TOUT EST DIT

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vendredi 20 août 2010

"Il ne faut compter sur personne pour lancer des réformes politiques en Chine"

L'écrivain dissident Yu Jie, 37 ans, basé à Pékin, démystifie, dans le livre Wen Jiabao, le roi de la comédie, sorti lundi 16 août à Hongkong, l'image du très populaire premier ministre chinois Wen Jiabao.

Fondateur de la branche chinoise du Pen Club considéré comme une organisation clandestine en Chine, Yu Jie, qui revendique ouvertement sa foi chrétienne, est interdit de publication en Chine. Il est l'auteur de nombreux articles et essais sur le mouvement des droits de l'homme ainsi que sur l'histoire contemporaine de la République populaire.
Qu'est-ce qui vous a poussé à écrire Zhongguo yingdi Wen Jiabao (Wen Jiabao, le roi de la comédie) ?

Yu Jie : J'ai commencé à écrire sur le sujet il y a cinq ans. J'ai observé Wen Jiabao, et je me suis aperçu que la plupart des experts occidentaux ont tous une très bonne impression de lui. Ils le décrivent souvent comme la personne la plus ouverte et la plus réformiste du parti.

Je trouve que c'est une grossière erreur d'interprétation. Depuis qu'il est en poste, sa fonction est de contrebalancer le côté plus sévère du président Hu Jintao. C'est un duo "président - premier ministre", à l'image du couple "bon flic - méchant flic" qui n'a pour but que de consolider leur pouvoir.

Wen Jiabao est très populaire. En Chine, il est souvent comparé à Zhou Enlai, l'ancien premier ministre de Mao Zedong.

Justement. Il y a un grand attachement, il est vrai, vis-à-vis de Zhou Enlai. Or, c'était l'exécuteur le plus fidèle de Mao, il a sa part de responsabilité dans ce que Mao a fait, et sans lui, ses ordres n'auraient peut-être pas été aussi bien exécutés… Zhou Enlai et Mao Zedong formaient un couple parfaitement complémentaire, tout comme Hu Jintao et Wen Jiabao aujourd'hui. On peut dire que ni Hu Yaobang et Zhao Ziyang, ni Jiang Zemin et Zhu Rongji n'ont aussi bien fonctionné.

Le premier ministre Wen Jiabao ne peut pas être promoteur de réformes [politiques], car son rôle l'interdit : l'empereur est au-dessus du peuple, tandis que le premier ministre est proche du peuple. Le comparer à un futur Boris Eltsine chinois n'a pas plus de sens : Wen Jiabao n'a pas assez de pouvoir, tout en étant trop haut placé. Eltsine était bien plus loin dans la hiérarchie, et puis il a quitté le parti communiste [soviétique].

Il ne faut pas, d'après moi, compter sur quiconque à l'intérieur du parti pour lancer des réformes politiques en Chine. Le seul espoir, c'est le réveil de la conscience du peuple, la lutte individuelle que chacun peut mener pour la liberté et la démocratie.

Tout le monde vit dans un énorme mensonge, auquel croient aussi les Occidentaux : que la Chine est une grande puissance qui émerge. J'ai parfois l'impression d'être l'enfant qui dit que l'empereur est nu. Il n'y a pas besoin d'aller chercher bien loin, il faut ouvrir ses yeux et oser le dire.

Wen Jiabao a autrefois travaillé sous Zhao Ziyang [le numéro un chinois limogé après les évènements de Tiananmen et décédé dans une résidence surveillée en 2005]. Il l'avait même accompagné sur la place Tiananmen lorsque celui-ci a rencontré les étudiants en grève, le 19 mai 1989. Est-ce que cette expérience ne l'a pas ouvert à une vision plus libérale ?

Le fait que Wen Jiabao ait accompagné Zhao Ziyang tient essentiellement au fait qu'il en avait reçu l'ordre de la part de Deng Xiaoping. On peut dire que si Wen Jiabao a survécu après le limogeage de Zhao Ziyang, c'est parce qu'il a fait ce qu'il fallait pour ça. Il a pu, par exemple, livrer des secrets sur Zhao Ziyang.

Dans le journal de Zhao Ziyang [envoyé clandestinement à Hongkong et publié après sa mort, en 2008, par le même éditeur que celui de Yu Jie], on comprend que quand il tente de convoquer une réunion du comité permanent du Politburo, Wen Jiabao s'y oppose.

Wen Jiabao est connu en Chine pour se rendre immédiatement sur toutes les catastrophes et pour faire preuve d'une grande compassion vis à vis des victimes…

Cela ne veut pas dire que c'est un bon dirigeant. On a vu les dictateurs les plus cruels faire très bien ce genre de choses. Wen Jiabao s'est rendu immédiatement au Sichuan après le séisme [en mai 2008], il a pleuré avec les parents d'enfants morts dans les écoles et promis que des enquêtes seraient menées sur les raisons de leur fragilité.

Deux ans après, aucun rapport officiel convaincant n'a été publié et personne n'a été désigné comme responsable. Au contraire, les intellectuels, les militants et les ONG qui ont entrepris d'enquêter sur ce sujet ont été soumis à la répression. Ce que peut dire Wen Jiabao à un moment donné, et ce qu'il fait ensuite, sont contradictoires.

En avril dernier, un long hommage à l'ancien secrétaire général du parti Hu Yaobang, connu pour ses idées libérales, a été signé par Wen Jiabao dans le quotidien du peuple. N'est-ce pas un moyen pour l'actuel premier ministre de choisir son camp ?

Cet article signé de M. Wen est à mon avis le résultat d'une décision à laquelle sont arrivés les neuf membres du Comité permanent du Politburo. L'article a simplement été publié au nom de Wen Jiabao suite à un commun accord. Le fonctionnement du cercle dirigeant du parti fait que même si M. Wen le voulait, il ne pourrait pas publier un article de son propre gré.


Certains membres du Comité permanent sont tout à fait conscients du fait que le parti communiste est mal vu par le peuple : rendre hommage à Hu Yaobang, c'est une manière de capitaliser sur quelqu'un qui était très populaire. L'article, d'ailleurs, ne parle que d'une facette du personnage, son côté "à l'écoute du peuple". Cela colle à l'image du dirigeant bon et pur auquel aspirent les Chinois.
Les autres facettes de Hu Yaobang, comme ses positions sur la liberté d'expression, sa conscience de la nécessité de limiter le pouvoir du PC et sa vision libérale vis-à-vis du Tibet, sont complètement passées sous silence. Ce prétendu hommage à Hu Yaobang de la part de Wen Jiabao n'a donc pas très grande valeur et les médias occidentaux se sont livrés d'après moi à une surinterprétation.

On parle toutefois de factions conservatrices et de factions libérales au sein du parti, dont Wen Jiabao seraient l'un des représentants.

D'après moi, il n'y a plus aucune divergence idéologique au sein du PCC depuis 1989 et on ne peut plus parler de camp progressiste, ni de camp conservateur. Ce sont des groupes d'intérêt dont les divergences tiennent à des questions de partage du pouvoir.

Ce sont des conflits d'intérêt et non d'idéologie. Sur les questions de corruption ou de répression des dissidents, on s'aperçoit que Hu Jintao et Wen Jiabao sont complètement sur la même ligne.

L'année 1989 fut un tournant. Avant, la sélection des futurs dirigeants se basait sur les choix de gens qui avaient fait leurs preuves au niveau local, comme Zhao Ziyang, ou Wan Li [Président de l'Assemblée populaire du peuple en 1989, il est aux Etats-Unis durant les évènements de Tiananmen et fait des déclarations en faveur du mouvement étudiant].

Après 1989, le parti s'est rendu compte qu'il fallait mieux ne pas laisser entrer au cœur du pouvoir de telles personnalités réformatrices. Tout a alors été fait dans le système pour les écarter. Et on n'a choisi que des gens qui ne sortaient pas du rang et se caractérisaient par leur loyauté. Jiang Zemin [prédécesseur de l'actuel président chinois], Hu Jintao et Xi Jinping [dauphin désigné de Hu Jintao] sont coulés dans le même moule !

