TOUT EST DIT

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vendredi 3 juin 2011

L’affaire Luc Ferry

Mettons les choses au point : je connais l’écrivain et philosophe Luc Ferry depuis de longues années et nous sommes devenus amis. J’admire son intelligence et sa finesse et c’est un esprit trop libre pour être resté longtemps dans un gouvernement. Mais je trouve qu’il a fait une grosse erreur en évoquant au journal de Canal+ un ancien ministre qui se serait fait prendre à Marrakech dans une partouze avec des petits garçons. Luc Ferry ajoutant que l’affaire lui a été racontée par les plus hautes autorités de l’Etat, notamment un ancien Premier ministre, mais qu’il ne pouvait citer le nom du ministre concerné de crainte d’être lui-même poursuivi en justice.
Luc Ferry aurait dû méditer l’exemple de Robespierre à la veille du 9 Thermidor, annonçant qu’il allait faire tomber des têtes sans préciser lesquelles.
Luc Ferry en a trop dit ou pas assez sur ce qu’il sait de l’affaire en question. Pour l’heure, ses déclarations constituent une forme de dénonciation anonyme dans un pays qui en a trop connu. S’il savait des choses précises, il aurait dû les transmettre à la justice de l’époque. S’il s’est tu, mieux valait continuer de se taire où tout dire. La pire des solutions, c’est le « je sais tout mais je ne peux pas vous le dire » qui ne peut qu’alimenter les ragots et le discrédit de la classe politique ; déjà plusieurs noms circulent partout. Il faut que la transparence et la libération de la parole des victimes permettent de briser le silence mais pas n’importe comment.
Luc Ferry aurait dû tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de s’exprimer.

Secouons l’Europe !

Avec nos Etats endettés et nos institutions internationales malmenées, nul ne sait ce que l’avenir nous réserve. Pourtant, la crise devrait nous inspirer un nouveau mode de pensée, estime un économiste tchèque. 

Le dernier album de la punkette éthérée PJ Harvey, encensé par la critique, est baptisé Let England Shake [Que l’Angleterre tremble]. Le dernier ouvrage du "plus dangereux des philosophes actuels", le philosophe slovène de gauche Slavoj Žižek, s’intitule pour sa part Vivre la fin des temps (Flammarion, 2011).
Tous deux sortent au moment où le monde de la finance est dans la tourmente. Mais il n’est pas le seul. Les structures politiques, nationales et, enfin, supranationales, comme l’Union européenne et le FMI, chancellent également. Nos grandes certitudes vacillent. Ajoutez à cela les secousses qui agitent le monde arabe et le tableau est quasi complet. Ce qui est étrange, c’est de voir les experts et les élites de la société aussi démunis face à cette situation.
Ce qui semble évident, c’est que nous sommes aux prises avec un démon dont nous ne sommes pas vraiment sûrs du nom – et nous n’avons aucune idée de la façon de le terrasser. En un mot, le monde tremble, et rien n’indique pour l’heure que les secousses s’apaiseront dans un futur proche. Comme pour la crise financière, aucun expert n’avait prévu la révolution arabe. Encore aujourd’hui, nous voyons des articles d’analyse maladroits ressassant le même refrain: comment avons-nous pu être aussi aveugles?
Tout ce que nous voyons, en vérité, c’est que nous n’en voyons pas le bout. Si le monde lui-même n’est pas menacé de disparition (contrairement à ce que l’on a voulu nous faire croire ce mois-ci), le système que nous connaissons l’est.
Bien que Tomáš Halik [prêtre catholique tchèque, intellectuel et sociologue] nous ait appris que ce qui ne tremblait pas n’était pas robuste, la question demeure: nos racines sont-elles vraiment solides? Où se situe le seuil de résistance de notre système et quels chocs peut-il encaisser avant de voler en éclats? Des secousses mineures sont supportables, et font même partie de la vie et de tout système. Cependant, les dernières secousses enregistrées ne sauraient être qualifiées de "mineures". Le tremblement, ou plutôt l’implosion inflationniste, est même palpable dans les domaines de la philosophie et des sciences sociales.

