TOUT EST DIT

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jeudi 6 mai 2010

La chute de la monnaie unique pourrait s'accélérer, selon les économistes

Il y a six mois, les dirigeants européens se seraient sans doute réjouis de voir passer l'euro sous le seuil de 1,28 dollar. Aujourd'hui, la baisse brutale de la monnaie unique apparaît comme le symptôme effrayant d'une crise grecque en train de gangrener la zone euro. Jeudi 6 mai, pour la première fois depuis mars 2009, la devise européenne a chuté jusqu'à 1,2748 dollar alors qu'elle s'échangeait encore 1,45 dollar début 2010.

L'euro recule régulièrement depuis plusieurs mois, à mesure que se dégrade la situation en Grèce. Mais ses pertes se sont accrues ces derniers jours face au dollar. Un paradoxe au moment où l'Europe et le Fonds monétaire international (FMI) s'engagent formellement à prêter 110 milliards d'euros à Athènes ? Le FMI pourrait même débloquer sa part dès lundi 10 mai.

En réalité, les déclarations rassurantes des capitales européennes n'y font rien : les marchés continuent de croire au scénario d'une faillite de la Grèce et au risque de contagion au Portugal et à l'Espagne. Le directeur général du fonds américain Pimco, géant mondial de l'investissement obligataire, l'a résumé dans une tribune au Financial Times : les fonds qui seront versés à Athènes régleront son problème de "liquidité" à court terme, mais ne garantissent en rien sa "solvabilité" à long terme.

Surtout, "la crise n'est plus exclusivement grecque, fait remarquer Marc Touati, directeur de la société de Bourse Global Equities. C'est toute la zone euro qui est devenue un objet de défiance".

La crise, jusqu'alors concentrée sur les marchés obligataires, est en train de se doubler d'une crise de change. Au regard de sa courte histoire, l'euro n'est pas si faible : il s'échangeait 1,18 dollar au moment de son introduction en 1999, et était tombé jusqu'à 0,82 dollar en 2000. Il reste aussi toujours loin du point bas touché au pire de la crise financière en décembre 2008, à 1,24 dollar. Certains économistes soulignent d'ailleurs que son recul actuel constitue un soutien bienvenu aux exportateurs. Reste que personne ne peut vraiment prédire aujourd'hui jusqu'où se poursuivra sa glissade.

"SEUIL PSYCHOLOGIQUE"

"Quand l'euro est passé sous la barre de 1,30 dollar mardi, cela a cassé un seuil psychologique important", décrit David Deddouche, stratège à la Société générale. Selon l'analyste, "tous les investisseurs commencent à devenir nerveux".

Outre-Atlantique, notamment, la crise européenne est désormais suivie de près. "Les Etats-Unis ne comprennent pas très bien le fonctionnement de la zone euro. La moindre alerte effraie les investisseurs de court terme", observe Timothy Griskey, gérant du fonds Solaris à New York. "Il y a eu un mouvement de vente de l'euro mais il ne s'agit pas encore d'une action massive", précise, de son côté, Dan North, chef économiste d'Euler Hermes aux Etats-Unis. Pourtant si la crise dégénère, les choses pourraient s'accélérer. Et "l'euro pourrait chuter jusqu'au niveau de 1 dollar", estime-t-il.

Tous les yeux sont tournés vers la Banque centrale européenne (BCE) dont le conseil des gouverneurs devait se réunir, jeudi matin, à Lisbonne. Les analystes s'interrogent : l'institution de Jean-Claude Trichet choisira-t-elle de soulager les pays les plus fragiles en achetant elle-même des emprunts d'Etat ? Un pas a déjà été fait dans cette direction quand la BCE a annoncé, lundi, vouloir refinancer les banques grecques quelle que soit la notation d'Athènes.

Ce genre de décision est pourtant à double tranchant. Elle provoquerait sans doute une détente des taux dans les pays malmenés par les marchés. Mais elle laisserait aussi entendre que la crise est d'une extrême gravité. Certains, en Allemagne notamment, redoutent surtout que la crédibilité de la BCE en ressorte définitivement écornée. Au point de menacer, pour de bon, la stabilité de l'euro.
Marie de Vergès et Claire Gatinois

"Pour Sarkozy, la période des réformes est révolue"

L'intégralité du débat avec Gérard Courtois, directeur éditorial du Monde, sur les trois premières années de mandat de Nicolas Sarkozy.
Chat sauvage : Comment expliquer cette forte baisse de popularité ? Est-elle anormale pour un président après trois ans de mandat ?
Gérard Courtois : Après trois ans de mandat, Nicolas Sarkozy affronte en effet un niveau de défiance très élevé, de l'ordre des deux tiers des Français, et supérieur à celui de ses prédécesseurs au même moment, qu'il s'agisse de Giscard d'Estaing, de François Mitterrand ou de Jacques Chirac.

