TOUT EST DIT

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mardi 15 février 2011

Le somptueux palais de Poutine




Le somptueux palais de Poutine
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Iran : "La surveillance des opposants en Iran est renforcée"




Iran : "La surveillance des opposants en Iran est renforcée"
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Wikipédia au château de Versailles

"La querelle des Anciens et des Modernes n'a plus lieu d'être", s'enthousiasme WikiMédia France. L' association qui promeut l'encyclopédie collaborative et le château ont signé un partenariat, mardi 15 février, afin d'alimenter et d'améliorer les contenus de l'information en ligne. "L'objectif est d'établir des ponts entre les équipes du château et les contributeurs de Wikipédia", résume Adrienne Alix, présidente de l'association Wikimédia France, au Monde.fr.

En résidence pendant six mois, un spécialiste de Wikimédia sera chargé de coordonner le transfert d'informations scientifiques, historiques et de toute nature existant à Versailles vers Wikipédia. Il sera aussi chargé d'enrichir, avec le concours des conservateurs et des scientifiques du château de Versailles, celles qui existent déjà sur l'encyclopédie collaborative. "Plusieurs tableaux et objets dans le musée sont suffisamment anciens pour être dans le domaine public. L'idée est d'établir, avec les responsables du château, quelles sont les meilleures modalités pour les présenter au mieux dans l'encyclopédie en ligne", détaille également Mme Alix.
"Wikipédia est une source d'information majeure sur le château de Versailles, diffusée dans le monde entier. Certains conservateurs et scientifiques de l'établissement y contribuent déjà de façon spontanée pour enrichir certaines notices", note Jean-Jacques Aillagon, président de l'établissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles, cité sur le site Wikimédia.fr.
PLUSIEURS MILLIONS DE VISITEURS PAR AN SUR LES PAGES DÉDIÉES
Pour les institutions, l'encyclopédie contributive constitue aussi une source de trafic de plus en plus importante : la galaxie de pages se référant au château de Versailles compte plusieurs millions de visiteurs par an. Au total, Wikipédia, qui vient de fêter ses dix ans, revendique 17 millions d'articles publiés en 250 langues et 400 millions de visiteurs mensuels. Versailles participe également au Google Art Project, qui permet des visites virtuelles dans dix-sept musées du monde entier.
Avant le château de Versailles, Wikimédia France a déjà signé deux partenariats avec des institutions, l'un avec la Bibliothèque nationale de France, l'autre avec la mairie, le Muséum d'histoire naturelle et les Archives de Toulouse. "Après le succès de l'expérience toulousaine, nous avons reçu de nombreuses sollicitations d'autres institutions", souligne Adrienne Alix.
Documents écrits, photographiques, multimédia : le British Museum a lancé pendant cinq semaines une initiative similaire à Londres, tout comme le Brooklyn Museum, à New York, plusieurs musées néerlandais, les archives fédérales allemandes, une bibliothèque de l'Etat australien du Queensland.

L'autre leçon d'Egypte

Pharaon régna 3.000 ans sur l’Egypte en gouvernant un peuple qui divisait l’année en trois saisons: inondation (akhet), germination (peret), et chaleur (shemou).
Autrement dit, un peuple organisé autour du Nil et de l’agriculture. Un peuple qui cultivait bien sûr, mais savait aussi stocker, compter, gérer, répartir. Le grand Râ, dieu du Soleil, aurait pu être comptable. Aujourd’hui, qui mesure la nourriture des hommes? Qui anticipe les aléas du climat, les stratégies des spéculateurs? Nous faisons terre commune, mais où sont Pharaon et ses scribes? Où est ce vieux savoir de la régulation dans un monde où il y a des prix mondiaux de l’alimentation, des cours du blé qui fluctuent à la Bourse de Chicago en fonction des crises climatiques et des spéculations? Pharaon savait que l’arme alimentaire était la première arme des guerres et que nourrir son peuple est le premier devoir du politique. N’oublions pas que la Révolution française a commencé une année de mauvaise récolte.

Aujourd’hui encore, le déclencheur premier des révoltes arabes est la hausse des prix alimentaires dans des sociétés de maigres salaires, de chômage et de dictatures militaires. Mais en Israël aussi, la centrale syndicale Histadrut annonce des grèves contre la hausse des prix de l’eau, du pain et de l’essence. Quand les ventres sont vides, naissent de nouvelles solidarités.

Alors nous devons gérer la mondialisation comme Pharaon l’Egypte, avec des investissements dans l’agriculture, des stocks et des régulations. Notre système actuel est insupportable: les paysans sont souvent pauvres; 90% des produits agricoles sont consommés dans la proximité mais ce sont les 10% qui voyagent qui font les prix mondiaux; les investissements sont totalement insuffisants, tout particulièrement en Afrique. Chaque Européen mangera dans sa vie 9 vaches, 32 cochons et 1.412 poulets. Que se passerait-il si les autres peuples voulaient nous imiter? La vie des hommes n’est décidément pas une marchandise comme les autres.

Alger: "Ce n’est qu’un début!"

Plusieurs milliers de personnes ont manifesté samedi à Alger face à 25.000 policiers. "Nous avons brisé le mur de la peur", assurent les opposants à Bouteflika. 
 Des laïques et des islamistes. Le chef du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), Saïd Sadi, un laïque. Et l’un des fondateurs du Front islamique du salut, Ali Belhadj. Des étudiants, des travailleurs et des chômeurs. Des femmes et des hommes, de simples quidams et des intellectuels… Tous ont bravé les forces de l’ordre pour défier hier le pouvoir dans le centre d’Alger. Place de la Concorde, les manifestants ne cachaient par leur fierté. Alger a connu samedi une journée de contestation peut-être historique. Interdite par les autorités, la manifestation, organisée à la suite de l’appel lancé par la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD), née dans la foulée des émeutes contre la cherté de la vie qui ont fait cinq morts et 1.000 blessés début janvier, a réuni près de 5.000 personnes, selon le président de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme, Mostepha Bouchachi. Un chiffre modeste, comparé aux centaines de milliers de manifestants du Caire, mais impressionnant quand on sait la difficulté de manifester en Algérie. La preuve : face à ces quelques milliers de manifestants (estimés à 250 par le ministère de l’Intérieur), les autorités ont déployé plus de 25.000 policiers.

De nombreuses références à la révolution égyptienne

Au départ, leur idée était, comme à Tunis ou au Caire, de marcher à travers les rues de la capitale pour crier leur colère. Mais très rapidement, les manifestants ont été bloqués par le très important dispositif de sécurité, qui a procédé à des interpellations musclées. Bloqués en plein centre de la capitale sur la place du "1er-Mai", rebaptisée symboliquement place "Tahrir du Caire", les marcheurs ont scandé des slogans hostiles au régime du président Abdelaziz Bouteflika, au pouvoir depuis 1999. Au lendemain de l’éviction du pouvoir d’Hosni Moubarak en Egypte, les manifestants ont lancé en arabe des "Algérie libre", "Le régime dehors!", "Système, dégage!". Certains ont aussi exigé le départ du chef de l’Etat et des changements politiques rapides. Des groupes de jeunes ont tenté de percer le cordon de sécurité, sans succès. Les organisateurs de la marche ont alors demandé aux manifestants d’éviter l’affrontement. De fait, le rassemblement s’est dispersé vers 15 heures sans débordements, ce qui n’a pas empêché la police de procéder à de très nombreuses arrestations. La Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme en a dénombré "plus de 300", contre 14 pour les autorités.
Pas de quoi décourager les contestataires algériens qui comptent suivre l’exemple des révolutions tunisienne et égyptienne. "Nous allons décider dans les prochains jours de la suite à donner à notre mouvement, mais cette manifestation n’est que le début", a déclaré samedi Mostepha Bouchachi. Des marches et des rassemblements devraient de nouveau se dérouler dans tout le pays. En attendant, Bouchachi a salué la mobilisation de samedi: "Si on avait pu marcher, il y aurait eu des dizaines de milliers de personnes avec nous", déplorait-il, avant d’accuser le pouvoir de se "donner en spectacle et de dépenser beaucoup d’argent pour empêcher les Algériens de s’exprimer". Les prochaines manifestations seront déterminantes. La colère sourde de la société algérienne ne demande qu’à s’exprimer dans des villes comme Oran, Annaba, Constantine et Boumerdès où des rassemblements, prévus également samedi, ont été soit interdits, soit durement réprimés; à Oran, une marche réunissant 400 personnes place du 1er-Novembre s’est achevée par une trentaine d’interpellations. Le chef local de la CNCD, l’universitaire Kaddour Chouicha, son fils et deux journalistes ont été emmenés dans un fourgon de police puis relâchés.

Bouteflika lâche du lest

Inquiet des exemples venus de Tunis et du Caire, le président Bouteflika a annoncé au début du mois la levée prochaine de l’état d’urgence (en vigueur depuis 1992), l’ouverture de la télévision et des radios publiques à l’opposition ainsi qu’un nouveau plan d’action contre le chômage et la crise du logement. Mais ces mesures n’ont pas convaincu les Algériens. Comme en Tunisie, les tentatives d’immolation par le feu n’ont pas cessé. Jeudi, un jeune a tenté de se suicider de cette façon à Ghardaïda, dans le sud du pays. A travers tout le pays, les opposants au régime de Bouteflika commencent à y croire: "Nous avons brisé le mur de la peur, assure Fodil Boumala, l’un des fondateurs de la CNCD. Samedi, les Algériens ont récupéré leur capitale."

Zone euro: la croissance reste modérée au 4e trimestre 2010

La croissance dans la zone euro a un peu déçu en restant stable à 0,3% au quatrième trimestre 2010, portant le total sur l'année à 1,7%, selon une première estimation mardi de l'office européen des statistiques Eurostat.

C'est légèrement au-dessous des attentes des analystes, qui espéraient en moyenne une augmentation du Produit intérieur brut de 0,4% au quatrième trimestre, après 0,3% les trois mois précédents dans les pays partageant la monnaie européenne.

