TOUT EST DIT

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vendredi 15 octobre 2010

Les routiers, "solidaires avec le reste de la population"

La CFDT, premier syndicat du transport routier, a appelé jeudi 14 octobre les salariés du secteur à "maintenir et amplifier les mouvements de mobilisations nationales contre la réforme", en organisant notamment des blocages sur les routes et les sites pétroliers. Des opérations-escargot et des barrages filtrants ont déjà eu lieu jeudi au nord de Limoges, dans le Pas-de-Calais ou encore au Puy-en-Velay (Haute-Loire). Maxime Dumont, secrétaire général de la CFDT-Route, explique pourquoi son organisation a décidé de hausser le ton.

Où en est la mobilisation des routiers ?

La mobilisation se met en place doucement. Ce sont des actions qui sont menées dans les régions et les départements de manière sporadique. On a déjà des secteurs qui sont entrés dans l'action, à Rouen sur un site pétrolier, à Nantes où des camarades sont déjà mobilisés... On ne cible pas le monde du transport, c'est une action de solidarité avec le reste de la population. En 1996-97 [lors de la grande grève des routiers portant sur les conditions de travail], lorsqu'on a eu besoin des gens, ils étaient là. Avec les blocages, il y avait des nuisances pour tout le monde et pourtant les gens nous soutenaient. Alors si on peut apporter quelque chose maintenant, on veut le faire. On se mobilise aussi pour ceux qui ne peuvent pas se déplacer.
Pourquoi choisir d'amplifier la mobilisation maintenant ?
Nous sommes un syndicat qui prône le dialogue. Aujourd'hui, on dialogue plus avec les renseignements généraux qu'avec les responsables politiques ! Nous étions dans les manifs, nous sommes là depuis le début. Mais depuis le 12 octobre [dernière journée de mobilisation], nous estimons que le gouvernement s'entête. Tout le monde en a ras-le-bol, on est en train de nous presser comme des citrons et on ne devrait rien dire ?
La réforme aurait-elle des conséquences particulières pour les routiers ?
Si elle venait à passer, oui. Un salarié du transport routier avec au moins trente ans d'ancienneté peut prendre un congé de fin d'activité à partir de 55 ans. Entre 55 et 60 ans, ce régime est financé par les employeurs, les salariés du secteur et l'Etat. A partir de 60 ans, il entre dans le régime général des retraites. Si l'âge légal est repoussé à 62 ans, que se passera-t-il entre 60 et 62 ans ? Reprendre un travail pour deux ans est illusoire.
On se dirigerait donc probablement vers un décalage de deux ans du régime. Or celui-ci a été obtenu sur des critères de pénibilité et de sécurité, et l'âge auquel on estimait qu'il pouvait être dangereux de continuer à conduire n'a pas changé ! Mais je le répète, c'est avant tout le soutien à une action globale, par solidarité avec l'ensemble de la population.


MANQUAIT PLUS QUE CE RAMASSIS DE FAINÉANTS TOUT JUSTE BONS À FALSIFIER LEURS DISQUES POUR FAIRE GRIMPER LA PRESSION.

La réforme, la méthode et les idées fausses

La politique est l'art de marier le courage et le temps, le devoir de courage avec les exigences du temps. Une fois de plus, la contestation massive du projet de réforme des retraites illustre combien la France reste un pays très conservateur, arc-bouté au statu quo et aux droits acquis, l'Histoire servant de paravent au réel.

Contrairement à ce qu'il veut laisser croire, le chef de l'Etat ne fait pas preuve d'un volontarisme hors pair en s'attaquant au régime des retraites. Nos voisins européens ont pour la plupart traité le problème, et c'est la crise économique et financière, avec son lot alarmant de dette et de déficits, qui l'a contraint à agir.
Ce chantier n'était pas au programme du candidat Sarkozy. Il s'est imposé lorsque les dérèglements du capitalisme ont précipité les risques d'explosion du système actuel. Le conseiller social du président, Raymond Soubie, estime que les échéances ont été avancées de vingt ans. C'est donc maintenant qu'il faut régler l'horloge des retraites, maintenant qu'il faut être courageux. Et équitable.
Mais une réforme d'envergure ne peut être acceptée qu'à deux conditions au moins : être expliquée avec méthode; être portée par des idées justes. Or ces exigences font défaut.
L'explication? Le gouvernement l'a bâclée depuis le début, choisissant la course de vitesse – une mauvaise appréciation du temps – afin d'imposer ses vues. Pour changer au fond, il fallait expliquer sans précipitation. C'est tout le contraire qui s'est passé, sur un dossier dont l'enjeu n'a d'égal que la complexité. Une réforme n'est légitime que si elle est comprise. Ce n'est pas le cas. Qu'elle soit portée par un président aussi impopulaire n'arrange rien.
C'est justement ce déficit d'explication qui ouvre la porte aux idées fausses dont l'opposition socialiste est devenue le chantre, fourvoyant une partie de la jeunesse, à juste titre inquiète pour son avenir, dans une impasse empreinte de démagogie. Laisser croire par exemple que le marché du travail est un gâteau à partager, que plus les "seniors" resteront, moins les jeunes entreront, est une contre-vérité.
C'est au contraire dans les pays où les plus âgés sont les plus actifs que l'emploi des plus jeunes est le plus dynamique, le travail des premiers favorisant le travail des seconds, et non l'inverse.
Malgré ses efforts, Mme Aubry ne parvient pas à dissiper l'impression première, qui, faute d'être forcément la bonne, demeure la plus forte: une confusion sur les véritables orientations du PS en matière de retraites, aggravée par l'engagement "totémique" d'un retour aux 60 ans pour l'âge légal du départ à la retraite.
En se polarisant sur ce que M. Strauss-Kahn ne reconnaît pas comme un dogme, le PS se trompe de combat et risque de s'enfermer dans une attitude résolument passéiste. Il manque aussi l'occasion de construire sa crédibilité sur la seule vraie cause qui vaille: insuffler dans la réforme nécessaire un non moins nécessaire esprit de justice. S'il n'est pas trop tard.

Louis-Philippe, le dernier roi possible

Il est parvenu au pouvoir sous les vivats, mais il a peu à peu suscité une haine démesurée. Il a conduit une rupture nécessaire avec son prédécesseur, avec hardiesse et, au départ, habileté avant d'irriter les Français et de paraître perdre la main. Il est devenu la victime d'une presse déchaînée et de citoyens désenchantés qui l'ont cruellement identifié à l'argent roi, voire à l'affairisme. Il a mené une politique étrangère intelligente et résolue. Il connaissait comme personne l'opinion, ses fluctuations, ses faiblesses et les moyens de l'amadouer, et puis il a donné l'impression de l'oublier. Il manipulait avec adresse les hommes avant de s'enliser dans le choix d'un ultime Premier ministre. Il voulait fortifier le Parlement mais il ne se résolvait pas à partager son pouvoir : ces caractères qui pourraient s'appliquer à un autre, plus contemporain, ce sont ceux de Louis-Philippe, le dernier roi possible, selon sa propre évaluation.


Il fait l'objet d'une nouvelle biographie sérieuse, solide, bien étayée, due à Arnaud Teyssier (1). Louis-Philippe a été jusqu'ici beaucoup caricaturé, dénaturé, sous-estimé, y compris et surtout par les historiens. Cette nouvelle approche ne veut pas être un plaidoyer mais devient, par les faits, une réhabilitation. Pour les Français, Louis-Philippe, impitoyablement immortalisé par Daumier sous les traits d'une poire, reste le roi bourgeois, bon père de famille, pacifique, médiocre, éclipsé par la gloire impériale, assimilé aux déboires et à l'aveuglement de ses cousins Louis XVIII et Charles X. La réalité est pourtant toute différente.