Mais on oublie que cette dégringolade dans l'opinion remonte en réalité à la fin de l'année 2007 et au début de l'année 2008. C'est à ce moment-là que le président de la République perd 20 à 30 points d'opinion positive dans les sondages, ce qui est énorme. Cela s'explique par deux raisons : d'une part, l'exposition de sa vie privée, moins au moment de son divorce, plutôt bien admis par les Français, que trois mois après, au moment de sa rencontre très médiatisée avec Carla Bruni. Pour le "peuple de droite", provincial, conservateur et vieux jeu, cela ne passe pas.

L'autre raison de cette dégringolade est la déclaration de Nicolas Sarkozy lors de sa conférence de presse du 8 janvier 2008, quand il dit brutalement : "Où voulez-vous que je trouve l'argent, les caisses sont vides".

Pour quelqu'un qui, six mois avant, s'était engagé à aller chercher la croissance avec les dents, c'est un terrible aveu d'impuissance, et les Français en tirent la conclusion qu'on leur a raconté des balivernes.

Aimé : Peut-on s'attendre enfin à ce que Nicolas Sarkozy cesse ses vulgarités et tutoiements dans ses apparitions ? Et par conséquent qu'il fasse président ?

Gérard Courtois : Il a eu à l'évidence dès le départ un problème de style. Pendant sa campagne, cela a été un atout, dans une certaine mesure. Pour la première fois en France, un candidat à l'Elysée semblait capable de sortir de la langue de bois et de parler la langue du peuple.

A partir du moment où il a été président, cette familiarité, que beaucoup de gens ont ressentie comme une forme de vulgarité, a téléscopé violemment l'image que les Français se font de leur président. On se souvient du "casse-toi, pauv' con" au Salon de l'agriculture en février 2008, ou, quelques semaines plus tôt, du "descends si t'es un homme" adressé à un pêcheur du Guilvinec. Ce genre de saillie a beaucoup fait pour dévaluer l'autorité du chef de l'Etat.

Même si c'est contre sa nature, Nicolas Sarkozy a pris la mesure du problème. Depuis le début de l'année, il fait à l'évidence des efforts pour lisser sa communication, pour éviter les dérapages, et pour solenniser davantage sa parole. Son problème est de savoir si son naturel ne reviendra pas à la première occasion.

Il a besoin de temps pour crédibiliser cette image plus maîtrisée et plus souveraine.

Marc : Notre président n'est-il pas condamné à toujours faire des promesses – une forme d'hystérie permanente qui consiste à toujours promettre et à ne jamais tenir ?

Gérard Courtois : Ça a été le cas pendant deux ans et demi, jusqu'à la fin de l'année 2009. C'était même une attitude théorisée par l'Elysée. Sarkozy et son équipe estimaient que si l'on ne fait pas toutes les réformes en même temps, on n'en fait aucune.

Cela a conduit à une gestion des dossiers et des réformes désordonnée et chaotique qui a donné le tournis au pays. Depuis trois mois, l'équipe politique et l'équipe des communicants de l'Elysée ont convaincu le président que s'il continuait ainsi, il irait dans le mur, et l'on assiste depuis à un recadrage en profondeur du style, de la communication, de l'équipe présidentielle et du mode de gouvernement.

ChrisGF : Pensez-vous que c'est l'inadéquation de la réponse à la crise économique qui va faire perdre Sarkozy en 2012, ou plus généralement la confusion des politiques mises en œuvre dans de nombreux domaines ?

Gérard Courtois : C'est sur la question économique que se joueront le bilan de ce mandat et la possibilité pour Nicolas Sarkozy d'être réélu. Mais il faut bien comprendre que le problème s'enclenche dès les premiers mois de son mandat. La loi fondamentale qui traduit dans les faits les principaux engagements de campagne (le "travailler plus pour gagner plus", la défiscalisation des heures supplémentaires, le "tous propriétaires", le bouclier fiscal), cette loi a été promulguée le 16 août 2007.

C'est la loi fondamentale du sarkozysme en matière économique et sociale. Mais dès la mi-août, exactement au même moment, démarre la crise des subprimes aux Etats-Unis, prélude à la crise financière et économique de l'automne 2008. Toute la politique de Nicolas Sarkozy supposait une croissance de l'économie française de l'ordre de 3 %, c'est-à-dire un point de plus que le rythme antérieur.