La croissance a notamment continué à ralentir dans la première économie de la zone euro, l'Allemagne: son PIB a augmenté de seulement 0,4% au quatrième trimestre après 0,7% au troisième et même 2,2% au deuxième.

Les économistes relèvent aussi la performance décevante affichée par la France au quatrième trimestre: seulement 0,3%, comme sur les trois mois précédents, mais moitié moins qu'espéré par la Banque de France.

Dans l'ensemble de l'Union européenne, la croissance a ralenti au quatrième trimestre, à 0,2% après 0,5% au troisième trimestre. Sur l'ensemble de l'année 2010, l'UE enregistre elle aussi une croissance de 1,7%.

En 2009, le recul du PIB avait atteint pour la zone euro un niveau historique de 4,1%, et pour l'UE 4,2%. Depuis la sortie de récession, la croissance européenne reste plutôt molle, seul le deuxième trimestre 2010 faisant figure d'exception avec un bond de 1%.

Eurostat n'a pas fourni à ce stade d'explications sur l'évolution du PIB européen au quatrième trimestre.

Mais "le mauvais temps en décembre pourrait avoir affecté l'activité dans certains pays", souligne Jonathan Loynes, économiste chez Capital Economics.

Pour lui, vu la confiance affichée par les entreprises, "la croissance pourrait de nouveau accélérer au premier trimestre 2011".

La reprise des exportations dans les membres historiques du "coeur" de la zone euro risque toutefois de "perdre au moins un peu de vigueur", tandis que la croissance restera très faible dans les économies plus fragiles, dites de la "périphérie", prévient toutefois l'économiste, qui table donc sur une croissance assez faible de seulement 1% environ en 2011.

Les Européens sous pression pour geler les avoirs de responsables égyptiens

Les autorités égyptiennes ont demandé à plusieurs pays européens de geler les avoirs d'ex-hauts responsables du régime de Hosni Moubarak, mais pas du président déchu lui-même, et la question sera abordée par toute l'UE mardi lors d'une réunion à Bruxelles.
Paris a été saisi par les autorités égyptiennes "d'une requête de gel des avoirs d'anciens responsables égyptiens", a déclaré lundi à l'AFP le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, M. Bernard Valero.
"Nous examinons cette demande et nous coopérerons bien entendu avec les autorités égyptiennes", a ajouté le porte-parole en précisant qu'elle "ne concernait ni l'ancien président Hosni Moubarak ni des membres de sa famille".
A Londres, le ministre britannique des Affaires étrangères William Hague a indiqué également avoir "reçu une demande de la part du gouvernement égyptien de geler les avoir de plusieurs anciens responsables égyptiens".
"Nous allons évidemment coopérer" avec les autorités égyptiennes "en travaillant avec l'Union européenne et les partenaires internationaux comme nous l'avons fait dans le cas de la Tunisie", a ajouté M. Hague, en référence avec le gel par l'Union européenne des avoirs de l'ancien président tunisien Zine El Abidine Ben Ali et de sa famille. "S'il y a la preuve d'un détournement ou d'une utilisation illégale de fonds publics, nous prendrons des mesures fermes et rapides", a encore assuré le chef de la diplomatie britannique.
La même demande de gel des avoirs d'ex-responsables a été faite par le gouvernement égyptien aux Etats-Unis, a indiqué un haut responsable du département d'Etat à Washington qui a également précisé qu'elle ne concernait pas M. Moubarak.
A la demande de la Grande-Bretagne en particulier, les ministres européens des Finances ont décidé de mettre la question d'un gel éventuel des avoirs de sept anciens responsables égyptiens au menu d'une rencontre qu'ils doivent avoir mardi à Bruxelles, a indiqué à l'AFP une source diplomatique.
"Il y a six ou sept Egyptiens sur la liste, mais elle n'inclut définitivement pas Moubarak", a-t-elle dit.
L'UE discutera aussi de l'aide aux pays de la rive sud de la Méditerranée.
"J'ai demandé à ce qu'on évoque ensemble, et je sais que ça le sera demain, la situation dans les pays tels que la Tunisie, l'Egypte en particulier, pour en examiner les aspects financiers et économiques, c'est-à-dire à la fois, les perspectives d'investissement et de soutien, notamment par la Banque européenne d'investissement, par les différentes agences de développement de chacun de nos pays", a souligné la ministre française de l'Economie, Christine Lagarde.
Il faut "voir comment on peut ensemble soutenir ce mouvement démocratique qui est en train de s'installer dans ces pays", a-t-elle ajouté.
L'Allemagne a aussi annoncé avoir été approchée par l'Egypte avec une requête de gel d'avoirs.
"Une demande d'entraide judiciaire des autorités égyptiennes concernant le gel d'avoirs d'anciens membres du gouvernement et du parlement égyptiens nous est parvenue", a déclaré à l'AFP un porte-parole du ministère allemand des Affaires étrangères. "Nous examinons actuellement cette demande", a-t-il ajouté.
Aucune des trois capitales n'a détaillé dans l'immédiat le montant des avoirs concernés ni les personnalités visées.
Le nom de Hosni Moubarak, qui a quitté la présidence de l'Egypte vendredi après 30 ans au pouvoir n'a pas été évoqué non plus à Londres et Berlin. Selon la presse britannique, M. Moubarak posséderait des millions d'euros d'avoirs en Grande-Bretagne. La Suisse a, elle, décidé dès vendredi de geler "avec effet immédiat" les avoirs que pourraient y détenir M. Moubarak et son entourage.

CES BANQUES EUROPÉENNES VONT-ELLES REMBOURSER LES PLUS-VALUES FAITES AVEC L'ARGENT DE MOUBARAK ? 
ÇA, C'EST UNE AUTRE HISTOIRE....

DSK confronté à une nouvelle salve de l'UMP

Après la polémique du week-end sur les propos de Christian Jacob critiquant DSK, Christine Lagarde et Brice Hortefeux sont revenus à leur tour sur les "qualités" du directeur général du FMI. 

Dans la majorité, chacun y va de sa petite phrase sur Dominique Strauss-Kahn, actuel directeur du FMI et possible candidat à la présidentielle de 2012. "Tout le monde s'accorde, et j'en fais partie, pour dire qu'il (DSK) fait un très bon travail au Fonds monétaire international", a déclaré Christine Lagarde sur France 2 ce mardi matin. "Il soutient les thèses françaises pour ce G20, donc nous avons besoin de lui là où il est." Interrogée sur l'opportunité d'une candidature de l'ancien ministre socialiste de l'Economie à la présidentielle, Christine Lagarde a précisé : "cela relève du choix intime de chacun des individus concernés. Moi, je constate simplement que c'est un partenaire de qualité comme directeur général du Fonds monétaire international."

De son côté, Brice Hortefeux, ministre de l'Intérieur, a estimé sur LCI que "Dominique Strauss-Kahn, qui est aujourd'hui loin de la France", n'était "pas forcément le mieux placé pour connaître les problèmes des Français au plus près". La France, selon le ministre, "il la connaît aujourd'hui moins bien du fait de ses responsabilités qui l'éloigne de notre pays".
Des déclarations qui interviennent après d'autres ce week-end, qui ont fait réagir vivement les socialistes. Le secrétaire d'Etat au Commerce extérieur, Pierre Lellouche, avait jugé dimanche que le directeur général du FMI incarnait la "gauche ultra-caviar", et Christian Jacob, président du groupe UMP à l'Assemblée nationale, estimé qu'il représentait "plutôt bien" les bobos, les électeurs "bourgeois-bohème". "Ce n'est pas l'image de la France, de la France rurale, de la France des terroirs et des territoires, de la France qu'on aime bien", avait déclaré l'ancien ministre de l'Agriculture.
"Gauche caviar ? Non, plutôt gauche couscous"
Ces propos ont déclenché la colère des proches de Dominique Strauss-Kahn, relayés lundi par une mise au point du porte-parole du Parti socialiste, Benoît Hamon, pour montrer "ce que nous accepterons et ce que nous n'accepterons pas" pendant la campagne présidentielle de 2012. Lors du point de presse hebdomadaire du PS, il a dénoncé "les relents très moisis" de la polémique, laissant entendre, à l'instar des partisans de Dominique Strauss-Kahn, que celle-ci avait une connotation antisémite.
De son côté, Jean-Christophe Cambadélis, secrétaire national du PS et proche de DSK, a jugé mardi que les sondages d'opinion actuels donnant le patron du FMI tantôt ultra favori, tantôt en baisse, étaient "irréels". "Vous savez, Dominique Strauss-Kahn, c'est pas la gauche caviar, ce serait plutôt la gauche couscous. On mange plus de couscous à Sarcelles qu'à Neuilly (...) On ne peut pas dire que des hommes et des femmes qui gagnent de l'argent, qui ont des responsabilités à l'échelle internationale sont incapables de comprendre la situation française et la situation des Français. C'est pas très compliqué, cela n'a pas beaucoup changé depuis cinq ans, cela s'est aggravé", a poursuivi le député de Paris.

L'UMP SE RIDICULISE EN VIDANT SON CHARGEUR AVANT QUE LA CIBLE SOIT RÉELLE. 
MAIS ÇA, C'EST UNE AUTRE HISTOIRE.