Né sous Louis XV, mort en son exil anglais sous le prince-président, Louis-Philippe a été le plus intelligent et le plus clairvoyant des derniers monarques français. A Valmy et Jemmapes, lieutenant-général de 20 ans, il se conduit avec éclat et jamais il n'acceptera de porter les armes contre la France. Exilé, il mène une existence aventureuse et même périlleuse. Sous la Restauration, la branche aînée, qui se méfie à bon droit des Orléans, le tient à l'écart. Il passe pour libéral, moderne. Ovationné, porté au pouvoir dans l'allégresse en 1830, il croit enraciner la monarchie constitutionnelle en élargissant les libertés et les pouvoirs du Parlement mais, malgré des présidents du Conseil marquants - Casimir Perier, Molé mais surtout Thiers et Guizot -, il ne se contente pas de régner, il gouverne. Politique brillant, diplomate lucide, il est moins heureux en matière sociale. Et puis il s'embrouille dans ses virevoltes. Accablé par Chateaubriand, Tocqueville ou Lamartine, défendu par Hugo, Dumas, Renan, son règne, novateur au départ, s'achève dans l'indécision, le tumulte, le rejet. Injustement, inévitablement.


1. " Louis-Philippe, le dernier roi des Français " (Perrin, 450 pages, 23 E).

Le sale coup anti-manifestations


Au soir de chaque manifestation, c'est une coutume de s'amuser de l'écart abyssal existant entre les chiffres venus de sources syndicales ou policières. Médiatiquement, c'est toujours le chiffre syndical qui l'emporte. Normal. Qui peut faire confiance à la police, forcément vendue au pouvoir en place ? Au milieu des cortèges, donc, les centrales syndicales s'entendent sur le bon chiffre du jour. Et ce chiffre est pieusement repris, répété et retenu par tous, au point de devenir officiel. L'essentiel est qu'il soit fort, symbolique, mythique et il n'y manque jamais. 3 millions, qui dit mieux ? 3,5 millions ? Va pour 3,5 millions. Ainsi vont les enchères, promptement gravées au panthéon des luttes sociales et dans la rubrique idoine du livre des records.


On en était là quand de sombres gêneurs sont venus mettre leur sale petit nez dans ces baudruches statistiques. Mardi dernier, France Soir fait venir un institut espagnol spécialisé dans le comptage, le site Mediapart envoie sur le pavé des journalistes armés de clics-clics. L'AFP ici, France Bleue là se mettent à compter. Leurs résultats se recoupent tous : partout où ils ont oeuvré, ces enquêteurs-compteurs ont relevé des chiffres inférieurs à ceux de la police. À la louche, 80.000 à Paris quand les syndicats en annoncent 330.000. 20.000 à Marseille pour 230.000 de source syndicale. À les croire, la manifestation à 3,5 millions se dégonflerait au million.


On ne dira jamais assez le mal qu'il faut penser de ces trouble-manifestations qui gâchent le jeu social et détruisent le trompe-l'oeil syndical. Ce sont des irresponsables qui ne respectent rien. Des briseurs de rêves de grandeur. La France a besoin de grands-messes, de grands mouvements, de grandes foules pour se défouler à la hauteur des iniques réformes gouvernementales. C'est désespérer un pays que de le doucher ainsi. Mais ces pisse-froid du chiffre, saboteurs de liesse contestataire, ne l'emporteront pas si facilement. Un homme averti en valant deux, les manifestants seront demain sept millions.

Le commentaire politique de Christophe Barbier



Carburants : "Le gouvernement veut passer en force"
Carburants : "Le gouvernement veut passer en force"

TOUJOURS LE MÊME LANGAGE LE SEUL MOT EST REFUS. 
A QUI LA FAUTE  ? AU GOUVERNEMENT BIEN SUR !!

TANT QU'IL Y AURA DE TELS CRÉTINS DANS LES SYNDICATS FRANÇAIS LES CHOSES N'IRONT PAS MIEUX. IL FAUT CRÉER DES SYNDICATS DE DROITE !

Les muscles du Hezbollah

Mahmoud Ahmadinejad s’est offert une nouvelle tribune pour peaufiner son image d’ennemi irréductible d’Israël. Jeudi, c’est à quatre kilomètres de l’État hébreu, dans le sud du Liban, que le président iranien a renouvelé ses diatribes antisionistes. Depuis 2005, il s’est ainsi acquis une solide popularité au Moyen-Orient, auprès de populations exaspérées par l’impasse du conflit israélo-palestinien. Alors que sa réélection a été farouchement contestée l’an dernier à Téhéran, ce voyage devrait en outre lui permettre de renforcer sa position dans la République islamique.

Reçu – logiquement – comme un chef d’État, Mahmoud Ahmadinejad savait pouvoir compter sur un appui solide : chiite et pro-iranien, le Hezbollah lui a fourni la claque. Mouvement politique, militaire et social, cette formation sait convaincre ses fidèles et ses obligés de manifester l’enthousiasme de rigueur. Les dizaines de milliers de manifestants qui l’ont fêté ne doivent pas faire oublier tous les autres, qui ont fait le dos rond ou éteint leur téléviseur durant son passage.

Le Liban est ainsi régulièrement confronté à ses divisions, à sa pluralité. Aucune communauté, aucune religion n’y est majoritaire, une situation que tentent régulièrement d’exploiter les puissances régionales. L’État y est souvent trop faible pour jouer un rôle d’arbitre et il doit naviguer entre des intérêts puissamment contradictoires. Le Hezbollah est aujourd’hui le seul mouvement doté d’armes lourdes capables de rivaliser avec celles de l’armée. En se drapant dans la « résistance » à Israël, alors que le contentieux territorial entre ce pays et le Liban est aujourd’hui infime, il oblige la classe politique et l’opinion à le soutenir et s’arroge ainsi une influence qui dépasse les clivages confessionnels.

En venant au Liban, Mahmoud Ahmadinejad a manifesté son soutien à cet allié indispensable, dont certains hauts responsables pourraient être bientôt poursuivis par le tribunal spécial chargé de juger, notamment, les assassins de l’ancien premier ministre Rafic Hariri, tué en 2005. Le Hezbollah a besoin d’impressionner ses adversaires. La justice internationale ne doit pas s’en laisser conter.

Psycho zéro

En psycho, option ados, ce gouvernement aurait zéro. A les entendre, on se demande parfois si les ministres, a priori bons parents, ont des enfants. Il fallait vraiment qu'ils planent en plein DST d'économie sociale sur les retraites pour être à ce point hors sujet en soupçonnant les jeunes d'être instrumentalisés par la gauche, ou susceptibles de l'être.
Oh bien sûr, les représentants des lycéens et des étudiants qui ont parlé aux micros et aux caméras ont bien copié, volontairement ou non, des... éléments de langage déjà vus et entendus autre part. Des formules dignes de concurrencer en conformisme sans imagination celui des argumentaires des jeunes populaires... Mais réduire le mouvement de protestation de la jeunesse à ces caricatures, c'est un faux ami politique. Une erreur d'interprétation qui peut coûter très cher à ses auteurs. La condescendance avec laquelle les responsables de la majorité ont tenté de déconsidérer la maturité des protestataires pour mieux les moucher a eu pour seul effet d'être ressenti comme un manque de respect. Une tentative d'infantilisation qui, bien évidemment, a stimulé un sentiment de révolte jusque-là bien caché.
Les politiques n'ont pas à appeler les jeunes à descendre dans la rue -c'est une démagogie minable- mais les jeunes n'ont pas attendu que les politiques les y invitent pour le faire. Cette « nouveauté » -pour reprendre l'expression malheureuse des JT- ne devrait surprendre personne. Dans un pays où depuis plus de 30 ans, l'emploi des jeunes a été systématiquement sacrifié aux égoïsmes conjugués de la société (pour eux le CDI est devenu un luxe inaccessible), c'est presque un miracle qu'une révolte étudiante n'aie pas éclaté plus tôt.
Les différents gouvernements de droite et de gauche qui ont accepté le scandale que constitue le taux de chômage des moins de 25 ans -le plus élevé des grands pays d'Europe !- n'ont pas voulu prendre en compte l'anxiété grandissante des ados, que tous les parents peuvent mesurer quotidiennement aujourd'hui. Profitant d'une apparente docilité, ils n'ont pas voulu entendre qu'à leurs oreilles, « l'avenir » est devenu un mot abstrait, vide de sens. Et d'une certaine façon, élitiste.
L'ironie de l'histoire, c'est que le système qui a tant voulu formater les jeunes et les soumettre à une sélection permanente, leur a aussi appris à calculer. A être précautionneux, prudents, prévoyants. A additionner 17 + 50. Ils n'ont pas besoin d'être en S pour comprendre intuitivement que l'équation de leur futur, telle qu'elle est posée aujourd'hui, a peu de chances d'être résolue de façon positive. Que l'inconnue ne sera pas une donnée romantique. En niant leur étincelle dans le noir de la fatalité, le pouvoir leur a peut-être donné envie de craquer l'allumette.