Or, à partir de l'été 2007, à cause de la crise des subprimes, non seulement la France ne connaît pas un regain de croissance, mais elle commence même à enregistrer une légère baisse de cette croissance.

A partir de l'automne 2008, évidemment, le problème va être d'une tout autre ampleur, puisque le pays, comme le reste des grandes économies développées, entre en récession.

Le pari économique de Sarkozy est donc immédiatement caduc. Toute la question pour lui aujourd'hui est de savoir si la France connaîtra en 2011 une amélioration perceptible de sa situation économique. Si c'est le cas, il peut aborder 2012 de manière raisonnablement confiante. Si, au contraire, la situation économique reste stagnante et aussi mauvaise qu'aujourd'hui, il aura beaucoup de mal à retrouver l'écoute des Français.

Anthony et EJC : Pensez-vous que la réussite ou l'échec de la future réforme des retraites puisse jouer sur une candidature éventuelle en 2012 de Nicolas Sarkozy ?

Gabriel : Bernard Guetta sur France Inter voyait dans la réforme des retraites une opportunité pour M. Sarkozy de réapparaître tel le grand réformateur du système français et un homme politique courageux. Partagez-vous cette analyse?
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Gérard Courtois : La réforme des retraites était annoncée depuis 2003, lors de la précédente réforme conduite par François Fillon. Compte tenu de l'évolution des comptes sociaux et du vieillissement de la population, elle est de toute façon nécessaire.

Je pense plutôt que ce sera une réforme minimaliste, évitant autant que possible de mettre le feu aux poudres et permettant surtout d'envoyer à la fois à Bruxelles et aux marchés financiers un gage du sérieux de la gestion par la France de son endettement public.

Il me semble que la période des réformes est révolue. Il suffit pour s'en convaincre de constater que deux réformes présentées il y a peu encore comme historiques ou essentielles ont été renvoyées à des jours meilleurs : la taxe carbone sur la question climatique et la réforme de la procédure pénale, avec la suppression du juge d'instruction.

A partir de maintenant, Sarkozy va se consacrer à l'essentiel : d'une part, le dossier de la sécurité sur lequel il a construit depuis dix ans toute son image, et sur lequel son bilan n'est pas convaincant ; d'autre part, sa capacité à démontrer aux Français qu'il parvient peu à peu à sortir le pays de la crise.

Tout le reste ou presque va être renvoyé sur un éventuel deuxième mandat.

Hibou : Faut-il s'attendre à une radicalisation à droite de l'UMP ?

Gérard Courtois : Oui, probablement. Le président de la République en a fait la démonstration à nouveau il y a quelques jours lors d'un déplacement en Seine-Saint-Denis. Son problème sur cette question est non pas de renouveler ses engagements multiples de ces dernières années, mais d'obtenir des résultats perceptibles par les Français.

Or c'est sur ce terrain de la réussite de sa politique que jusqu'à présent il n'a pas convaincu. La tentation d'en rajouter va probablement être grande, pas seulement pour essayer de regagner les voix de l'extrême droite, mais avant tout pour conserver celles de la droite, qui a toujours été favorable à la défense de la loi et de l'ordre.

Musaraigne : Bonjour. Ne pensez-vous pas que l'on donne Sarkozy mort politiquement trop tôt ? Peut-il encore rebondir ?

Gérard Courtois : Evidemment. Il ne faut pas sous-estimer l'incroyable accélération du temps politique. Rappelez-vous simplement où nous en étions il y a moins d'un an : le Parti socialiste était donné pour mort après son résultat calamiteux des européennes ; la question était posée de savoir si Martine Aubry resterait longtemps première secrétaire du Parti socialiste ; et l'autre question posée aussi bien par les journaux que par les responsables politiques était de savoir si Sarkozy était "battable".

Dix mois plus tard à peine, la question est parfois posée de savoir s'il se représentera, tellement sa situation est difficile ; Martine Aubry a assuré son autorité, non seulement sur le PS mais sur la gauche grâce au succès des régionales. Les rôles, en quelques mois, se sont totalement inversés.

Donc je serai très prudent sur la situation dans laquelle nous serons dans un an, et plus encore dans deux ans.

Cheval : Le vrai avantage de Sarkozy n'est-il pas la faiblesse de la gauche et des syndicats ?