Nous sommes tous garants de la dette grecque

L’école de la déconstruction postmoderne, me semble-t-il, a fait beaucoup de tort à la philosophie et, d’une certaine manière, s’est auto-déconstruite. Le philosophe est aujourd’hui tellement loin de la vie réelle et tellement immergé dans une réalité simulée (modélisée) qu’il n’a souvent rien de constructif à dire sur les événements en cours. Quand les vraies grandes questions arrivent sur le tapis, eh bien, il ne se passe rien, les puits de science laissent les politiques le bec dans l’eau.
La question, au fond, est de savoir comment nommer le système en vigueur. Le concept de dette nationale s’est écroulé car nous savons, depuis belle lurette maintenant, que la dette grecque n’est pas seulement la dette grecque. À partir du moment où l’Europe s’est mise à trembler, la dette grecque est devenue la dette allemande, et la dette française – en un mot, notre dette à tous, et dont nous sommes tous les garants. Finalement, même les prêts souscrits auprès d’établissements de crédit d’États souverains sont aujourd’hui tacitement garantis par tous les autres pays.
Nous vivons avec un concept de faillite qui est lui-même en faillite – autrement dit, dans une situation dans laquelle la faillite n’est admise que du bout des lèvres, car l’admettre ouvertement aurait des répercussions dévastatrices sur les autres pays. Ce qui était séparé autrefois (comme l’Europe et la Chine) est aujourd’hui lié, et de manière quasiment indissoluble. Des pays lointains sont aujourd’hui voisins grâce à la mondialisation, ce qui a ses avantages, souvent portés aux nues, mais aussi certains inconvénients – car quand nous faisons naufrage, c’est tous ensemble. Cela ne s’est jamais produit auparavant dans l’histoire. Le résultat est que notre système de responsabilité et de garanties mutuelles doit être revu. Comment? C’est précisément l’enjeu.
Ou bien l’Europe se serrera les coudes et luttera de concert, État ou pas État, dette ou pas dette, ou bien le monde se déconnectera du réseau et fera un pas en arrière dans la mondialisation. Le scénario dans lequel un État laisse s’accumuler ses dettes tout en se soustrayant à ses responsabilités est donc intenable. Jusqu’à présent, ce sont des économies de taille modeste qui ont fait faillite.
C’est une chance, mais ce ne sera sans doute pas toujours le cas à l’avenir. Et, dans cette éventualité, il serait judicieux de prévoir un plan B ou un plan C européen – ce que, j’en ai peur, nos responsables politiques n’ont pas dans leurs cartons. Je serais curieux de voir leur mine déconfite quand sonnera l’heure et qu’il ne sera alors plus temps d’agir.

Le bon plan de la BCE pour sauver l'Europe

L'ex-trader Marc Fiorentino apporte son regard éclairé sur la stratégie de la Banque Centrale Européenne confronté à un problème majeur : le risque de la propagation de la crise grecque aux autres pays de la zone euro dans le collimateur des marchés : de l'Irlande au Portugal en passant par la Belgique, l'Espagne et même l'Italie.

La Banque centrale européenne (BCE) est montée au créneau dans les derniers jours. Avec une véhémence qu'on ne lui connaissait plus depuis longtemps. Qu'elle soit soft ou hard, la BCE ne veut pas de restructuration de la dette grecque. Jean-Claude Trichet l'avait affirmé haut et fort. Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France et vice-président de la BCE, a franchi un pas dans l'escalade verbale. Il a parlé d'un "scénario de l'horreur".

On se demande : "Pourquoi tant de haine ?" Pourquoi l'évocation d'une restructuration, même soft, de la dette grecque, une restructuration que tous, y compris la BCE, savent inéluctable provoque-t-elle une telle levée de boucliers ? Les Allemands veulent la restructuration, les Grecs veulent une restructuration pour bénéficier d'une bouffée d'oxygène, les pays de l'Union européenne veulent une restructuration mais la BCE n'en veut pas. En fait, ce n'est pas tout à fait exact. Si on lit entre les lignes, on s'aperçoit que la BCE ne veut plus d'une solution partielle.

Restructurer la dette grecque seulement serait une rustine de plus

Depuis l'annonce du plan d'aide à la Grèce, en février 2010, soit depuis près de seize mois, on passe notre temps à colmater les brèches. Les unes après les autres. Toujours avec un temps de retard. Toujours poussés par les marchés. Sans vision globale. Sans projet d'ensemble. D'où la propagation de la crise grecque à l'Irlande puis au Portugal et plus récemment à la Belgique, à l'Espagne et même à l'Italie.