Le fait que Wen Jiabao ait été chef des affaires générales du Comité central sous Hu Yaobang, Zhao Ziyang et Jiang Zemin et ait survécu jusqu'au poste de premier ministre prouve, avant tout, qu'il sait très bien tirer son épingle du jeu lorsqu'il y a des luttes de pouvoir





Propos recueillis par Brice Pedroletti

Mont-Saint-Michel, la face cachée d’une machine à fric

La célèbre abbaye normande attire plus de 3 millions de visiteurs par an. Une belle affaire que se disputent quelques familles de commerçants, habiles à tirer le maximum de chaque touriste…
Les cartes postales du Mont-Saint-Michel seront encore plus jolies. Cet été, Veolia lance le chantier des parkings, qui vont rendre l’abbaye à la mer. En 2012, au lieu de se garer au pied des remparts, les voitures seront cantonnées à 3 kilomètres de là, au lieu-dit la Caserne. Pour 8,50 euros par véhicule, les touristes auront droit à une navette gratuite vers l’île et ses célèbres escaliers. Mais, sur place, l’embellissement ne fait pas que des heureux.

Il a déclenché une guerre entre les deux nababs du commerce local, qui se partagent les quatorze enseignes de cette stratégique Caserne : Eric Vannier, maire de la commune et entrepreneur (il possède entre autres la célèbre auberge de La Mère Poulard), contre Jean-Yves Vételé, P-DG de Sodetour (hôtels et campings). Tous deux âgés de 57 ans, ils sont à couteaux tirés depuis que le point de départ des navettes a été déplacé. Au lieu de les trouver sur le parking, les visiteurs devront marcher 850 mètres. Sur un parcours qui semble calculé pour éviter les enseignes de Sodetour sans rater un seul des commerces de Vannier !

Ce Clochemerle prêterait à sourire si l’enjeu n’était pas colossal. Le Mont-Saint-Michel est l’un des vingt lieux les plus visités de notre pays, avec plus de 3 millions de curieux par an. Certains jours, plus de 20 000 touristes se bousculent dans ses rues étroites. Autant que la capacité maximale du Parc Astérix, pour un volume d’activités similaire : selon une étude menée en 2008 par le Réseau des grands sites de France, 80 millions d’euros de retombées du tourisme submergent chaque année les ­caisses de cette commune de 1 kilomètre carré, abritant 22 habitants et 99 électeurs. Car, sur le confetti normand, on crache au bassinet. Mais le rapport qualité-prix est rarement à la hauteur.
Ainsi, réserver l’une des 580 chambres d’hôtel du Mont-Saint-Michel ne garantit pas de dormir sur le rocher, car les trois quarts d’entre elles se trouvent en fait à la Caserne, sur la terre ferme. Un flou artistique souvent dénoncé par les associations de consommateurs. Bien sûr, au sommet, la visite de l’abbaye (classée au patrimoine mondial de l’Unes­-co) mérite ses 8,50 euros. Mais, autour, entre les musées sans intérêt, les gargotes dont les tarifs feraient rougir un bistrot des Champs-Elysées et les souvenirs bas de gamme, les marchands sont dans le temple.

En décrochant le marché du parking, le 6 octobre dernier, Veolia a mis la main sur un sacré magot : 40 millions d’euros pour la construction, en trois ans, puis dix années d’exploitation. Mais le géant du BTP a aussi mis les pieds dans un drôle de marigot, comme le montre la querelle sur le départ des navettes de la Caserne. Dans ce secteur surnommé Las Vegas, en raison des néons qui pullulent au bord de la route, la bataille en cours est plutôt digne d’un épisode de «Dallas». Pour calmer le jeu, François-Xavier de Beaulaincourt, patron du syndicat mixte qui pilote les travaux, explique que le déplacement de la mini-gare routière a d’abord une raison budgétaire : «Nous éco­nomisons ainsi 4,5 millions d’euros.» En raccourcissant le parcours des navettes, on a gagné plusieurs hectomètres de route et, grâce à l’accélération des rotations, la desserte nécessite un véhicule de moins, donc moins de chauffeurs. Sur dix ans, le compte y est.
Mais l’arithmétique municipale ne convainc pas le P-DG de Sodetour, qui a déposé un recours devant le tribunal administratif de Caen. «Ce projet va décourager les visiteurs, juge Jean-Yves Vételé. Les premiers garés, le matin, seront à 850 mètres de la navette, mais les derniers arrivés seront bons pour 1,3 kilomètre de marche. Pour peu qu’il pleuve, ils viendront une fois, pas deux.» D’autres opposants murmurent que le maire, proche de Nicolas Sarkozy, aurait profité des bonnes relations du chef de l’Etat avec Henri Proglio, patron de Veolia, pour obtenir un tracé piétonnier arrangeant ses ­affaires. «Il n’y a vraiment qu’en France que la réussite attire de tels soupçons, rétorque Eric Vannier. On investit plus de 200 millions d’euros pour mettre en valeur Le Mont et son environnement, l’effet sera forcément positif. Mon but n’est pas d’aller brouter l’herbe du voisin !»

Il est vrai que l’herbe en question est assez verte pour tout le monde. Et d’abord pour l’Etat, propriétaire de l’abbaye depuis la Révolution française. Certes pas en raison du loyer versé par les occupants : aux moines bénédictins, chassés en 1791, ont succédé aujourd’hui huit frères et sœurs des Fraternités monastiques de Jérusalem (une communauté active à Paris, Vézelay, Lourdes…), qui paient une contribution symbolique d’environ 1 000 euros par an.

Mais l’afflux de visiteurs compense largement la généreuse hospitalité de l’Etat laïque. «L’abbaye du Mont-Saint-Michel est l’un des cinq sites rentables sur les 95 ­gérés par le Centre des monuments nationaux», explique Jean-Marc Bouré, administrateur des lieux depuis février dernier. Pour 3 millions d’euros de charges, il aligne 9 millions de recettes, issues à 70% de la billetterie (1,2 million de visiteurs par an). Le reste : les ventes de la boutique et la location occasionnelle du site. Comptez 15 000 euros, traiteur non compris, pour une soirée de prestige (la Société générale l’an passé, par exemple). En mars dernier, TF1 a loué le monument pour tourner le téléfilm «L’Ombre du Mont-Saint-Michel», avec Christophe Malavoy.
Assis sur ce tas d’or qui culmine à 170 mètres, l’administrateur du monument n’est pas fan de la future desserte. Comprenez son inquiétude : après avoir crapahuté sur les parkings, les touristes risquent de manquer de jus pour les deux centaines de marches qui mènent au guichet de l’abbaye. Pragmatique, le fonctionnaire réclamait une billetterie pour vendre ses tickets dès l’entrée du Mont. Le maire, Eric Vannier, s’est noblement opposé à la création d’un tel «péage». Tout le monde pense qu’il envisage en fait de vendre, dans ses boutiques de la Caserne, des billets pour les musées qu’il exploite lui-même sur le rocher.

Car la digne abbaye nationale est cernée par un incroyable souk, 100% privé et 100% ­prospère. «On n’a jamais vu personne faire faillite ici», s’amuse Noëlle Poignant, propriétaire de deux magasins de souvenirs sur les 23 échoppes que compte Le Mont. Le pire des bric-à-brac trouve preneur, à raison de 18 euros dépensés par touriste en moyenne : stylos et briquets à 3 euros, tee-shirt «Hello Kitty au Mont-Saint-Michel» à 15 euros, assiettes en faïence de Quimper à 45 euros, marinières Saint James à 50 euros, panoplies de pirate, maquettes de bateaux… Et même – blasphème ! – des préservatifs siglés Mont-Saint-Michel à 2,50 euros pièce. «Dans le temps, on vendait des bijoux et de l’artisanat local, poursuit Noëlle Poignant. Aujourd’hui, c’est porte-clés et cartes postales, boules à neige et tours Eiffel.» C’est vrai, pourquoi frustrer l’étranger qui ­visite Le Mont sans passer par Paris… Et puis, sur le rocher, l’authenticité en a vu d’autres : dans les rues noires de touristes venus du Japon (de loin la première nation représentée parmi les visiteurs), on trouve surtout du «made in China», comme les boules à neige. Prix de revient unitaire en Chine : 20 centimes. Prix de gros : 50 centimes. A la caisse : 2 à 5 euros. Une culbute à faire s’agiter les flocons !