Gérard Courtois : On peut poser la question exactement dans l'autre sens : la chance du PS et de la gauche n'est-elle pas la faiblesse actuelle de Sarkozy ? Plus sérieusement, Sarkozy a pu avancer sans beaucoup d'obstacles depuis trois ans parce que la gauche était effectivement impuissante à se reconstruire et à surmonter ses échecs.

Depuis quelques mois, les choses sont en train de changer. Le Parti socialiste semble avoir surmonté ses querelles de chefs, l'autorité de Martine Aubry n'est plus contestée, et surtout, elle a réussi peu à peu à remettre au travail son parti. On peut évidemment discuter de nombreuses propositions du projet économique que les socialistes viennent de rendre publiques.

Néanmoins, c'est la première fois depuis des années qu'un vrai travail de réflexion et de rénovation des idées a été engagé Rue de Solferino. Ce n'est pas suffisant. Cela laisse en suspens de nombreux points d'interrogation. Mais cela change en profondeur le rapport de force entre le pouvoir et son opposition.

Quant aux syndicats, c'est un des aspects un peu occultés des trois premières années de mandat de Sarkozy : il a réussi à établir avec les principales centrales syndicales une relation de travail permanente qui explique notamment qu'au plus fort de la crise économique les syndicats soient restés remarquablement responsables et n'aient pas mis d'huile sur le feu au moment où la crise sociale semblait pouvoir dégénérer.

Beaucoup maintenant va se jouer sur la réforme des retraites et il faudra observer attentivement, dans les trois prochains mois, l'attitude des syndicats sur ce dossier-clé.

Evelyne : Le sénateur Alain Lambert, UMP, ne souhaite plus voir son "ami" se présenter en 2012... Croyez-vous vraiment à une candidature alternative à droite ?

Gérard Courtois : Non, je n'y crois pas. En tout cas aujourd'hui. Tout d'abord, Nicolas Sarkozy a très peu d'amis. Ce n'est pas une nouveauté. Il a conquis presque seul l'UMP, il s'est imposé presque seul contre Jacques Chirac et Dominique de Villepin. Il est habitué à cette solitude politique.

En revanche, il a évidemment des soutiens. Quand il enregistre, comme cela a été le cas durant les six derniers mois, échec sur échec, les turbulences sont inévitables dans la majorité, et d'autant plus inévitables que Nicolas Sarkozy n'a pas ménagé les uns et les autres depuis trois ans.

Mais s'il retrouve un tant soit peu de solidité dans son action et de crédit dans l'opinion, il ne fait pour moi aucun doute que tout le monde ou presque à droite se rangera à nouveau derrière lui.

Les exceptions, on les connaît. Il s'agit de Nicolas Dupont-Aignan, qui essaie envers et contre tout de maintenir une voix "gaulliste". C'est le cas de Dominique de Villepin, qui, pour l'instant, a créé une auto-entreprise sans troupe ni moyens. Et ça n'est à mes yeux pas le cas d'Alain Juppé, qui a levé le doigt récemment pour dire qu'il serait candidat à la candidature dans l'hypothèse où Sarkozy ne se représenterait pas, ni de Jean-François Copé, qui vise 2017 et a trouvé avec le chef de l'Etat un accord dont chacun avait besoin.

Gabur: Peut-on imaginer une réorganisation à l'Elysée ou à Matignon ? Avec le départ de Guéant et/ou Fillon ? Où sont-ils trop indispensables pour Sarkozy ?

Gérard Courtois : L'expérience démontre qu'en politique, personne n'est indispensable. Evidemment pas le premier ministre, même si pour l'instant il est plus utile qu'embarrassant pour Sarkozy. La question est plus compliquée pour Guéant, qui est depuis plusieurs années, et surtout depuis trois ans, un collaborateur tout-terrain en qui le chef de l'Etat a eu jusqu'à présent une totale confiance.

Il sera difficile à remplacer, mais ce n'est pas exclu. Quant au resserrement de l'équipe de l'Elysée et de son mode de fonctionnement, il est déjà effectué pour une bonne part. L'organisation des réunions et la répartition des responsabilités ont été vigoureusement recadrées après les régionales.

En outre, dans un régime de plus en plus présidentiel et dans un système de quinquennat, un remaniement ministériel, voire un changement de premier ministre, sont beaucoup moins déterminants qu'auparavant, quand le président avait sept ans devant lui et que le premier ministre était effectivement perçu comme le chef de la majorité, ce qui, de fait, n'est plus le cas.

Pignon : Le président Sarkozy peut-il retrouver ses habits de président lors de la présidence française du G 20 ?