Une crise qui dépasse l'économie


Deux ans après que se fut ouverte une crise financière, avec la faillite de Lehman Brothers, le 15 septembre 2008, nous continuons à nous interroger sur la portée de cette crise et les mutations dont elle est l'indice. Parce que nous en mesurons les effets sociaux, nous sommes amenés à nous interroger sur les liens de la démocratie et du marché, et à rappeler que la logique marchande ne peut être imposée à tous les types de « biens ». La santé, l'éducation et la citoyenneté ne relèvent justement pas de cette logique.

C'est autour de ces questions que tournera la rencontre organisée à Rennes, aujourd'hui, par l'Association des Amis d'Emmanuel Mounier, décédé il y a 60 ans. Le thème sera justement : « Penser notre crise ».

Dans la foulée de son maître, Péguy, le fondateur de la revue Esprit posait lucidement la question de l'argent. En faisant de l'argent et de sa logique l'instance ultime de notre vie sociale, de la culture, de la civilisation, notre monde ne court-il pas fatalement à la catastrophe ? En questionnant aussi le sens de la propriété, Mounier affronte nos impasses.

La remise en cause nécessaire, mais non acquise, du pouvoir absolu de l'économie, réduite à la finance sur l'ensemble de la vie humaine, ne peut escamoter l'enjeu crucial des valeurs. Et c'est là une autre ligne de force de la pensée de Mounier, qui travaille à une réorientation de la civilisation à travers une philosophie des valeurs.

Dans l'économie mondialisée, le travail est souvent réduit, comme on le dit de manière révélatrice, au statut de « variable d'ajustement ». Dans cette évolution, c'est le sens même du travail humain, sa dignité, sa participation à la dignité de la personne qui sont rejetés. On relit aujourd'hui avec étonnement les pages fortes de Mounier sur le travail (« Refaire la Renaissance »), sur son rôle essentiel comme intégrateur « vers la communion humaine ». Peu d'auteurs ont dit avec autant de vigueur comment le travail contribue aux fins humaines les plus hautes, sans pour autant réduire l'homme au statut de travailleur.

D'autre part, nous voyons bien que les excès de l'attitude individualiste mutilent la citoyenneté. La mise au premier plan, comme un absolu exclusif, de l'individu rend difficile le fondement légitime des diverses collectivités. Or, on ne dépasse la notion d'individu que grâce à la personne. Celle-ci, dans la pensée de Mounier, consiste à mettre à la base de la réalité humaine la qualité de la relation avec autrui. La personne se réalise dans l'engagement, c'est-à-dire dans la capacité de se dépasser soi-même pour devenir sujet de l'Histoire dans des mouvements collectifs.

La personne n'est rien sans la communauté. Mais celle-ci, dans la réflexion de Mounier, n'a en droit comme limite que l'humanité. Elle est l'instrument de critique et de dévoilement des insuffisances, des défauts de toutes les sociétés imparfaites.

Nous sommes placés devant l'urgence de construire une alternative au « nihilisme contemporain », qui dominera aussi longtemps que la société tendra à « s'enfermer dans la production de valeurs d'échanges ». C'est là, exactement, l'intérêt de revenir aujourd'hui à Mounier.

(*) Président de l'Association des Amis de Mounier, auteur notamment de Emmanuel Mounier, l'engagement politique (Michalon), 2009.

La tentation du Titanic


Nicolas Sarkozy et Alain Juppé ont pris de la hauteur hier. Assis côte à côte (ou face à face) dans l’avion présidentiel. Un vol Paris -Bordeaux pour aller ensemble, en Gironde, défendre “la nécessité de réformer” et dénoncer “l’immobilisme”. Un peu de hauteur au-dessus de Français qui redoutent, chaque jour un peu plus, la pénurie d’essence et qui, pour un, deux, trois millions d’entre eux, se sont déjà faits à l’idée de marcher. Toutes les semaines, sous les banderoles. Un vol Paris-Bordeaux : on est loin de l’avion long courrier, mais Sarkozy et Juppé ont tout de même eu le temps de se parler. De quoi ? Des manifestations de 1995 ? Peut-être. De l’été dernier ? Sans doute. Le “meilleur d’entre nous”, comme l’appelait Chirac, a pas mal dégainé contre le président et sa politique sécuritaire. Il se serait même interrogé sur l’intérêt de “monter dans le Titanic”. Jolie formule pour évoquer le gouvernement. Mais les voyages forment la jeunesse et les idées. Et sa présence hier dans l’avion présidentiel est interprétée comme un signe. Le maire de Bordeaux pourrait redevenir ministre. Au Quai d’Orsay ? Possible, car même si la lettre de démission envoyée par Kouchner n’est toujours pas arrivée sur le bureau de Sarkozy (la grève de La Poste ?), certains verraient bien Juppé aux “Affaires étrangères”. Bientôt ? La possible pénurie d’essence va-t-elle ralentir la France et accélérer le remaniement ?

Mouches


Olivier Besancenot n'en est pas encore à injurier Claire Chazal. Mais il a fait fort, hier, pour tenter d'exister dans le film de l'actualité, et ne pas se faire voler la vedette radicale par Jean-Luc Mélenchon: Monsieur Besancenot a proclamé la révolte globale, et réclamé un Mai 68. Et pourquoi pas une nouvelle Révolution d'Octobre ? Ce serait de saison... On imagine l'irritation de Bernard Thibault et François Chérèque, à entendre les bourdonnements de la mouche du coche trotskyste. Remarquez, Nicolas Sarkozy et François Fillon ne doivent guère mieux goûter les conseils de leur propre mouche du coche, l'inévitable et inébranlable Dominique de Villepin: attention à la réforme-gadget, a morigéné le comte, qui se rêve Président à la place du Président. Et si on organisait un débat Besancenot-Villepin, par exemple sur la responsabilité en politique ?

Aubry se pose en force de propositions face à Sarkozy

Invitée hier soir de l'émission « A vous de juger », la patronne du Parti socialiste a revêtu les habits de première opposante au chef de l'Etat, tout en s'efforçant de faire des contre-propositions.
S'opposer et proposer. Invitée hier soir de l'émission « A vous de juger » sur France 2, Martine Aubry, très en forme, a endossé ses habits de première opposante à Nicolas Sarkozy, tout en se posant en « première des proposants ». Interrogée par Arlette Chabot (France 2) et Nicolas Beytout (PDG du Groupe Les Echos), la maire de Lille s'est attachée à montrer que si elle critique l'action du gouvernement, elle a, sur l'ensemble des domaines, des contre-projets.

