TOUT EST DIT

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ǝʇêʇ ɐן ɹns ǝɥɔɹɐɯ ǝɔuɐɹɟ ɐן ʇuǝɯɯoɔ ùO

lundi 16 mai 2011

Les mensonges vont tuer l’euro

En se réunissant secrètement pour parler de la crise grecque, le 6 mai, certains ministres des Finances de l’Union européenne ont donné le coup de grâce à la confiance que les citoyens avaient placée dans leurs gouvernements. Ce n’est pas comme cela que nous sauverons l’euro, prévient la Süddeutsche Zeitung. 
Rarement les responsables politiques européens se seront comportés de manière aussi peu responsable que vendredi 6 mai. À Berlin, Bruxelles, Rome, Paris et Luxembourg, on s’est tu, on a trompé le monde, quand on n’a pas ouvertement menti. Et tout cela, dans le seul but de garder secrète une réunion de quelques ministres des finances, pendant laquelle – comme on l’apprendra par la suite – on n’aura pris aucune décision et l’on n’aura fait qu’échanger quelques vues sur la situation de la Grèce, qui n’en finit plus de s’enfoncer dans la crise.
En l’espace de quelques heures, les gouvernements des pays de la zone euro sont parvenus à ruiner le peu de confiance que les citoyens plaçaient encore dans leurs plans de sauvetage. Qui croira désormais les déclarations selon lesquelles les Grecs n’ont aucune envie de sortir de l’union monétaire, quand on sait que c’est le président de l’Eurogroupe, le premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker, qui était à la tête de cette duperie ? Il commence par nier par écrit que les ministres des finances se sont réunis à Luxembourg. Puis il proclame publiquement sa confiance envers la Grèce. Et enfin, l’on apprend qu’il a invité personnellement les ministres en question.
Tout citoyen qui s’intéresse un tant soit peu à l’Union se demandera désormais, avec étonnement ou agacement, quel est le degré de gravité réel de la crise grecque. Le pays est-il à deux doigts de la faillite en dépit de toutes les aides et des discours discordants ? Cela voudrait dire qu’une autre promesse des gouvernants a fait long feu : celle qui voulait que les Hellènes remboursent l’intégralité des crédits qui leur ont été accordés, intérêts compris. Or, s’ils ne paient pas, c’est le contribuable [européen] qui couvrira les dégâts.

On a menti à dessein au grand public

Ce n’est pas la première fois que les citoyens se sentent floués. Déjà, voilà un an, alors que la crise de la dette se faisait de plus en plus menaçante en Grèce et que tout portait à croire qu’Athènes avait besoin de l’aide étrangère, les responsables politiques de Berlin, Bruxelles, et d’autres capitales minimisaient la gravité de la situation. In extremis, ils ont garanti une enveloppe de 110 milliards d’euro de crédits.
Le sauvetage de l’Irlande a suivi le même type de scénario. Pour commencer, les grands pays de la zone euro n’ont pas voulu admettre que le gouvernement de Dublin n’était plus capable de gérer seul la situation. Et puis, tout à coup, on a entrepris de négocier un plan de sauvetage. Enfin, cela a été le tour du Portugal. Le pays se serre la ceinture, le pays réforme, la situation est tendue, certes, mais non désespérée, nous a-t-on servi une fois de plus. Et puis l’on a appris que Lisbonne n’était même pas en mesure de payer les salaires de ses fonctionnaires – et le pays s’est abrité derrière l’aide internationale.

Un mensonge sans explication ni excuses

Pour être honnêtes, reconnaissons que les pays de la zone euro, la Banque centrale européenne et la Commission ont été – au début de la crise tout au moins – dépassés par les événements, et ont peut-être longtemps cru, en effet, que ces pays s’en sortiraient sans aide extérieure. Mais, depuis le 6 mai, les choses ont changé. Ce vendredi là, on a menti à dessein au grand public. On en a la preuve, pour la première fois. Et deux jours plus tard, toujours ni explication, ni excuses pour ce mensonge. Les responsables politiques concernés gardent le silence.
S’ils sortent indemnes de cette affaire, l’union économique et monétaire en sortira en revanche affaiblie. Car cette tromperie apporte de l’eau au moulin de tous ceux qui aimeraient se débarrasser de l’euro. Et enflamme l’imagination des contribuables qui doutent de revoir un jour la couleur de l’argent qu’ils ont prêtés.
La scène politique peut peut-être ignorer encore les états d’âmes des citoyens, mais les responsables ne pourront pas échapper à la loi des marchés. Pendant la grossière erreur de communication du 6 mai, l’euro perdait encore  jusqu’à deux centimes sur le dollar, et les investisseurs se réfugiaient sur les valeurs américaines. Une chose est sûre : pour faire revenir la confiance, la duperie délibérée du 6 mai doit avoir des conséquences.


Vu d'Athènes

Gardons notre sang froid

À Athènes, les signes d’une nouvelle période de turbulences financières étaient évidents depuis quelques temps . "On pouvait le lire dans la presse internationale et on le comprenait en suivant la pression constante des marchés : le problème grec serait revenu sur le devant de la scène et il aurait demandé des décisions politiques et économiques radicales, bien plus fortes que celles adoptées il y a un an, avec le plan de rigueur", écrit ainsi Antonis Karakousis dans le quotidien To Vima.
Gardons notre sang froid"Rien que la publication, le 6 mai après-midi sur le site du magazine allemand Der Spiegel, d'un article expliquant que la Grèce allait demander sa sortie de la zone euro, a suffi à placer le pays en état d'urgence. Tout montre que nous avons atteint un point de non retour et que la suite des évènements dépendra de la capacité du gouvernement, de la classe politique en général et de la société, à se tenir prêts a affronter la situation. L'attaque du magazine allemand et ses allégations révèlent les intentions de certains Etats membres en ces heures cruciales. Les deux prochains mois seront sans doute marqués par la pression. Il faudra faire preuve de calme, de force et de sérénité".