Avec de telles marges, pas étonnant que la petite dizaine de familles de commerçants locaux fasse la loi dans la commune, même si Colette Lecart est, à 72 ans, la seule à vivre sur le rocher (elle tient la dernière boutique de souvenirs avant l’abbaye). Les autres – les Framery, qui possèdent une demi-douzaine de magasins de souvenirs, mais aussi les Hireux, les Ridel, les Gaulois, les Nicolle – habitent plutôt de belles propriétés à Pontorson, à Avranches ou à Saint-Malo. Mais rien ne leur échappe. Demandez à Patrick Gaulois : maire de 2001 à 2008, il a été battu par Eric Vannier, aux dernières municipales, d’une seule voix. Entre les deux tours, l’imprudent avait omis d’assister aux obsèques du fils d’une commerçante…

Retrouvant ainsi le siège qu’il avait occupé depuis 1983, Eric Vannier incarne mieux que personne l’emprise des boutiquiers sur la ville. Originaire de la région parisienne, il a hérité de sa famille le musée «historique» – quelques caves où les mêmes statues de cire reconstituent l’histoire locale depuis quarante ans. Comme dans les autres musées privés, on y traque le touriste avec des méthodes «dignes des racoleurs de Pigalle», dixit un guide officiel de l’abbaye. Mais son plus gros coup, c’est le rachat, en 1987, de l’auberge de La Mère Poulard, créée un siècle plus tôt par Annette Poulard, une bonne originaire de Nevers. De cette adresse connue dans le monde entier pour son omelette mousseuse, Vannier a fait une poule aux œufs d’or. Il a d’abord transformé l’auberge en véritable usine à rassasier le touriste et à remplir les caisses, à raison de 300 couverts par jour en moyenne et de 42 euros l’omelette de 5 œufs. Affirmant suivre l’exemple d’Annette Poulard, qui ne possédait pas le moindre livre de comptes, Eric Vannier ne publie pas de chiffres.

En a-t-on au moins pour son argent en goûtant cette fameuse omelette ? Certes, ce n’est pas la première venue : «Il faut trois ou quatre personnes pour la préparer, révèle Michel Bruneau, un chef étoilé qui a officié plus de trois ans aux fourneaux du restaurant. Elle est cuite dans une poêle spéciale, en argent, chauffée sur un feu de bois d’arbres fruitiers, bien plus cher que du bois de résineux.»

Mais cet homme de l’art ne donne pas tort aux nombreux clients qui, sur Internet, trouvent l’addition trop salée : «Bien faite, c’est un grand moment, mais quand on en sert des centaines par jour, elle devient tout à fait ordinaire.» Quant à l’accompagnement, il a valu à Eric Vannier une amende de 4 000 euros avec sursis, en 2008, pour publicité et affichage mensongers : les «légumes du jardin» inscrits au menu venaient de chez un grossiste et la «salade fraîche du marché» sortait de sachets prêts à l’emploi…

Tout cela n’a pas empêché le «maire Poulard» (surnom inévitable !) de décliner sa marque bien au-delà des murs de l’auberge. D’abord avec des sablés et palets bretons traditionnels, puis avec des dizaines de produits, exportés dans 70 pays. Le groupe emploie 1 200 personnes, dont 400 dans l’hôtellerie (15 établissements) et 800 dans l’agroalimentaire, sur 10 sites de production en France. La Biscuiterie Mère Poulard fait ainsi ­travailler 200 ouvriers à Saint-Etienne-en-Cogles (Ille-et-­Vilaine) et peut produire plus de 1 million de biscuits par jour, dont une partie pour des marques de distributeurs. La Mère Poulard a aussi des boutiques à Deauville ou Saint-Malo, pour écouler ­galettes, confiture, caramels, conserves, pâté et condiments. Dans les années 1990, on a même prêté à Eric Vannier le désir de racheter… l’abbaye. "N’importe quoi, rigole l’intéressé. Elle n’a jamais été à vendre !"

Les super-héros sont des super-machos

Les super-héros version XXIe siècle n'étaient pas à la fête lors de la 118e convention annuelle de l'Association américaine de psychologie, qui s'est tenue à San Diego (Californie), du 12 au 15 août. D'accord, ils sont plus grands, plus beaux et surtout encore plus forts…
Mais les voir mettre une raclée aux vilains à grand renfort d'effets spéciaux n'est pas sans conséquences sur le développement personnel des jeunes garçons, avis aux tenants d'une masculinité moins stéréotypée.

L'étude, présentée par le professeur Sharon Lamb, de l'université de Boston (Massachusetts), ferait presque regretter les super-héros du XXe siècle avec leurs seules tenues en Lycra, slips ostentatoires et capes délavées.

Selon elle, "il y a une énorme différence entre le super-héros des films d'aujourd'hui et le super-héros des comics d'hier. Le héros d'aujourd'hui est trop proche d'un héros d'action qui participe à un flot continu de violence, il est agressif, sarcastique et ne revendique quasiment jamais l'idée d'agir pour le bien de l'humanité. Quand ils ne sont pas dans leur costume de super-héros, ces hommes, à l'image d'Iron Man, exploitent les femmes, étalent leurs richesses et traduisent leur virilité avec des armes surpuissantes".

Les hommes forts d'aujourd'hui manquent cruellement du côté vulnérable des héros d'hier. Comment oublier les difficultés d'un Clark Kent pour séduire la belle Loïs Lane, qui n'a d'yeux que pour son alter ego Superman. Peter Parker, alias Spiderman, n'a jamais abusé de ses super-pouvoirs pour prendre les dames dans sa toile.

DES MONSTRES D'AGRESSIVITÉ

L'hyper-virilité des super-héros modernes ne serait pas si alarmante pour le professeur Sharon Lamb si elle était contrebalancée par un autre modèle, plus sain, de la masculinité.

Or au cours de son enquête auprès de 674 garçons, âgés de 4 à 18 ans, sur le contenu de leur lecture, et sur les émissions et les films qu'ils visionnent, elle souligne que l'alternative, dans les médias modernes, à ces monstres d'agressivité et de confiance en soi exacerbée, ce sont des hommes fainéants et immatures, incarnés par le "gentil bon à rien", personnage principal de nombreux teen movies, comme Supergrave.

"Dans les médias aujourd'hui, les super-héros ou les dilettantes sont les deux seules options offertes aux jeunes garçons. Les fainéants sont drôles, mais ils n'aiment pas l'école et fuient leurs responsabilités." Un modèle qui pourrait aller jusqu'à affecter les performances scolaires des jeunes garçons, selon le professeur Lamb.

Sharon Lamb reste nostalgique des héros d'antan qui, "sous leur costume, étaient de vraies personnes avec de vrais problèmes". Les super-héros d'aujourd'hui ne donnent pas le bon exemple, que l'on considère le cynisme d'Iron Man, la violence du Punisher ou le machisme de Wolverine. Lequel fume, horreur !, des cigarillos. Franchement, vous imaginez Superman ou Batman la clope au bec ?

Aude Lasjaunias

La Méditerranée, berceau de l'alphabet

Un signe = un son. Près de deux mille ans après la naissance de l'écriture, le procédé est enfin trouvé, quelque part entre la Syrie et la Palestine. Une invention simplissime, mais gravée à jamais dans l'histoire de l'humanité.

Au commencement était le Verbe. Soit. Encore fallait-il pouvoir l'écrire. Et, pour cela, l'utilisation de l'alphabet semble... le b.a.-ba. Or, si l'écriture a été élaborée de façon indépendante et à des époques différentes (Mésopotamie, vallée de l'Indus, Chine, Amérique précolombienne), l'invention de l'alphabet, elle, est unique. Son origine remonte à trois mille ans et elle est géographiquement identifiée, du côté de la Syrie actuelle, entre la Phénicie et la Palestine. Retour sur une invention qui a changé le cours de l'humanité.