La réforme des retraites a évidemment constitué le plat de résistance de l'émission. « La France ne veut pas de cette réforme, a-t-elle déclaré. J e m'adresse au président de la République : je lui demande de suspendre ces discussions au Sénat, mais aussi de mettre aussitôt les syndicats autour de la table, de remettre tout à plat. » Elle a réaffirmé la nécessité d'une réforme mais demandé une discussion préalable et « surtout de la justice. » Quant aux mouvement sociaux, selon elle, il n'y a qu' « un seul responsable, celui qui ne veut pas entendre ».
L'âge légal maintenu à 60 ans

Du recul de l'âge légal préconisé par le Fonds monétaire international (FMI) de Dominique Strauss-Kahn au référendum demandé par Ségolène Royal, les socialistes n'ont pas toujours parlé d'une seule voix sur cette question ces dernières semaines. Martine Aubry a minimisé la portée du rapport du FMI. Ses rédacteurs « disent que l'étude n'engage que ses auteurs, ni l'organisation, ni le "board", ni le directeur général » du FMI. Comme l'avait fait Ségolène Royal sur ce même plateau télévisé il y a un mois, Martine Aubry a opposé au texte du gouvernement le contre-projet du PS, « plus juste et plus équilibré », dans la répartition de l'effort entre les revenus du travail et ceux du capital. Elle a réaffirmé que, dans le contre projet du PS, l'âge légal de départ à la retraite maintenu à 60 ans constitue une garantie pour ceux qui ont atteint leur durée de cotisation, une protection pour les salariés usés par un travail pénible et qui souhaitent partir, et, enfin, est une liberté de choix pour tous les Français même si « la majorité d'entre eux doit travailler plus longtemps. » Elle a en effet reconnu que le projet socialiste inclue l'allongement de la durée de cotisations. En ce qui concerne les jeunes, Martine Aubry souhaite qu'ils puissent cotiser plus tôt (par la prise en compte des stages). Evoquant ensuite les seniors, souvent au chômage avant d'atteindre l'âge de la retraite, elle a expliqué que le PS, s'il dirige le pays en 2012, prendrait des mesures spécifiques de retour à l'emploi.

Autre sujet au menu de l'émission, la fiscalité. Martine Aubry s'est félicitée de la remise en cause par le chef de l'Etat lui-même du « bouclier fiscal », jugeant cette annonce « gaguesque. » Toutefois, selon elle, si cette suppression était accompagnée de celle de l'impôt sur la fortune, ce serait « presque une honte ! » Elle a ensuite évoqué la grande réforme fiscale envisagée par les socialistes s'ils reviennent au pouvoir en 2012. Elle repose notamment sur la fusion de l'impôt sur le revenu et de la CSG afin de créer un impôt progressif et équitable. « J'ai une règle un peu bébête : il faut que ceux qui ont beaucoup paient beaucoup et ceux qui ont moins paient moins ! », s'est-elle amusée.

Quant à 2012 et au choix du candidat socialiste, fidèle à son habitude, Martine Aubry a botté en touche, refusant de dévoiler ses intentions. « Entre Dominique Strauss-Kahn et moi, c'est comme avec Laurent Fabius, nous avons préparé un projet », a-t-elle indiqué. « Dominique garde un oeil d'affection, et plus que d'affection sur la France, j'en suis convaincue », a-t-elle ajouté rappelant que l'un n'ira pas contre l'autre… Reste à savoir, s'ils veulent être candidats tous les deux, lequel aura la primauté…


LES PROPOSITIONS DE CETTE GROSSE COCHE SONT TOTALEMENT UTOPIQUES, MÉCANIQUEMENT IRRÉALISABLES .
FRANCHEMENT QUELLE CONNE !

Angela Merkel n'en finit plus de chuter

À la veille d'un scrutin majeur, les sondages continuent de plomber la coalition de la chancelière. En cas de défaite, elle pourrait renoncer à son poste et être remplacée par son ministre de la Défense, Karl-Theodor zu Guttenberg.

Rien ne va plus pour Angela Merkel. En dépit du redressement spectaculaire de l'économie allemande, le pays semble peu à peu lui glisser entre les doigts. La cote de sa coalition de centre droit continue son interminable chute libre. Au point d'avoir atteint un nouveau record d'impopularité et de soulever les premières interrogations sur l'avenir politique de la chancelière et sur son éventuel remplacement à la tête du gouvernement allemand. Son ministre de la Défense, le Bavarois Karl-Theodor zu Guttenberg, fait figure de favori à sa succession.

Selon un sondage de l'institut Forsa, la coalition de la chancelière ne recueillerait plus que 33% des intentions de vote. Ce niveau record à la baisse illustre la montée du mécontentement de l'électorat face à la politique du gouvernement, en particulier ses dissensions internes et ses projets de prolonger l'activité des centrales nucléaires et de construire une nouvelle gare à Stuttgart. Les conservateurs de la CDU recueillent 29% des intentions de vote, soit deux points de moins que la semaine dernière. Leurs partenaires de la coalition, les libéraux du FDP, perdent un point et obtiennent 4%, sous le seuil des 5% requis pour avoir une représentation parlementaire.

Les Verts sont pour leur part crédités de 25% et leurs alliés du SPD de 23%. Dopés par l'opposition au projet de construction de gare «Stuttgart 21», les écologistes sont donnés largement favoris aux élections régionales prévues dans le Bade-Wurtemberg le 27 mars 2011. Pour la première fois, le SPD s'est dit prêt à faire élire un ministre-président Vert à la tête d'une coalition régionale écologistes sociaux-démocrates, si Die Grünen arrivaient en tête du scrutin. Pour le parti conservateur de Merkel, qui dirige le Bade-Wurtemberg sans interruption depuis l'après-guerre, une défaite à Stuttgart serait catastrophique. «Si nous perdons le Bade-Wurtemberg, ce sera aussi grave pour la CDU que la défaite du SPD en Rhénanie-du-Nord-Westphalie en 2005», estime un haut responsable de la CDU.

Manque de leadership

Contrairement à Gerhard Schröder, la chancelière n'organisera pas d'élections anticipées en cas de défaite à Stuttgart. Les législatives anticipées avaient coûté la Chancellerie au SPD en septembre 2005. Cependant, d'après les analystes, il est peu probable que Merkel puisse se maintenir à la tête de la CDU en cas de défaite. Son second mandat et la coalition avec les libéraux du FDP ne réussissent pas à la chancelière, dont la cote de popularité ne cesse de s'effriter depuis sa réélection en septembre 2009. Le parti lui reproche son conservatisme trop mou, son manque de leadership et une stratégie floue. Et selon les médias allemands, il est clair pour Merkel qu'elle renoncera à la Chancellerie si elle perd la direction du parti. Selon le quotidien conservateur Frankfurter Allgemeine Zeitung, la perte du Bade-Wurtemberg ferait naître une «situation explosive», qui pourrait entraîner un coup de balai dont Merkel serait la première victime.
Son ministre de la Défense au physique de jeune premier, le très populaire Karl-Theodor zu Guttenberg, serait alors l'ultra-favori pour lui succéder. Idole de l'union des jeunesses conservatrices, qui le surnomme «KT», Guttenberg est déjà traité par les médias et la CDU comme un «chancelier en réserve». La Frankfurter Allgemeine Zeitung souligne que Guttenberg, âgé de 38 ans, a su montrer son courage politique et son indépendance d'esprit avec sa réforme de la Bundeswehr, qui prévoit la fin du service militaire, à laquelle il a su rallier les conservateurs. Horst Seehofer, patron de la CSU (parti jumeau de la CDU en Bavière), aurait d'ores et déjà prévu de lui céder, l'année prochaine s'il n'est pas parvenu à enrayer l'érosion de son parti, les rênes de la CSU et son poste de ministre-président de la Bavière. Son discours très remarqué à l'occasion des 20 ans de la réunification a donné l'impression que Guttenberg se prépare à toutes les éventualités. S'il poursuivait son irrésistible ascension jusqu'à la Chancellerie, «KT» serait le premier Bavarois à diriger l'Allemagne.