La justice ordonne l'incarcération de DSK

La justice américaine a ordonné, lundi 16 mai, l'incarcération de Dominique Strauss-Kahn et a refusé de le libérer contre la caution d'un million de dollars proposée par ses avocats. Le patron du Fonds monétaire international (FMI) comparaissait, deux jours après son arrestation, devant le tribunal pénal de New York pour son implication dans une affaire de crime sexuel contre une femme de chambre dans un hôtel de Manhattan.

La juge Melissa Jackson a décidé de suivre les réquisitions du procureur, qui craignait une fuite du directeur du FMI en cas de libération conditionnelle.
De son côté, le parquet a fait valoir que les rapports préliminaires des experts corroborent les accusations de la plaignante et que si l'accusé retournait en France, il ne serait pas possible de le faire revenir aux Etats-Unis. Il a aussi indiqué qu'une enquête était ouverte sur une autre affaire sexuelle dans laquelle Dominique Strauss-Kah aurait pu être impliqué.
"LA BATAILLE NE FAIT QUE COMMENCER"

Pendant l'audience, la défense du patron du FMI a tenté de démontrer que son client n'avait pas cherché à fuir la justice en se rendant à l'aéroport JFK de New York, samedi : "J'ai un fichier électronique qui montre que son itinéraire était prévu depuis quelques jours", a annoncé son avocat à la barre. "Sa présence dans cet avion est cohérente. Ce n'est pas un homme qui fuit (...), c'est un homme qui avait prévu des rendez-vous à l'avance", a-t-il ajouté.
A la sortie du tribunal, l'un des avocats de Dominique Strauss-Kahn, Benjamin Brafman, s'est dit "déçu par la décision du tribunal" de ne pas accorder la liberté sous caution à son client, mais a déclaré aux journalistes que "la bataille ne [faisait] que commencer". "L'intention de M. Strauss-Kahn est d'essayer de rétablir son nom et sa réputation" a-t-il conclu.
La prochaine comparution devant la justice de DSK a été fixée au vendredi 20 mai, a indiqué la juge new-yorkaise qui a prononcé son incarcération.

Sans “DSK”, Athènes se sent encore plus seule

Au moment où la Grèce s’apprête à négocier un nouveau prêt afin de sortir de la crise, le départ de Dominique Strauss-Kahn du FMI suscite l’inquiétude car, écrit Eleftherotypia, il était parmi ceux qui avaient le mieux compris le problème grec. 

L’un des enjeux majeurs de ce qui s’est passé à New York, c’est l’effet sur la zone euro et surtout, sur le problème grec. Les experts s’attendent en effet à ce que celui-ci se complique et "DSK" [Dominique Strauss-Kahn] était un des dirigeants internationaux qui, en dehors de l’Europe, connaissait le mieux les enjeux et les problèmes européens et en particulier le cas grec.
Il a été le premier a avoir accepté, dès l’année dernière, la demande grecque d’aide financière, avant que les européens ne s’y résolvent, après maintes négociations avec l’Allemagne. Il avait tendance à mieux comprendre le problème de la Grèce (et des pays du Sud en général), contrairement à de nombreux pays européens du Nord.
Dimanche 15 mai, il devait rencontrer la chancelière Angela Merkel, et lui aurait demandé, comme le confirment plusieurs sources, de donner plus de temps à la Grèce pour rembourser sa dette. Il était le premier à avoir soutenu le prolongement du remboursement de la dette grecque. Cette rencontre n’aura jamais lieu. Il devait assister au conseil des ministres européens des Finances de l’eurozone le lendemain, dans le but de trouver des solutions en vue du sommet des Vingt-Sept de juin et de prendre de graves décision. Il ne sera pas au conseil.
Le fait que "DSK" soit européen et qu’il allait probablement être candidat à l’élection présidentielle française l’a forcé à montrer plus d’intérêt à l’Europe et aux pays faibles, plus que celui dont aurait fait preuve un asiatique.
Cette tragédie soudaine a ses conséquences en Grèce, puisqu’il y a encore beaucoup de choses en suspens : les négociations avec la troïka [les experts de la Commission européenne, de la BCE et du FMI]  pour le versement de la cinquième tranche du prêt de 110 milliards d’euros continuent. Les discussions aussi pour l’octroi d’un nouveau prêt à la Grèce viennent à peine de commencer. Et elles vont débuter sans la présence d’un joueur fondamental, tel que l’était "DSK". Le temps nous dira si ce qui s’est passé à l’hôtel Sofitel de New York sera décisif pour la suite du "match".

Vu de Lisbonne

Le Portugal redoute une austérité plus sévère

Le Portugal redoute une austérité plus sévère
"Le Portugal et la Grèce vont perdre la vision flexible qui était aujourd'hui celle du FMI", écrit le quotidien lisboète Público qui craint le départ très probable du directeur général du FMI Dominique Strauss-kahn suite aux accusations de tentative de viol portées à son encontre. Si son absence à la réunion des ministres européens des Finances, le 16 mai, n'affectera pas directement le programme d'aide au Portugal, Público estime toutefois que le FMI pourrait désormais avoir des exigences plus dures en matières d'austérité budgétaire. Par ailleurs, poursuit le quotidien, il est peu probable que le prochain chef du FMI soit un Européen. Ce qui veut dire qu'il n'aura "ni l'implication ni la vision de l'actuel [directeur] pour résoudre les problèmes européens", déplore un diplomate européen interwievé par le journal.  Pour Público, "la chute abrupte de DSK, l'un des hommes les plus puissants du monde laisse un vide inquiétant". Il était un allié très actif de l'Europe, conclut le quotidien, de même que le défenseur acharné des économies les plus fragiles, celui qui arrivait à persuader les capitales les plus réticentes de continuer à alimenter les plans de sauvetages.