Tout débute par une inscription qui date d'il y a environ mille six cents ans avant notre ère. Découverte dans le sud-ouest du Sinaï, à Sérabit-el-Khadim, cette première trace se trouve inscrite sur une sphinge - un monstre à corps de lion, tête de femme et pourvu d'ailes : "LB'LT", une formule que l'on prononcerait aujourd'hui "LîBa'aLaT", ou quelque chose d'approchant, et qui signifie "en hommage à la maîtresse". Il s'agit, en l'occurrence, de la déesse Hathor, patronne des mines de turquoise et qui sera plus tard identifiée à Astarté, la Dame de Byblos. Cinq lettres, cinq signes, plutôt, qui constituent le premier témoignage écrit d'un alphabet de type "acrophonique", où la forme d'une lettre reproduit le mot dont elle est l'initiale.

Ainsi, la lettre b imite schématiquement la forme d'une maison. Pourquoi ? Parce que le mot qui signifie "maison" se dit "beth" (qui deviendra bêta en grec) en sémitique. Tout comme "aleph" signifie "tête de boeuf" et deviendra "alpha" en grec. Ce premier alphabet demeure à bien des égards, aujourd'hui encore, source de mystères. Pourquoi n'en trouve-t-on plus trace dans les cinq siècles qui suivent ? Qui pouvait l'utiliser ? S'est-il éteint ou transformé au fil des ans ? Les experts eux-mêmes continuent de s'interroger.

D'autant qu'en 1300 environ avant Jésus-Christ, un nouvel alphabet apparaît. A Ougarit précisément, en Syrie actuelle, juste en face de Chypre. "Une invention extraordinaire", lance Pierre Bordreuil, directeur de recherches émérite au CNRS et lecteur assidu à la bibliothèque d'Etudes sémitiques du Collège de France. Expert d'Ougarit, il est l'auteur de nombreux ouvrages de référence sur ces questions, comme Les débuts de l'Histoire, le Proche-Orient, de l'invention de l'écriture à la naissance du monothéisme (éd. de la Martinière), en collaboration avec deux autres spécialistes, Françoise Briquel-Chatonnet et Cécile Michel. Surtout, Pierre Bordreuil est intarissable sur cette civilisation fascinante, qui a produit "plus de 5 000 textes en quelques dizaines d'années, dans tous les domaines, administratifs ou religieux, mathématiques ou mythologiques".

Un royaume à la croisée des grands axes économiques

Noeud commercial et centre portuaire, le royaume d'Ougarit n'est pas plus grand qu'un département français. Idéalement situé entre la Crète et l'Euphrate, entre l'Anatolie et l'Egypte, il se trouve à la croisée des grands axes économiques. Découverte en 1929, cette ville antique passionna très vite les archéologues, notamment en raison du grand nombre d'objets d'art, de temples et de maisons qu'on y découvrit. A ce jour, un quart du site à peine a été exploré. Tout au plus sait-on qu'on y parlait huit langues différentes et que l'on utilisait au moins cinq systèmes d'écriture (cunéiforme mésopotamien, hittite, hourrite...). Dont l'akkadien, qui compte 500 à 600 signes différents reposant, entre autres, sur la notion de logogramme, sorte d'idéogramme symbole. Ainsi, le mot "shou" désigne-t-il la main. Représenté par un symbole simple, cinq doigts, le vocable devient progressivement un son. Associé à d'autres, il peut former de nouveaux mots, à l'instar d'un rébus. Comme si, par exemple, "chat + pot" devenait "chapeau".

Mais, surtout, au début des années 1930, les archéologues décèlent, sur une partie des tablettes d'Ougarit exhumées, une écriture radicalement nouvelle, composée de 30 signes, pas un de plus. Une découverte si surprenante qu'elle mobilise trois savants : un Allemand, un Français et un père dominicain de Jérusalem. Sans l'aide d'aucune tablette bilingue, Hans Bauer, Paul-Edouard Dhorme et Charles Virolleaud unissent leurs forces et, en moins d'un an, ils parviennent à la conclusion que ce système s'apparente bien à celui d'un alphabet. Certes, il ne comporte pas de voyelles, mais l'ordre des lettres est fixe et il s'agit de cunéiforme simplifié.

Qui l'a créé ? A quelle époque précisément ? Dans quel but ? A toutes ces questions, les linguistes apportent des réponses prudentes, d'autant qu'une telle invention ne s'est pas faite en quelques années mais plus probablement par tâtonnements successifs. Certains évoquent des soldats levantins, d'autres des marchands, mais les experts penchent pour une création issue d'une poignée de scribes. Ces même experts notent, entre autres, que l'Egypte avait bien un dieu de l'écriture (Thot), la Mésopotamie également (Nabou) mais qu'à Ougarit en revanche il n'existait pas de divinité associée, ce qui renforce la thèse d'une élaboration indigène de l'écriture ougaritique.

"Les langues sémitiques (celle d'Ougarit, l'hébreu) sont essentiellement consonantiques et ne font guère usage de voyelles, observe Pierre Bordreuil. A la lecture, les lettrés d'Ougarit restituaient probablement spontanément les voyelles manquantes, exactement comme on rajoute une musique sur les paroles d'une chanson." Cette écriture cunéiforme simplifiée serait peut-être aujourd'hui encore utilisée si la cité d'Ougarit n'avait été détruite aux alentours du xiie siècle avant notre ère, durant l'invasion des "Peuples de la mer" (Shekelesh, Philistins, Shardanes...) qui ravagèrent la côte syrienne. En revanche, si l'alphabet cunéiforme d'Ougarit disparaît également, son principe, lui, demeure, sous forme dite "linéaire" : progressivement, les signes se simplifient et peuvent être facilement employés sur des supports autres que les tablettes d'argile.
Au VIIIe siècle avant notre ère, les Grecs introduisent les voyelles

Tout l'intérêt d'un alphabet réside dans un paradoxe : plus la valeur phonétique d'un signe est réduite et moins on a besoin de signes pour s'exprimer. Pour écrire, par exemple, "ba", "bi", "bou", "bab", "bib", "boub" en langage syllabique, il faut six signes différents. Mais une seule consonne de base avec l'alphabet. Ne nous y trompons pas. Il ne s'agit pas d'un simple perfectionnement technique. En permettant de passer de l'oeil à l'oreille, du dessin symbole au son "pur", l'alphabet opère une révolution conceptuelle, avec un degré d'abstraction inconnu jusque-là.

Les Phéniciens, grands voyageurs, vont être les promoteurs de cet alphabet linéaire de 22 signes. En quelques dizaines d'années, celui-ci se répand dans de petits royaumes, ceux des Hébreux et des Araméens notamment. Puis à Chypre, en Sardaigne, en Crète, en Asie Mineure et de la Perse jusqu'en Afghanistan ! Les Grecs l'adoptent un peu plus tard et, au viiie siècle avant notre ère, ils l'améliorent en introduisant les voyelles et quelques lettres supplémentaires, telles le phi et le psi. Dès lors, ce corpus qui comporte 26 lettres est "exporté" par des colons dans le sud de l'actuelle Italie. Puis, les Etrusques s'en servent à leur tour et le transmettent aux peuples indigènes, les Latins en particulier. De fait, la propagation de l'écriture n'est pas que géographique, elle touche de nombreuses couches de la société, tant elle "permet de diffuser la culture de façon plus rapide, plus efficace et plus profonde que tout ce qu'on avait connu jusque-là", observe Pierre Bordreuil.

Alors, comment expliquer un si durable succès ? "Les langues sémitiques dites "mortes" sont fixes et conservatrices. Aujourd'hui, un disciple de Jésus-Christ revenu sur terre se ferait assez bien comprendre en Syrie. De même, au Moyen-Orient, l'araméen demeure encore la langue liturgique de nombreux chrétiens. A l'inverse, l'alphabet se caractérise par une malléabilité extraordinaire. Son principe est simplissime (un signe = un son), et son champ d'application, universel puisque le son peut être différent selon les pays", s'enthousiasme Pierre Bordreuil. Des exemples ? Au Vietnam, au prix de quelques accents supplémentaires, Alexandre de Rhodes, père jésuite, a créé au xviie siècle le "quôc-ngu" pour transcrire par écrit cette langue qui ressemblait à un "gazouillis des oiseaux" et évangéliser les populations. Près de trois cent cinquante ans plus tard, elle est toujours la langue officielle du pays. Mais avec ces mêmes 26 lettres, on peut aussi écrire du basque et du finnois. De l'indonésien et du turc. Du magyar et du wolof. En trois mille ans à peine, l'alphabet des Phéniciens est devenu universel.