Berlin soutient la formation d'imams

Le gouvernement allemand va verser jusqu'à 4 millions d'euros aux universités de Tübingen (Sud-Ouest) et de Münster-Osnabrück (Nord-Ouest) qui vont former des imams et des théologiens spécialisés dans l'islam, a annoncé ce jeudi la ministre de l'Éducation, Annette Schavan. Ces futurs imams se verront dispenser un enseignement en allemand. De nombreux imams sont envoyés par la Turquie pour quelques années et ne parlent pas ou peu allemand à leur arrivée.





LIVRE - Raciste la police ?

Raciste, homophobe, sexiste, voilà la police telle que la décrit Sihem Souid, 29 ans et... policière. Dans son livre Omerta sur la police, la jeune femme dénonce les “dysfonctionnements” de la Police de l'Air et des Frontières, accentués par la politique du chiffre. Un réquisitoire sans précédent

C'est par “vocation et par idéalisme” que Sihem Souid, française d'origine tunisienne, explique qu'elle est entrée dans la police. Major de sa promotion en 2006, elle intègre la police aux frontières. Elle s'accomode du racisme ordinaire - “Tiens voilà encore un avion de nègres”- jusqu'au jour où elle témoigne par écrit pour dénoncer la discrimination que subissent deux collègues homosexuelles. “C'est comme ça à la PAF d'Orly : on n'aime pas les "bougnoules", les "nègres", les "pédés" et les "gouines". C'est même conseillé de les détester. Cela facilite et accélère les promotions.” Cette déposition la fera passer “du statut de la fonctionnaire exemplaire à celui de l'incompétente doublée d'une fraudeuse”, estime-t-elle.
Alors la gardienne de la paix prend la plume. Dans son livre qui parait aujourd'hui, elle raconte par le menu ce qu’elle a vu et entendu pendant les trois ans et demi passés à la PAF de l’aéroport d’Orly, dans la banlieue sud de Paris.
Politique du chiffreA son poste d'adjointe administrative, Sihem connait les combines qui permettent à ses collègues de présenter des statistiques personnelles satisfaisantes. Abîmer volontairement un passeport permet de justifier un refoulement et d'améliorer son bilan du mois. De même, chaque touriste étranger doit disposer de 53, 27 euros en liquide à multiplier par le nombre de jours à passer en France. Une règle qui peut être appliquée strictement. Ces “abus de pouvoir”, qui visent certains étrangers lorqu'ils se présentent aux guérites, sont spécialement fréquents lorsqu'ils arrivent d'Afrique. Et que dire d'Antoinette, une Française d'origine congolaise placée en garde à vue, et qui s'est finalement retrouvée “nue dans une cellule, rabaissée, humiliée, déshumanisée, au point qu'une policière puisse filmer cette scène honteuse et barbare comme si elle était banale, ordinaire.”
CorruptionUn avionneur transportant un sans-papiers est passible d'une contravention de 5.000 euros si le clandestin est majeur, et de 10.000 euros s'il est mineur. Alors pour éviter cela, Sihem ne compte plus “les billets d'avion gratuits délivrés aux flics galonnés, les caisses de champagne offertes au patron de la PAF” qui “passe une semaine à Djerba, en Tunisie - un pays de bougnoules -, offertes par Tunis Air. Cadeaux et extras compris.
Pour la création d'un comité d'éthiqueSihem Souid risque une condamnation et une révocation de la police pour avoir violé le secret professionnel. Interrogés sur son livre, les syndicats de policiers se disent “prudents”.“Je détiens toutes les preuves et je les tiens à disposition de quiconque” clame-t-elle. Suspendue de ses fonctions, elle a été réintégrée grâce à la Halde (Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité).“Ce que j’ai fait est bien. J’aime la police. Je veux rester dans la police. Mais ce n’est pas à moi de partir. Pour vous dire à quel point je suis idéaliste, j’espère même que ce livre va permettre d’en finir avec les pseudo-enquêtes de la "police des polices" pour créer un vrai comité d’éthique de la police nationale. Comment voulez-vous qu’un citoyen soit exemplaire si un policier ne l’est pas?”


Omerta sur la police, Sihem Souid, Le Cherche Midi

Les jeunes, les vieux, les riches


Lycéens et étudiants tentés par la grève contre la réforme des retraites. On a compté 400 lycées perturbés mardi 12 octobre, jour de la grande manifestation, en gros 10 % des établissements. L'événement donne le bourdon : des jeunes de seize ans qui se projettent contre leur départ en retraite à 62 ans… Quelle France ! On veut bien comprendre : les lycéens et étudiants ignorent tout du texte sur les réformes, ils manifestent pour manifester, pour louper les cours, pour ce qui est une fête initiatique à la vie politique. Chaque génération a connu ça.


L'intérêt bien compris des jeunes est que la réforme passe. Ils devraient contre-manifester, refuser que les babyboomers repoussent une nouvelle fois les déficits sur leurs épaules. Le sort que la France fait a sa jeunesse depuis trente ans est un pur scandale : mauvaise éducation, impréparation de l'avenir, chômage record en Europe, stages, intérim, CDD… Au-delà du combat devenu politique, le rejet de cette réforme des retraites s'inscrit au registre du même égoïsme générationnel : une fois dissipées les solutions idéologiques selon lesquelles « les riches et les entreprises peuvent payer », si les vieux refusent de travailler plus longtemps, ce seront les jeunes qui régleront la note.


Il n'y aurait rien à dire de plus. Pourtant deux de leurs arguments, ou plutôt deux de leurs slogans, méritent pourtant qu'on s'y arrête, ils disent beaucoup de ce qu'on peut appeler le « tout à l'envers » des raisonnements en France.


Le premier porte sur l'emploi. Les lycéens craignent que si l'on maintient les seniors dans l'emploi, ils n'auront pas de place et devront patienter encore plus longtemps au chômage. Cette idée colle à l'intuition, d'où sont succès. Il y aurait un stock de travail qui serait donné et qu'il faudrait « partager ». Les 35 heures ont été faites selon ce principe.


Il faut dire aux lycéens que c'est une idée fausse : c'est l'inverse qui est vrai. Le travail ne se partage pas, il se crée. La démonstration est facile à faire. Pierre Cahuc et André Zylberberg rappellent (1) qu'en 1962 les autorités françaises tremblent à l'idée que les 400.000 rapatriés d'Algérie vont venir gonfler le chômage puisque on ne compte que 35.000 emplois « vacants » dans l'Hexagone. Il n'en fut rien, les rapatriés ont créé des emplois et l'économie ne s'en est portée que mieux. En 1980, même crainte à Miami lorsque Fidel Castro doit laisser partir 125.000 réfugiés cubains. En trois mois, le taux de chômage y passe de 5 à 7 %… avant de revenir à son niveau précédent. En un an, la ville avait absorbé l'afflux exceptionnel de population : l'équivalent de 2 millions de personnes pour la France. Les économistes ont aussi établi que la baisse de la durée du travail ne créait pas d'emploi : ce fut le cas pour le passage de 40 à 39 heures en 1982 et le chiffre des 350.000 emplois qui auraient résulté des 35 heures en 2000 est sans fondement.