Restructurer la dette grecque seulement serait une rustine de plus. Un pas supplémentaire franchi sous la pression et qui déclencherait une nouvelle onde de choc. Car si on restructure la dette grecque, pourquoi ne pas restructurer la dette irlandaise, la dette portugaise et même la dette espagnole ? Et la BCE pose une question essentielle : quid des banques ?

L'inévitable restructuration des dettes des pays "périphériques"

Certes, la restructuration de la dette grecque n'aurait qu'un impact limité sur le bilan des banques européennes mais on doit, pour une fois, tenter de prévoir le coup d'après. Les banques européennes peuvent-elles absorber toutes les restructurations en cascade que provoquera inexorablement la restructuration de la dette grecque ? Et pour la BCE, la réponse est non.

Je ne pense pas que la BCE soit opposée au principe de la restructuration des dettes périphériques. Elle est inévitable. Mais la BCE voudrait probablement qu'on envisage un vrai plan de sauvetage européen dans lequel on prévoirait déjà les mesures d'urgence nécessaires pour que le système bancaire européen résiste au choc. Comme un assouplissement des ratios de capitaux propres.

Cessons la politique des petits pas

On a bien fait sauter momentanément les critères de Maastricht pour les États, en raison de la crise, on peut très bien suspendre momentanément tous les Bâle et les Solvency le temps que les banques surmontent le réajustement des dettes européennes. Il est temps, et je pense que c'est le message de la BCE, qu'on arrête cette politique des petits pas... en arrière et qu'on adopte une véritable refonte en profondeur. Allongement des maturités des dettes, abaissement des taux d'intérêt sur 3 à 5 ans, émission d'eurobonds pour financer les besoins à court terme : la « road map » est claire. Il ne manque plus qu'une volonté européenne commune.

Le ministère grec des Finances bloqué par des manifestants

Alors que la Grèce attend ce vendredi une annonce cruciale pour le pays sur un nouveau plan d'aide international assorti de mesures de rigueur, des sympathisants communistes se sont installés devant le ministère des Finances grec, en empêchant l'entrée des employés.

Marquer l'opinion avec des actions spectaculaires. C'est apparemment la tactique choisie par le front syndical communiste grec - le Pame - alors que la Grèce attend pour ce vendredi de savoir quelles nouvelles mesures de rigueur le gouvernement va annoncer pour satisfaire aux exigences de L'Union européenne et du FMI.
Des militants de cette organisation ont déployé ce vendredi matin une banderole gigantesque aux derniers étages du ministère, situé sur la place centrale de Syntagma, en face du Parlement. Ils en bloquent également l'entrée aux employés.
"Nous avons le devoir de lutter pour nos enfants", proclamait un enregistrement sonore, installé sur la terrasse du ministère, qui appelait également à la grève générale du 15 juin, annoncée jeudi par les deux centrales du pays, du privé (GSEE) et du public (Adedy). "Depuis l'aube aujourd'hui, les forces du Pame (Front syndical communiste, NDR), ont occupé symboliquement le ministère des Finances appelant les travailleurs à se soulever, à lutter contre une vague de mesures antipopulaires du gouvernement", a indiqué un communiqué de ce syndicat.
Selon la police, les employés du ministère n'ont pas pu entrer dans le ministère, qui était entouré d'un cordon policier. "Nous allons rester sur place jusqu'au soir", a indiqué à l'AFP Yiorgos Perros, un des responsables du Pame, présent sur les lieux avec une cinquantaine des militants. Le Pame a annoncé une manifestation vendredi soir dans le centre d'Athènes et un défilé jusqu'à Syntagma.
Par ailleurs, sur cette place campent depuis dix jours des centaines de personnes appartenant à la mouvance des "indignés", sur le modèle espagnol de la Puerta del Sol, qui attirent quotidiennement des milliers d'Athéniens tous les soirs en scandant des slogans hostiles aux hommes politiques.
La tension ne cesse de monter en Grèce ces derniers jours alors que le gouvernement socialiste s'apprête à durcir la rigueur imposée depuis l'année dernière sous pression de l'UE et du FMI qui doivent annoncer vendredi un accord sur une aide supplémentaire au pays, selon la presse grecque. Jeudi soir, des dizaines de manifestants ont lancé injures et projectiles à Athènes contre le porte-parole du gouvernement, Georges Pétalotis, qui se rendait à une réunion socialiste dans un centre pour personnes âgées.