Exit le mécano de la crise

L’arrestation du patron du FMI prive les Européens d'un allié précieux sur la scène internationale. Dominique Strauss-Kahn avait en effet su mâtiner de social les interventions du Fonds auprès des Etats frappés par la crise et faire peser l'Europe auprès d'une institution souvent perçue comme le fer de lance du néo-libéralisme. 
Un vide immense s’ouvre au  sommet du Fond monétaire international (FMI), à un moment crucial pour le sauvetage de la Grèce et pour la stabilité de la zone euro. Un acteur-clé pour les opérations d’"intervention d’urgence" sur les crises des Etats souverains qui menacent l’économie globale, est détruit par le scandale. Le rôle du FMI a en effet été considérablement renforcé grâce à Dominique Strauss-Kahn, dit "DSK".
A présent, le FMI doit faire face à une urgence interne inédite. L’issue finale pourrait être l’arrivée d’un Chinois ou d’un Brésilien, affirmant ainsi l’hégémonie des pays émergeants et la fin du "droit européen" à nommer le dirigeant du FMI. Ce serait un prix très cher payé par l’Union européenne tout entière pour la chute honteuse d’une de ses leaders les plus prometteurs.

L'homme de la providence

Le choc est considérable : annulation du sommet du 15 mai entre "DSK" et [la chancelière allemande] Angela Merkel qui devait dénouer les dangereux désaccords à propos de la crise grecque ;  convocation en urgence de l’équipe dirigeante du FMI à Washington; nomination du numéro deux, l’américain John Lipsky à la direction par intérim.
Le lundi16 mai, la délégation du FMI s’est présentée décapitée à la réunion de l’eurogroupe, qui devait décider de thérapies urgentes concernant la Grèce et donner son premier accord de principe pour la nomination de Mario Draghi à la tête de la Banque centrale européenne (BCE). En Allemagne, le ministre des Finances Wolfgang Schäuble a dû intervenir pour rassurer les marchés avant l’ouverture, en déclarant que "la solution du problème grec n’est pas bloquée, l'arrestation de Dominique Strauss-Kahn ne pèsera pas sur les négociations". 
C’est vite dit. Le caractère gravissime de cette perte pour l’économie globale affleure sous les réactions les plus extrêmes de la part des Français. La recherche de manipulateurs occultes donne la mesure de ce personnage extraordinaire qu’était devenu "DSK", dans sa vie professionnelle, bien sûr. En 2007, il hérite de la direction du FMI, qui semble alors en voie d’extinction. Dans les six premiers mois, alors que les marchés ignorent encore la bulle des subprime, la Turquie rembourse "le dernier prêt" consenti par le FMI, qui se retrouve alors au chômage. Tout va trop bien. Aucun pays n’a plus besoin d’aide.
Puis, en quelques mois, c’est l’apocalypse : le monde est précipité dans une crise financière sans précédents depuis la Grande dépression. "DSK" devient l’homme de la providence. Il dirige énergiquement le FMI, qui redécouvre sa vocation d’intervention. Il se précipite pour endiguer une crise après l’autre : au Pakistan, en Ukraine, en Islande. Il est indispensable d’éteindre les incendies à la périphérie de l’UE, en passant outre les jalousies de Bruxelles et de quelques Etats membres. L’Irlande, le Portugal, la Grèce deviennent les étapes régulières des tournées internationales de "DSK".
Il impose un tournant à la pensée unique néolibérale en réclamant des contrôles sur les mouvements des capitaux et de nouvelles règles pour le système bancaire. Il dénonce les inégalités sociales et choisit un Chinois comme numéro deux. Sous les coups de la crise, même les Etats-Unis vont apprendre à apprécier la présence d’un socialiste français à la tête du FMI, avec une vision des réformes nécessaires pour soigner les excès du tout-marché.
A plus forte raison, les Européens l’encensent. Pendant 18 mois les rapports personnels qu’il a de longue date avec le président français Nicolas Sarkozy, le patron de la BCE Jean-Claude Trichet et le Premier ministre grec Georges Papandréou, la crédibilité qu’il obtient auprès d’Angela Merkel et du président américain Barack Obama, sont des armes précieuses pour apaiser les tensions quant aux remèdes contre la désagrégation de la zone euro.

La maudite affaire du Sofitel

Sans la maudite affaire du Sofitel de Manhattan, "DSK" était attendu ce 16 mai à Bruxelles pour jouer les médiateurs entre l’Allemagne, la BCE et la Commission européenne, pour décider d’une nouvelle aide de 60 milliards d’euros à la Grèce et conjurer une restructuration de sa dette publique. Les marchés sont à nouveaux aux abois : après le risque de banqueroute de la Grèce, on redoute celle du Portugal, de l’Irlande, et de combien d’autres encore. 
C’est un scénario connu, mais pendant un an et demi, le pire a été évité. On a gagné du temps, même "DSK" mettait en garde contre un danger plus grand encore : le thérapies de choc  exigées des gouvernements des "PIGS" (Portugal, Irlande, Grèce, Espagne) les précipitent vers la récession, comme la Grèce, qui est en train de perdre quatre points de PIB. 
On ne réduit pas les dettes publiques sur les ruines d’une calamité sociale. "DSK" travaillait à une solution socialement viable. Les Américains le qualifiaient avec admiration de vrai "micro-manager" pour saluer le soin qu’il portait à l’étude de chaque détail des dossiers de crise. "Micro-manager" exemplaire, de tout, sauf de lui-même.

"Salauds de pauvres !"

Sans doute y a-t-il en France beaucoup plus de tabous que de fromages (317). On ne compte plus, chez nous, les sujets qu'il ne faut pas aborder, sous peine de tollé et de mise à l'index.

Laurent Wauquiez vient de s'en rendre compte à ses dépens. Quand, dans l'émission politique dominicale de BFM-TV avec Le Point, le ministre des Affaires européennes s'en est pris à l'assistanat, "cancer de la société", il n'a pas dit que des bêtises, loin de là.