L'idée du partage reste ancrée en France, c'est elle qui a poussé aux préretraites et à bloquer, de toutes les manières possibles, l'entrée des jeunes. Elle va à l'extrême droite jusqu'à vouloir « expulser les immigrés pour redonner du travail aux Français ». Mais elle est fausse. Plus de gens veulent travailler, meilleur c'est. Les lycéens doivent savoir que les seniors maintenus dans l'emploi ne leur piquent pas les places.


L'autre slogan est plus large : il repose sur le sentiment que le monde « capitaliste » va dans le mauvais sens et que les réformes ont pour objectif de démolir les constructions de l'Etat providence les unes après les autres. Ainsi en serait-il des retraites : la réforme va dissoudre le système par répartition et il faut manifester pour le défendre. Que ce sentiment puisse dominer chez les jeunes et dans l'opinion éclaire singulièrement l'échec des élites françaises. Elles n'ont pas su expliquer que les réformes étaient au contraire le moyen et le seul de sauver l'Etat providence.


Il y a beaucoup d'explications historiques et idéologiques à ce « tout à l'envers » : les responsabilités sont partagées entre les politiques, les dirigeants d'entreprises, les médias et tous ceux qui ont un devoir de rationalité, de sérieux, d'exemplarité aussi. Mais sûrement, ici, Nicolas Sarkozy par le rejet qu'il suscite dans l'opinion est un obstacle aux réformes. L'homme de la rupture par rapport à l'immobilisme chiraquien risque de devenir l'homme de la continuité. 
Il lui reste dix-huit mois pour convaincre le pays que les réformes sont bonnes pour tous et pas seulement pour l'élite et les riches.

Les effets à long terme de la pénibilité du travail sur la santé

De nombreuses études scientifiques montrent les effets à long terme de la pénibilité du travail sur la santé, et devraient être prises en compte dans le projet de loi sur les retraites, selon une association spécialisée dans les recherches épidémiologiques sur la santé et le travail.

Alors que le débat se poursuit au Sénat sur la réforme des retraites, "des études, nombreuses et convergentes, établissent déjà l'ampleur des effets à long terme des contraintes ou nuisances professionnelles sur la santé", explique dans un communiqué l'Aderest (Association pour le développement des études et recherches épidémiologiques sur la santé et le travail), qui regroupent des chercheurs, des médecins du travail, des enseignants, etc.

Sur ce sujet, "des synthèses ont été élaborées ces dernières années et diffusées par divers organismes", comme l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), l'Institut de veille sanitaire (InVS), le Centre d'études de l'emploi (CEE), ou l'Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES), ajoute l'Aderest.

L'association souligne notamment que "le rôle néfaste pour l'espérance de vie en bonne santé de l'exposition à des toxiques cancérogènes, du travail de nuit et des efforts physiques importants est maintenant acquis sur un plan scientifique".

"Ces effets se manifestent, pour une grande part, après la fin de la vie professionnelle", et "leur évaluation ne peut donc relever d'un examen médical au moment de la retraite", ajoute l'Aderest.

Le projet de loi sur les retraites prévoit notamment que les salariés qui, du fait d'une situation d'usure professionnelle constatée, ont un taux d'incapacité physique supérieur ou égal à 20% pourront continuer à partir à la retraite à 60 ans, contre 62 ans pour les autres.

Entre 10% et 20% de taux d'incapacité physique, le salarié pourra aussi partir à 60 ans, mais sous conditions: il faudra qu'il apporte la preuve qu'il a bien été exposé à des facteurs de risques professionnels et qu'il reçoive l'aval d'une commission.

L'Aderest a "pris acte des propos du chef de l'Etat et de membres du gouvernement, évoquant la création d'un comité scientifique pour progresser dans la connaissance des effets de certains facteurs de pénibilité +à impact différé+", mais juge "légitime que les connaissances scientifiques largement validées soient prises en compte dans les travaux législatifs en cours".

L'équation postale

Changement de statut, recapitalisation, en 2010, La Poste aura bouclé deux dossiers essentiels pour son avenir. Un peu plus de deux mois avant la fin de son deuxième mandat, Jean-Paul Bailly a donc respecté le plan de marche qu'il s'était fixé à la mi-2008. Le groupe qu'il préside dispose du paquetage minimum pour affronter l'ouverture totale à la concurrence le 1 er janvier prochain.

Mais il ne faut pas s'y tromper, la mission est loin d'être accomplie. Maintenant que les moyens juridiques (transformation en société anonyme) et financiers (2,7 milliards d'euros de fonds propres supplémentaires) sont acquis, il va falloir s'atteler à la transformation du groupe. C'est-à-dire réussir une mutation qu'aucun autre opérateur postal historique n'a achevée jusqu'ici. Autant dire que la partie est loin d'être gagnée.

Concrètement, La Poste va devoir gérer la chute accélérée du courrier, son activité historique. En recul de 2,5 % en 2009, elle devrait au total s'être contractée de 30 % entre 2008 et 2015. Pour y parvenir, le groupe public a lancé une série d'actions, dont l'objectif est d'assurer le basculement du centre de gravité du groupe vers le colis express et surtout la banque. Ce plan, parfois qualifié d'optimiste, prévoit quelques parachutes pour amortir le choc en cours, comme la téléphonie mobile par exemple. Mais, pour l'essentiel, il s'agit de transformer un réseau postal dans lequel on peut faire de la banque en un réseau bancaire dans lequel on peut accessoirement effectuer des opérations postales. Une véritable révolution à effectuer en un temps record.

Pour atteindre l'objectif, il faudra donc qu'aucun soutien ne manque, à l'intérieur bien sûr, mais aussi à l'extérieur de l'institution publique. En clair, il serait bon que ses deux actionnaires fassent primer l'intérêt social de La Poste sur leurs intérêts particuliers. La reconduction de son président pour un troisième mandat pourrait être un premier pas dans cette direction. Un autre serait que l'Etat ne se fasse pas trop tirer l'oreille pour apporter sa quote-part de fonds propres. Enfin, il serait préférable que l'Etat, encore, mais aussi la Caisse des Dépôts n'utilisent pas leur participation comme un levier pour se lancer dans un grand Meccano financier. C'est d'ailleurs l'intérêt patrimonial des deux actionnaires. Il serait bon de ne pas l'oublier.

Grève tactique

Nouvelle manifestation contre la réforme des retraites samedi, appel à la mobilisation le mardi suivant, les syndicats ne désarment pas. Pourtant, la question porte moins sur la durée d'un mouvement déclenché le 12 octobre que sur la façon d'arrêter un conflit, qui, de fait, tourne en rond. Le plus paradoxal est de constater que cette interrogation n'est pas seulement celle de l'exécutif, mais aussi et surtout celle d'états-majors syndicaux qui, jusqu'à récemment, n'ont jamais donné le sentiment de pousser les feux en direction d'une grève dure. Une attitude réaliste, liée à deux grandes séries de raisons que Bernard Thibault comme François Chérèque ont parfaitement identifiées. La première, c'est la redoutable efficacité de l'arsenal de dissuasion désormais dressé contre toute contestation longue, à savoir le service minimum dans les transports et le non-paiement des jours de grève. Il faut y ajouter l'enjeu spécifique de cette réforme pour l'avenir politique de Nicolas Sarkozy, qui lui interdit tout renoncement, limitant du même coup le pouvoir d'inflexion des grévistes. Deuxième série de raisons, la stratégie propre des syndicats, et singulièrement celle de la CGT. Bernard Thibault a compris depuis longtemps que l'avenir de son organisation ne réside plus dans la seule défense de ses bastions publics, qui lui fournissent encore un tiers de ses militants mais ne représentent plus que 5 % de la population active. S'il veut accroître ses parts de marché dans le secteur privé, seule voie d'avenir pour la CGT, il lui faut impérativement donner un visage moins radical à son syndicat. Tout se passe comme si les deux leaders restaient persuadés au fond d'eux-mêmes qu'ils ne gagneront pas sur le front des retraites. D'où une attitude ambiguë, ni outrancière ni modérée, qui donne leur caractère si étrange aux grèves du moment. Leur souci est avant tout de conserver un capital de crédibilité pour rebondir le moment venu sur le mécontentement. Car il ne faut pas s'y tromper : si la grève patine, voire décroît, le mouvement social, lui, reste puissant, comme en témoigne le nombre de manifestants mardi dernier, qui ne devrait guère diminuer les jours prochains. Un tremplin dont les syndicats pourraient se servir pour obtenir l'ouverture de négociations sur d'autres dossiers. La question des salaires, par exemple, pourrait rapidement resurgir dans le débat national, après deux années de disette imposées par la crise. Cette tactique n'est pas infaillible et reste soumise aux aléas de la rue. Les rassemblements lycéens, qui ont donné lieu à leurs premiers incidents, ou le blocage des raffineries pourraient faire voler en éclats cette subtile tactique qui n'est rien d'autre qu'une nouvelle preuve de la faiblesse de la médiation sociale dans notre pays.