Vincent Olivier

« La France perd 200 fermes par semaine »

Marc Dufumier est ingénieur agronome et enseignant chercheur, très recherché en conférences débats dans toute la France sur l'accès à la terre et les modes de productions agricoles alternatifs.

- Que vous inspire le développement récent de Terre de Liens en France ?

« C'est l'une des pistes à suivre de toute urgence pour freiner la disparition progressive des exploitations agricoles. En France, chaque année, 66 000 hectares de terres agricoles sont artificialisés, c'est l'équivalent d'un département français moyen artificialisé tous les dix ans. La France perd 200 fermes par semaine, c'est 160 hectares en moins chaque jour de perdus au profit du bitume. L'autonomie des agriculteurs, condition de leur maintien, est déjà défendue depuis longtemps par le CEDAPAS, un réseau d'agriculteurs prônant le retour à une agriculture paysanne, non industrielle. Terre de Liens s'engage dans la même voie... »

- Un retour en arrière est-il souhaitable ?

« Oui. L'agriculture ne rémunère plus ses agriculteurs. On a des surplus de céréales, de sucre et de viande et des déficits en protéines végétales. On surproduit ce qu'on a de trop (qui est subventionné), on aggrave en même temps notre déficit alimentaire et la standardisation des semences.

On impose aujourd'hui des variétés "améliorées" pour plus de rendements, pour amortir les capitaux investis (intrants, matériels, charges fixes...). Les écosystèmes et les paysages sont simplifiés à l'extrême. Sans insectes, sans coquelicots, sans la biodiversité qui enrichit naturellement les sols. C'est un véritable forçage et nos régions sont devenues hyperspécialisées, avec parfois des concentrations animales insupportables (les cochons en Bretagne, polluant les eaux). Au contraire, il faudrait libérer les terres pour rétablir l'autonomie en protéines (luzerne, trèfles, légumineuses protègent les sols), ne plus importer le soja brésilien, réhabiliter le fumier pour ne plus acheter de l'azote de synthèse, très cher en gaz naturel russe ou norvégien. L'avenir de la France, c'est le retour aux terroirs ! Chacun dans sa région, voilà qui est moderne ! ».

Un imam "islamiste" expulsé de France pour la deuxième fois

Un ancien "imam islamiste" d'une mosquée de Pantin, Ali Ibrahim El-Soudany, déjà expulsé de France vers l'Egypte en janvier, a été renvoyé un deuxième fois vers l'Egypte, jeudi 19 août, en "urgence absolue", selon le ministère de l'intérieur.
"Cet individu est très récemment réapparu sur le territoire national alors qu'il était sous le coup d'un arrêté d'expulsion, exécuté en janvier dernier", explique un communiqué.

Brice Hortefeux avait annoncé le 7 janvier dernier, quasiment dans les mêmes termes, "l'interpellation et l'expulsion en urgence" d'Ali Ibrahim El-Soudany vers l'Egypte, son pays d'origine. Selon le ministère de l'intérieur, l'imam se livre à des prêches "appelant à la lutte contre l'Occident, méprisant les valeurs de notre société et incitant à la violence", glorifiant notamment les jeunes "qui donnent leur sang".

"Ce prêcheur de haine avait, de manière répétée, tenu des propos violemment hostiles à l'égard du monde occidental et totalement contraires aux valeurs de notre société", a répété M. Hortefeux. Le ministère précise que depuis 2002, 125 islamistes radicaux, dont 29 imams ou prédicateurs, ont été expulsés de France.

Le Web est mort... ou pas

L'iPhone, Facebook ou encore les vidéos auraient tué le Web originel, argumente le rédacteur en chef du magazine Wired. Une hypothèse qui fait débattre les penseurs du Net.


"Internet est complètement mort". Quand c'est le chanteur Prince qui l'affirme, au mois de juillet, les commentateurs ricanent. Mais quand le magazine américain Wired publie un dossier: "Le Web est mort, vive Internet!", signé par son rédacteur en chef Chris Anderson, les commentateurs s'affolent.


Le postulat d'Anderson et de Michael Wolff, le journaliste qui co-signe cet article, est simple: le Web tel qu'on le connaît est sur le déclin. Certes, nous sommes de plus en plus connectés à Internet. Mais nous utilisons de moins en moins nos navigateurs habituels (Internet Explorer, Firefox...). Nous préférons regarder des applications, par exemple pour consulter la météo ou recevoir nos mails sur notre iPhone.

Apple oui, Google non

Anderson décrit ainsi la journée-type d'un Américain très connecté: "Vous vous réveillez et lisez vos mails sur l'iPad de chevet -une application. Pendant le petit déjeûner, vous vous baladez sur Facebook, Twitter et le New York Times - encore trois applications. Sur votre chemin pour aller au travail, vous jetez un oeil à vos flux RSS, discutez sur Skype et Instant messenger. Encore des applications. A la fin de la journée, vous rentrez, faites à manger en écoutant Pandora, jouez sur l'Xbox Live et regardez un film sur le service de vidéo en streaming de Netflix."

Pourquoi ce changement? Parce que les internautes préféreraient un monde hyper-confortable grâce à ses applications simples d'utilisation - enfants et grands-parents savent utiliser un iPad, affirme Apple. Et parce que les entreprises auraient davantage de facilité à gagner de l'argent par ce moyen.

Anderson explique comment Google perd la main, lui dont la force est de connecter et d'organiser les contenus créés par d'autres. Et comment Facebook ou iTunes gagnent du terrain, eux qui choisissent de garder le contrôle sur leurs outils (Steve Jobs est d'ailleurs un fervent partisan de ce système). Une économie "à l'ancienne", selon Wolff, qui conclut son article en écrivant "après un long voyage, nous sommes de retour à la maison".

Un graphique polémique

Pour appuyer son propos, Anderson fait appel à un graphique (cliquez ici pour le voir en entier) pour montrer combien le Web est peu important dans la part globale du trafic Internet.

Rapidement, l'analyse des chiffres proposée par Wired fait débat: ils seraient trop pessimistes. Boingboing en propose une autre lecture et un autre graphique en incluant le facteur temps. Oui, la croissance du Web ralentit par rapport à la croissance des applications. Mais elle est toujours en augmentation, expliquent entre autres Boingboing et le New York Times. Le blog TechCrunch soulève un autre problème: les vidéos YouTube ne sont pas comptées dans la partie "Web".

Les applications, un monde fermé

Autre point contesté: la démonstration d'Anderson tuerait trop vite un modèle économique basé sur la publicité. Contrairement à Wired, Benoît Raphaël, ex-rédacteur en chef du Post.fr, estime que les publicitaires ne sont pas encore capable de tirer le meilleur profit de l'interactivité. Sur le Web, les internautes dialoguent, bloguent, partagent des liens. Une démarche que ne favorisent pas les applications. Et de conclure: "Il y a encore du boulot pour les créatifs."

Une idée qu'exprimait déjà le blogueur passionné de technologies de la communication et des médias Jeff Jarvis avant même la publication de l'article de Wired: "Les applications sont plus fermées, contrôlent davantage - et c'est pourquoi les médias les aiment. Mais elle n'interagissent pas avec d'autres applications ou avec le Web lui-même. Elles sont hostiles aux liens, aux recherches. Ce que nous faisons avec une application est moins ouvert au monde. Je vois l'iPad un peu comme une sorte d'étrange cheval de Troie: au lieu d'amener des soldats dans un royaume pour briser ses murs, dans ce cheval, nous sommes captifs, amenés dans de vieux murs. La porte se referme et nous sommes de retour dans le vieux monde des médias qui contrôlent tout - et sommes de retour une génération en arrière."

