après, il a été question d’agriculture. De douanes. De justice. De contrôles aux frontières. Et de monnaie. Et maintenant, de tout. Sans qu’un seul citoyen ait jamais été consulté.
Ce n’est pas par hasard qu’Hans Magnus Enzensberger a fait de l’Europe – le "doux monstre de Bruxelles" – sa nouvelle tête de Turc. Loin de déplorer les conquêtes civilisatrices de l’Union européenne, Enzensberger voit dans Bruxelles – son centre bureaucratique – un malfaiteur menaçant par sa folie centralisatrice et réglementatrice de transformer le continent en véritable "maison de correction".
Représentant de la première génération européenne à vivre en paix, il brise avec délectation un certain tabou en s’en prenant ainsi directement à l’Union européenne. Cela en fait-il un allié des Geert Wilders, Kaczynski, Le Pen et tutti quanti ? Evidemment non. Le "cancer" du "populisme de droite" dont parlent tous les médias n’est en réalité rien d’autre qu’une idéologie confuse et xénophobe ne reposant que sur un seul véritable ressort : celui du nationalisme.
Instinctivement, des masses d’électeurs européens se tournent aujourd’hui vers l’ordre ancien parce que le nouveau ne fonctionne pas.
Voilà le véritable problème. L’Europe est, selon la formule d’Enzensberger, un phénomène "post-démocratique". Dans la plupart des pays membres, le projet européen était la seule solution possible, si bien que ni la création de la CEE, ni les accords de Schengen ou l’introduction de l’euro n’ont été soumis à un vote. La richesse était comme automatiquement créée par le biais de l’ouverture des marchés et des aides structurelles, si bien que même des nations aussi fières que la Hongrie et la Pologne ont accepté sans rechigner de céder leur souveraineté fraîchement acquise à l’autorité de Bruxelles.

Il faut stopper la machine trop complexe de Bruxelles

Même avec la meilleure volonté de la classe politique, tout cela n’aurait jamais pu fonctionner car il manque à l’Europe quelque chose de fondamental : une opinion publique commune. L’Union européenne nous apporte la preuve que la démocratie ne peut exister sans un discours commun.
Les membres du Parlement européen, qui n’a de toute manière pas grand-chose à dire, sont élus dans le cadre de campagnes nationales. Les informations, les personnes, les traditions et les manières de s’affronter sont restées purement nationales. C’est pourquoi les majorités de droite comme de gauche se trouvent régulièrement en butte aux partis établis dès lors qu’il s’agit de l’Europe. La majorité des élites internationales, polyglottes et liées entre elles, ne suit tout simplement pas.
L’Europe doit alors être limitée à ce que les Européens arrivent encore à comprendre et à sanctionner lors des élections. L’Europe ne doit pas être la machine à lobbies et à compromis qu’est devenue Bruxelles et dont sont issues 80% de nos lois. L’Europe doit seulement être une Europe des démocraties.
Aujourd’hui, nous ne pouvons aider l’Europe qu’en stoppant la machine trop complexe [de Bruxelles]. Tous les mécanismes de prise de décision doivent redevenir démocratiques, puis nationaux, régionaux ou locaux. Tout élargissement doit être arrêté et l’euro va de toute façon disparaître.
D’ailleurs, il existe un pays qui a déjà achevé sa phase nationale et s’en remet entièrement à l’Union européenne. Il s’agit, et ce n’est pas un hasard, du plus européen de tous les pays : la Belgique. La démocratie s’y est noyée dans un marchandage d’intérêts régionaux. On y tient des élections mais il n’y plus de gouvernement. Les fonctionnaires s’occupent des affaires courantes sous la bride de l’Europe, sans grand bouleversement. La souveraineté du peuple et la politique ne veulent à proprement parler plus rien dire. Si nous voulons éviter ce sort, l’Europe n’a pas d’autre choix que de retourner à la nation et à la démocratie.

Les angoisses de la démocratie

C’est toujours pareil avec les révolutions ! On se rassemble, on s’encourage, on tire, on pousse, et parfois le dictateur tombe du piédestal qu’il pensait éternel. Puis viennent les questions. Comment et à quel rythme bâtir une démocratie malgré les séquelles de la dictature qui vous transforment le changement en une éreintante course à handicap ?

La Tunisie, encore étonnée de passer d’un système unanimiste à un système pluraliste, se mesure à deux dangers : d’un côté un scénario à l’iranienne, avec confiscation de la Révolution par les islamistes, de l’autre le retour d’anciens cadres du RCD (ex-parti au pouvoir), qui cherchent à rebondir comme d’anciens dirigeants communistes l’ont fait en Roumanie après 1989.

Contrairement à la Pologne qui a pu s’appuyer sur les dirigeants du très puissant syndicat Solidarnosc, aucune force constituée n’a structuré et organisé la révolution tunisienne. Ce fut un soulèvement populaire considérable, mais cela explique qu’aujourd’hui chacun cherche sa légitimité. Tout le monde se dit et se pense dépositaire de la volonté du peuple…

Heureusement pour elle, la Tunisie ne manque pas d’hommes et des femmes de haut niveau. Encore faut-il que les solides expertises acquises dans l’exercice d’une profession soient transposées dans la sphère politique. Or en Tunisie comme en France, un chef d’entreprise renommé ne devient pas automatiquement un bon ministre de même qu’un juriste brillant ne fait pas forcément un parlementaire de poids.

Derrière le débat technique lié à la date des premières élections pluralistes se profilent les enjeux politiques. L’Assemblée constituante attendue le 23 octobre aura toute latitude, à commencer par le choix du pouvoir exécutif : celui-ci sera responsable devant elle et elle pourra le censurer. Après vingt-trois ans de dictature Ben Ali, on comprend que la Tunisie se méfie farouchement d’un nouveau pouvoir exécutif personnalisé et qu’elle privilégie un régime plus parlementaire que présidentiel.

Qu’on regarde du côté des principes ou du côté des hommes, c’est, dans tous les sens du terme, une jeune nation qui reste à bâtir entre une Algérie sous influence de l’armée, un Maroc imprégné de culture monarchique et une Libye en guerre. Le concours apporté aux démocrates tunisiens ne doit pas faiblir au fil du temps car ce qui se construira dans ce pays d’ici à la fin de l’année sera décisif pour l’avenir de ce remarquable mais encore incertain « printemps arabe ».