"Hitler et les Allemands": première exposition sur une alchimie funeste

Un musée berlinois accueille, à partir de vendredi, la première exposition en Allemagne qui tente d'expliquer comment un peuple déboussolé a vu en Adolf Hitler son "sauveur", le suivant dans la guerre et la destruction.
"C'est un miracle de notre temps que vous m'ayez trouvé (...) parmi tous ces millions (de gens)! Et que je vous ai trouvés, c'est la chance de l'Allemagne!", a déclaré Hitler dans un discours en 1936 à Nuremberg, cité dans le catalogue de l'exposition "Hitler et les Allemands".
65 ans après la deuxième Guerre mondiale, cette exposition qui se tient jusqu'au 6 février à l'annexe du Musée d'histoire allemande construite par l'architecte américain Ieoh Ming Pei, étudie les mécanismes qui ont entretenu la fascination jusqu'à l'aveuglement du peuple pour son Führer.
Ce "qu'il faut expliquer, c'est comment l'insignifiant Adolf Hitler, cet homme qui a vécu 30 ans dans l'anonymat, n'a pas fait d'études, n'a aucune expérience politique, a pu être ce sauveur", explique l'historien Hans-Ulrich Thamer, conservateur de l'exposition.


Parler d'Hitler, hors d'un cadre strictement académique, reste très délicat en Allemagne. "Le Musée d'histoire allemande voulait faire cette exposition depuis 2003, environ", révèle ainsi M. Thamer.
Un première projet d'exposition sur la personnalité et le parcours d'Hitler avait buté sur l'opposition unanime du comité scientifique du Musée, qui craignait d'entretenir une sorte de fascination morbide pour le "Mal".
Mais il y a trois ans, le Musée est revenu à la charge, chargeant l'historien de travailler sur le thème très général "Hitler et le national-socialisme".
"Je pouvais arranger (ce thème) à ma convenance. J'ai essayé de rassembler ici ce qui occupe actuellement la recherche historique", explique Hans-Ulrich Thamer.
"Nous voulons expliquer l'ascension, le mode opératoire, l'exercice du pouvoir jusqu'à la chute et l'incroyable potentiel de destruction libéré par le national-socialisme", explique-t-il.
"Pas en partant de la personnalité d'Hitler, qui serait une sorte de démon malfaisant qui aurait corrompu des millions de personnes" mais en contraire en présentant "les mécanismes d'adhésion, de mobilisation des masses, mais aussi d'exclusion, qui tissent la relation entre le Führer et la population", soudée dans le concept nazi de "communauté d'un peuple" (Volksgemeinschaft), poursuit-il.
Ce projet d'une société homogène, fournissant sécurité et emploi, s'adressait aux couches sociales frappées par la crise économique de la fin des années 1920, et justifiait les persécutions. Les plus fervents admirateurs de Hitler "n'étaient pas vraiment des gens qui avaient réussi", dit-il.
Ainsi, "des photos montrent que la persécution des opposants politiques, des juifs, la déportation des juifs se passaient au vu et au su de tout le monde". La "communauté du peuple" se constituait autant par l'exclusion des opposants et des ennemis que par l'adhésion à des comportements.
L'exposition met face-à-face les documents sur l'holocauste et les produits de la propagande nazie qui s'infiltrait dans tous les aspects de la vie.
On découvre ainsi une affiche qui explique comment faire correctement le salut hitlérien, un jeu de carte aux effigies des dirigeants nazis, une tapisserie aux motifs nazis qui décorait une église.
Un cahier d'exercice, qui peut être feuilleté électroniquement, montre comment Hitler a modifié le curriculum pour que les écoles produisent de bons petits nazis.

Maurice Allais, économiste de génie et de folie

Il faudrait un roman écrit avec la finesse psychologique d'un Milan Kundera et deux ou trois brillants essais pour raconter la vie et l'oeuvre de Maurice Allais, décédé samedi dernier dans sa centième année. Fils de crémiers parisiens, major de l'X en 1933 par la grâce de l'école républicaine, chercheur foisonnant, imprécateur, seul Français à avoir été distingué par le Nobel d'économie, en 1988… Il a eu un parcours hors normes. Et laissera le souvenir de quatre visages très différents.


1- Le théoricien étincelant

Le jeune Allais explore une foule d'univers, le plus souvent en solitaire. Il s'intéresse à la monnaie, à l'équilibre général, aux probabilités, au capital… Certains de ses résultats sont devenus des théorèmes. On en rappellera ici trois. D'abord, l'équilibre général entre l'offre et la demande. Allais montre qu'un équilibre concurrentiel est une situation d'efficacité maximale et, inversement, qu'une situation d'efficacité maximale est un équilibre concurrentiel. Ce théorème débouche sur des préceptes très libéraux - et Allais sera longtemps un libéral ardent. Mais il pousse le raisonnement en l'appliquant aussi dans les secteurs « à rendements croissants », où une seule grosse entreprise produit plus efficacement que des centaines de petites. Dans ce cas, le prix d'équilibre est inférieur à celui qui assure la rentabilité de l'entreprise. Il est donc légitime que l'Etat prélève un impôt pour financer ce déficit « optimal ». Libéral mais pas borné ! Ces travaux ont une immense portée. Le célèbre économiste Paul Samuelson, consacré par le Nobel dès 1970, écrira que « si les premiers écrits de Maurice Allais avaient été en anglais, une génération entière de science économique aurait pris un cours différent ».

Deuxième exemple, la croissance économique. Le chercheur formule les grands principes de ce qui sera appelé plus tard la théorie néoclassique de la croissance. Il prouve notamment sa « règle d'or » : le taux d'intérêt à long terme doit être égal au taux d'augmentation de la population (l'effort d'investissement se situe alors au niveau optimal pour maximiser la consommation). Le premier pays à baisser ses taux d'intérêt massivement, dans les années 1990, est aussi celui où la stagnation, puis le déclin de la population, a été le plus précoce : le Japon. Un hasard ?

Troisième domaine, la prise de décision en univers risqué. Depuis Blaise Pascal au XVII e et Daniel Bernoulli au XVIII e siècle, les chercheurs supposent que les agents économiques décident d'une action risquée (par exemple l'achat d'un billet de loterie) en évaluant leur espérance de gains à partir des probabilités associées à l'action. Maurice Allais montre que ce n'est plus vrai au voisinage de la certitude : quand le gain est pratiquement assuré, on refuse de prendre le moindre risque. Le « paradoxe d'Allais » a des conséquences majeures dans les salles de marché.