L'immense courage des Syriens

Comme tous les vendredis, depuis le 15 mars, des milliers de Syriens vont descendre aujourd'hui dans les rues pour manifester leur hostilité au régime de Bachar al-Assad. En sortant de chez eux ce matin, ils ne savent pas s'ils reviendront ce soir. La plupart laissent leur téléphone portable à la maison, pour ne pas être repérés par la police. Ce n'est pas un réseau qui se soulève, c'est tout un peuple. Lucide. Les jeunes Syriens savent parfaitement les horreurs dont ce régime est capable. Leur courage n'en est que plus grand et plus émouvant.

Des horreurs, en quarante-huit ans d'état d'urgence, les Syriens n'en ont que trop vu. Derrière le quotidien d'une surveillance policière systématique, d'authentiques massacres ont été perpétrés. En février 1982, notamment, à Hama, dans l'ouest du pays. Un soulèvement y fut réprimé dans le sang, à coups de chars et d'artillerie. Aucun bilan précis n'existe, mais le chiffre de 15 000 morts est considéré unanimement comme une estimation basse.

Depuis les premiers soulèvements, le spectre d'Hama hante tous les esprits. Lorsque les habitants des villages situés entre la ville de Deraa et la frontière israélienne ont vu, fin avril, des chars arriver de Damas, ils ont, un instant, pensé qu'ils se dirigeaient vers le Golan, vers l'ennemi. Lorsqu'ils ont compris que le régime les avaient envoyés contre eux, pour rétablir l'ordre, le souvenir de Hama a immédiatement affleuré.

En dix semaines, plus de 1 100 manifestants auraient été tués et 10 000 arrêtés. Cela n'a pas stoppé le mouvement. À chaque manifestation, des tireurs d'élite placés sur les hauteurs tirent sans sommation. Prenant pour cible y compris des enfants. Les images du corps mutilé d'un adolescent de 13 ans, torturé fin avril près de Deraa, circulent depuis quelques jours sur Internet et ont été brandies hier lors de nouvelles manifestations meurtrières. Elles donnent la mesure de la répression en cours.

On disait Bachar plus libéral que son père Hafez. Jusqu'en janvier, de nombreux Syriens voulaient encore le croire. Les violences en cours démentent cet espoir. L'amnistie décrétée mardi, suivie hier de la libération de centaines de prisonniers politiques, arrive bien tard. Trop tard sans doute. Car plus personne ne croit à la volonté réformatrice du régime.

Depuis des décennies, la dynastie Assad invoque le facteur de stabilité pour justifier sa permanence. Stabilité intérieure, dans un pays composite et multiconfessionnel. L'après-Assad fait d'ailleurs peur aux minorités, notamment chrétienne, qui redoutent un scénario à l'irakienne. Stabilité régionale, la Syrie étant frontalière de l'Iran, de l'Irak, de la Turquie, du Liban, d'Israël.

Au nom de cette stabilité, Paris et Washington ont tout fait pour renouer avec Damas. En vain. Tristement inutile, la présence d'Assad au défilé du 14 juillet 2008 à Paris n'a pas gommé les réflexes tortionnaires de ses milices. On peut penser que les sanctions internationales n'auront pas plus d'effet. C'est des forces d'opposition, réunies actuellement en Turquie, qu'une alternative politique peut venir.

Car une intervention militaire, comme en Libye, est exclue. Ce serait ouvrir la boîte de Pandore. Elle est même impensable, compte tenu du véto russe. Les Syriens le savent et comptent sur leurs propres forces. Ils espèrent que l'armée va finir par craquer. Deux cents soldats auraient été abattus pour avoir refusé de tirer sur la foule. Le signe d'un régime aux abois.