Sarkozy siffle la fin de la trêve estivale à Bregançon

Avant la grande rentrée du gouvernement, pour le conseil des ministres du 25 août, Nicolas Sarkozy réunit vendredi au Fort de Brégançon (Var) le Premier ministre et les ministres de Bercy, pour parler budget, croissance et déficits. Le chef de l'Etat, le chef du gouvernement François Fillon, les ministres de l'Economie Christine Lagarde et du Budget François Baroin se retrouveront dans la résidence d'été présidentielle à partir de 11h30. Après leur réunion, un déjeuner de travail est prévu.

Nicolas Sarkozy regagnera ensuite la résidence familiale de son épouse, au Cap Nègre, à quelques dizaines de kilomètres de Brégançon. Avant la réunion avec ses ministres, le président s'entretiendra avec ses principaux conseillers, Claude Guéant (secrétaire général de l'Elysée), Xavier Muscat (économie), Raymond Soubie (social) et Franck Louvrier (communication). Un communiqué sera publié à l'issue de la réunion et du déjeuner de travail.

Coup de rabot sur les niches fiscales

Au programme: la croissance, le budget 2011 et les déficits abyssaux de la France, dont la réduction est l'une des priorités la politique économique du gouvernement. Les deux têtes de l'exécutif et les ministres jaugeront l'ampleur du "coup de rabot", selon le terme de François Fillon, à donner aux très nombreuses niches fiscales. Toutefois, il ne devrait pas y avoir de décisions définitives car "les arbitrages se feront dans les jours à venir", a précisé Franck Louvrier.

Les 470 niches fiscales recensées représentent un manque à gagner pour l'Etat en 2010 de 75 millions d'euros. En en supprimant plusieurs, le gouvernement espère réaliser une économie de 8,5 à 10 milliards d'euros. Même si elle n'est pas officiellement à l'ordre du jour, la réforme des retraites, discutée à l'Assemblée à partir du 7 septembre, devrait également être évoquée. Selon le Fonds monétaire international et l'agence de notation Moody's, sa mise en oeuvre permettrait de contribuer à assainir les finances publiques du pays.

Roms: la France à tort ou à raison


Grain de SEL

Le principe de base des systèmes d’échanges locaux est de favoriser des échanges de services, de savoirs et parfois de biens sans recourir à l’euro, mais sur la base d’une unité de compte fictive. Ainsi les quelque 30 000 membres des 350 SEL qui existent en France peuvent, selon des modalités très diverses, échanger une heure de jardinage contre une leçon d’anglais ou une heure de garde d’enfant.

Dans un contexte de crise, les SEL attirent des personnes qui espèrent pouvoir accéder à des services peu chers. Mais ils sont bien autre chose qu’un réseau où l’on peut faire de bonnes affaires. Les SEL sont nés d’un constat : l’échange monétaire exclut. D’une manière générale, les plus démunis ne peuvent entrer dans la ronde des échanges parce que leurs compétences ou leurs savoir-faire ne sont pas reconnus ou mobilisés. En valorisant toute activité, indépendamment de la qualification qu’elle requiert, les créateurs des réseaux d’échange cherchent à briser le cercle de l’exclusion. En effet, dans le cadre d’un SEL, l’accès à un service n’est pas une finalité en soi, mais est l’occasion d’une rencontre, d’une parole. Les SEL contribuent ainsi à leur manière à la vitalité du lien social en favorisant des relations au cœur même de l’échange économique, y compris entre des personnes qui autrement ne se croiseraient pas.

Dans l’échange marchand habituel, la logique est celle de l’équivalence, celle du donnant-donnant. Les liens de réciprocité entre le vendeur et l’acheteur s’éteignent avec la fin de la transaction. L’un et l’autre sont quittes. La logique des SEL est tout autre. Elle fait de la réciprocité le moteur de l’échange des biens et des services entre les hommes.

Les SEL n’ont pas vocation à se substituer à l’échange marchand. En période de crise, ils ont une utilité sociale de premier ordre pour permettre aux plus démunis de garder la tête haute en leur permettant de commercer avec d’autres. Mais plus encore, ils font percevoir qu’il n’y a pas d’économie au service de l’homme si la gratuité n’y a pas sa place.

Une justicière chez les Verts

Tout baigne dans le camp des écologistes. Sur le campus nantais, leur université d’été n’a pas tourné au chahut estudiantin. Aucune chamaillerie visible ne divise les troupes. Eva Joly reçoit un “blanc-seing” pour mener la campagne à la présidentielle de 2012.

Cécile Duflot, candidate naturelle, ne “se sentait pas les épaules…” L’ex-juge d’instruction, en revanche, ignore les contraintes d’une excessive modestie. Sa vertu lui tient lieu de programme politique. Elle toise déjà ses adversaires. Un souffle intègre et pur, venu du froid, va balayer leur front forcément corrompu…

Au passage, la justicière se flatte d’avoir jadis “mis Dominique Strauss-Kahn en examen.” Et oublie de préciser que celui-ci, au bout du compte, bénéficia d’un non-lieu. Un détail, sans doute ?

Eva, coqueluche des médias, part en croisade. Une impeccable puritaine se présente, enfin, pour tourner la page des “années bling-bling”.

Reste à rassembler le parti unique qui la soutiendra. D’un côté “les Verts”, canal historique, plutôt portés vers l’extrême gauche. De l’autre “Europe-Écologie”, partisan d’une ouverture raisonnable.

Qui réussira à concilier les deux familles ? Pas M. Cohn-Bendit qui, hier, de guerre lasse, a jeté l’éponge. L’aimable Dany souhaite “prendre un peu ses distances.” On se demande bien pourquoi.

Chine : deux leçons et un souhait

L'économie chinoise est-elle déjà la deuxième économie du monde ? Ne chipotons pas, l'essentiel est qu'elle a accompli d'immenses progrès, et cela contre tous les pronostics. Y compris ceux de sa propre population car, aujourd'hui encore, il y a beaucoup plus de Chinois pour quitter leur pays que pour y revenir.

Plutôt que de se lamenter face aux succès d'une économie émergente, il vaut mieux, pour nos sociétés européennes, tirer la leçon de l'événement. Celle-ci est simple, mais dure : dans la hiérarchie entre les pays, l'économie a toujours été et reste un facteur fondamental. Les pays européens avaient dominé la Chine, il y a près de deux siècles, parce que leurs économies capitalistes étaient plus dynamiques. Aujourd'hui, la Chine communiste et capitaliste retrouve son rang ancien pour la même raison, réussissant là où la métropole du communisme, l'URSS, avait échoué. La leçon est donc claire : nous perdrons notre rang si nous ne relançons pas notre croissance économique.

D'un autre côté, les Chinois, dirigeants et société civile confondus, feraient bien de réfléchir à l'histoire de certains pays qui avaient opéré, eux aussi, des démarrages ou des accélérations rapides, et en particulier de l'Union soviétique ou l'Allemagne hitlérienne. Ces pays se sont ensuite effondrés, entre autres, car il leur a manqué un élément fondamental : porter des valeurs crédibles aux yeux de leurs populations, comme du reste du monde. Leurs régimes sont morts à cause de leurs crimes. Les despotes chinois contemporains seraient donc bien inspirés de méditer cette leçon, et d'abord, au moins, de laisser travailler ceux qui, chez eux, y réfléchissent.

En attendant, il faut souhaiter que les responsables du monde entier se penchent sur la façon d'accueillir l'ascension chinoise. Non pas pour constituer des alliances défensives, mais pour faire comprendre et admettre à la Chine les règles du monde contemporain et pour faciliter son atterrissage parmi nous. Il y faut de la fermeté, sans doute, mais aussi de la générosité.

Les Chinois nous connaissent peu et ils ne nous aiment guère, quoi qu'ils disent : comment s'en étonner, compte tenu des prédations que nous avons commises chez eux ? Les connaissons-nous mieux ? Ce n'est pas sûr. En tout cas, nous ignorons trop souvent leur langue et leur culture. Un véritable « plan Chine », lucide et ambitieux, devrait être mis en place par les autorités européennes. Il pourra ouvrir la route de l'entente avec ce grand pays qui retrouve son rang...

(*) Directeur de recherche au Céri (Centre d'études et de recherches internationales).