Gérard Courtois : Premier constat : c'est quand il était président de l'Europe et en pleine crise économique que Nicolas Sarkozy est apparu le plus en phase avec sa fonction.

Il mise énormément sur cette année 2011, où il présidera à la fois le G8 et le G20. Cela lui donne, d'une part, une tribune pour apparaître en première ligne des efforts conduits par les grands pays pour maîtriser la crise et en sortir. Cela lui offre en outre l'occasion d'apparaître en permanence, sans avoir à inventer des scénarios et des occasions, comme l'un des principaux chefs d'Etat du monde.

S'il réussit cette séquence-là, il est très vraisemblable que cela lui redonnera aux yeux d'une partie des Français qui l'ont soutenu en 2008 une partie du crédit qu'il a perdu. Sur la scène internationale, l'an prochain, se joue une bonne part de sa capacité à être réélu, tant il est évident à mes yeux qu'il sera à nouveau candidat.

L'Europe au pied du mur

Un mauvais air flotte sur l'Europe. Une mémoire obsessive d'un passé ravageur y respire l'odeur de grisou des années 30. C'est un sentiment, Dieu merci, tout à fait exagéré ! Mais on ne peut ignorer pour autant les nuages de populisme xénophobe qui infectent, ici et là, un continent fragile.

On ne mettra pas dans le même sac l'extrême droite de l'Europe de l'Est et les colères danoises ou néerlandaises, ou encore l'accès de fièvre italien, voire français, avec le regain du Front national. On ne confondra pas non plus les boucs émissaires que sont, selon les pays, ici les juifs et les banques, là la Commission de Bruxelles ou ailleurs les immigrés. Observons que nulle part ne se lève une idéologie antidémocratique susceptible d'emporter nos régimes. Evitons donc les prophéties de malheur qui concourent au malheur même en répandant sa fatalité !

Cela dit, pour l'Europe de l'Ouest où nous vivons, ces mauvais nuages parlent le langage des signes. Ils nous disent les dangers conjugués d'un funeste trio : la crise financière qui nous trouve couchés mais les grands pays émergents debout ; la faiblesse persistante de la construction européenne ; et le malaise d'une immigration mal gérée qui devient la victime expiatoire de toutes sortes de ressentiments. Dans cette mauvaise passe, les peuples s'éloignent de nos pouvoirs incompris, et dont le babil inquiète.

De la grande crise financière la révélation magistrale n'est pas celle qu'on nous rabâche. Elle est bel et bien que nos pays dits « avancés » reculent et que les pays dits « émergents » ont cessé d'émerger : ils submergent. Constatons seulement que la production, en quatre ans, aura augmenté en Asie de 29 % et reculé de 2 % en Europe. Devant cette formidable évidence - et qui redessine la carte du monde -, les emplâtres promis à la sphère financière seront bienvenus, mais il est vain d'en attendre merveilles. La spéculation est à la finance mondiale ce que le dopage est au sport : un mal à combattre mais qui ne condamne pas le sport. Le vaste monde ne condamne pas non plus l'économie de marché. Si la crise a installé chez nous le marasme, elle n'a pas empêché les pays émergents de continuer à caracoler. Certes, ils viennent de loin. Mais ils ont, eux, le sentiment de vivre encore au-dessous de leurs moyens. Et nous, au-dessus. De quoi chambouler les humeurs nationales : chez eux confiantes, chez nous mélancoliques.

L'Europe communautaire devrait constituer dans cette nouvelle conjoncture sinon la panacée, du moins le bloc consistant des résistances. Elle en a la puissance, et une capacité théorique refusée aux pays sous-dimensionnés qui la constituent. Mais l'Europe reste un nain politique et un géant économique divisé, miné qu'il est par la disparité de ses nations.

La première d'entre elles éclate sous nos yeux : celle des cigales et fourmis que la quasi-faillite grecque étale au grand jour. La fourmi allemande aura beaucoup regimbé pour aider la cigale méditerranéenne. Pour finir, la sagesse a prévalu de ne pas jeter l'euro communautaire avec l'eau sale des tricheries et des endettements abusifs. Ainsi des pays comme l'Allemagne et la France, qui empruntent encore à 3 %, prêteront au taux de 5 % à un quasi-failli qui dut emprunter, lui, au taux suicidaire de 7 à 8 %. Le sapeur Camember, ainsi, creusait des trous pour en combler d'autres...