L'opposition iranienne défie à nouveau le régime

Des manifestations ont été durement réprimées lundi par le pouvoir, qui craint la contagion égyptienne. Une personne a été tuée.
Pari tenu. Après plus d'un an de silence, les insoumis de Téhéran ont osé reprendre, lundi, le chemin de la contestation. Rassemblés par grappes éparses -pour tenter de contourner les cordons sécuritaires déployés à travers la capitale -, ils sont plusieurs milliers à s'être déplacés, à pied ou en voiture, de la place Imam Hossein à la place Azadi (Liberté), dans l'ouest de la capitale. Dans les contre-allées, à l'abri du regard des officiers de police, les plus enhardis se sont même risqués à crier quelques slogans. «Mort au dictateur !» ou encore «Libérez les prisonniers politiques !», peut-on entendre sur quelques vidéos d'amateurs transmises au Figaro . Une jeune femme, présente sur les lieux, raconte avoir également noté de nouveaux slogans, inspirés des révoltes du monde arabe, comme «Moubarak ! Ben Ali ! Nobaté Seyed Ali !» («Moubarak ! Ben Ali ! Au tour de Seyed Ali» - en référence à Ali Khamenei, le guide suprême).
Sur d'autres images, en provenance de villes de province - Ispahan, Tabriz, Kermanchah -, on peut voir les manifestants faire le v de la victoire, les doigts tendus vers le ciel. Une victoire qui reste néanmoins relative. En fin d'après-midi, les rassemblements pacifiques ont viré, dans plusieurs endroits, en accrochages entre manifestants et forces de l'ordre. Ces dernières ont chargé la foule avec du gaz lacrymogène. Les contestataires, eux, ont brûlé des bennes à ordures renversées sur la chaussée. Un mort par balle et plusieurs blessés ont été signalés des deux côtés. «On s'attend à des clashs pendant la nuit», prévenait, en fin de journée, Arash, un manifestant joint par téléphone.
Officiellement, la manifestation, lancée à l'initiative des deux principaux leaders de l'opposition, Mir Hossein Moussavi et Mehdi Karoubi, avait pour objectif de «soutenir la lutte des peuples égyptien et tunisien» contre la «dictature», en saisissant au pied de la lettre les discours anti-Moubarak du pouvoir iranien. Officieusement, il s'agissait d'une journée «test» pour la dissidence iranienne, largement fragilisée par une répression sans merci. Depuis plusieurs mois, la «vague verte» née de la contestation postélectorale de juin 2009 - et dont l'activisme, à travers Facebook, Twitter et YouTube inspira les résistants tunisiens et égyptiens - peine à se ressaisir. L'expulsion de nombreux étudiants de l'université, l'arrestation de milliers de manifestants, la condamnation de journalistes et dissidents à de lourdes peines de prison - voire à la pendaison pour certains - ont rendu quasi impossible toute nouvelle forme de mobilisation.

«Un nouveau départ»

En fin de semaine dernière, l'étau s'était resserré d'un cran avec l'interpellation d'une vingtaine de personnes proches des ténors de l'opposition et le brouillage stratégique des programmes en persan de la chaîne britannique BBC - très regardés par les jeunes. Lundi, Mir Hossein Moussavi et Mehdi Karoubi ont même été empêchés de sortir de chez eux par des agents en civil. Craignant une contagion venant d'Égypte, les autorités avaient fait couper leurs lignes téléphoniques. Contactés sur place, plusieurs manifestants ont également fait part de leurs craintes d'être convoqués par les services de renseignements dans les jours à venir. «Mais ça valait quand même le coup d'aller manifester», précise l'un d'entre eux, qui y voit «un nouveau départ». Pourtant, il sait que les obstacles au changement sont encore très nombreux. Selon lui, on ne peut pas comparer l'Iran à l'Égypte ou à la Tunisie. «Les Tunisiens ont eu la chance d'avoir l'armée de leur côté. Ici, ce n'est pas le cas. Et puis, en Tunisie comme en Égypte, les couches défavorisées ont joué un grand rôle dans les manifestations. En Iran, le mouvement vert, encore très citadin, devrait en tirer des leçons pour l'avenir», dit-il.

Le commentaire politique de Christophe Barbier


Une initiative élégante

Pressé de divers côtés, politiques ou associatifs, d’annuler l’« Année du Mexique », qui est marquée en France, le président Nicolas Sarkozy a pris, hier, une décision qui devrait recueillir l’assentiment général. Le chef de l’État avait, au préalable, reçu à l’Élysée la famille de Florence Cassez, détenue au Mexique, où elle est condamnée à 60 ans de prison pour « complicité d’enlèvements ». Les proches de la détenue, dont la Cour suprême du Mexique a rejeté un pourvoi, la semaine dernière, ont eu la primeur de la décision présidentielle. Celle-ci est conforme à la demande que la jeune Française avait elle-même exprimée, depuis sa cellule : il faut maintenir les manifestations dédiées au Mexique dans l’Hexagone, non pour oublier, pour faire diversion, mais en rappelant à chaque occasion la situation de cette femme de 36 ans, originaire du Nord de la France. Il faudra trouver la manière et le ton justes. La provocation ou l’insulte ne contribueront pas à améliorer le sort de la prisonnière, vis-à-vis d’un pays démocratique, qui argue de sa souveraineté et exige de l’étranger le respect de ses lois. Et dont on doit comprendre aussi que l’opinion publique est révoltée par l’industrie du rapt, qui commet le nombre pharamineux de quelque huit mille enlèvements par an ! Florence Cassez a eu, pour le moins, la malchance ou le mauvais goût d’être liée à un monsieur dont personne, apparemment, ne conteste qu’il a trempé dans cette activité repoussante. L’année du Mexique peut être l’occasion de mieux connaître la richesse humaine, patrimoniale, économique et artistique de cette nation. Elle doit permettre de suggérer — poliment — à ses gouvernants que l’image de leur pays ne sera vraiment flatteuse que s’ils font, aujourd’hui, un effort d’humanité digne de la civilisation dont le Mexique se dit porteur.

L’autre grand défi

La révolution égyptienne a non seulement « surpris » les États-Unis et mis en évidence les criantes incompétences de l’Europe, elle pose un énorme défi à Israël.

Imaginons une Égypte qui deviendrait vraiment laïque et démocratique. Ou, du moins, qui s’orienterait vers une société « à la turque » avec un avenir économique sous un islam modéré surveillé par une armée jalouse de ses privilèges. Cette Égypte, déjà traditionnellement phare du monde sunnite, ferait vite des émules. Pourquoi pas jusque dans les Territoires palestiniens, en commençant par la Cisjordanie ? Comment se comporterait le gouvernement israélien face aux nouvelles démocraties à ses frontières ? En poursuivant sa politique de colonisation, en continuant à refuser la création d’un État palestinien vraiment viable ? Quelle serait l’attitude de Tsahal si des centaines de milliers de Palestiniens venaient pacifiquement manifester devant le « Mur » et les multiples « checkpoints » ?

Déjà, l’Autorité de Ramallah, après avoir soutenu le régime Moubarak jusqu’à son dernier souffle, a pris un virage à 180 degrés. En organisant, dès cet été, des élections municipales, législatives et présidentielle. En abandonnant officiellement les négociations avec Israël, jusqu’à dissoudre les services concernés. Il est vrai que rien ne peut aboutir sous le gouvernement Nétanyahou resté insensible aux pressions de Washington, notamment sur la politique de colonisation grignotant jour après jour l’espace palestinien.

Pour Israël, ces élections palestiniennes ouvrent une nouvelle porte sur l’inconnu. Ou le « virus » démocratique gagnera. Ou le Hamas l’emportera avec, à la clé, une nouvelle et sanglante intifada très vite encouragée, voire prolongée à la frontière libanaise, par le Hezbollah. Sans oublier la Syrie. Un cauchemar pour Israël !

Ce n’est pas le seul scénario du pire. En Égypte comme en Tunisie l’aspiration à la liberté s’accompagne de revendications sociales légitimes lorsque la moitié de la population (en Égypte) vit avec moins de 1,50 euro par jour. Mais ces remous peuvent mener à d’incontrôlables instabilités que voudront « canaliser » les nostalgiques du panarabisme et les fractions les plus intégristes des « Frères musulmans ». A la « paix froide » du Sinaï (qui, dans le cadre des traités israélo-égyptiens, a permis à l’État hébreu de réduire de moitié ses dépenses militaires) succéderaient de nouvelles et dangereuses tensions. Apparemment, en applaudissant à leur façon la chute de Moubarak « pro-américain et pro-sioniste », l’Iran et ses affidés misent à fond sur cette carte nauséabonde.

Aux Occidentaux, aux Russes et aux Chinois aussi, de réagir rapidement, tant la région est stratégique, politiquement et économiquement (le canal de Suez reste une artère vitale). Aux Américains d’affirmer leur leadership, y compris face à Israël. Et aux Européens de comprendre que certaines aides sont plus urgentes que la création d’un dispendieux et inutile « service diplomatique » de l’UE. Il y va de la paix.


Justice : un nécessaire armistice

Ne jamais parler trop vite. Tourner sa langue sept fois dans sa bouche. La précipitation est toujours mauvaise conseillère... Ces bons vieux adages, le président de la République devrait les faire siens. Dans l'affaire du crime atroce de la jeune Laëtitia Perrais, à Pornic, Nicolas Sarkozy a sans doute laissé parler son coeur après avoir reçu la famille d'accueil de la jeune femme, mais il a trop vite évoqué des sanctions à l'encontre des magistrats fautifs, comme s'ils avaient facilité un tant soit peu, par permissivité, cet acte odieux.

Les rapports d'inspection, dévoilés, hier, par le gouvernement, sont pour le moins nuancés. Ils confirment des dysfonctionnements, un tri des dossiers malencontreux, un manque de coordination et de dialogue entre les services de l'administration pénitentiaire, mais ils pointent tout autant les faiblesses d'un système judiciaire qui court après des moyens et des effectifs suffisants.

Ici, des conseillers manquent ; là, des juges d'application des peines, des greffiers, des fonctionnaires font défaut. Le budget de la Justice augmente, chaque année, depuis plus de douze ans, mais la paupérisation de certains services est telle que les tribunaux ont le sentiment d'appartenir à la tribu des Shadoks. Ils pompent, ils pompent, mais le niveau de l'eau, du fait d'un recours de plus en plus fréquent des citoyens aux tribunaux, monte toujours... La justice est un service public au bord de la noyade. D'où cette fronde inédite, qui a surpris tout le monde, les magistrats les premiers, car ils n'ont pas la réputation d'être des révoltés battant le pavé à la première occasion.

À l'image de toutes les professions exposées, ils redoutent les sanctions publiques. Les médecins aussi. Les notaires, les avocats... Fermons la liste. Longtemps, on a cru leur impunité parfaite. Ils réglaient entre eux, au sein du Conseil supérieur de la magistrature, les fautes et les incompétences des confrères, dans la plus parfaite discrétion. Ce temps-là est révolu, et tout citoyen peut désormais saisir la juridiction disciplinaire.