La méfiance continue de régner au sein du secteur laitier

La FNPL, organisation majoritaire du secteur, s'inquiète de l'impact des discussions entre transformateurs et grande distribution, tandis que l'OPL et la Confédération paysanne, minoritaires, critiquent l'accord.
Malgré la hausse, décidée mercredi soir, de 10% des prix du lait, la méfiance au sein du secteur n'est pas estompée. La Fédération nationale des producteurs laitiers (FNPL), branche laitière de la FNSEA, a ainsi averti "solennellement", jeudi 19 août, la grande distribution que cette hausse "est nécessaire et que les éleveurs ne pourraient admettre que les transformateurs ne puissent l'appliquer sous des prétextes de blocages dans leurs négociations".
"Tenir parole"

"L'an dernier les centrales d'achat [de la grande distribution, ndlr] ont importé du lait et de l'emmental allemand qui étaient moins chers", a expliqué à l'AFP Christophe Roquefeuil, secrétaire général de la FNPL. "Aujourd'hui, on leur demande de tenir leur parole. Sinon on ira voir ce qui se passe dans les magasins", a-t-il prévenu, précisant que "l'activité syndicale n'a pas pris fin" mercredi soir à la conclusion de l'accord.
L'Organisation des producteurs de lait (OPL), branche laitière de la Coordination rurale, un syndicat minoritaire qui ne participait pas aux négociations, a elle estimé qu'aux termes de l'accord, les producteurs étaient "méprisés". Elle défend un prix de 400 euros les 1.000 litres pour faire face non seulement aux coûts de production, mais également assurer une rémunération à l'agriculteur.
La Confédération paysanne, qui ne participait pas non plus aux négociations, a elle affirmé que "pour de très nombreux producteurs fragilisés, cet accord a minima est synonyme d'un arrêt de la production".
L'accord conclu mercredi soir prévoit une hausse des prix de 31 euros au second semestre, soit une moyenne de 301 euros sur l'ensemble de l'année. En contrepartie, la filière s'est accordée pour mettre en place un indicateur de compétitivité pour faire face à la concurrence européenne, notamment allemande.

Le cancer est la maladie qui a le plus d'impact sur l'économie

En France, le coût du cancer est estimé à 12,8 milliards de dollars en 2009, suite à une augmentation de 16,8 % des cas sur un an. Mais ce phénomène est mondial puisqu'il s'étend désormais aux pays en voie de développement.

La santé est la clé de la croissance, et la maladie un frein à la productivité. Avec un coût de 895 milliards de dollars en 2008, soit 1,5% du PIB mondial, le cancer se place en tête des maladies en terme d'impact sur l'économie. L'étude menée par l'American Cancer Society aborde pour la première fois le fléau en terme de coûts et de pertes sur la productivité, afin de lui trouver une réponse globale. Il est aussi, cette année, la première cause de mortalité dans le monde, selon l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS).

La France n'échappe pas à cette tendance. Avec une augmentation de 16,8% des cas en 2009, le coût total du cancer dans l'Hexagone est ainsi estimé à 12,8 milliards de dollars. A l'échelle européenne, les nouveaux cas ont coûté 82,6 millions de dollars. Un bilan économique qui place le cancer en tête des maladies dans le monde, et devance ainsi de près de 20% les maladies cardio-vasculaires, selon les chiffres publiés par l'association du coureur cycliste Lance Armstrong, «Livestrong».
Les pays en voie de développement, foyers de nouveaux cas

Alors que le cancer reste perçu comme la «maladie des riches», faibles et moyens revenus compteront bientôt davantage de nouveaux cas de cancer que les revenus aisés. En 2009, les revenus moyens ont représenté 39,9% des nouveaux cas de cancer. A l'horizon 2020, elle sera la tranche la plus touchée, avec 6,6 millions de nouveaux cas dans le monde, suivie par les très hauts revenus, avec 5,9 millions de nouveaux cas.

En cause : le mode de vie occidental que les pays en voie de développement adoptent de plus en plus. Calqués sur les pays développés, leurs nouveaux régimes de vie participent à l'augmentation des cas. De fait, 61% des nouveaux cas de malades se situent dans les pays en voie de développement en 2009. Une tendance qui inquiète les chercheurs. «On sait à présent que sans une intervention immédiate, le bilan économique et humain du cancer augmentera considérablement dans les pays à faibles ou moyens revenus, avec l'explosion de la demande de système de sécurité sociale et l'accroissement des coûts qu'ils ne pourront supporter», analyse John R. Seffrin, de l'American Cancer Society.

Pour les chercheurs, SIDA et Malaria ne sont donc plus les maladies sur lesquelles l'aide internationale doit se concentrer. Face au cancer, l'urgence est de mettre en place les même moyens de lutte et de prévention que pour ces maladies. D'ici à 2020, le nombre de nouveaux cas de cancer augmentera de 16,8 millions dans le monde, soit cinq fois plus que les nouveaux malades du SIDA. Car si l'impact économique du cancer pèse de plus en plus, le développement des méthodes de détection et de prévention dans ces pays seraient, elles, un moteur de croissance, autant qu'un moyen de sauver des vies.


Jeanne Dussueil

Grève le 7 septembre à la SNCF contre la réforme des retraites

Les syndicats de cheminots CGT, Unsa, SUD-Rail et CFDT dénoncent dans leur communiqué "un projet de réforme injuste, refusant notamment le report brutal de l'âge de départ en retraite".
Les syndicats de cheminots CGT, Unsa, SUD-Rail et CFDT ont lancé un appel à la grève pour le 7 septembre dans le cadre de la journée d'action intersyndicale contre la réforme des retraites.

Elles dénoncent dans leur communiqué "un projet de réforme injuste, refusant notamment le report brutal de l'âge de départ en retraite".

Les syndocats entendent aussi marquer leur opposition à la réforme du fret et défendre leurs revendications sur l'emploi et le pouvoir d'achat, ainsi que la situation des apprentis.

Les syndicats appellent aussi le personnel de la SNCF à se joindre aux manifestations du samedi 4 septembre contre la politique sécuritaire du gouvernement.

Outre la SNCF, la RATP devrait aussi participer au mouvement. Deux syndicats de la Régie autonome des transports parisiens (RATP), Sud et Force ouvrière, ont eux aussi déposé un préavis de grève illimité à partir du 7 septembre.

Ce 7 septembre, l'Assemblée nationale entamera l'examen de la réforme des retraites au Parlement.

Le 24 juin dernier les syndicats avaient déjà mobilisé un à deux millions de personnes contre ce projet.

Atterrissage à Brégançon

Enfin, on revient sur terre.
Après deux semaines de récréation politique et de fantaisies dérivatives sur le thème de la sécurité, l'exécutif se concentre sur les problèmes immédiats auxquels il sera confronté à la rentrée : la croissance et le déficit budgétaire. La petite réunion de poids lourds gouvernementaux convoquée ce matin au fort de Brégançon par le président de la République prend donc des allures de veillée d'armes.
Personne, autour de la table, ne se fait d'illusion. En dépit du triomphalisme de circonstance de Christine Lagarde, les 0,6 % de croissance enregistrés au deuxième semestre - quatre fois moins que l'Allemagne ! - sont insuffisants pour enclencher le mouvement vertueux qui doit permettre à la France de réduire ses déficits publics de 8 % du PIB aujourd'hui à moins de 3 % d'ici 2013.
Si l'agence de notation Moody's a bien renouvelé le label AAA - le meilleur possible - qui atteste de la crédibilité économique et financière de notre pays auprès des marchés - elle l'a assorti de remarques sur la dégradation relative de la situation française. Des doutes clairs sur la capacité de l'État à tenir ses engagements.
A elle seule, la décisive réforme des retraites - qui n'est que le premier étage de la fusée - n'est pas encore acquise. Jusque-là, le gouvernement a plutôt bien géré le calendrier, mais il doit mettre au point un nouvelle stratégie pour la phase finale de septembre où il devra affronter le mécontentement syndical et la rue... Handicap supplémentaire : l'acteur principal de cette construction politique majeure du quinquennat est devenu presque encombrant. Hors jeu, le ministre du Travail, Éric Woerth, n'a même pas été invité à Brégançon...
L'autre levier pour trouver les introuvables dix milliards d'euros n'est pas moins explosif. Nicolas Sarkozy s'était engagé à ne pas augmenter les impôts et il va devoir le faire. Pas le choix. Du rabotage général des niches fiscales (de 10 % au moins) au relèvement de la dernière tranche d'impôt, qui touchera les contribuables les plus riches, le chef de l'État est condamné à être très convaincant pour justifier son revirement. Mais comment être performant pour rendre des arbitrages budgétaires douloureux et traverser ces semaines de turbulences avec une équipe ministérielle usée et un Premier ministre en fin de vie gouvernementale ? Au fort, ce ne sera pas seulement la fin des vacances. Le début des travaux forcés.

