TOUT EST DIT

TOUT EST DIT
ǝʇêʇ ɐן ɹns ǝɥɔɹɐɯ ǝɔuɐɹɟ ɐן ʇuǝɯɯoɔ ùO

mardi 29 mars 2011

Populiste


Il y a des jours où l’actualité vous invite au populisme. Hier, vous avez appris que, pour sauver l’industrie gazière française, le prix du gaz va augmenter de 5,2%. Mais vous vous souvenez, ou plutôt votre compte en banque se souvient, qu’avec les hausse précédentes, cela fait 20% d’augmentation en un an. Pris d’un accès de curiosité, vous regardez les comptes de Suez-GDF: ils ne se portent pas mal, avec 4,6 milliards d’euros de bénéfices pour un chiffre d’affaires de 84,5 milliards. Un excellent rendement, d’ailleurs salué par la bourse. Toujours curieux, vous découvrez que les revenus du président de GDF-Suez, Gérard Mestrallet, sont de 3,1 millions d’euros... Il vous reste alors deux options: expliquer comment tout cela est juste et normal compte tenu de la variation des prix du gaz à Rotterdam, ou vous laisser aller à un coup de gueule populiste. Ca ne diminue pas la facture, mais ça soulage.

Parfum de défaite et goût de trahison

Les hommes sont ce qu’ils sont. L’amer parfum de la défaite stimule chez eux le goût de l’abandon. Nicolas Sarkozy connaît trop bien cette musique acide et il ne s’étonnera donc pas des soudaines velléités émancipatrices d’une partie de ses troupes : elles craignent de couler avec le capitaine en 2012. En politique, la fidélité s’arrête là où commence l’instinct de survie. On approche, semble-t-il, de ce moment critique.

En dépit des mauvais sondages qui le créditent d’une infamante troisième position au premier tour de la présidentielle, le président de la République est pourtant loin d’avoir perdu toutes ses chances. En ces temps tourmentés où l’actualité va à toute vitesse, «l’opinion», par nature volatile, est sujette à des retournements tout aussi rapides. Douze mois et trois semaines - soit le temps qui nous sépare désormais de l’échéance - c’est très court et c’est très long à la fois. Une durée largement suffisante pour redresser une image en perdition ou pour naufrager une réputation. Nicolas Sarkozy a désormais... l’avantage de ne plus avoir rien à perdre. Tout le monde, ou presque, le donne battu ? Le voilà revenu outsider ! Or c’est toujours le dos au mur qu’il est le meilleur. Par ailleurs, il a devant lui une séquence favorable - rôle international valorisant et éclaircie économique - quand ses adversaires ont sans doute mangé leur pain blanc.

Oui, le chef de l’État peut s’en sortir, mais à deux conditions... qui ne sont réunies ni l’une, ni l’autre. Sa propre lucidité et l’appui indéfectible de son camp. Si son analyse de la défaite des cantonales n’est pas erronée - il n’y a pas eu de vague socialiste- elle s’est refusée à prendre en compte l’ampleur de la défaite de l’UMP. Un signe inquiétant auquel s’en ajoute un autre : le réveil des sensibilités qui avaient été étouffées par le béton idéologique utilisé pour cimenter le parti présidentiel. Nicolas Sarkozy avait oublié que le soutien des centristes était factice. Il ne reposait en effet que sur la veulerie de dirigeants qui se sont couchés devant le maître de l’Élysée... mais qui, au fond d’eux-mêmes, n’en pensaient pas moins. Un exemple parmi d’autres : le Jean-Louis Borloo, version candidat à Matignon, n’avait rien dit pour s’opposer à un discours de Grenoble qui, pourtant, piétinait toutes ses valeurs et celles de sa famille politique.

Personne, dans la majorité, n’a osé arrêter les dérives du président. On préférait l’applaudir. Les grands courageux ont attendu qu’il soit en position de faiblesse pour prendre leurs vertueuses distances. François Baroin a raison de préconiser l’arrêt des débats annoncés sur la laïcité et l’islam lestés de sous-entendus stigmatisants. Mais pourquoi n’a- t-il pas fait entendre sa voix - grave - plus tôt ? Enroué peut-être ? Dans l’hiver démocratique, ça arrive.

Nouvelles images choc du tsunami au Japon

Un film probablement tourné par un vidéaste amateur montre l'inexorable montée des eaux dans une ville du nord du pays. En près de six minutes, une partie de la localité est littéralement submergée.