Les magistrats échapperont donc de moins en moins à la règle commune. Il est malséant, aujourd'hui, de leur reprocher leurs silences de jadis. Si l'un d'eux avait commis une faute manifeste dans le traitement du dossier de Tony Meilhon, nous le dirions. Mais ce qui transparaît, c'est tout autre chose et cela n'a rien de rassurant. La France construit des prisons, mais néglige la réinsertion des détenus, leur suivi, leur traitement psychiatrique quand il est nécessaire.

Non seulement les juges ne sont pas laxistes, mais toutes les études sérieuses révèlent une sévérité accrue et continue des peines. On est loin d'emprisonner autant qu'aux États-Unis, mais la France, selon les prévisions des services pénitentiaires, placera, d'ici à 2017, environ 80 000 personnes sous écrou. Les maisons d'arrêt resteront surpeuplées, les conditions de vie indignes d'un pays moderne.

Cette politique sécuritaire est censée rassurer l'opinion. Mais la violence ne décroît pas, bien au contraire. Il y a nécessité absolue de remettre à plat les priorités judiciaires. Construisons moins de prisons, mais faisons en sorte qu'elles ne soient plus des écoles de la récidive et du crime. Alors, loin de se rejeter les responsabilités, d'accuser l'autre de tous les maux, le gouvernement et les magistrats pourront signer un armistice intelligent et nécessaire.

Chines


L’époque est aux classements et aux palmarès. Tout se calcule, se comptabilise, se «statistise». Et dans le registre mondial, c’est la Chine qui, depuis quelques années, décroche la timbale, dépassant une à une les vieilles puissances dans tous les domaines. Pour la seule journée d’hier, elle a enregistré deux progressions spectaculaires. Elle est officiellement devenue la deuxième puissance économique mondiale, devant le Japon, juste après avoir doublé l’Allemagne. Mais la surprise est venue d’un autre palmarès, la consommation de vins et spiritueux français : les buveurs chinois hissent leur pays parmi le cinq majeur, à portée de verre de la Belgique. Et cela grâce au haut de gamme - champagne, cognac et (que les beaujolais et côtes-du-rhône nous pardonnent) bordeaux. De quoi se réconcilier avec la mondialisation: la Terre est plate, et les Chinois ronds.

Les immigrés de la révolution

Révolution du jasmin ou pas, l’herbe leur semble plus verte ailleurs. Nombre de Tunisiens imitent Ben Ali dans son exil, avec cependant les poches un peu moins pleines. Ils se tournent vers le vieux continent, la porte à côté, en quête d’un avenir meilleur. Nul ne pourra les convaincre que la prospérité, chez nous, a vécu. 5 000 d’entre eux, en quelques jours, ont débarqué sur l’île de Lampedusa, au large de la Sicile. Pourquoi quitter la mère patrie, au moment où la démocratie s’y installe ? “Ces nouveaux réfugiés fuient la pauvreté, le désordre et les grèves” estime l’Onu. Car la chute du régime bénaliste a aussi entraîné celle des revenus liés au tourisme (-40 % en janvier) et une grande incertitude économique. Personne n’ose encore prétendre que “c’était mieux avant”, mais on sent bien que le vent tourne. L’enthousiasme des opinions occidentales vis-à-vis du “réveil des peuples arabes” baisse soudain d’un cran. “L’explosion du Maghreb risque d’avoir un effet dévastateur sur toute l’Europe” s’alarme le ministre italien de l’Intérieur, en sonnant le tocsin communautaire. Roberto Maroni parle même “d’un exode biblique jamais vu auparavant.” Sans remonter jusqu’à Moïse, ni jouer sur les peurs ancestrales, le spectre d’une “vague migratoire” se profile. On ne l’arrêtera pas à coups de matraque, plutôt par une aide accrue au développement de la Tunisie. Pourvu qu’aucune corruption, là-bas, ne vienne en détourner l’objet…

Comment Moubarak a géré ses derniers jours au pouvoir

Il n’est plus là, mais est quand même encore dans toutes les têtes. Les Égyptiens s’interrogent sur les derniers jours de la présidence Moubarak. Comment le vieux rais a-t-il pu rester si sourd aux appels de la rue ? À cause du ministre de l’Intérieur et de son fils.
C’est initialement le très détesté ministre de l’Intérieur qui semble avoir induit le raïs en erreur. “Le rapport qu’a fait parvenir Habib el-Adli au président Moubarak avant le mardi 25 janvier minimisait l’importance de la manifestation” qui sonné le début de la révolte, selon Al-Ahram. Par la suite, il était convaincu “qu’il s’agissait d’une poignée de familles et que tout était sous contrôle”.

Un ministre et un fils haïs

Autre fait qui ressort, c’est la main de Gamal, décrit comme un ambitieux, qui était la plus visible dans les discours de son père pendant toute la crise. “Gamal n’a compris que très tardivement qu’il était hors-jeu... C’est pour cela que les discours ne correspondaient pas à ce que les gens voulaient entendre”, note Al-Ahram .
Jeudi, avant la dernière apparition de M. Moubarak à la télévision, Gamal aurait convaincu son père d’annoncer des réformes. La stratégie du fils cadet n’aurait pas fait l’unanimité, même au sein de sa propre famille. Selon Al Akhbar (officiel), les deux fils du président, Alaa, l’aîné, et Gamal, en sont presque venus aux mains après l’enregistrement du discours du 10 février, objet d’un “montage” afin d’introduire des propos plus fermes envers les manifestants. “Tu as pourri le pays quand tu as ouvert la voie à tes copains (des milieux d’affaires) et voici le résultat. Au lieu que ton père soit honoré à la fin de sa vie, tu as œuvré pour salir son image”, s’est écrié Alaa à l’adresse de son frère, rapporte le quotidien.
Toujours selon le quotidien officiel, ce discours a été remanié au dernier moment, à la grande surprise des États-Unis qui s’attendaient à un autre ton...

Éthique et lucidité : comment aider la Tunisie et l’Égypte ?

par Robert Lanquar, pro­fesseur aux Universités et expert international à l'Organisation Mondiale du Tourisme (OMT). 

Les évènements actuels dans les pays arabes vont profondément affecter le tourisme méditerranéen. Pour le court terme, certains s’en félicitent : avec cynisme, ils se disent que ce que ceux-là perdent, ils le gagneront. D’autres s’en inquiètent pour plus tard, croyant à la montée d’un islamisme qui réduirait à peau de chagrin, tourisme et commerce international, et tous les processus de paix : leur peur alimente les stéréotypes  qui durant plus d’un siècle ont basé les affrontements entre les deux rives de la Méditerranée.

Il s’agit de viser plus d’éthique et d’être lucide. Nous avons affaire à une révolution démocratique née dans la douleur de la crise économique et alimentaire. Deux vecteurs l’ont facilité: la meilleure éducation des jeunes  et l’usage de plus en plus répandu des technologies de l’information et de la communication. Wikileaks a montré toute l’hypocrisie des soi-disant secrets diplomatiques, politiques, bancaires et autres. La jeunesse arabe a relayé ces informations à travers les réseaux sociaux, le téléphone mobile et les SMS. 
L'UpM reste silencieuse
Ce n’est pas la théorie des dominos qu’il faut utiliser si on veut expliquer ce qui se passe aujourd’hui dans le monde arabe. Cela n’a pas fonctionné du temps de Nixon et Kissinger pour l’Asie du sud-est. Cela ne montre pas l’incidence des mouvements de foule qui font tâche d’huile, ce que les responsables de l’Union pour la Méditerranée comprennent avec difficulté. La posture de cette dernière étonne, après la démission fin janvier de son Secrétaire général basé à Barcelone, le jordanien Ahmad Massa’deh, sans donner trop de précisions sinon qu’il  « quitte son poste, car les conditions dans lesquelles il l’a accepté ont changé ». 
Sans porte-parole, l’Union pour la Méditerranée reste silencieuse. Quels que soient les arguments de la realpolitik, par le biais de la réussite économique, l’Union devrait permettre l'avènement de sociétés pluralistes se respectant mutuellement. La spectaculaire révolution tunisienne prouve que le monde arabe change vite, peut-être plus vite que n’évolue le rapport de l’Europe à celui-ci. 
  

Un effet de mode

En même temps, tous sont d’accord pour que l’agitation ne dure pas trop de temps afin que reprennent les mouvements touristiques et que la saison printanière et estivale se déroule dans les meilleures conditions.
On pourra jouer avec l’effet de mode, celui de vivre la movida de la Révolution de Jasmin ou de celle de la Place Tahrir. Pour 2011, Euromonitor prévoyait une chute de 30% du tourisme tunisien fin janvier, la récupération serait lente et il faudrait attendre 2014 pour retrouver les niveaux de 2010. 
D’autres modèles, comme celui que nous avons élaboré pour MED 11 Prospective estiment par contre qu’en 2012, nous retrouverons ces niveaux de 2010. La disparition de certains abus de pouvoir, la réforme de la bureaucratie et une politique d’aménagement du territoire plus équilibrée, moins néolibérale, favorisant un tourisme responsable, durable et solidaire, pourraient booster le tourisme tunisien. Les compétences sont là, la motivation ne l’était plus dans un pays où les droits de l’homme avaient été bafoués. La Tunisie avec ses 10,4 millions d’habitants, dont 42% ont moins de 25 ans, au PIB par habitant de 8600 $, a d’importantes potentialités. Elle pourrait innover dans de très nombreux secteurs du tourisme, comme elle l’a déjà fait avec le tourisme médical et la thalassothérapie.  