Personne ne peut nier que notre État-providence, le plus gros des fromages français, fait eau de toutes parts. Personne, sauf l'ensemble de la classe politique, qui est tombé à bras raccourcis, dans une unanimité suspecte, sur Laurent Wauquiez, notre nouveau Père Fouettard.

Circulez, il n'y a rien à voir ni à débattre. À entendre les uns et les autres, il est donc interdit d'étudier la question du cumul des aides sociales, voire des fraudes aux allocations qui, d'après certaines études, atteindraient pas loin de 1 milliard d'euros. Pardonnez-moi ce chiffre, il m'a échappé, c'est une sorte de secret d'État, et celui-là au moins est bien gardé.

S'il a posé les bonnes questions, Laurent Wauquiez a donné les mauvaises réponses quand il a remis en question le RSA, qui reste une très bonne réforme. Il a eu tort, de surcroît, de passer un peu vite sur d'autres cancers de notre société, comme la cupidité des pseudo-preneurs de risques de notre système bancaire et financier qui, après avoir mis à sac l'économie mondiale, se gavent, sitôt renfloués par l'État, de bonus en tout genre. Les politiciens sont décidément toujours frappés d'hémiplégie. Parfois, que voulez-vous, on dirait même qu'un seul hémisphère de leur cerveau fonctionne, reprenant l'antienne drolatique de Marcel Aymé : "Salauds de pauvres !"

Présumé innocent, politiquement fini

La campagne présidentielle de Dominique Strauss-Kahn est finie avant même d'avoir commencé. Le super-favori des socialistes pour 2012 ne peut quitter le territoire des Etats-Unis où il est mis en examen. Aucun auteur de polar noir n'aurait osé ce scénario. L'inimaginable est devenu, hier, l'actualité. Le respect de la présomption d'innocence est un devoir qui ne peut empêcher de réfléchir aux conséquences probables – ou possibles – pour DSK, pour le PS et pour notre pays.

– Pour DSK, hormis l'hypothèse (peu crédible à ce stade) d'un coup monté et d'un piège où il serait tombé, l'avenir paraît sombre. On lui connaissait deux faiblesses, l'argent et les femmes. Une histoire de Porsche l'avait fait vaciller, une histoire de sexe l'abat, comme si l'on tombait toujours par là où l'on penche. Même s'il était reconnu innocent, DSK est sorti du champ aussi bien du FMI que de l'élection présidentielle de 2012.

– Pour le PS, le séisme rebat toutes les cartes : il conforte François Hollande dans sa progression ininterrompue, il redonne un peu d'espace à Ségolène Royal et, surtout, il pousse Martine Aubry à une candidature à laquelle elle avait quasiment renoncé. A moins que la première secrétaire ne s'efface devant Laurent Fabius, toujours prêt au cas où... Globalement pourtant, le PS, atteint de plein fouet par ce drame, est affaibli, ses divisions inévitables, la victoire de la gauche plus aléatoire.

– Pour notre pays enfin, quelle humiliation ! Quand on voit la presse populaire de New York afficher à la une le Français le plus gradé dans les institutions internationales comme « le pervers »... Bonjour les dégâts !

DSK, New York, 44 e Rue, chambre 2806

Troublant, forcément troublant. Il côtoyait, tutoyait les grands de ce monde, quand soudain il entre dans la chronique des faits divers, tel un petit caïd de Sarcelles. Dérangeante, cette nouvelle bombardée dès potron-minet par les radios. Elle ne peut susciter que l'incrédulité. Violente même : un ponte d'une institution internationale arrêté parce qu'il aurait tenté d'abuser d'une femme de chambre. DSK est certes un personnage flamboyant, nanti d'une réputation à la ville, il est d'abord un économiste éminent, le patron respecté du FMI dont on loue l'action au chevet des pays endettés. Polar de mauvais aloi. DSK sera interrogé dans un commissariat de Harlem qu'on imagine un peu glauque, comme dans les séries. Inculpé d'agression sexuelle, une qualification criminelle, comme dans la vraie vie. Qu'ajouter sur cette déflagration, sinon qu'il faudra analyser ses répercussions à l'aune et au rythme de la justice américaine. Le temps n'est plus à spéculer sur l'atterrissage difficile promis à DSK pour les primaires socialistes : c'est un crash politique. Il était l'homme à abattre dans la course à l'Élysée. Sa carrière est probablement brisée, qu'il soit innocenté ou condamné, victime d'une machination ou de la fragilité de l'âme humaine, attribut des puissants comme des humbles. Surtout, cesser d'en faire des tonnes sur la présomption d'innocence. De gloser sur l'image salie de la France comme l'ont dit ceux qui n'avaient rien à dire ou que ne contrarie pas la descente aux enfers du champion des sondages. Ironie de la situation, DSK était contraint au silence. On n'a jamais autant attendu qu'il en sorte.