La vidéo tourne en boucle sur Internet. Tournée juste après le séisme qui a frappé le nord-est du Japon le 11 mars dernier, elle montre pendant près de six minutes, l'inexorable avancée des eaux dans les terres, charriant tout sur son passage. L'auteur de ce film, probablement un vidéaste amateur posté en haut d'un immeuble, n'a pas été identifié. Il aurait été tourné dans la ville côtière de Kesennuma, au nord de la préfecture de Miyagi, la plus touchée par la catastrophe. La ville de Kesennuma compte 75.000 habitants. Elle est située à environ 150 kilomètres de Fukushima. Plusieurs médias, parmi lesquels la chaîne d'information américaine CNN, l'ont diffusé.

On assiste à la très rapide montée des eaux depuis un bâtiment situé à quelques dizaines de mètres de la mer. Des sirènes résonnent et une voix se fait entendre, probablement par haut-parleur. Les flots emportent d'abord les premiers véhicules garés en bord de mer avant de s'enfoncer vers les terres. Au large, un bateau dérive et fonce vers ce qu'il reste du rivage. Des bâtiments entiers cèdent, libérant dans l'eau des objets en tout genre. La ville n'est plus qu'une rivière.

L'urgence du rassemblement

À droite, à gauche et au centre, on n'a pas tardé à méditer les leçons des cantonales. Il faut dire que les enseignements sont suffisamment alarmants pour les uns, nets pour tout le monde, pour ne pas perdre de temps.

Pour l'UMP, le message est clair : le désaveu des électeurs et les dissensions internes risquent de faire trébucher Nicolas Sarkozy au premier tour de 2012. Dès hier matin, le président-candidat, qui veut y aller, et seul, a donc intimé l'ordre à ses compétiteurs de droite de lui épargner une concurrence jugée suicidaire.

Ainsi, Jean-Louis Borloo, que des velléités d'émancipation démangent, est déjà désigné comme responsable d'un échec du parti présidentiel s'il persistait dans son projet de fédération des centres. La mise en garde vaut aussi pour Dominique de Villepin et Hervé Morin, chaque point valant de l'or face à un Front national dédiabolisé et excité par l'idée de faire subir à Nicolas Sarkozy l'humiliation infligée en 2002 à Lionel Jospin.

La candidature unique serait jouable si la droite modérée et radicale se reconnaissait dans la politique suivie. Mais les centristes n'ont toujours pas digéré d'être réduits à la portion congrue dans le dernier gouvernement. Ils réclament, sans être toujours entendus, plus d'attention sociale et de justice fiscale. Ils ne comprennent pas les surenchères identitaires et sécuritaires.

Divisions au sommet

En quoi sont-elles prioritaires quand le prix de l'énergie augmente, que les bénéfices des multinationales sont inéquitablement distribués et que le salaire n'assure plus la fin de mois ? Ce genre de question divise jusqu'au sommet : Nicolas Sarkozy, contredisant François Baroin, le porte-parole du gouvernement, persiste curieusement dans une droitisation qui a déjà échoué. Celle-ci ouvre alors un vaste espace aux sensibilités sociales, laïques et humanistes. On va vite mesurer leur courage et leur capacité à s'exprimer et à s'unir.

Dire que la droite a déjà perdu et la gauche déjà gagné serait pour autant très imprudent. Martine Aubry sort renforcée des régionales et des cantonales. Les résultats d'hier renforcent même l'hypothèse, pour la première fois, d'une majorité de gauche au Sénat en septembre. Mardi, elle montrera qu'elle a un projet pour 2012.

Mais autant que les programmes, ce sont les hommes (ou les femmes) qui feront l'élection. Porté par des sondages quelque peu irréels, Dominique Strauss-Kahn, qui devrait annoncer sa décision juste après le G20 de Deauville, demeure le favori. Mais il risque, à chaque déclaration, d'éroder son capital de confiance. Jamais, à treize mois d'une présidentielle, le chouchou des sondages n'a été élu.

D'ailleurs, une cinquantaine de députés pressent Martine Aubry, qui ne fera rien contre lui, de se déclarer. Entre les deux, François Hollande, qui construit méthodiquement une sorte de synthèse entre le fond et la forme, espère créer la surprise. Chacun ayant sa chance contre Nicolas Sarkozy, la primaire, d'ici à octobre, promet d'être sportive.

Même si ses espoirs sont plus fondés que jamais, la gauche aussi doit prendre en compte le risque de l'élimination au premier tour. La cristallisation de l'antisarkozysme ne s'accompagne pas d'une dynamique en sa faveur. Pour elle aussi, il faudra sonner le tocsin du rassemblement.