Pour l’Égypte, l’OMT par la voix de son Secrétaire général, Taleb Rifaï,  faisait remarquer que le tourisme représente au moins 11% du PNB égyptien et qu’il génère plusieurs millions d’emplois. Il venait de signer fin décembre un accord avec l’Égypte pour renforcer sa compétitivité internationale et ses capacités statistiques avec un projet de benchmarking par un compte satellite du tourisme. L’année 2010 avait battu tous les records avec plus de 14 millions d’arrivées de touristes internationaux par rapport à 12,5 millions en 2009. La crise pourrait faire perdre plus de 2,5 milliards € seulement cet hiver et faire revenir les arrivées du tourisme international au niveau de 2005. Mais dès 2013, un scénario MED 11 Prospective nous montre qu’il serait possible de retrouver les records de 2010.    

Que faire ?

Bien sûr, la Commission européenne a mis en place début février un plan d'aide en faveur de la Tunisie et de l'Égypte afin de répondre à leurs "nouveaux besoins" et "pour apporter un large soutien au processus de transition" selon les déclarations de Stefan Füle , Commissaire européen chargé de l'élargissement et le président José Manuel Barroso d’ajouter qu’il souhaitait  apporter un large soutien à ces pays. Sans doute, les négociations pour le statut avancé de la Tunisie se dérouleront avec une attitude plus conciliante des représentants européens. Les solutions sont sur la table depuis plusieurs mois, ces derniers sont dans l’obligation de les accepter plus rapidement.  Cela accélérera alors les discussions avec les autres pays et l’Union pour la Méditerranée pourrait être mieux acceptée dans les couloirs de Bruxelles comme l’agora des relations entre l’Europe et le monde méditerranéen du sud et de l’est.   
    
Mais c’est aux professionnels du tourisme des pays émetteurs comme la France ou l’Espagne de réagir de leur coté, plus positivement. Il ne s’agit pas comme l’ont fait les responsables des îles Canaries de crier haut et fort et de le faire savoir, que cette crise les arrange et qu’ils attendront des taux d’occupation de 100%. Les mauvais résultats qu’ils ont connus jusqu’à présent n’étaient pas seulement dus à la concurrence des pays méditerranéens arabes, sinon à leur manque de compétitivité et leur incapacité de rénover leurs produits et services pour faire face à l’évolution de la demande touristique.   
    
Un sondage vient de montrer que 44% des Français qui comptaient se rendre en Tunisie cette année veulent aujourd’hui passer leurs vacances dans une autre destination. Comment les convaincre que dans quelques mois, sinon dans quelques semaines, la situation redeviendra complètement normale en Tunisie ? Comment relancer cette destination sinon par des opérations de promotion comme celle des « Engagements du Jasmin » signée le 9 février à Paris à l’Institut du Monde arabe ? Les tour-opérateurs français viennent tout juste de se rendre à Tunis pour discuter du plan de relance que le nouveau Ministre du tourisme et du Commerce,  Mehdi Houas, leur a présenté. Mr. Houas était le PDG cofondateur de Talan, une entreprise basée à Marseille pour le développement des nouvelles technologies de l’information et de la communication, une très bonne expérience pour permettre aux opérateurs tunisiens de tourisme de mieux contrôler la distribution. Ces professionnels savent qu’il est urgent d’agir, les jours sont précieux, d’autant qu’aucun assureur ne veut garantir la perte d'exploitation liée à des événements comme ceux survenus en Tunisie et en Égypte, les qualifiant en assurance "d'émeutes et mouvements populaires".    

Le paradigme de Cordoue

Les Britanniques ont levé leur mise en garde sur les voyages en Tunisie. Autre bonne nouvelle en Grande-Bretagne, les grands tour-opérateurs Thomas Cook, Thomson and First Choice reprendront leurs vols vers Monastir au 27 février. Pour Thomas Cook, on reviendrait à la normalité pour toute la Tunisie après le 2 mars.Tripadvisor a vu le nombre des informations d’intérêt sur la Tunisie augmenter de plus de 18% ces deux dernières semaines. 
D’autres pays européens sont en train de les suivre. En Espagne, Casa Arabe pourrait prendre le leadership d’une opération similaire à la parisienne. Après la réussite à Cordoue, à la fin de la première semaine de février de sa réunion sur le « Paradigme de Cordoue » co-organisée avec les Rencontres d’Averroès de Marseille, une initiative de Casa Arabe montrerait sa volonté de faire du tourisme un élément de sa stratégie pour faciliter « l’interculturalité » et la connaissance du monde arabe. Elle devrait en outre monter avec des professionnels du tourisme et agences de voyages, des circuits et croisières culturelles comme le font d’autres institutions, défendant les mêmes objectifs en Europe.    
     
Que va-t-il en être dans les autres pays arabes? La situation égyptienne prendra plus de temps à être réglée, même si tout est fait pour éviter la violence grâce à l’armée.  Le Yémen, la Jordanie, le Liban comme la Syrie, pays qui commençaient à être considérés comme des destinations touristiques aux excellentes potentialités, vont peut être vivre des moments difficiles. La Tunisie doit leur servir d’exemple pour que la transition démocratique n’altère pas le retour à la normalité touristique, une industrie qui emploie des millions de personnes.     

L'homme fort de l'euro

Les erreurs ne deviennent pas des vérités par la seule force de la répétition : non, la deuxième économie mondiale n'est ni le Japon déchu ni la Chine nominée depuis hier. C'est la zone euro et les seize pays la composant qui occupent cette place derrière les Etats-Unis. Pourquoi cette réalité pourtant assise sur une histoire commune et une monnaie unique a-t-elle tant de mal à être vue et reconnue ? Pour une raison simple. L'Europe n'a ni numéro de téléphone, selon la formule consacrée, ni visage clairement identifié. Pour que ce triste état de fait change, on ne peut guère compter, hélas, sur le versatile José Manuel Barroso (1) et le transparent Herman Van Rompuy (2). Un homme, en revanche, incarne désormais chaque jour de mieux en mieux aux yeux de l'extérieur -responsables politiques et économiques, marchés -le credo de l'euro. Cet homme, c'est Jean-Claude Trichet. Le patron de la Banque centrale européenne a donné la visibilité nécessaire et la crédibilité indispensable à la seule institution fédérale du Vieux Continent. Souvent moqué au début de son mandat pour sa défense acharnée de la stabilité des prix, il est aujourd'hui respecté, à Francfort, New York ou Tokyo. Son pragmatisme pendant la crise a enfin fait ses preuves.

C'est la raison pour laquelle le processus qui doit conduire à sa succession à l'automne doit être un sans-faute. Les Européens n'auront pas le droit à l'erreur pour le choix du nouveau président, le troisième de cette encore jeune banque centrale. Or, c'est mal parti. Pas tant à cause du coup de théâtre que représente le retrait surprise d'Axel Weber, le candidat de Berlin, que du désarroi dans lequel il a plongé les dirigeants européens. En passant, on notera que si la rumeur de son passage de la Buba à la Deutsche Bank était fondée, elle renverrait à leur juste proportion nos débats sur les conflits d'intérêts ! Quoi qu'il en soit, c'est peu dire que l'Allemagne ne sort pas en bonne posture de cette décision qui a pris au dépourvu la chancelière Angela Merkel elle-même. De son côté, Paris peut bien sûr se réjouir secrètement de cet embarras germain qui rouJvre le jeu, et rêver d'installer un autre Français. Mais à quelques mois de l'échéance, il est troublant de constater qu'aucune figure ne se dégage vraiment, qu'il s'agisse d'un autre Allemand, de l'Italien Mario Draghi ou d'un représentant d'un pays tiers. Si un interstice juridique le permettait, Jean-Claude Trichet serait prolongé. Faute de quoi, le couple franco-allemand, moteur dans cette affaire, ne doit avoir qu'une priorité : éviter d'offrir le spectacle de la cacophonie et de l'hésitation.

(1) Président de la Commission européenne.(2) Président du Conseil européen.

Microsoft va payer "des milliards" à Nokia

Stephen Elop, le nouveau directeur général de l’équipementier finlandais, promet que l’adoption de la plateforme Windows Phone 7 n’est pas une "transition" avant l’abandon des systèmes d’exploitation Symbian et Meego.

Nokia a-t-il passé un marché de dupes avec Microsoft ? Microsoft semble effectivement être le grand gagnant de cette alliance nouée dans le plus grand secret, après quatre mois d’intenses tractations. L’alliance avec Nokia devrait installer ce nouvel acteur sur le marché des systèmes d’exploitation, alors qu’il n’a vendu que 2 millions de smartphones "Windows Phone 7" en tout et pour tout.
C’est ce que le patron du groupe finlandais, Stephen Elop, a appelé une "course à trois chevaux". Windows va pouvoir jouer à armes égales à côté d’Apple et d’Android. Venu à Barcelone les mains vides, puisqu’aucun téléphone n’est encore né de cette union, il s’est livré à un exercice de communication. Certains auraient préféré que Nokia signe avec Google pour doper immédiatement sa part de marché aux Etats-Unis. Symbian, la plateforme de Nokia pour les smartphones, a un gros problème là-bas : les développeurs américains l’ignorent. La part de marché de Nokia aux Etats-Unis n’est que de 4%. Or c’est là que sont les revenus et que se dessinent les tendances de l’Internet mobile. Avant même l’arrivée d’Elop, le groupe a donc mis sur pied avec ATT un centre pour le design de futurs smartphones en Californie. Nokia a aussi étudié l’opportunité d’adopter le système d’exploitation numéro un aux Etats-Unis, Android.