Olivier Picard

La France du rêve

Le « Journal du dimanche » a publié récemment le classement qu'il réalise deux fois par an sur les 50 personnalités préférées des Français. Au-delà de son aspect ludique, ce sondage en dit long sur l'état d'esprit de nos compatriotes. A qui vont leurs suffrages ? D'abord à ceux qui les font rêver. L'écrasante majorité des lauréats (près de 40 sur 50) appartiennent au monde du spectacle - acteurs, chanteurs, humoristes. Donnez-nous des images, des chansons ou du rire, mais surtout faites-nous oublier la réalité… Pour la huitième fois depuis que ce classement existe, Yannick Noah arrive en tête : le doit-il au souvenir d'une finale héroïque à RolandGarros, ou à la sympathie qu'il inspire aujourd'hui sur scène ? En tout cas, le duo qu'il forme avec Zinedine Zidane, aux deux premières places, exprime un plébiscite bienvenu en faveur de la diversité.

Le rêve, oui, mais pas nécessairement celui auquel invite le clinquant des grands shows télévisés. Les cinq chanteurs qui figurent parmi les vingt premiers nominés ne sont pas précisément des trouvailles récentes du star système : Sardou (5 e), Aznavour (8 e), Cabrel (11 e), Renaud (19 e), Pagny (20 e). Ces choix traduisent-ils la nostalgie d'un passé plus serein, ou, plus prosaïquement, le poids démographique de la génération du baby-boom ? Cette « préférence pour le souvenir » existe aussi à l'égard des sportifs, qu'on s'attendrait à trouver plus nombreux parmi ces pourvoyeurs de rêve : ils ne sont que cinq dans le palmarès, dont deux (Zidane et Douillet) ont leur carrière derrière eux.

Et les gens sérieux, ceux qui nous parlent de la « vraie vie » ? Le monde politique n'a ici que deux représentants avec, là encore, une prime au passé : Simone Veil (21 e) et Jacques Chirac (41 e). L'absence totale de responsables de l'actuelle majorité n'étonne pas dans la morosité ambiante, mais il faut noter aussi celle de la gauche. Les politiques ne peuvent faire rêver que sur l'avenir : cette fuite des Français vers des rêves de rechange n'est-elle pas le signe d'un profond pessimisme ?

La trace numérique

Il ne faut peut-être pas vivre caché pour vivre heureux. Mais peut-on vivre heureux si l'on ne cache rien ? A l'heure du boom de l'Internet et des réseaux sociaux, les citoyens numériques du XXI e siècle laissent en tous les cas bien trop de traces digitales sur le Web.

Les fermes de serveurs poussant sous le contrôle de Google comme de Facebook accumulent chaque jour des milliards de données concernant des millions d'internautes. Sites visités, mots clefs recherchés, heures d'accès au Web mais aussi informations personnelles, photos, chat, e-mails… tous les clics ou presque sont enregistrés. Et avec la généralisation des « smartphones », le « Netizen » est sous surveillance passive quasi permanente. La géolocalisation permettant même de savoir qui se trouve où à l'instant T. Demain, les Web-annonceurs seront de plus en plus nombreux à croiser informations personnelles et localisation géographique pour bombarder de messages publicitaires les cyber consommateurs.

A l'aube de cette nouvelle ère numérique, il est urgent que l'internaute sorte de sa relative passivité en commençant par apprendre à se méfier. Tiraillés entre la tentation de révolutionner les modes de communications et celle de monétiser leurs inventions, les ténors du Web qui prétendaient qu'ils ne feraient jamais le mal ne sont plus des start-up désintéressées mais des entreprises à la recherche du profit. Face à elles, le citoyen doit se comporter en consommateur exigeant et vigilant. Il doit faire jouer la concurrence mais aussi refuser la facilité en donnant trop facilement des informations qu'il a souvent le droit de protéger.

L'internaute se doit aussi d'accroître la pression sur les politiques et les autorités de régulation pour qu'elles encadrent plus rigoureusement les pratiques des champions du Web. Dans un secteur aussi innovant, aucun législateur ne peut bien sûr adopter des lois capables de tout prévoir. Il n'est pas davantage question d'imposer un carcan réglementaire qui briderait le progrès. Mais il est temps de forcer les Google et Facebook à suivre quelques règles de base. Leurs pratiques en matière de défense de la vie privée doivent en particulier être transparentes et simples à comprendre. Le droit à l'oubli numérique permettant d'effacer totalement ses traces informatiques doit également être affirmé sans que les acteurs du Web puissent se protéger derrière d'hypothétiques difficultés techniques. Et, pour que les Etats européens, par exemple, puissent se faire obéir, il faut sans doute obliger les acteurs du Web à localiser leurs serveurs sur le Vieux Continent. Pour de mauvaises raisons, les dictatures ont prouvé que l'on pouvait contrôler le Web. Les démocraties ont de bonnes raisons de chercher à simplement en limiter les abus.

La Bundesbank prévoit 3% de croissance en 2010

La croissance de l'économie allemande devrait atteindre 3% cette année avant de ralentir, après le rebond d'une ampleur inattendue dont elle a bénéficié au deuxième trimestre, a déclaré jeudi la Bundesbank.
Porté notamment par les exportations, le produit intérieur brut (PIB) allemand a crû de 2,2% sur le trimestre avril-juin, sa plus forte hausse depuis la réunification il y a 20 ans. (voir )
"Les signes se multiplient montrant que la reprise économique en Allemagne est de plus en plus autoentretenue", écrit la Bundesbank dans son bulletin mensuel.
"Sur la base des données actuelles, on peut s'attendre à une hausse du PIB réel en Allemagne d'environ 3% en moyenne en 2010, contre près de 2% dans la prévision de juin", ajoute-t-elle.
Cette nouvelle prévision est plus optimiste encore que celle formulée vendredi par le ministre de l'Economie, Rainer Brüderle. Celui-ci avait dit s'attendre désormais à une croissance "bien supérieure à 2%" cette année.
La croissance devrait toutefois ralentir au fil des mois, précise la banque centrale allemande.
"Parmi les arguments dans ce sens, figurent le fait que l'économie mondiale suivra probablement une tendance d'expansion plus modérée au second semestre de l'année", explique-t-elle.
L'embellie allemande n'a pas échappé aux syndicats de salariés qui devraient très vite demander de profiter à leur tour des fruits de la croissance. (voir )
La centrale IG Metall, premier syndicat allemand, a annoncé qu'elle allait demander le mois prochain des hausses de salaires comprises entre 4,5 et 8% pour la sidérurgie, ce qui pourrait inciter les autres secteurs à lui emboîter le pas.
Certains observateurs soulignent toutefois que les hausses de salaires risquent de menacer la reprise allemande et éventuellement la compétitivité de la première économie européenne.
"Certains signes montrent que, sur la durée, les salaires vont repartir à la hausse, mais je ne pense pas que l'on assistera à des revalorisations massives", a commenté Jürgen Michels, économiste chez Citigroup.
"Il y toutefois peu de chances que cela se traduise par une érosion rapide de l'avantage compétitif de l'Allemagne par rapport aux autres pays de la zone euro", a-t-il poursuivi.
Ces hausses de salaires pourraient faire le bonheur des partenaires de l'Allemagne qui souhaitent que la demande intérieure augmente dans le pays, ce qui faciliterait leurs exportations.