Stoppé avant le décollage

 Stoppé avant le décollage


On prêtait à Dominique Strauss-Kahn la possibilité de choisir entre le Fonds monétaire international et la présidence de la République française. Le premier lui était acquis jusqu’à la fin 2012, l’Élysée lui était promis par les sondages. Son arrestation évitera au brillant socialiste de trancher ce dilemme cornélien : ce ne sera ni l’un, ni l’autre. Sa carrière connaît un coup d’arrêt brutal, peut-être définitif.
Il n’est pas impossible que DSK soit tombé dans un traquenard. Il ne manque pas d’ennemis, aux États-Unis et en France. Mais machination ou pas, il lui sera difficile, voire impossible, de s’en sortir à temps pour briguer l’investiture socialiste. La justice américaine a harcelé Bill Clinton pour beaucoup moins que ce que la femme de ménage du Sofitel de New York reproche à DSK. Et la réputation d’homme à femmes du directeur du FMI, étayée par sa relation adultérine de 2008 avec une économiste hongroise, ne l’aidera pas à se défendre dans un pays puritain, où la morale est souvent le bras armé de la politique.
En France, il n’y avait, hier, que le député UMP Bernard Debré et la présidente du FN, Marine Le Pen, pour accabler DSK. Mais à gauche comme à droite, son explosion juste avant le double décollage de sa campagne et de l’avion qui le ramenait en France fait le bonheur plus ou moins bien caché de beaucoup de monde. La primaire socialiste est relancée. François Hollande, qui rattrapait déjà DSK dans les sondages, est en bonne position mais Martine Aubry devrait logiquement bénéficier d’un vote « légitimiste » des adhérents. En tout cas, elle va devoir sortir du bois. Peut-être même le coup de tonnerre new-yorkais ouvre-t-il un créneau au rigide Laurent Fabius, très différent de DSK dans le style, mais quasi-clone sur le plan économique et politique. C’est Fabius qui avait succédé à DSK à Bercy, en 2000…
La chute du candidat préféré des sondages offre aussi un grand bol d’air au locataire actuel de l’Élysée, car elle déboussole et fait tanguer la gauche. Elle favorise donc mécaniquement la droite… et le centre. Certains y voient une opportunité pour Jean-Louis Borloo, qui a fait sortir ce week-end le Parti radical de l’UMP. Il est plus probable qu’au centre, elle bénéficie d’abord à François Bayrou, issu d’une tradition chrétienne-démocrate qui pourrait rassurer un électorat fatigué par les frasques des uns et des autres.

Grèce : UE et FMI prônent une restructuration douce

L'Union européenne et le Fonds monétaire international, soutenus par le gouvernement allemand, sont prêts à accepter une restructuration "douce" de la dette de la Grèce, du fait de la détérioration de la situation du pays, mais la Banque centrale européenne et la France restent opposées à une telle mesure, rapportait samedi le journal allemand Die Welt, en citant des sources anonymes.
"Nous ne sommes pas au courant d'une telle décision", a déclaré un représentant du gouvernement allemand, s'exprimant sous couvert de l'anonymat.
La BCE a refusé de s'exprimer, et un porte-parole du commissaire européen aux Affaires économiques et monétaires Olli Rehn a déclaré ne pas avoir de commentaire à faire. Le ministère français des Finances n'était pas immédiatement joignable, et le FMI n'a pas répondu aux demandes de commentaires envoyées par courrier électronique.
Selon Die Welt, le FMI, la Commission européenne et Berlin, suite aux dernières prévisions pour l'économie grecque, préconisent une extension de la maturité des emprunts d'Etat grecs, rapporte le journal.
Jusqu'à présent, la Commission européenne s'était opposée à une telle mesure, craignant - tout comme la BCE - que cela ne provoque des turbulences sur le marché obligataire européen et ait des conséquences négatives pour les banques européennes, d'après le journal.
"Si l'on regarde les dernières statistiques, on voit que la situation a changé", a déclaré une source au quotidien.

Impossible


C’est impossible ! Et si c’est vrai, c’est un piège. Mais si c’est un piège, comment a-t-il pu tomber dedans, lui, si intelligent ? On ne cesse ainsi de tourner et retourner les hypothèses, pour trouver un peu de raison dans cette histoire de fou. Comment un homme aussi brillant, aussi expérimenté, qui peut espérer devenir président de la République, qui accessoirement a bien assez de charme pour séduire sans contraindre — oui, comment cet homme-là pourrait-il commettre pareille folie ? Il y a dix ans, DSK avait déjà chuté sur une incroyable bêtise, une cassette compromettante oubliée dans son bureau. François Hollande avait eu alors ce terrible commentaire : « L’intelligence ne protège pas. Les gens bêtes ont des réflexes, quand les gens intelligents ont tendance à faire les malins ». Tout de même : c’est impossible ! Et si c’est vrai, c’est un piège…

Le commentaire politique de Christophe Barbier




DSK en chute libre

Cette semaine, il devait sauver la Grèce, puis l’Irlande et le Portugal, avant de redresser la patrie à l’horizon 2012. Mais son avion n’a jamais décollé de l’aéroport JFK, où des policiers sont venus le cueillir samedi soir. Le patron du FMI a gâché son week-end dans un commissariat de Harlem, bientôt inculpé pour “agression sexuelle et séquestration”. Comment peut-on ainsi passer, en un instant, du gotha au caniveau ?

En 2008, déjà, quelques galipettes extra-conjugales avec une blonde collaboratrice firent un peu pâlir son étoile. L’épisode, dans le registre du vaudeville, ne scandalisa alors que les extrêmes moralisateurs. Cette fois, on parle d’un crime ! On n’est plus chez Feydeau, plutôt du côté de chez Ellroy. Une modeste employée d’un hôtel new-yorkais accuse M. Strauss-Kahn de tentative de viol. Il nie, l’histoire demeure assez trouble pour ne pas exclure l’hypothèse d’une “manipulation”.

En France, quelques (rares) imprécateurs s’empressent pourtant de pourfendre le suspect. Sans doute les mêmes qui, naguère, désignaient Dominique Baudis comme complice d’un ignoble tueur en série…

Jusqu’à preuve du contraire, DSK bénéficie de la présomption d’innocence. La justice américaine tranchera, mais le temps judiciaire ignore les agendas électoraux. Le verdict, sauf nouveau coup de théâtre, risque de tomber après la fin juin – date butoir des candidatures au PS. Pour le favori des sondages, coupable ou pas, l’Élysée s’éloigne.

Un immense gâchis

Stupéfiant. Ahurissant. Assourdissant. Invraisemblable... Qu'un des plus puissants dirigeants du monde, parmi les plus surveillés et les plus respectés, puisse jouer son avenir sur une possible affaire de moeurs au pays du puritanisme est un choc et un désastre.