Mais Stephen Elop, qui était encore un cadre dirigeant de Microsoft il y a cinq mois, en a décidé autrement. "Si nous avions conclu un partenariat avec Android, nous aurions créé un duopole. Cela aurait énormément compté pour eux. Mais cela compte tout autant pour Microsoft que nous n’ayions pas signé avec Google", a t-il expliqué hier à Barcelone dans un entretien avec "Les Echos" et d’autres journaux européens. Stephen Elop a insisté sur cet aspect pour faire valoir que Nokia, "courtisée par deux des entreprises technologiques les plus en vue dans le monde", a su négocier une contrepartie.
Comme, par exemple, un gros rabais sur les royalties. En effet, contrairement à Android, Windows Phone 7 est une plateforme payante. La licence est habituellement estimée à une quinzaine d’euros par téléphone. "Nous sommes le plus gros fabricant au monde, on peut espérer que nous ayions négocié un très bon deal", a commenté un Stephen Elop goguenard. Surtout, a-t-il expliqué, Microsoft va verser à Nokia "des milliards de dollars" pour devenir un grand du mobile.
Et il ne s’agit pas seulement de ressources libérées. Certes, les frais de fonctionnement (Opex) vont diminuer. Oui, des développeurs seront licenciés, y compris en Finlande. Mais certains d’entre eux ont d’ores et déjà été reconvertis sur Windows Phone 7 (Nokia ne s’interdit pas de les reclasser chez son partenaire à terme). Et les investissements en développement seront réorientés : "Une grande partie de la valeur va aller vers le marketing, la R&D", a souligné Stephen Elop.

En fait, Nokia s’est également fait payer en espèces sonnantes et trébuchantes pour choisir Microsoft. Stephen Elop n’a pas voulu préciser le montant de l’engagement de son partenaire, ni le nombre d’années. Mais il a salué l’entrée de Nokia sur un tout nouveau marché, celui de la publicité. Microsoft dispose de sa propre régie publicitaire, de son moteur de recherche Bing pour vendre des liens sponsorisés, et de nombreux sites très visités, qui constituent un inventaire appréciable.
Sacrée transformation pour Nokia. D’autant plus que jusqu’à vendredi dernier, seules 200 personnes dans le monde sur 60.000 ont été tenues dans la confidence du choix d’Elop. A présent, il doit expliquer, et rassurer… mais pas trop : "Nous devons faire évoluer la culture. Nous sommes trop lents, tout le monde le sait. Nous devons également être humbles, reconnaître que nous sommes un challenger. Nous avons été arrogants", explique le dirigeant.
Pour autant, insiste-t-il, il ne faut pas interpréter le maintien des systèmes d’exploitation existants de Nokia comme une « transition » synonyme de mort lente. Windows sera la plateforme principale pour les smartphones, et l’objectif d’Elop est de faire redescendre le plus bas possible, vers le milieu de gamme, cette plateforme élitiste. Parallèlement, Symbian continuera d’être amélioré dans l’entrée de gamme, pendant des mois et même "des années", a indiqué la nouvelle patronne des smartphones Jo Harlow. Les deux systèmes convergeront progressivement. Enfin, Meego, fruit d’une alliance conclue avec Intel il y a un an, sera un "système d’exploitation généraliste", en pointe sur les futurs objets connectés. Il est juste surprenant que malgré sa stratégie de développement sur trois pieds, Nokia ait abandonné l’idée d’adapter son outil de développement QT à Windows. Il permettait de simplifier le travail des développeurs et d’unifier tous les systèmes d’exploitation de la maison sous une seule ombrelle. Mais Microsoft a sans doute de bonnes raisons de verser beaucoup d’argent à Nokia.

Luc Vigneron

Heureusement pour le PDG de Thales qu'il a piloté dans une vie antérieure le destin des chars Leclerc, car il va lui falloir un solide blindage pour résister au pilonnage dont il est l'objet. Sous la menace d'une éviction depuis un récent conseil gouvernemental de défense, ce X-Ponts avare de ses mots reste droit dans ses bottes pour défendre l'action qu'il a conduite depuis sa nomination il y a moins de deux ans. Le recentrage sur l'électronique de défense et l'aéronautique qu'il a imposé, de même que son plan d'économies, qui n'a épargné ni voitures de fonction ni chauffage des bureaux, sont mal passés parmi les personnels. Leur courroux a valu à ce patron solitaire de se retrouver caricaturé en autoritaire « camarade Lük » dans une édition pastiche de la « Pravda » et en adepte de la force obscure dans une parodie de « La Guerre des étoiles ». Ses tentatives de se concilier les faveurs de ses cadres en partageant avec eux des barbecues n'ont pas donné les résultats escomptés. Il est vrai que ce père de trois enfants, marié à une prof de maths, avait déjà subi ce genre d'avanies dans ses fonctions précédentes à la tête de l'ex-Giat, rebaptisé « Nexter » à son initiative, où son effigie avait été brûlée par les salariés. Cela ne l'a pas empêché d'imposer au groupe la cure d'assainissement qui lui a permis de renouer avec les profits. Le natif de Kaolack, port sénégalais où son père, magistrat, était en poste, pourra donc trouver quelque consolation à son actuelle disgrâce en méditant le proverbe de sa terre natale qui dit : « Si tu ne sais pas où tu vas, regarde d'où tu viens. ».

Nokia et la prophétie de Redmond


Enfin, Nokia a scellé une alliance digne de son rang. En annonçant vendredi dernier un partenariat stratégique avec Microsoft, la firme finlandaise a montré qu'elle n'était pas un géant malade, isolé et condamné au déclin. Jusqu'à présent, tout le monde voyait dans le fabricant de téléphones cellulaires nordique un patriarche en fin de règne, harcelé par des voisins avides de conquête, Apple, Samsung et Google avec ses mobiles Android. Mais le dernier survivant de l'aristocratie européenne du mobile a trouvé une autre puissance à qui s'adosser afin de réaffirmer son empire. Car Nokia sait encore imposer le respect. L'équipementier vend 453 millions de téléphones chaque année, dont 100 millions de « smartphones ». Leader mondial du mobile, la marque est connue sur toute la planète, et ses téléphones équipent aussi bien le pêcheur sénégalais que l'ouvrier chinois ou le trader de Wall Street.


Néanmoins le trader se raréfie. C'est là tout le malheur de Nokia : les riches préfèrent acheter un iPhone ou un BlackBerry, nettement plus conformes à l'idée qu'on se fait d'un téléphone haut de gamme. Et toute la gamme des N-Series ou E-Series se trouve d'un coup ringardisée. Par conséquent, Nokia ne profite pas autant que ses concurrents de l'explosion du marché du mobile depuis deux ou trois ans. Le groupe n'est pas assez présent sur les segments où les profits sont les plus plantureux. Sa part de marché totale, bas de gamme compris, s'effrite. Elle dépassait 40 % dans le monde, elle n'est plus que de 31 %. Dans l'univers impitoyable du mobile - Motorola ou Palm l'ont appris à leurs dépens -, les revers de fortune sont rapides et brutaux.


L'alliance qui vient de se nouer est donc également celle d'un groupe aux abois. Stephen Elop ne l'a pas caché. Le nouveau patron de Nokia n'a-t-il pas appelé ses troupes à prendre des risques hors du commun ? Des risques, son prédécesseur, Olli Pekka Kallasvuo, en a pris, lui aussi, mais il a échoué. Il y a tout juste un an, il avait également profité du Mobile World Congress de Barcelone pour dévoiler une alliance royale : le système d'exploitation de Nokia, Symbian, étant considéré comme insuffisamment compétitif dans l'univers du « smartphone », « OPK » avait annoncé en grande pompe le lancement d'une plate-forme logicielle alternative. Meego, coconçu avec le géant des microprocesseurs Intel, devait équiper les mobiles haut de gamme de Nokia. Cette solution ménageait la sensibilité des employés de la maison, fiers de leur savoir-faire et habitués par le passé à définir eux-mêmes les standards du marché.


Un an plus tard, aucun « smartphone » Meego n'a été livré. Il y aura un terminal d'ici à la fin de l'année, a tout juste reconnu Stephen Elop. A ce rythme, et face à des concurrents qui innovent en permanence grâce à des plates-formes déjà opérationnelles, Nokia ne s'en sortira pas, a-t-il analysé. D'où cette nouvelle alliance avec Microsoft, qui lui offre un système d'exploitation sur un plateau. Pour bénéficier de ce système prêt-à-l'emploi, Nokia a dû se lier avec un royaume plus puissant qu'Intel, mieux doté, et donc forcément plus exigeant.


L'éditeur de logiciels de Redmond est le grand gagnant de l'affaire. Il va en effet bénéficier du formidable marché mondial du finlandais pour donner une assise à son nouveau système d'exploitation. Ce dernier a été revu de fond en comble, il est maintenant parfaitement compétitif pour construire un écosystème de « smartphone » ; cependant le démarrage est poussif. Les constructeurs agréés, HTC, Samsung, LG, n'ont vendu que 2 millions de « Windows phones » en un trimestre. Microsoft va donc pouvoir accélérer.


Nokia ne devient pas pour autant un vaincu de l'histoire. Le groupe finlandais peut trouver en Microsoft une vraie planche de salut et, à sa façon, favoriser un nouvel accomplissement de la « prophétie de Redmond ». Avant de révolutionner le marché des PC dans les années 1980, Bill Gates et ses comparses de Microsoft n'hésitaient pas à prédire la fin du modèle vertical incarné par IBM. Un « Big Blue » qui pourrait se comparer à l'Apple d'aujourd'hui : un empire cultivant l'excellence dans une enceinte close. Chez IBM, on produisait les machines, les logiciels, tout en assurant le conseil et le maintenance informatique. Jusqu'à ce que Microsoft ouvre une brèche dans l'édifice en intercalant sa brique logicielle... sans en céder la propriété intellectuelle. Dès lors, il devenait possible de vendre Windows à d'autres fabricants d'ordinateurs. Les machines fabriquées par différents constructeurs ont pu se parler par logiciels interposés - on appelle cela l'interopérabilité. Les entrepreneurs n'ont pas tardé à comprendre que de nouveaux modèles économiques horizontaux étaient possibles. Les uns font les machines, les autres les logiciels. Diversité en amont ; domination d'un seul, Microsoft, en aval.


Cette révolution n'a pas encore eu lieu dans le mobile. Chez Microsoft, on attend qu'elle se réalise. La bataille du « smartphone » ne fait que commencer. Ces mobiles se vendent pour l'instant surtout aux urbains fortunés. Demain, ils devront se faire bon marché, s'adapter aux géographies locales, à des réseaux de distribution complexes. Il faudra des volumes importants pour faire baisser les prix. Nokia a toute sa place dans ce monde-là. Même si le géant finlandais doit payer des royalties à Microsoft pour utiliser Windows, il a encore une vraie valeur ajoutée avec ses gammes incroyables de terminaux, la qualité de ses produits et ses réseaux sur le terrain.