2- Le professeur passionnant

Allais n'est pas seulement un chercheur. Ancien de l'Ecole des mines, il y enseigne pendant plus de quarante ans. Le professeur est exigeant, cassant. Il s'arrête parfois au milieu du cours pour noter une idée qui lui traverse l'esprit. Mais ses leçons sont brillantes et il relie les idées et la vraie vie. Il enseigne à Edmond Malinvaud, Jacques Lesourne, Marcel Boiteux, Gérard Debreu… L'histoire veut que les deux derniers cités aient tiré au sort une bourse pour partir aux Etats-Unis. Le gagnant, Debreu, est resté là-bas, est devenu Américain puis Nobel d'économie en 1980. Le perdant, Boiteux, est devenu patron d'EDF où il a développé les tarifs au coût marginal de production de l'électricité, directement issus des travaux d'Allais. Beaucoup d'autres élèves d'Allais furent de grands professeurs, comme s'il avait réussi à leur transmettre non seulement son savoir mais aussi son talent pédagogique.

3- L'innovateur provocant

Pas question pour Allais de rester enfermé dans un laboratoire ou une salle de classe. Il veut agir sur le monde. Comme l'explique l'économiste Jean-Michel Grandmont, il est persuadé que « la théorie abstraite doit toujours être confrontée aux faits et que les modèles théoriques doivent être construits dans le but principal d'apporter des réponses aux questions pratiques ». Il multiplie les recommandations de politique économique. Certaines sont encore aujourd'hui en pleine actualité. Il proposait par exemple de couper les banques en deux : les banques de dépôt qui seraient des sociétés de services à leurs clients, et les banques de prêts qui feraient de la transformation financière. Il a aussi baptisé un livre « L'Impôt sur le capital » (1976). Il y propose un système fiscal centré autour de la TVA et d'un impôt prélevé sur toutes les formes de capital (Allais parle de « biens physiques »), de 2 % par an. Ce serait un instrument de justice (il pourchasse les rentes) et d'efficacité (il incite chacun à faire fructifier son capital).

4- Le pamphlétaire affligeant

Mais si Allais a exploré beaucoup de voies fécondes, il s'est aussi engouffré dans quelques impasses - avec la même obstination, la même certitude d'avoir raison. Dans les années 1950, il avait établi une théorie vibratoire de l'univers. Il voulait expliquer les fluctuations de la conjoncture par les taches du soleil. Dans les deux dernières décennies de sa vie, il s'est attaqué au libre-échange en vantant les vertus du protectionnisme. Comme il était auréolé de son Nobel, on l'a écouté béatement. Il n'avait jamais eu une telle audience. Les altermondialistes buvaient du petit-lait, aux côtés des lecteurs du « Figaro » qui publiait ses diatribes. Mais tous étaient au café du Commerce. Aucune recherche scientifique ne sous-tendait les positions d'Allais, pas plus que pour l'influence des taches solaires. Ces textes ne laisseront même pas une rayure sur la science économique. Les génies ont toujours une case en moins ou en plus. Maurice Allais était un génie.




Le plan de la commission Attali pour ramener le déficit public à 3 % de PIB en 2013

Réactivée en février pour « accroître le potentiel de croissance », la commission remet vendredi son rapport au chef de l'Etat. Présentée comme une « ambition pour dix ans », les 25 propositions de réformes visent d'abord à répondre aux « urgences » du désendettement et de l'emploi.


 

Le rapport que remet vendredi la commission présidée par Jacques Attali à Nicolas Sarkozy devrait nourrir les débats alors que débute lundi l'examen du budget 2011 à l'Assemblée nationale. Sur les quelque 25 propositions soumises au chef de l'Etat, environ la moitié porte sur la maîtrise des finances publiques. Trouver un consensus entre la quarantaine de membres de tous bords qui composent la commission n'a pas été simple. Elle avait eu moins de mal à s'entendre sur les 316 propositions de son premier rapport, remis en janvier 2008, mais qui évitait le thème clivant de la fiscalité.
Réactivée en février pour « accroître le potentiel de croissance », la commission Attali s'est, cette fois, assigné deux objectifs : répondre aux « urgences » que sont le désendettement et l'emploi et préparer deux « chantiers de long terme » que constituent l'éducation et la gestion des ressources rares. Le tout étant censé former « une stratégie à dix ans » à l'horizon de laquelle la France serait alors capable d'atteindre une croissance moyenne d'au moins 2,5 % par an.

Pas d'impôts nouveaux

Pour cela, la priorité est d'abord de ramener le déficit public sous le seuil de 3 % de PIB en 2013, comme s'y est engagé le gouvernement. Si la croissance atteint en moyenne 2 % sur la période, la première proposition est d'accomplir un ajustement de 75 milliards d'euros sur trois ans, indique une version préliminaire du rapport consultée par « Les Echos ». Comment ? En jouant « exclusivement » sur la réduction des dépenses publiques (50 milliards d'euros) et en élargissant l'assiette des prélèvements « sans relèvement des taux » (25 milliards). En clair, la commission ne propose pas d'impôts nouveaux, mais veut éliminer en trois ans le quart des pertes de recettes au titre des niches fiscales et sociales.
Concernant le volet dépenses, ce sont les 10 milliards d'économies préconisées dans le cadre de « mesures exceptionnelles » qui risquent de faire le plus de bruit : d'ici à 2013, la commission suggère de geler le point d'indice pour les salaires des fonctionnaires (ce qui n'est prévu par le gouvernement que pour 2011) et de prolonger et élargir la règle de non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite aux collectivités locales et à la Sécurité sociale. Il faut en outre geler certaines prestations sociales et mettre sous conditions de ressources les allocations familiales, estime le rapport.

Mettre à contribution les malades en affection de longue durée

A côté de ces mesures temporaires, 40 milliards d'économies sont attendus d'une « meilleure maîtrise des dépenses de chacun des acteurs publics ». L'accent est notamment mis sur les collectivités locales, pour qui est recommandée une baisse de 1 % des concours financiers de l'Etat en valeur, alors que le gouvernement a opté pour un gel sur trois ans.
Autre cible : la Sécurité sociale, avec le déremboursement de médicaments et, surtout, la mise en place d'une participation financière des malades en affection de longue durée (cancers, diabète, etc.), aujourd'hui pris en charge à 100 % par la Sécurité sociale quelles que soient leurs ressources. Le budget 2011 de la Sécurité sociale ne prévoit de réviser qu'à la marge le dispositif des « ALD », qui explique l'essentiel de l'accroissement des dépenses . « Les dépenses publiques doivent être ciblées sur ceux qui en ont le plus besoin », justifie la commission

La TVA à 5,5 % dans la restauration en ligne de mire

Côté recettes, la commission partage la philosophie du gouvernement en décidant de jouer en priorité sur les niches fiscales et sociales. Mais elle veut aller beaucoup plus loin que lui puisque l'exécutif s'est engagé à réduire les niches de 11 milliards dans son budget 2011. Le rapport cible en priorité les niches « ayant des effets antiredistributifs ou favorisant les plus privilégiés ». La TVA à 5,5 % dans la restauration est notamment en ligne de mire.
Alors que le gouvernement compte ouvrir l'an prochain le débat sur la fiscalité du patrimoine, le rapport prône un « réexamen » de la fiscalité sur les plus-values et les successions « pour des raisons d'équité ». Pour ces mêmes raisons, il demande que la « contribution des plus favorisés » aux hausses d'impôts (effort sur les niches, patrimoine) « ne soit pas annulée par le bouclier fiscal ». Alors que l'avenir de ce dernier s'inscrit désormais en pointillé, la commission reste prudente : « Certains voulaient supprimer l'ISF, d'autres le bouclier, on est resté au statut quo », résume un membre.
En dépit de la cure d'austérité proposée, la commission juge au final son plan de redressement des finances publiques « réaliste, équitable et équilibré ».