Personne n'aurait imaginé pareil polar politico-sexuel, si implacable dans son déroulement, si précis dans la seule version que l'on connaît, si improbable compte tenu de l'enjeu et de l'intelligence de Dominique Strauss-Kahn, que l'on en vient à douter de son authenticité.

Que l'agression soit avérée ou qu'il s'agisse d'un complot, que les faits soient exacts, approximatifs ou inventés, que l'inculpation repose ou pas sur une preuve de culpabilité, Dominique Strauss-Kahn est pris au piège d'une procédure judiciaire. Comment pourrait-il continuer à diriger le FMI, ce métier de globe-trotter ? Faire campagne en France, tout en préparant son procès ? Cela n'a rien à voir avec l'épisode dérisoire de la Porsche dans une rue de Paris ou l'exploitation du prix de ses costumes. Le pire scénario au pire moment.

Le calendrier judiciaire étant bien plus lent que l'agenda politique, et la justice américaine n'étant pas du genre à expédier les affaires, l'inculpation de DSK ouvre une phase de fortes turbulences pour toute la classe politique. Son onde de choc lui ferme la porte des primaires, pour lesquelles les candidatures doivent être déposées dans les deux mois, et de facto celle de l'Élysée. Elle ouvre une crise de succession au FMI au moment où il faut vite convaincre les Européens d'empêcher la contagion de la crise grecque.

Les conséquences politiques étant là, une double question se pose : à qui profite l'affaire ? Et à qui nuit-elle ?

Même s'il s'agissait d'un piège, dans lequel Dominique Strauss-Kahn serait en tout état de cause tombé, cet épisode troublant et humiliant risque de lui coûter sa carrière publique, de salir son honneur d'homme et celui de ses proches.

Elle est désastreuse pour la qualité du débat politique et pour l'image de la France qu'elle va ternir des semaines durant. Elle assomme ses amis politiques et Martine Aubry. Elle ébranle le PS qui n'a plus de leader évident et qui doit se préparer à une primaire qui ne ressemble plus du tout à une banale formalité, au seul profit de l'ex-favori des sondages.

Le malheur des uns faisant le bonheur des autres, on peut déjà identifier trois bénéficiaires. Dans un PS abasourdi, François Hollande qui, sans imaginer un tel scénario, avait anticipé que DSK n'était pas à l'abri d'un faux pas, pourrait devenir le favori. Il est le mieux préparé, le plus motivé, mais la multiplication prévisible des candidatures va corser son parcours.

Par effet de contraste, cette affaire relativise singulièrement les critiques comportementales adressées à Nicolas Sarkozy. Le Président a en outre compris qu'il n'aurait rien à gagner d'une instrumentalisation de l'événement. La droite, dont Dominique Strauss-Kahn était le concurrent le plus redoutable, y voit une occasion d'élargir son électorat, spécialement du côté des centristes dont Jean-Louis Borloo a annoncé, hier, qu'ils auraient bien un candidat. Enfin, elle pourrait profiter à l'extrême droite qui fait peu de cas de la présomption d'innocence et se délecte de tout ce qui a le goût de la décadence politique.


DSK passe de nouveaux examens médicaux

Le directeur général du FMI est sorti cette nuit du commissariat, menotté. Il a accepté de subir de nouveaux examens médicaux et devrait comparaitre devant la justice ce lundi après-midi. La journée en direct.
09h04:Sur France Info, Eva Joly a elle souligné "la violence" des images montrant Dominique Strauss-Kahn sortant menotté du commissariat d'Harlem à New-York, parlant d'"un cauchemar". Selon elle, le patron du FMI, inculpé pour tentative de viol, encourt une peine "entre 20 et 26 ans" alors qu'en France "c'est 15 ans, le maximum encouru". 
Les photos du directeur du FMI quittant le commissariat menoté soulève des interrogations juridiques. La diffusion d'images sans son accord d'une personne menottée, si elle n'a pas été jugée et condamnée est passible d'une amende de 15000 euros
08h51: Le secrétaire général de l'UMP, Jean-François Copé, appelle les membres du parti à la "mesure" et au "silence". Au micro de RTL, il confie avoir "été très impressionné par l'annonce de cette nouvelle, ainsi que par les images que j'ai vues ce matin". 
08h15:Sur RTL, Manuel Valls se dit choqué par les images de Dominique Strauss-Kahn menotté. "Cela fait près de 30 ans que je fais de la politique mais je n'ai jamais vu cela et je n'ai jamais ressenti cela. Il est un ami que je connais depuis longtemps, les images de ce matin sont d'une cruauté insoutenable. J'avais les larmes aux yeux." 
Tout le PS est ce lundi sens dessus dessous. LEXPRESS.fr fait le point sur la situation. Et sur les nouveaux rôles de Martine Aubry.  
08h01:"En plus de la victime présumée, la femme de chambre, il y a une victime avérée, c'est la France", commente Nathalie Kosciusko-Morizet. "Je fais confiance à la justice américaine (...) c'est tellement français de voir des complots partout, c'est quelque chose je crois qui est dans notre culture", a-t-elle ajouté. 
07h50:Cette journée de lundi marque le début d'une procédure judiciaire, qui pourrait durer plusieurs mois. Il comparaîtra vers 17 heures (heure française). Un juge lui annoncera les chefs d'accusation et décidera dans la foulée de sa libération, sous caution ou pas, avec autorisation de quitter le territoire américain ou pas.  
A la veille de cette journée, retrouvez toutes les infos sur cette affaire DSK ici. 
7h00: La nuit est tombée sur la côte est des Etats-Unis. D'après le New York Post, Dominique Strauss-Kahn serait dans un hôpital de Manhattan pour réaliser des examens médicaux complémentaires. La victime aurait assuré que les enquêteurs pouvaient trouver des griffures sur le corps de son agresseur présumé. 
5h36:La police annonce que DSK ne bénéficie d'aucune immunité diplomatique. 
5h09:La garde-à-vue de Dominique Strauss-Kahn s'achève après 30 heures d'audition. Il sort menotté du commissariat de Harlem. Des dizaines de photographes sont là pour immortaliser l'hallucinante image. 
Il monte ensuite à l'arrière d'une voiture de police banalisée, assis entre deux policiers. 
Il n'a pas dit un mot devant la foule des journalistes. 
4h39:La comparution de DSK devant un juge est repoussée à lundi. Pas avant à 17 heures (heure française). 
4h11:La police de New York obtient un nouveau mandat pour examiner les vêtements du patron du FMI, à la recherche de nouvelles traces d'ADN. 
Les traces d'ADN recherchées pourraient être "des cheveux, du sperme", ou autre, a-t-il précisé, ajoutant que la police souhaitait en obtenir un autre pour réaliser une fouille corporelle. 
A la question de savoir si la police entend chercher des traces de griffures comme l'ont indiqué des médias américains, un porte-parole de la police a acquiescé: "Oui, c'est ce qui se passe". 
3h47:Le FMI repousse la réunion consacrée à l'inculpation de Dominique Strauss-Kahn à lundi. Une source proche de l'institution indique à l'AFP que l'institution souhaitait d'abord attendre d'être fixée sur le sort de son directeur général. La situation "n'est pas simple", a indiqué une autre source proche du FMI. 
23h50: La femme de chambre qui accuse Dominique Strauss-Kahn de l'avoir agressée sexuellement identifie formellement le directeur du FMI. 
Un porte-parole de la police a ajouté que les enquêteurs avaient "relevé des preuves dans la chambre" d'hôtel, notamment des éléments comprenant de l'ADN. 
L'employée de l'hôtel, âgée de 32 ans, avait quitté le commissariat deux heures auparavant dans une fourgonnette, cachée sous un drap blanc. 

