TOUT EST DIT

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mardi 3 juin 2008

LUXE une histoire de famille.


Les groupes ont les moyens d'investir, mais les proies disponibles manquent.

Fleuron de l'économie fran­çaise, tant vanté pour son rayonnement mondial et ses exportations, le luxe reste dominé par un capitalisme familial. Les entreprises qui le composent sont surtout une myriade de PME à la notoriété souvent sans rapport avec le poids économique. Dans les années 1990, des groupes se sont constitués à coups de rachats, provoquant une frénésie spéculative. Bernard Arnault a su constituer un géant français partant de Christian Dior et de Louis Vuitton, alignant une galaxie de marques de champagne et de mode, de Moët & Chandon à Givenchy, de Chaumet aux montres Hublot, rachetées le mois dernier. La famille Pinault a suivi la même stratégie, rachetant Gucci, Yves Saint Laurent, Balenciaga ou Boucheron. Parallèlement, les suisses Richemont et Swatch ont rassemblé les plus belles marques de joaillerie et d'horlogerie, parfois à des prix délirants.
Les secrets du succès
Du coup, depuis le début de la décennie, la moindre marque un tant soit peu déstabilisée dans son parcours est donnée convoitée par les uns ou les autres. D'ailleurs, dotés de gros moyens, ces groupes ne cachent pas qu'ils sont en quête d'acquisitions, mais ce sont les proies qui manquent.

Car, dans ce secteur hérité de l'artisanat du cuir de la fin du XIXe siècle et de la vague mode de la seconde moitié du XXe, les familles ou les hommes restent aux commandes. C'est même souvent le secret du succès. Il en va ainsi d'Hermès, où, pendant vingt-huit ans, Jean-Louis Dumas a cumulé la vision créative et la gestion. Autre pépite française, Chanel est entre les mains des très secrets frères Wertheimer.

Même cas de figure en Italie, après les rachats de Gucci, Fendi, Bottega Veneta et Pucci par Arnault et Pinault. Giorgio Armani prend un malin plaisir à ne rien décider sur l'avenir de sa griffe très convoitée. Prada appartient à Miuccia Prada et à son mari. Les Ferragamo contrôlent toujours la maison florentine. Versace reste entre les mains des héritiers du couturier assassiné. Les introductions en Bourse envisagées cette année par ces trois dernières sociétés sont repoussées à plus tard. Coté, lui, le joaillier Bulgari est détenu à 51 % par la famille.

Du coup, la spéculation se reporte toujours sur les mêmes sociétés opéables comme l'américain Tiffany ou l'anglais Burberry. Ou les improbables serpents de mer, comme Hermès.

LE LUXE UNE VALEUR QUI SE PORTE BIEN EN.......BOURSE

LUXE


La maison Hermès se porte bien Dieu merci. Le luxe est un secteur qui ne souffre pas du pouvoir d'achat.
Pourquoi ? Parce qu'en fait cela revient moins cher d'acheter une paire de John Lob qui durera plus de dix ans sans se démoder,
plutôt que d'acheter une paire de chaussures dans n'importe quel autre magasin.

La maison indépendante réunit son assemblée générale ce mardi alors que son action est au plus haut.

Il n'avait pas fallu moins de deux Boeing spécialement affrétés pour emmener, le 7 avril dernier, une bonne partie des descendants de la famille Hermès (ainsi que de nombreux journalistes du monde entier) dans les jardins d'un improbable palais de maharadjah posé au fin fond de la campagne anglaise, fêter le lancement du thème annuel de la maison de luxe, consacré à l'Inde. Un rituel immuable. Demain, les descendants d'Émile Hermès seront encore là, fidèles, pour voter les résolutions présentées lors de l'assemblée générale des actionnaires.

Chez Hermès, la famille, ça compte. Beaucoup. Une soixantaine de membres des cinquième et sixième générations portant, après une série d'alliances, les patronymes de Dumas, Puech et Guerrand se partagent 74 % du capital de l'entreprise. Jusqu'à quand ? C'est la question qui agite les marchés financiers de façon chronique depuis l'annonce de son départ, voici bientôt trois ans, par le patron emblématique, Jean-Louis Dumas, malade. Son successeur, Patrick Thomas, premier gérant extérieur à la famille, s'efforce depuis lors de maintenir la cohésion, malgré ces poussées de fièvre spéculative récurrentes.

Après près d'un an de calme, la spéculation est repartie de plus belle au printemps. Hier, l'action Hermès clôturait encore proche de son niveau historique, à 107,45 euros. Un gain de 38 % en trois mois. En Bourse, la société est valorisée 11,4 milliards d'euros, 38 fois ses bénéfices. Elle vaut plus que l'ensemble du groupe PPR (Fnac, Conforama, Gucci, Saint Laurent), dix fois plus gros en chiffre d'affaires !

Le lundi de Pentecôte, l'action avait fait un bond de 12 % en séance sur des rumeurs d'intérêt de Bernard Arnault et de son allié belge Albert Frère. Le patron de LVMH, qui rêve certes de mettre un jour la main sur la pépite de la rue du Faubourg-Saint-Honoré, a eu beau affirmer publiquement depuis ne pas avoir acheté d'action Hermès et eu de contact avec la famille, la spéculation n'en est pas pour autant retombée. Techniquement, cette fébrilité s'expliquerait par des prises de position de hedge funds sur la valeur, avec des mouvements de yo-yo amplifiés par la faiblesse du flottant (26 % du capital en Bourse).
Unité familiale
« Ces rumeurs sont sans aucun fondement. L'unité de la famille reste totale », martèle une nouvelle fois Patrick Thomas. Le statut en commandite et l'obligation de déclarer tout franchissement de seuil de 0,5 % empêche sur le papier toute prise de contrôle. Mais la spéculation s'autoentretient, dans l'attente éventuelle d'une déstabilisation de la cohésion familiale, à l'image de ce que vécut le groupe Taittinger.

Cet intérêt des investisseurs cautionne aussi, il est vrai, la belle santé d'Hermès face aux turbulences économiques, alors que la marque est souvent à la traîne de ses pairs en période d'euphorie. « Nous avons fait la meilleure performance du secteur au premier trimestre. Hermès garde son rythme propre quand les autres ralentissent », se félicite Patrick Thomas. C'est aussi le luxe d'une maison familliale de vivre selon son propre tempo.