A moyen terme, ce modèle économique horizontal pourrait faire vaciller les verticales d'Apple ou de RIM. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si Android, la plate-forme de Google, qui est ouverte à tous les constructeurs, a réalisé les meilleurs gains de part de marché l'année dernière. Nokia était également en discussion avec Google avant de choisir Microsoft. Rien ne lui interdit à l'avenir de former une alliance supplémentaire avec le fameux moteur de recherche. On n'a jamais fini de consolider les marches d'un empire.

Quand l'Etat crée le brouillard

C'était trop compliqué. Finalement, l'impôt sur la fortune survivra. Et si le bouclier fiscal disparaît, il sera remplacé par un plafond. Le grand ménage de la fiscalité du patrimoine promis par le président de la République il y a trois mois a été volatilisé sous la pression des lobbies, la résistance des parlementaires et les savants calculs des experts de Bercy. Autrement dit, le système va devenir encore plus compliqué l'an prochain. Et ce n'est pas fini, car il est probable que le prochain président, de gauche ou de droite, tiendra à réformer lui aussi cet impôt stupide faute d'avoir le courage ou l'énergie de l'envoyer à la réforme.

Le journaliste aurait mauvaise grâce de s'en plaindre. Ca fait de beaux titres à la Une, des échauffourées à raconter, des clics sur Internet. Mais il en va tout autrement pour le citoyen, le contribuable, le patriote. Car l'Etat passe son temps à organiser la pagaille. Normalement, dans un monde qui bouge de plus en plus vite, où l'obsession du court terme chasse la vision à long terme, l'action publique devrait calmer le jeu, donner des repères, élargir l'horizon. C'est tout l'inverse qui se passe aujourd'hui. L'Etat crée de la volatilité, cette volatilité qu'il entend par ailleurs extirper des marchés financiers.

La preuve par trois exemples. D'abord, le marché de l'emploi. Près de 900.000 hommes et femmes travaillent dans la fonction publique en étant « non titulaires », soit 16 % du total. Pour parler clair, ils sont en contrat à durée déterminée. Au bout du compte, la précarité touche bien plus le secteur public que le secteur privé, où « seulement » 12 % des salariés sont dans des conditions précaires (CDD, intérim, stages). C'est le contrepoids inévitable d'une organisation du travail complètement figée du côté des fonctionnaires. Les uns ont l'emploi à vie, les autres la volatilité à vie.

Deuxième exemple : l'impôt, donc. Dans son rapport « Cartes sur table 2011 » publié la semaine dernière, le Medef donne des chiffres stupéfiants : « La taxe professionnelle a été modifiée 68 fois depuis 1975, le crédit impôt recherche 24 fois depuis 1982, la taxation des plus-values sur actions des particuliers 10 fois depuis 1989. » La frénésie ne s'arrête pas là. Pour reprendre l'ISF, il a été créé en 1989, plafonné à 70 % (impôt sur le revenu et ISF ne devaient pas dépasser cette proportion des revenus) puis à 85 %, puis le plafonnement a été déplafonné en 1995, puis recréé par le bouclier à 60 % en 2006 et à 50 % en 2007, le tout accompagné d'incessants changements de la base taxée. Le barème de l'impôt sur le revenu, lui, a changé en 1994, 1997, 2000, 2001, 2002, 2003, 2004, 2007 et 2011. Au lieu d'être un jardin à la française, notre fiscalité est une mer agitée aux vagues imprévisibles. Gare au promeneur, qui risque d'être emporté par une lame.

Troisième exemple : l'énergie solaire. Pour encourager l'essor de cette électricité verte, l'Etat avait décidé de la subventionner. Le kilowattheure solaire venant de panneaux intégrés aux constructions (toits, etc.) devait être acheté par EDF 60 centimes (alors que le particulier paie son kWh moins de 12 centimes). Le 1 er janvier 2010, ce prix a été abaissé à 42 centimes. Au 1 er septembre, il est passé à 37 centimes. Et à la fin de l'année, a été décrété un moratoire de trois mois pour les nouveaux projets...

Ces trois exemples ont tous la même conséquence : l'action de l'Etat crée le brouillard au lieu de le réduire. Près d'un million de salariés vivent dans l'angoisse du prochain contrat que voudra bien signer -ou non -son employeur public. Des millions de contribuables ne savent pas à quelle sauce ils seront mangés demain. Des centaines d'entreprises annulent leur projet d'équipement solaire, compromettant l'émergence d'une véritable filière pour laquelle la France avait pourtant de réels atouts. Même si chaque action, chaque décision, chaque changement peut se justifier par une excellente raison, leur enchaînement est injustifiable. Les Français n'ont d'autre choix que de s'y résigner. Il en va autrement pour les étrangers qui veulent investir en France : ils citent invariablement l'imprévisibilité de l'action publique comme l'une des principales barrières à leurs projets en France. Il est urgent de mettre fin au mouvement brownien. De décréter le moratoire des microchangements. De revenir à un Etat stratège.

Gagner avec l'argent que l'on n'a pas

Le sage Frédéric Thiriez, président de la Ligue nationale du football professionnel, vient de piquer un coup de sang qui mérite attention. C'était au début du mois, lors de la remise d'un prix par Michel Platini à son glorieux aîné Raymond Kopa, attaquant légendaire du Stade de Reims puis du Real Madrid dans les années 1950 et 1960. L'occasion était belle de comparer les conditions financières dans lesquelles les grands clubs évoluaient jadis par rapport à aujourd'hui.

Il faut préciser que cette sympathique cérémonie se déroulait quelques jours après que les clubs anglais se sont livrés à une furieuse compétition pour acquérir quelques joueurs renommés. C'est ainsi que Chelsea a acheté pour 60 millions d'euros à Liverpool le champion du monde espagnol Fernando Torres, alors que ce même Chelsea venait d'annoncer un déficit de 82 millions. Arsène Wenger, l'entraîneur français d'Arsenal, un des autres grands clubs de Londres, s'est aussitôt fâché en parlant de « dopage financier ». Frédéric Thiriez est allé encore plus loin. Il a déclaré que le football professionnel « allait dans le mur » s'il continuait de vouloir gagner des trophées avec de l'argent qu'il n'a pas. Et d'égrener l'énorme dette de 4 milliards d'euros du football anglais, le déficit de 150 millions d'euros subi l'an dernier par le foot français et même le déficit de 100 millions enregistré par le foot allemand qui faisait pourtant figure, jusqu'à présent, d'élève le plus sérieux de la classe.

« Gagner avec l'argent que l'on n'a pas. » Cela ne vous rappelle rien ? N'est-ce pas très ressemblant avec les contrats à terme, les « futures » des marchés financiers où l'on espère réaliser un bénéfice sur la vente à terme d'un produit que l'on n'a pas encore acheté pour la bonne raison que l'on ne dispose pas de l'argent nécessaire ? Thiriez regrette vivement que le football professionnel se soit ainsi engagé dans les pratiques spéculatives les plus critiquables des marchés financiers. Platini partage ce sentiment. On leur souhaite bonne chance dans leur bras de fer contre les faux milliards du foot.

Les nouveaux éléphants blancs

Après la pénurie, le trop-plein ? Les projets de stades de football ou de rugby se multiplient en France. Qu'il s'agisse de rénovations lourdes à Paris ou Marseille ou de la construction de nouvelles enceintes à Lille, Nice, Lyon ou Nanterre notamment, on ne les compte plus. A tel point que notre pays, souvent montré du doigt pour son manque d'arènes sportives de qualité, pourrait se retrouver dans peu de temps avec un parc de stadiums et autres arenas aux toits rétractables de premier ordre. Dans la perspective de l'Euro 2016 de football, c'est évidemment une bonne nouvelle.

Mais après ? Comment assurer la viabilité économique de ces grands vaisseaux ? C'est bien là la question à plusieurs centaines de millions d'euros. La construction de telles enceintes représente en effet un investissement considérable. De 3.000 à 6.000 euros par siège en fonction du niveau de prestations choisi. Pour les 25.000 places du tout nouveau stade du Mans, l'addition s'est ainsi élevée à 104 millions d'euros ! Difficile de compter sur la passion sportive des Français. Car, contrairement aux supporters britanniques ou aux « socios » espagnols, ils ne sont pas des spectateurs très assidus. Et comme il n'est plus question de compter sur la générosité publique pour porter à bout de bras des éléphants blancs synonymes de gouffres financiers, l'équation économique peut paraître compliquée à résoudre.

A entendre les promoteurs de ces projets, il s'agit pourtant là d'un combat d'arrière-garde. La rentabilité de ces nouvelles enceintes serait garantie. Car il ne s'agit pas de simples stades mais de projets urbains mêlant complexe immobilier, centre commercial et entreprise de spectacles offrant des manifestations sportives ou culturelles (concerts...). Cette recette a d'ailleurs fait ses preuves en Angleterre, en Allemagne ou aux Etats-Unis, expliquent-ils. L'idée est certes séduisante, mais il ne faudrait pas y voir une martingale. Car ce qui est vrai dans de grandes métropoles capables de drainer un large public ne l'est pas forcément dans des villes de taille moyenne pour lesquelles le poids financier de tels projets, mal calibrés, pourrait rapidement devenir insupportable.