La fin d’une illusion

C’est un cauchemar pour l’homme, et pour sa victime présumée, mais ce n’est pas le cataclysme annoncé sur 2012. Tout juste la fin d’une illusion. Celle qui faisait d’un simple favori des sondages un futur président virtuel. D’une façon ou d’une autre, le directeur général du FMI était quasiment condamné à trébucher dans les chausse-trappes d’une campagne qui s’annonce violente. Le petit épisode de la Porsche lui avait donné une idée de ce qui l’attendait. Il avait montré, aussi, que DSK n’était pas vraiment préparé à résister au passage dans la terrible machine à laver, la terrible machine à broyer, de la présidentielle. En une semaine, les failles de sa communication, révélatrices de la fragilité de son profil, étaient apparues. S’il culminait encore dans les intentions de vote, le candidat providentiel était déjà très vulnérable, chacun le voyait bien, avant même qu’il ne se déclare... Touché-coulé. Le coup de théâtre de Times Square a seulement précipité un naufrage qui aurait pu survenir à n’importe quel moment.

Si on en croit son accusatrice -dont les allégations restent à prouver- DSK se serait pris les pieds dans le tapis (de bain) d’une tentation de trop qui l’aurait fait glisser dans le sordide. Une démonstration à l’américaine du principe selon lequel un candidat à la présidentielle ne connaît pas pire ennemi que lui-même... Car les couplets hypocrites du droit à la présomption d’innocence n’y changeront rien: quelle que soit la suite de la procédure judiciaire à Manhattan, il faudrait un miracle pour que Dominique Strauss-Kahn se relève d’une telle histoire. Il est sans doute politiquement fini et, hier soir, les acteurs de la scène politique française peinaient encore à admettre cette réalité qui va maintenant s’imposer à tous.

Son élimination n’est ni une mauvaise affaire pour le PS, ni une bonne pour Nicolas Sarkozy. Certes, les socialistes perdent leur meilleure chance de gagner -sur le papier des sondeurs- mais le président sortant perd lui aussi un concurrent qui, par son parcours, aurait constitué une cible facile... Et voilà qu’elle se désagrège trop tôt, comme l’ont d’ailleurs déploré publiquement des conseillers de l’Élysée. Jusque-là fasciné, au-delà du raisonnable, par la promesse, artificielle et prématurée, d’une victoire facile de son champion d’Amérique, le PS, lui, va bien devoir redescendre sur terre et s’impliquer dans de vraies primaires. Un réveil brutal, sûrement désagréable, mais salutaire. Le Strauss-Kahn charmeur et surdoué, irrésistible en petit comité, n’est guère à l’aise dans le cambouis d’une campagne électorale. La marche vers 2012 avait de fortes probabilités de tourner au chemin de croix et il n’y a sans doute rien à regretter de voir DSK s’effacer d’un paysage qui n’a pas fini de se transformer. Cet homme brillant était assurément dangereux pour son camp.

DSK suspecté « d’agression sexuelle » : le récit dans la presse new-yorkaise

Un porte-parole de la police new-yorkaise, cité par le New York Times, retrace l’agression présumée, dont Dominique Strauss-Kahn est accusé par une employée de l’hôtel Sofitel New York, situé 45 West 44th Street dans Times Square.