Grèce. Des militants communistes bloquent l’accès au ministère des Finances

Des militants communistes ont bloqué vendredi l’entrée du ministère grec des Finances, où se déroulent des négociations sur le sauvetage financier du pays. Des activistes du Pame, un syndicat communiste et non-violent, ont déployé sur cinq étages du bâtiment une large banderole, sur laquelle était écrit : « Organise-toi et combats pour la révolution - Grève Générale ».
Contre la corruption et la mauvaise gestion économique du pays
Il était impossible d’accéder au ministère, situé dans le centre d’Athènes. Dans un communiqué, le Pame affirme qu’il est du devoir des Grecs « de faire obstacle au projet de transformer les travailleurs en esclaves modernes. » Le ministère des Finances est situé place Syntagma, où des manifestants se rassemblent tous les soirs pour protester contre la corruption et la mauvaise gestion économique du pays.
Des négociations s’y déroulent depuis un mois entre le gouvernement grec et des inspecteurs de la troïka Union européenne-Fonds monétaire international-Banque centrale européenne. La Grèce a accepté jeudi de prendre de nouvelles mesures d’austérité budgétaire pour 2011, représentant 6,4 milliards d’euros, dont une hausse des impôts ainsi qu’une révision des exonérations de l’impôt sur le revenu, a-t-on appris de source gouvernementale grecque.
Les discussions sur le programme budgétaire à moyen terme de la Grèce devraient s’achever vendredi et la troïka devrait publier un communiqué dans la journée.

Histoires de France

Depuis de Gaulle au balcon de l’Hôtel de ville, en 1967, l’air de Montréal est décidément une source inépuisable d’inspiration pour notre personnel politique hexagonal. En y promettant de changer le nom du ministère des affaires étrangères s’il était élu à la présidence de la République, Jean-Louis Borloo a fait un pas original dans sa course lente vers l’Elysée. Quelle meilleure garantie de sa détermination à concourir pouvait-il offrir que cette profession de foi touchant à un domaine réservé du chef de l’Etat ?

On ne l’attendait guère sur ce territoire-là, diplomatique, où sa figure peu conformiste devra trouver sa place si le chef du Parti radical veut acquérir la fameuse et insaisissable «dimension présidentielle» qui lui manquerait encore. Borloo, on le sait, faillit être arrimé au quai d’Orsay en novembre dernier quand Nicolas Sarkozy voulut l’empêcher, sans succès, de prendre le large. Il préféra, en effet, mettre tout de suite le cap sur 2012, mais ce romantique n’a pas perdu de vue la symbolique de la prestigieuse maison.

Le candidat présumé veut en faire la figure de proue d’une France ouverte sur le monde. Au troisième millénaire, les affaires de la planète ne sauraient être «étrangères» à un pays et à un peuple dont la vocation universaliste se confond avec son identité depuis le siècle des lumières et la Révolution. Si le message n’a rien d’étonnant dans la bouche d’un défenseur de l’environnement, qui ne peut penser qu’à l’échelle planétaire, il détonne dans le climat politique frileux de 2011. Quand l’UMP ne cesse d’envoyer des signaux de repli à une nation transie, son ancien allié l’invite au contraire à croire en elle-même pour affronter la mondialisation avec générosité, et avec une ardeur... gaulliste.

Si on les a bien entendus tous les deux, M. Borloo doit beaucoup souffrir en écoutant M. Guéant, défenseur inlassable d’une forteresse France qui serait assiégée par l’étranger. Le ministre le plus proche de Nicolas Sarkozy ne serait pas loin de la voir rongée de l’intérieur par l’immigration - contre laquelle il faudrait la protéger à tout prix - confortant ainsi les thèses de la droite «populaire» du parti présidentiel. A tel point que la proposition d’interdire la binationalité présentée par Marine Le Pen semble trouver aujourd’hui un écho favorable jusque dans l’oreille de Jean-François Copé quand hier elle aurait été jugée marginale, sinon régressive, en tout cas injustement stigmatisante pour quatre millions de Français, dans l’ancienne famille politique de Jacques Chirac.

Jean-Louis Borloo, qui se présente aussi en héritier de la bienveillance radicale de l’ancien président, était resté bien silencieux après le discours de Grenoble, mais n’en pensait pas moins. Libéré, il semble maintenant décidé à marquer sa différence sur ce terrain sensible.


Luc Ferry s'explique et dénonce "le bal des faux-culs"




Le commentaire politique de Christophe Barbier