Entre hier et demain

Imaginez le face-à-face : d'un côté les membres du Conseil suprême des forces armées, de l'autre les cybermilitants auteurs de la révolte du 25 janvier. Moyenne d'âge : ici 70 ans largement révolus, là une trentaine à peine. Et ça discute. De quoi ? Mais des réformes que promet d'entreprendre une caste miraculeusement sortie de sa torpeur pour démanteler l'héritage du régime (dont elle avait la garde six décennies durant), prendre bonne note des doléances de ceux qui pourraient presque passer pour ses petits-enfants et reconnaître que « l'avenir du pays réside dans un pouvoir civil », elle qui n'aura pas cessé, depuis 1952, d'assurer l'alimentation en galonnés de ce même pouvoir.
À l'intention de ceux qui depuis trois semaines ne cessent de clamer que quelque chose a changé sur les bords du Nil - ils seraient bien en peine, ceux-là, de dire quoi -, il est bon de rappeler que oui, certes, il y a du nouveau. Ceci d'abord : alors que tous les dirigeants, ou presque, de la planète Terre avaient tablé jusqu'au bout sur les gouvernants en place, c'est du côté du peuple que le vent s'est levé. Et comme le bon peuple a la mémoire courte, il est facile a posteriori d'assumer la paternité de l'élan et de prétendre, par exemple, que la démocratie prônée il y a dix ans par George W. Bush est en train de prendre pied en terre arabe.
Pour un vieil observateur de la chose publique, il est toujours amusant de relever combien prompts à voir le progrès en marche sont les Grands de ce monde pour peu que les choses adviennent. Amusant mais inquiétant aussi tant un tel constat trahit la légèreté de ceux qui les dressent. Les États-Unis sont excusables, eux qui se retrouvent incapables d'imprimer leur marque sur le cours des événements alors qu'ils n'ont cessé d'alimenter les caisses de leurs protégés, véritable tonneau des Danaïdes. Mais le palmarès de l'humour, qu'on voudrait croire involontaire, revient à Hosni Moubarak obligé, croyait-il jeudi dernier, de se décerner un satisfecit de bonne conduite en affirmant n'avoir jamais « obéi aux ordres de l'étranger ». Et pourtant... Jusqu'à l'avant-dernier jour, Washington s'était contenté de formuler des vœux pieux, incapable de prédire de quel côté était en train de pencher la balance. Soucieuse d'éviter toute anticipation qui pourrait s'avérer malheureuse mais dans le même temps désireuse de s'accrocher ne fût-ce qu'au dernier wagon du train en marche, l'administration démocrate a constamment cherché à effacer le souvenir encore présent dans les mémoires du mot terrible de Franklin Delano Roosevelt, évoquant en 1939 le président du Nicaragua, Anastasio Somoza Garcia : « C'est peut-être un salaud, mais c'est notre salaud. »
La vérité, c'est qu'avec la fin de la guerre froide, les dictatures, incapables plus avant de jouer un bloc contre l'autre, ont entrepris de museler la presse, de consacrer la toute-puissance de la police, de truquer les élections, ce qui ne pouvait qu'amener inéluctablement à l'explosion généralisée au niveau de la rue. Dans le même temps, elles se sont condamnées à la surdité comme le prouve l'ahurissant jugement prononcé, au plus fort de la crise égyptienne, par le général Omar Souleimane : « Notre culture n'est pas encore mûre pour la démocratie. » À quel point le chef des services de renseignements avait perdu tout sens des réalités, ce même peuple vient de le prouver. Sans tirer un seul coup de feu mais en subissant les tirs des alguazils et leurs coups de matraque, la torture dans les cachots et les charges des méharistes, il a fait valoir ses droits à la liberté sans laquelle il n'y a pas de dignité.
Il n'est pas inutile de souligner à l'intention des organisateurs du mouvement appelé à soulever tôt ou tard une immense onde de choc à travers le Machrek et le Maghreb qu'ils doivent beaucoup à Hosni Moubarak. Sans sa malencontreuse intervention télévisée du 10 février, il est probable que l'issue aurait été plus lente à survenir. Ce soir-là, grimé comme un acteur de kabuki, arborant une fraîche teinte de cheveux, le verbe à contre-temps, le ton emphatique, il a donné aux jeunes le souffle qui commençait à leur manquer et à l'armée - qui le soutenait encore mais comme la corde soutient le pendu - une raison supplémentaire d'arrêter enfin son choix. Demain, dans six mois peut-être, les généraux ne seront plus dans la salle d'opérations. Mais d'ici là, et presque partout dans le monde arabe, ils resteront en place, à la fois acteurs et arbitres, ultimes recours souvent faute de mieux. Demain tout comme aujourd'hui, les nouvelles générations seront présentes sur toutes les places al-Tahrir. Demain, l'informatique représentera plus que jamais la fenêtre ouverte sur le monde et le lien de sécurité entre les hommes des cordées en marche vers les cimes. Bien sûr, peut-être aussi que, demain, des kleptocraties, comme les appellent joliment l'éditorialiste du Time, Joe Klein, poindront encore le bout du nez. Mais pour un temps que l'on souhaite le plus court possible.

Egypte : le défi de Mohamed Tantaoui vers la démocratie

Cinquante ans de carrière militaire, trois guerres contre Israël et vingt ans passés au gouvernement : Mohamed Hussein Tantaoui, chef du Conseil suprême des forces armées, dépositaire du pouvoir, n'est pas vraiment le jeune révolutionnaire post-Moubarak que la foule attendait après dix-huit jours de soulèvement. Cet apparatchik de 75 ans apparaît surtout comme le candidat des Etats-Unis et il doit encore prouver qu'il est capable d'effectuer la "transition pacifique" promise, samedi 12 février, par le Conseil suprême des forces armées.

Apparatchik expérimenté. Mohamed Tantaoui devra représenter le pays "auprès de toutes les parties à l'intérieur et à l'extérieur". Né en 1935, il a passé les deux tiers de sa vie dans l'armée, où il est entré en 1956, participant ainsi à la première crise internationale qu'a connue l'Egypte, celle du canal de Suez qui l'avait opposée à Israël, à la France et à la Grande-Bretagne.
M. Tantaoui a par la suite participé à deux autres conflits armés contre l'Etat hébreu, lors de la guerre des Six Jours en 1967, puis celle du Kippour en 1973. En 1991, il a ensuite joué un rôle-clé en conduisant les forces armées au sein de la coalition qui est intervenue au Koweït après l'invasion irakienne. Quatre ans plus tard, il fut nommé au poste qu'il occupe encore aujourd'hui, celui de commandant général des forces armées.
Au-delà de ces faits d'armes, le CV du nouvel homme fort de l'Egypte présente aussi un lourd volet politique, puisque celui-ci a occupé la fonction de ministre de la défense et de la production miliaire pendant vingt ans (1991-2011). Enfin, Mohamed Tantaoui a reçu une promotion aussi récente qu'éphémère : le 29 janvier, Hosni Moubarak l'avait nommé vice-premier ministre, pensant calmer les ardeurs des révolutionnaires de la place Tahrir.
Un élément au pouvoir depuis aussi longtemps semble donc peu enclin au changement. Un télégramme diplomatique américain révélé par WikiLeaks et datant de 2008 décrit Tantaoui comme quelqu'un de "charmant et courtois" mais aussi "âgé et hostile au changement". Les câbles le décrivent, lui et Hosni Moubarak, comme des hommes n'ayant "tout simplement pas l'énergie, l'inclination ou la vision du monde pour faire les choses différemment".
Rassurant à l'intérieur. Agé de 75 ans, Mohamed Tantaoui peut aussi se poser en garant de la stabilité et du renoncement à la violence. On l'a vu pendant les jours de soulèvement : l'armée a toujours su faire preuve de retenue, contrairement à la police, accusée de nombreuses violences. Les manifestations ont d'ailleurs été marquées par de nombreuses scènes de fraternisation entre la foule et l'armée.
En outre, un ancien enquêteur auprès de Human Rights Watch disait vendredi à ABC News qu'en ce qui concerne les abus sur les droits de l'homme, l'ONG était "beaucoup plus confiante et optimiste sur ce qu'il va se passer", maintenant que l'armée dirige le pays.
La plupart des observateurs font par ailleurs remarquer que le militaire n'a pas d'aspirations politiques. "Tantaoui n'a pas d'ambition présidentielle. Personne à l'intérieur du Conseil suprême de l'armée ne souhaite qu'il en ait", assure au Washington Post Hosam Sowilam, général à la retraite et ancien camarade de M. Tantaoui à l'école militaire.
Rassurant à l'extérieur. Du haut de ses dizaines d'années d'expériences, Mohamed Tantaoui est en fait – surtout – le candidat idéal des Etats-Unis et d'Israël, avec qui il a tissé de nombreux liens. D'après Mohamed Kadry, un ancien général de l'armée interrogé par le Washington Post, il "comprend l'importance de la relation" avec les Etats-Unis. D'autant plus que Washington octroie à l'armée 1,3 milliard de dollars d'aide par an.
D'autre part, l'armée a répété qu'elle restait liée par les traités internationaux signés par l'Egypte, histoire d'apaiser les inquiétudes des Etats-Unis et d'Israël sur le devenir des accords de paix israélo-égyptiens de 1979. Dimanche, le Conseil suprême des forces armées a noué des premiers contacts plutôt positifs avec les dirigeants israéliens et, devant la presse, le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, s'est félicité de l'engagement de l'armée de respecter le traité de paix conclu avec Israël.
D'ailleurs, d'après le document de WikiLeaks de 2008, les Etats-Unis jugent que, marqué par trois guerre contre Israël, Mohamed Tantaoui est à présent "déterminé à en éviter une autre".
Instable. Mais ce document souligne aussi que "des officiers de rang intermédiaire sont très critiques à l'égard [du] ministre de la défense, qu'ils estiment plus prompt à valoriser la loyauté que la compétence chez ses subordonnées". Ces mêmes officiers le surnommaient d'ailleurs le "caniche" de Moubarak. Si la période de transition dure un peu trop, le risque de mutinerie dans l'armée pourrait augmenter.
Quant à la société civile, elle l'a vu partager, un peu interdit, la joie des jeunes révoltés place Tahrir. Vendredi, tandis qu'il célébrait la chute du raïs devant le palais présidentiel, le peuple égyptien ne l'a reconnu que comme l'homme de la transition, non comme le nouvel homme fort et permanent du pays.
Ainsi, comme l'écrit Oren Kessler, dans le Jerusalem Post, "la rêverie se terminera bientôt s'il n'arrive pas à mettre en œuvre les réformes démocratiques et le gouvernement civil que les manifestants ont exigés".