Les faits reprochés à DSK se seraient produits samedi 14 mai, dans la chambre du patron du FMI, dans cet hôtel, vers 13 h (19 h en France). La victime présumée, « une femme de 32 ans », dit être entrée dans la suite 2806 où logeait DSK, croyant qu’elle était vide. En fait, celui-ci prenait une douche.
La plaignante dit qu’il serait sorti de la salle de bain, « complètement nu », puis se serait « approché d’elle » et l’aurait « touchée de manière inconvenante », rapporte Paul J. Browne, porte-parole de la police new-yorkaise. DSK l'aurait alors « forcée à accomplir un acte sexuel ».
La femme de ménage a raconté s’être débattue, disant avoir été entraînée dans la salle de bains, où DSK aurait à nouveau tenté d’abuser d’elle. Il aurait également tenté d’empêcher sa fuite en fermant la porte de la chambre à clé.
Ayant cependant réussi à s’échapper, « elle a prévenu le personnel de l’hôtel, qui a appelé le 911, poursuit M. Browne. Quand la police est arrivée, il n’était plus là. »
M. Browne laisse entendre que Dominique Strauss-Kahn se serait empressé de vider les lieux, oubliant même derrière lui son téléphone portable, récupéré par les inspecteurs de police. « Nous avons appris qu’il prenait un vol Air France, poursuit M. Browne, l’avion a alors été retenu au sol et nous avons procédé à son interpellation. »
Inculpation annoncée
DSK était toujours en garde à vue dans les locaux de la police new-yorkaise (NYPD) samedi soir (tôt, ce dimanche matin, en France). « Nous nous attendons à ce qu’il soit formellement arrêté et inculpé dans l’heure », a déclaré Paul Browne, porte-parole NYPD, vers 23 h 15 heure locale (dimanche matin en France, 5 h 15).
« Il va être inculpé d’acte sexuel criminel, de tentative de viol et de séquestration », a-t-il ajouté.

L'employée d'Accor identifie DSK comme son agresseur

La femme de chambre de l'hôtel de Manhattan, l'a formellement identifié dans un commissariat de Harlem à New York. DSK doit être présenté à un juge.

Dominique Strauss-Kahn,inculpé dimanche d'agression sexuelle et de tentative de viol aux Etats-Unis, nie tous les faits qui lui sont reprochés et va plaider non coupable. La femme de chambre de l'hôtel Sofitel à New York, dont la plainte pour agression sexuelle a déclenché toute l'affaire, a formellement identifié dimanche le président du FMI comme son agresseur. L'employée s'est rendue au commissariat de Harlem, à New York, où DSK a été entendu après son interpellation à l'aéroport JFK. Comme dans les séries américaines, elle a dû désigner son agresseur présumé parmi un groupe d'hommes réunis pour une séance d'identification. Elle a ensuite le commissariat vers (21H45, heure française) dans une fourgonnette, cachée sous un drap blanc.
DSK va être présenté à un juge qui doit décider soit de son maintien en détention provisoire, soit de sa remise en liberté sous caution.Le directeur général du Fonds monétaire international a été inculpé dimanche par le parquet de New York d'agression sexuelle, de tentative de viol et de séquestration. Il a été arrêté samedi soir à l'aéroport de New York après la plainte d'une femme de chambre d'un hôtel new-yorkais.

Le scénario de l'agression supposée

Les faits se seraient déroulés à 13 heures dans une chambre de l'hôtel Sofitel de Manhattan. Une femme de ménage, âgée de 32 ans, serait entrée dans la suite de l'ancien ministre qu'elle croyait inoccupée pour la nettoyer. Dominique Strauss-Kahn serait sorti de la salle de bain nu. Il l'aurait alors jetée surle lit pour tenter d'abuser d'elle. La jeune femme aurait réussi à se libérer, mais le directeur du FMI l'aurait attrapée et emmenée dans la salle de bain de la chambre pour la contraindre à lui pratiquer une fellation. Selon les enquêteurs, Dominique Strauss-Kahn aurait tenté de l'enfermer dans la chambre d'hôtel. La femme serait parvenue à se libérer et aurait aussitôt prévenu des membres du personnel de l'hôtel, qui ont contacté la police. Quand les forces de l'ordre sont arrivées sur place, DSK avait déjà quitté les lieux, laissant un téléphone portable (il en aurait plusieurs) et des effets personnels. La police new-yorkaise parle d'un départ qui semble avoir été précipité.
Des enquêteurs en civil de l'Autorité des ports de New York et du New Jersey sont alors partis le chercher à l'aéroport de JFK, où il avait déjà embarqué à bord d'un vol Air France qui s'apprêtait à décoller. «Nous l'avons mis en garde à vue et remis à la police de New York» (NYPD), a déclaré sous couvert d'anonymat un responsable de l'Autorité des ports de New York et du New Jersey.

Anne Sinclair n'y croit pas une seconde

Selon des sources policières, des relevés d'ADN ont été réalisés dans la chambre mais les résultats ne sont pas encore connus.
Dans un communiqué, la journaliste Anne Sinclair, a pris la défense de son mari : «Je ne crois pas une seule seconde aux accusations qui sont portées contre mon mari. Je ne doute pas que son innocence soit établie», écrit-elle avant d'appeler «chacun à la décence et à la retenue».
Le FMI a assuré qu'il restait «pleinement opérationnel», après l'inculpation de son directeur général, tout en se gardant de faire tout autre commentaire. Dominique Strauss-Kahn a reçu la visite samedi soir de Philippe Lalliot, consul général à New York «dans le cadre de l'exercice de la protection consulaire», a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Bernard Valero. «L'ambassade de France et le consulat à New York sont mobilisés», a précisé le porte-parole. «Nous sommes et restons en contact étroit avec le FMI et les autorités américaines», a-t-il ajouté, sans plus de commentaire.
Depuis quelques semaines, Dominique Strauss-Kahn est la cible en France de critiques sur son train de vie, son patrimoine étant passé au crible dans la presse. Il venait de contre-attaquer en annonçant vendredi des poursuites judiciaires contre le quotidien France Soir. La suite de l'ancien ministre dans l'hôtel Sofitel était proposée à 3000 dollars la nuit, précise à ce titre le New York Times.
La carrière du directeur du FMI a été gravement menacée en octobre 2008 après la révélation d'une liaison extra-conjugale avec une économiste hongroise de l'institution. Mais Dominique Strauss-Kahn avait été blanchi de toute accusation d'abus de pouvoir par le conseil d'administration du FMI, qui lui avait reproché une «grave erreur de jugement». Son étoile sur la scène politique française n'a pas pâli de cette affaire, DSK continuant à caracoler dans les sondages au fur et à mesure que s'approche l'échéance présidentielle de 2012.