Mais pas de moquerie ! Sauver l'euro valait vraiment qu'on se décarcasse. On gardera néanmoins à l'esprit le fossé dévoilé entre les fourmis du Nord et les cigales du Sud. Il met à son juste poids notre Union méditerranéenne, un club de cigales qui, par les temps qui courent, ne fait guère recette.

Aujourd'hui que l'échec possible de l'euro et de l'union monétaire a tout un temps rôdé sur le continent et titillé les marchés mondiaux, il est sain de rappeler que sans l'euro et l'Europe communautaire plus d'un pays du continent irait à la dérive. On peut alors, avec un peu d'optimisme, escompter que s'imposera la nécessité d'une gouvernance économique avec son lot d'harmonisations, fiscales et autres.

Mais il faut, je le crains, beaucoup d'optimisme - et trop peut-être ! - pour imaginer que l'euro soit déjà tiré d'affaire. Et que l'Europe communautaire, ingouvernable à 27, entreprendra d'elle-même la cure qui s'impose. A moins qu'elle ne se donne d'abord la fessée qu'elle interdit à ses citoyens ! Sans doute faudra-t-il, entre la fourmi allemande et la cigale française, bien des efforts et compromis pour entraîner une machinerie rétive. On dira que, le dos au mur, nécessité fait loi. Mais cette fameuse « nécessité » n'apparaît guère à des peuples drogués de démagogie. Elle ne prévaudra que sous l'empire, aujourd'hui inaudible, de la vérité.



Claude Imbert

Le drame, la peur et l'impuissance


Les dramatiques événements d'Athènes ne sont pas à mettre au compte de l'exaspération collective. Les trois personnes mortes dans l'incendie d'une banque sont les victimes des groupuscules anarchistes grecs. Ils n'ont jamais hésité à tuer.
Mais la triste nouvelle a semé l'effroi en Europe. En posant une question que personne jusqu'à présent n'osait ouvertement formuler : le gouvernement Papandréou restera-t-il en place et sera-t-il en mesure d'appliquer le plan de rigueur, condition sine qua non des 110 milliards de prêts annoncés ? La réponse se limite à un silence assourdissant. Sauf chez quelques économistes constatant l'évidence : l'austérité va automatiquement creuser la récession en Grèce, ce que confirment d'ailleurs les prévisions de Bruxelles. Comment, dans ces conditions, quand l'économie ne tourne plus, espérer un rétablissement ? Un malade déjà anémique ne guérit pas avec des purges. Même si des saignées sont nécessaires dans la pléthorique bureaucratie grecque rarement insensible aux pots de vin...
Évidemment, ces incertitudes sur le remboursement de la dette et l'engagement des banques en Grèce pèsent sur l'euro. Hier soir, il frisait les 1,28 dollars. L'effet domino continue avec le Portugal et l'Espagne qui représente 12% de l'activité économique de l'UE. Avec toujours les mêmes mécanismes : des agences de notation qui affolent les marchés, des rumeurs à vitesse électronique, des gouvernements incapables de faire face... et une Europe paralysée, adepte de la politique de l'autruche jusqu'au dernier moment. Car il n'y a pas consensus pour toucher, du moins officiellement, aux dogmes de la monnaie unique dont le catéchisme ne prône que la stabilité, et à tout prix.
Le problème est là. L'euro est né dans un continent libéré des menaces de la guerre froide, lorsque la mondialisation n'était encore que balbutiante et la Chine absente de la scène économique. L'euro, d'abord comptable puis sonnant et trébuchant, se mouvait à merveille dans ce havre de paix... jusqu'aux tempêtes. Pour garder cet euro ciment de la construction européenne, pour faire face aux crises, un gouvernement économique et monétaire s'impose, et rapidement !
La preuve ? Question déficits, le Royaume-Uni n'a rien à « envier » à la Grèce, encore moins à l'Espagne. Mais il demeure inattaquable car Gordon Brown a su gérer souverainement - même s'il devait être « remercié » aujourd'hui - en acceptant la dépréciation de la livre. Quant à l'euro, il « vole » sans pilote. En pleines turbulences, la monnaie unique reste verrouillée, toutes alertes au rouge, sur le pilotage automatique programmé au siècle dernier.
Le sommet de Bruxelles, demain, décidera-t-il enfin d'adapter les commandes de l'euro, et pas seulement avec une nouvelle version d'un « pacte de stabilité » aussi inefficace que facteur d'instabilité politique et sociale ?

L'Europe à un tournant


En observant les violences perpétrées, hier, dans le centre d'Athènes, qui ont provoqué la mort de trois employés de banque, on pourrait être tenté de relativiser les faits. Ces débordements sont l'oeuvre d'une minorité violente, traditionnellement très active dans les manifestations grecques. La foule présente dans les rues n'était d'ailleurs pas si imposante, et la population grecque semble, pour l'heure, plus déprimée et amère que mobilisée. Tout cela est peut-être vrai. Et pourtant, le signal qui nous arrive d'Athènes est, évidemment, tout autre.

L'explosion de la violence montre que la crise n'est plus seulement affaire de financiers, de banquiers et de politiques. Avec les prêts accordés à la Grèce et le plan de rigueur élaboré par Athènes, la crise vient d'atterrir brutalement dans l'économie réelle et le tissu social d'un pays membre de la zone euro. La Grèce est probablement le malade le plus grave de la classe européenne, mais il n'est pas le seul. Les déficits publics sont partout inquiétants. Si à Londres, à Berlin ou à Paris on a tout fait depuis des mois pour ne pas parler de rigueur, essentiellement pour des raisons électorales, le moment de vérité se rapproche à grande vitesse. C'est ce qui inquiète dans l'image reflétée par le miroir grec.

Toutefois, le parler vrai, chacun pour soi, chacun dans son pays, ne suffira pas. Car si la crainte d'une contagion de la crise grecque est si ressentie par les marchés, et les ministres européens des Finances, c'est essentiellement pour une raison : le déficit politique de la réponse européenne à la crise. Ce n'est pas la première fois. En 1974, lors du premier choc pétrolier, la tentation du chacun pour soi avait déjà secoué la dynamique européenne. Mais dans une Europe à neuf et, à l'époque, sans une monnaie unique.

Aujourd'hui, l'architecture incomplète qui a accompagné la création de l'euro a non seulement montré ses limites, mais elle menace jusqu'à la stabilité même de l'Union si aucune réforme n'y est apportée. Annoncée avant Noël, la crise grecque n'a été sérieusement traitée qu'après des mois d'hésitations. Un retard coûteux et qui a eu pour effet, selon Jacques Delors, de « raviver la spéculation et nourrir l'euroscepticisme ». La chancelière allemande n'est pas la seule responsable, mais ses tergiversations ont pesé lourdement sur la nature et le timing de la réaction.

Au demeurant, et c'est une évidence, si les Européens eux-mêmes n'ont pas confiance dans leur partenaire grec, pourquoi les marchés devraient-ils en avoir? Absence de politique fiscale commune, paralysie de la Banque centrale européenne, absence d'un fonds de solidarité, pas de coordination budgétaire. Trop d'attributs de la souveraineté économique manquent à la zone euro pour résister durablement à la crise et aux spéculateurs. Et l'équation, à dette souveraine réponse seulement nationale, ne tient pas. Ni à Athènes ni ailleurs.

Angela Merkel l'a compris et c'est sur un ton inhabituellement solennel qu'elle s'est adressée, hier, aux députés allemands pour les convaincre du plan d'aide à la Grèce alors qu'une majorité d'Allemands y sont opposés. « L'avenir de l'Europe et l'avenir de l'Allemagne en Europe », sont en jeu, a-t-elle déclaré. Réunis à Bruxelles vendredi, les seize membres de la zone euro vont devoir changer de posture. Ne plus seulement réagir au coup par coup et toujours sur la défensive, mais redonner du sens au club européen. Paris et Berlin ont, à cet égard, une responsabilité particulière.
Laurent Marchand

La crise sur le gâteau


C'était il y a trois ans pile. Pile, c'est le mot. Le nouvel élu, brillamment porté par 53,06 % des voix, semblait animé par d'inépuisables accus, à l'instar du célèbre automate de la publicité qui dure plus longtemps. Le candidat de la rupture venait d'écraser sa rivale socialiste. La France de mai tournait sans nostalgie la longue page des années Chirac, cet "homme vieilli" qui, à peine quelques mois plus tard, deviendrait le chouchou de ses détracteurs. Ainsi va l'histoire immédiate, avec ses engouements et ses rejets, avec son ironie et sa raison. Pour le triomphateur, la victoire en chantant commença au Fouquet's et se poursuivit, au large de Malte, sur le yacht d'un riche ami. Le ton du quinquennat était donné : people et bling-bling. De quoi masquer d'emblée le volontarisme proféré. Car l'ami des patrons et des acteurs était aussi un vrai bosseur. Il allait dire ce qu'il fait et faire ce qu'il dit ? Mais sous le syllogisme séduisant, le message fut vite brouillé. Pas facile de démêler l'essentiel du futile, lorsqu'à chaque réforme claironnée correspond un "plan com". Et pour un peu que la vie privée soit érigée en permanent vecteur du pouvoir. En ce jour d'anniversaire, sur fond de marasme mondial persistant et de désastre grec, l'heure ne serait cependant pas vraiment propice au regard en arrière. Du moins à en croire l'Élysée qui, tout en se défendant d'établir un bilan, en esquisse un dans une sobre plaquette pédagogique. D'ici 2012, le chemin est encore long. Et si, face aux mauvais sondages et à la désillusion, le président parle de retraite, ce n'est probablement pas à la sienne qu'il songe. Le chantier lancé est courageux. C'est tout l'avenir qui est en jeu. Celui des Français. Celui du premier d'entre eux aussi. S'accordera-t-il une pause tout à l'heure devant le gâteau de crise aux trois bougies ? C'est mal le connaître. Nicolas Sarkozy déteste souffler.


Didier Pobel

Des islamistes égyptiens veulent interdire "Les Mille et Une Nuits"

Les syndicats d'écrivains égyptiens ne veulent pas s'en laisser conter. Après avoir assisté, médusés, à la plainte d'un groupe d'avocats demandant l'interdiction d'une réédition des Mille et Une Nuits, les écrivains égyptiens entendent désormais porter plainte pour position "contre le patrimoine". "Il est temps pour nous de passer de la position de défense à la position d'attaque", explique Mohammed Salmawy, responsable du syndicat des écrivains.
Cette nouvelle édition des Mille et Une Nuits a été publiée par un organisme gouvernemental qui s'était déjà attiré des critiques par le passé pour d'autres ouvrages. En 2003, le chef de l'organisme avait été renvoyé par le ministre de la culture Farouk Hosni pour la publication de trois romans considérés comme obscènes par les islamistes.

Chef-d'œuvre de la littérature arabe, Les Mille et Une Nuits est attaqué par un groupe d'avocats pour les mêmes motifs. Dans leur plainte contre Les Mille et Une Nuits, le groupe Avocats sans restrictions dénonce des références au sexe qui selon eux "encouragent au vice et au péché". Ils demandent la confiscation de l'ouvrage et la poursuite de ses éditeurs. Selon eux, l'ouvrage viole un article du code pénal égyptien punissant de deux ans de prison les "offenses à la décence publique", révèle le site Internet Al-Masry Al-Youm.

Une version des Mille et Une Nuits avait déjà été interdite en Egypte en 1980, et comme il n'existe pas de version définitive du livre, chaque nouvelle édition fait l'objet d'appréciations diverses. Selon la loi égyptienne, chaque citoyen peut porter devant un tribunal ce qu'il considère comme portant atteinte à la morale. Selon les groupes de défense des droits de l'homme en Egypte, de plus en plus d'attaques de ce genre ont lieu depuis une dizaine d'années.

De nombreux écrivains ont dû faire face à des procès de ce type et espèrent aujourd'hui ouvrir un vrai débat sur ces points de droit et sur les valeurs de la société égyptienne. Pour Samia Mehrez, professeure à l'université américaine du Caire, citée par Al-Masry Al-Youm, ces cas ne sont pas une surprise et sont plutôt le résultat des luttes de pouvoir entre gouvernement et conservateurs religieux. "Dans ce jeu, la culture n'est qu'un pion", déplore-t-elle.

François Fillon : "Les attaques spéculatives contre la zone euro vont échouer"

Dans un entretien en direct mercredi 5 mai au soir sur TF1, le premier ministre, François Fillon, a estimé que la zone euro faisait l'objet d'attaques spéculatives depuis plusieurs semaines mais que ces attaques allaient échouer, rappelant que la zone euro était moins endettée que les Etats-Unis ou le Japon. Il a assuré la Grèce de la totale solidarité de la France.
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La monnaie unique, de son côté, chutait sous le seuil symbolique de 1,30 dollar, jusqu'à 1,2976 dollar, tandis que les taux d'intérêt de la Grèce, de l'Espagne et du Portugal repartaient à la hausse.
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"La France est aujourd'hui la meilleure signature avec l'Allemagne en Europe, et nous allons tout faire pour la conserver", a ajouté le premier ministre.

Il a par ailleurs annoncé la réunion, jeudi, d'un séminaire gouvernemental pour préparer le budget 2011 et 2012. "On va prendre des mesures difficiles", a-t-il prévenu, "on va baisser les dépenses publiques". Il a notamment évoqué des économies de 5 milliards d'euros sur les niches fiscales en deux ans.